Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/851-860

Fascicules du tome 1
pages 841 à 850

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 851 à 860

pages 861 à 870


BÉNÉDICTINES. s. f. Religieuses habillées de noir, qui suivent la règle de saint Benoît. Ordinis santi Benedicti Moniales. Elles ont un voile noir, une guimpe de toile blanche, & une grande robe de même serge que leur voiles. Il y a de simples Congrégations, il y a aussi des Prieurés & des Abbayes de Bénédictines. Le Roi nomme à leurs Prieurés & à leurs Abbayes, & leurs Prieures & leurs Abbesses sont perpétuelles. Voyez la Préface du premier siècle des Acta. SS. Ben. §. 3. p. XX. & du IIe siècle, §. 3. p. XXIII.

Les Bénédictines de Bourbourg, d’Estrun, de Messine, dans l’évêché d’Ypres, & autres en Flandre & en Italie, sont nobles. Il y a à Venise trois Monastères de Bénédictines, où l’on ne reçoit que des filles de Sénateurs & des premières maisons de la République. On les appelle Gentildonne ; en leur parlant on leur donne le titre d’Illustrissime. Saint Zacharie est le premier de ces Monastères, fondé en 819 par Ange & Justinien Patticipace. Les autres sont celui de saint Laurent, & celui de saint Côme & de saint Damien. P. Helyot, T. VI. C. 40. Les Bénédictines de l’Adoration perpétuelle furent instituées par la Mere Mectilde du S. Sacrement, touchée du récit des effroyables sacrilèges commis par les Hérétiques, contre le Saint Sacrement, dans les guerres commencées en Allemande, en 1629. Id. C. 47.

Bénédictine. s. f. Nom qui se donne à une Bulle de Benoît XII de l’an 1336, par laquelle ce souverain Pontife réforme l’Ordre de saint Benoît, & lui prescrit des réglemens.

☞ BÉNÉDICTION. s. f. En général, action de bénir, c’est-à-dire, de souhaiter quelque chose d’heureux. Fausta prædicatio. On le dit dans ce sens des prières & des vœux que font les peres & les meres en faveur de leurs enfans, sur-tout à l’article de la mort. Jacob reçut la bénédiction de son pere au lieu d’Esaü.

☞ On le dit de même des prières qu’on fait pour les Princes, pour les bienfaiteurs, & des souhaits qu’on fait pour leur prospérité. Ce Prince attire par ses bienfaits les bénédictions de tout son peuple. Le nom de Bourbon est en bénédiction à tout le monde ; c’est un nom pour lequel tout le monde fait des vœux.

Bénédiction, signifie aussi abondance, les faveurs, les grâces que le Ciel accorde. Divinum beneficium, cœleste munus, donum. Celui qui seme avec bénédiction, moissonnera avec bénédiction, avec abondance. Vous remplirer tout animal de bénédiction, de l’abondance de vos biens. Jacob après avoir été éprouvé, reçut mille bénédictions de Dieu. L’abondance des fruits est une bénédiction céleste.

Bénédiction, signifie aussi louange à Dieu, remerciment de ses grâces. Laus, gratiarum actio. Les Martyrs donnoient à Dieu mille bénédictions dans leurs souffrances.

☞ Les Hébreux entendent aussi souvent par le nom de bénédiction, les présens que se font les amis, sans doute parce qu’ils sont accompagnés de bénédictions, c’est-à-dire, de vœux & de complimens de la part de ceux qui les donnent, & de remerciment de la part de ceux qui les reçoivent. Voyez Gen. XXXIII, 2. Josué, XV, 19, &c.

Bénédiction, est aussi une cérémonie ecclésiastique qui se fait pour rendre une chose sacrée ou vénérable. Consecratio.

L’esprit de piété a introduit dans l’Eglise Catholique des bénédictions pour rpesque toutes sortes de choses. On trouve des bénédictions dans le Pontifical Romain, dans le Missel Romain, dans le livre des cérémonies ecclésiastiques, imprimé du temps de Léon X, & dans les Rituels & les Cérémoniaux de différentes Eglises, que l’on trouve ramassés dans l’ouvrage du P. Martène sur les rits & la discipline de l’Eglise. Il y en a pour les cierges, pour les rameaux, pour les cendre, pour les vases & les ornemens sacrés, pour les drapeaux, pour les armes, pour l’Agneau pascal, pour les fruits & les biens de la terre, pour une maison, pour un navire, pour les œufs à la fête de Pâques, pour une Abesse, pour des nouveaux mariés, pour des fonts, pour des cloches, pour l’eau bénite, pour le pain bénit, pour le cilice de ceux qui font la pénitence publique, pour un cimetière, &c. Autrefois on faisoit la bénédiction des fruits nouveaux durant la Messe après la consécration, & après cette bénédiction qui finissoit par les paroles ordinaires per Christum Dominum nostrum, on ajoutoit la prière qui commence par ces paroles : Per quem omnia, Domine, semper bona creas, &c. Voyez le Cardinal Bona, & Dom Luc d’Acheri, le Glossaire de M. du Cange, où l’on trouve toutes les espèces de bénédictions qui ont été en usage, & celui des Macri.

