Dictionnaire de théologie catholique/ABDIAS, l'un des douze petits prophètes

J. de Kernaëret
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.1 : AARON — APOLLINAIREp. 17-18).

1. ABDIAS, l’un des douze petits prophètes, nous a laissé une très courte prophétie (21 versets) contre l’Idumée. D’après le texte même, 11, cette prophétie a été écrite après une prise de Jérusalem par des ennemis. Mais quels ennemis ? Si Abdias est antérieur à Jérémie, il s’agit, d’après l’ensemble du texte, de l’invasion des Philistins sous Joram ; s’il est postérieur, de celle de Nabuchodonosor. Il y a une analogie frappante entre Abdias, 1-7, et Jérémie, xlix, 7-22. Lequel des deux prophètes a imité l’autre ? Plusieurs critiques modernes pensent que c’est Jérémie qui a imité Abdias. Jérémie a, en effet, souvent imité les prophètes qui l’ont précédé, en particulier dans ses oracles contre les nations. D’ailleurs, l’unité de la prophétie d’Abdias, ainsi que les expressions originales qu’il emploie, semblent prouver qu’il ne s’est pas inspiré de Jérémie. Voir Trochon, Les petits prophètes, Paris, 1883, p. 194. Cornely, Introductio in utriusque Testamenti libros, Paris, 1887, t. ii, 2e part., p. 552 ; Knabenbauer, Commentarius in prophetas minores, Paris, 1886, p. 339 ; Vigouroux, Dictionnaire de la Bible, Paris, 1891, t. i, col. 20, et Manuel biblique, Paris, 1885, t. ii, p. 634. Cf. H. Weiss, De ætate qua Obadja vaticinatus est, Brunswick, 1873. Cependant, d’autres critiques pensent qu’Abdias, a imité Jérémie et que sa prophétie a eu pour occasion les premières attaques des Arabes contre les Iduméens au ve siècle. Ils choisissent donc comme date approximative de sa composition les environs de l’an 500. Van Hoonacker, Les douze petits prophètes, Paris, 1908, p. 285-297. Sur l’unité d’Abdias, voir Condamin, dans la Revue biblique, 1900. p. 261 sq.

Pour le théologien, l’intérêt de la prophétie d’Abdias se concentre dans l’oracle qui la termine, 17-21, et qui annonce le salut en la montagne de Sion, le triomphe complet sur Édom et le règne du Seigneur. Et ascendent Salvatores in montent Sion judicare montem Esau ; et erit Domino regnum.

De nombreux commentateurs expliquent cette prophétie de la victoire des Juifs sur les Iduméens en particulier, au temps des Machabées, I Mach., v, et sur les peuples païens, dont ils étaient les vasseaux. Au jour du grand triomphe, Juda soumettra Esaü à ses ennemis et l’empire appartiendra à Jahvé, Van Hoonacker, op. cit., p. 308-311. Ils pensent qu’elle n’est messianique qu’au sens spirituel. Que le prophète ait eu en vue les victoires futures de son peuple, cela ne fait pas le moindre doute. Mais Édom représente tous les peuples païens, qui seront soumis par le Christ et les apôtres du Christ. Ici comme ailleurs, Is., ii, 2 ; Mich., iv, 1, la montagne de Sion est l’Église, dans laquelle se réalise sur la terre, en attendant une réalisation plus complète, le règne de Jahvé : et erit Domino regnum. Cf. Dan., vii, 14-27 ; Mich., iv, 7.

La prophétie d’Abdias a été remarquablement commentée, au sens mystique, par Hugues de Saint-Victor, P. L., t. clxxv, col. 37. Parmi les commentateurs modernes, outre les interprètes de la Bible en général, et en première ligne Cornélius a Lapide, dom Calmet et Knabenbauer, on peut citer comme auteurs spéciaux, Martin del Castillo, Commentarius in Abdiam prophetam, Salamanque, 1556 ; Louis de Léon, Commentarius in Abdiam prophetam, Salamanque, 1589 ; A. Joannes, Commentar zu der Weissagung des Propheten Obadja, Wurtzbourg, 1885.  J. de Kernaëret.