Dictionnaire de théologie catholique/ABDIAS, évêque de Babylone

P. Batiffol
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 1.1 : AARON — APOLLINAIREp. 18).

2. ABDIAS, évêque de Babylone. Eusèbe, H. E., i, 13, P. G., t. xx, col. 127, rapporte d’après la légende de saint Thaddée que ce disciple guérit à Édesse, en présence du roi Abgar, un malade nommé Abdos, fils d’Abdos. Il est question dans Socrate, H. E., vii, 8, P. G. l. lxvii, col. 751, des premières missions chrétiennes chez les Perses à la fin du ive siècle. Il dit comment elles furent conduites par Maruthas, évoque de Mésopotamie, et par un Abdas dit évêque de Perse ; mais la lecture Abdas est incertaine. Ce même nom d’Abdias a été popularisé en Occident par un recueil de légendes sur les apôtres, portant le titre de Historia certaminis apostolici ou encore Historiæ apostolicæ, divisé en dix livres et contenant les Actes des apôtres Pierre, Paul, André, Jacques, fils de Zébédée, Jean, Jacques, fils d’Alphée, Simon et Jude, Matthieu, Barthélémy, Thomas, Philippe. Les manuscrits n’indiquent pas de nom d’auteurs : mais les Actes de Simon et Jude parlent d’un compagnon des deux apôtres, appelé Abdias, et fait par eux évêque de Babylone ; or en tête du recueil figure une préface qui se donne comme composée par Africanus (Jules l’Africain, le chronographe, contemporain d’Origène), et dans laquelle cet Africanus prétend que les actes qu’il va publier ont été composés en hébreu par Abdias, évêque de Babylone, traduits de l’hébreu en grec par Eutropius, et traduits du grec en latin par Africanus : autant de fables. Une fois débarrassée des assertions de cette préface, la critique se trouve en présence du recueil lui-même, qui est sûrement latin d’origine, puisqu’il dépend de la Vulgate hiéronymienne. On distingue deux stades dans la formation de ce recueil : on a réuni d’abord une collection de passions des douze apôtres, passions dérivées de la collection dite de Leucius pour les apôtres Pierre, Paul, Jean, André, Thomas, ou dérivées de documents indépendants pour les autres. Puis à cette collection de passions on a ajouté, avec la préface sus-mentionnée, des récits de miracles ou virtutes, notamment en ce qui concerne saint André et saint Thomas, au sujet desquels notre compilateur a pour source Grégoire de Tours. Ainsi constitué, le recueil du faux Abdias paraît avoir été connu de Fortunat († 609) dans son poème sur la virginité (vs 137 sq.) et aussi de l’auteur de la recension auxerroise du martyrologe hiéronymien, à la fin du vie siècle. « Grégoire, Fortunat, la recension auxerroise du martyrologe hiéronymien, tout cela représente un même milieu littéraire, le monde ecclésiastique franc de la fin du vie siècle. Tel est le pays d’origine et la date de la collection dite d’Abdias, quel que soit d’ailleurs l’âge, quelle que soit la patrie de chacune des pièces qui y sont entrées. » L’intérêt propre du pseudo-Abdias est de nous renseigner sur les légendes qui, dans le monde franc du vie siècle, avaient cours sur les apôtres, et de nous avoir conservé, en des relations bien dérivées, il est vrai, quelques-uns des Actes apocryphes les plus anciens.

R. A. Lipsius. Die apokryphen Aposteltgeschichten, Brunswick, 1883, t. i, p. 117 sq. ; L. Duchesne, Les anciens recueils de légendes apostoliques (Compte rendu du congrès scientifique international des catholiques, Bruxelles, 1894, sect. v, p. 74). On trouvera le texte du pseudo-Abdias dans Fabricius, Codex apocryphus Novi Testamenti, Hambourg, 1700, p. 402 sq.

P. Batiffol.