En général ces bénédictions se font par des aspersions d’eau bénite, des signes de Croix, & des prières conformes au sujet de la cérémonie. Quand il y a onction, cela s’appelle Consécration : ainsi on consacre le calice, & on bénit le ciboire, parce qu’on emploie l’onction pour le calice : dans l’usage ces mots se confondent quelquefois. M. Fléchier, Evêque de Nimes, en faisant la bénédiction des drapeaux d’un Régiment Suisse, prononça un fort beau discours par rapport à cet usage de l’Eglise, & à la destination de ce Régiment, que le Roi envoyoit combattre les Fanatiques des Cévènes.

Bénédiction, se dit plus particulièrement du signe de la Croix que font les Prélats & autres Supérieurs en plusieurs occasions. Sublatâ manu figuras Crucis exprimere, & bene precari. Les Evêques en passant dans les rues, dans l’Eglise donnent leur bénédiction au peuple. Autrefois quand les Evêques alloient par la ville, & lorsqu’ils passoient par les bourgs & villages, on sonnoit une petite cloche pour avertir le pleuple de venir recevoir leur bénédiction. Quand ils alloient à la Cour, ils ne s’en retournoient point qu’ils n’eussent donné la bénédiction au Roi. Voyez le P. Thomassin, Discip. de l’Egl.. Il est fait mention de cette bénédiction des Evêques dans Théodoret, Hist. Eccl. L. IV. C. 5, & dans Evagrius, L. IV, C. 34, comme M. de Valois l’a montré. On donne la bénédiction à la fin de la Messe. La bénédiction du S. Sacrement se donne au Salut quand on le resserre. Ipso Christi corpore figuram Crucis effingere.

L’usage de donner la bénédiction au peuple en étendant les mains, & en prononçant des paroles qui expriment les souhaits que l’on fait, est très-ancien. Il en est parlé dans S. Ambrois, de Pœnit. L. I, C. 7, & S. Jérôme Ep. ad. Eust. Dans les anciennes liturgies grecques, dans les Conciles d’Agde, d’Orléans, dans le quatrième de Toléde. Walfridus, Bernon, Burchard, en font mention. Jean-Bap. Scortia Jésuite, croit avec S. Isidore, Jansénius de Gand, & plusieurs savans interprètes de l’Ecriture, que cette coutume est venue des Juifs. Jansénius dit, dans son commentaire sur l’Ecclésiastique, que les Prêtres chez les Juifs donnoient la bénédiction en élevant les mains, & en les portant en forme de croix vers les quatre parties du monde ; & Galatinus prétend que la bénédiction se faisoit avec le nom ineffable יהוה, Jehova, à quoi répond dans la religion Catholique l’invocation d’un seul Dieu en trois personnes, le Pere, le Fils, & le saint Esprit. On peut voir Levit. IX, 22, au Liv. des Nomb. VI, 23, 24, 25, 26. Exod. VIII, 9, Luc XXIV, 50.

La bénédiction de la table, des viandes, & des choses que l’on boit, en faisant le signe de la Croix dessus, est une très-ancienne coutume, comme il paroît par S. Grégoire, dans la vie de S. Benoît, au L. II de ses dialogues. Le premier Traité du premier Ordre du Thalmud des Juifs est intitulé ברכות, les bénédictions, & l’on y traite des prières que les Juifs font en différentes occasions, le matin en se levant, le soir avant que de se coucher, avant, après & pendant le repas, &c. C’est là ce qu’ils appellent bénédiction.

Bénédiction Apostolique, est le salut que donne le Pape au commencement de toutes ses Bulles, en ces termes : Salutem, & Apostolicam benedictionem.

Bénédiction, est aussi une rubrique du Bréviaire, où il y a un titre des bénédictions & absolutions. Elle se fait au commencement des Leçons des Matine, en ces termes, Jube, Domne, benedicere.

On dit proverbialement, donner sa bénédiction ; pour dire, congédier, conduire quelqu’un. On appelle un pays, une maison de bénédiction, un lieu où toute richesse & prospérité abonde, une maison de bonne chère. Donner à quelqu’un des bénédictions de S. Roch, c’est donner des malédictions, dans Mascarat.

☞ Vallée de bénédiction. On avoit donné ce nom à un lieu situé dans la Tribu de Juda, à cause de la victoire que Josaphat avoit remportée sur les troupes des Moabites, des Ammonites & des Iduméens.

BÉNÉDICTIONNAIRE. s. m. Terme ecclésiastique. Livre qui contient les bénédictions. Benedictionarium. Le P. Le Brun se sert de ce mot dans ses Livres sur les Liturgies. A la fin des Missels il y a un bénédictionnaire, c’est-à-dire, les formules des bénédictions.

BÉNÉFICE. s. m. Terme de droit canonique. Eglise dotée que quelque revenu pour y faire le service divin : il se dit non-seulement de la fonction, mais aussi du revenu qui y est affecté. Beneficium Ecclesiasticum. Un bénéfice est une certaine portion du bien de l’Eglise assignée à une personne ecclésiastique, pour en jouir pendant toute sa vie, pour rétribution du service qu’il rend, ou qu’il doit rendre à l’Eglise. Pour être pourvu d’un bénéfice il suffit d’être tonsuré ; à moins que le bénéfice ne soit sacerdotal par sa fondation. A l’égard de l’âge, il se régle selon la différence des bénéfices. Pour les simple Chapelles il faut avoir sept ans, pour les Prébendes des Eglises Cathédrales, quatorze ; pour les dignités qui n’ont point charge d’ames, vingt ; pour les Abbayes, & prieurés Conventuels, vingt-trois ; pour les Cures & les dignités à charge d’ames, vingt-cinq commencés ; pour les Evêchés & Archevêchés, vingt-sept.

On distingue des bénéfices libres & des bénéfices serfs. Les bénéfices libres, sont les vrais bénéfices, tels qu’on les a décrits ci-devant. Les bénéfices serfs sont les places qu’on donne dans une Eglise à des Prêtres, à charge de desservir au service divin. Par Arrêt du Parlement de Paris du 5 Août 1705, les titres de Grands-Chapelains, ou de Vicaires dans l’Eglise de Meaux ont été déclarés bénéfices serfs, c’est-à-dire, qu’ils ne peuvent en disposer qu’avec l’agrément de l’Evêque & du Chapitre. Hist. de l’Eg. de Meaux, Tom I, p. 103, & 104. Les Chapelles que l’on donne dans les églises cathédrales ou collégiales aux Chantres ou Vicaires choristes pour la desserte du chœur, doivent une présence actuelle & continuelle, & sont amovibles & destituables pour cause d’absence, sans monition canonique. Assisi, Mansionarii. Voyez le Procès-verbal de l’Assemblée de 1726, & Bronod, Mém. pour le Chapitre de S. Germain l’Auxerrois. On les appelle encore bénéfices impropres.

Les bénéfices peuvent vaquer en trois manières, ou de droit, de droit & de fait, ou par Sentence de Juge. Un bénéfice vaque de droit, lorsque le droit prive celui qui en est pourvu pour des crimes exprimés dans le Droit, comme l’hérésie, la simonie réelle, la confidence, la falsification des lettres apostoliques, la protection qu’on donne à ceux qui font profession d’hérésie, le meurtre d’un Clerc, battre un Cardinal, le crime de Lèse-Majesté humaine, de fausse monnoie, la sodomie dont on est atteint & convaincu, emprisonner un Bénéficier, afin de le contraindre à résigner son bénéfice, les violences que l’on fait à son Evêque, &c. Ces crimes font vaquer un bénéfice dès qu’on les a commis, ensorte qu’un Bénéficier est incapable de le posséder, & même de le résigner, & qu’il n’est pas nécessaire d’attendre qu’il en soit déposé par la justice, pour s’en faire pourvoir. Un bénéfice vaque de droit & de fait, par la mort naturelle du titulaire, & par le renoncement exprès ou tacite. Il y renonce expressément par la démission qu’il en fait entre les mains du Collateur, & que le Collateur admet, lorsqu’ensuite il en abandonne la possession. Il y renonce tacitement, lorsqu’il s’engage dans un état, ou dans un bénéfice qui est incompatible avec celui dont il est pourvu, & qu’il ne se dépouille pas de l’un de ces deux bénéfices dans le temps prescrit. Ainsi dès qu’on contracte mariage par paroles de présent, qu’on fait profession dans un Ordre Religieux ; dès qu’on est sacré Evêque, & qu’on prend possession de son évêché, on renonce tacitement à tous les bénéfices incompatibles qu’on possédoit, & non aux bénéfices simples. Un bénéfice vaque par Sentence d’un Juge, en punition de certains crimes qui obligent un Juge à déposer un Clerc de son bénéfice. Tels sont le concubinage, si après en avoir été averti par son Supérieur on ne se corrige point, comme il est dit dans le Concordat, & au titre De concubinariis ; l’ingratitude envers son résignant, qu’on traite injurieusement, & qu’on refuse de secourir dans ses besoins, ou à l’égard du Collateur, de qui on a reçu le bénéfice, en s’efforçant de lui faire perdre le droit qu’il a de le conférer, ou en attaquant sa Juridiction ; la non résidence dans un bénéfice qui demande un service personnel, nonobstant les monitions canoniques qui ont été faites pour ce sujet ; le parjure, le sortilège, toute sorte d’irrégularités où l’on tombe par quelque crime ; le mépris que font les Bénéficiers de l’état ecclésiastique, étant d’ordinaire vêtus comme des laïques. Clem. I, de vitâ & honest. Cleric. Du casse. Auboux.

S. Vincent Ferrier, cité par M. Auboux, Official de Cahors, dans la Véritable Pratique, civile & criminelle des Cours Ecclésiastiques, disoit que de son temps on parvenoit aux dignités & aux bénéfices par cinq cas ; par le nominatif, ainsi qu’il appert par la rubrique de la nomination royale aux prélatures dans le Concordat, & par le droit de régale que le Roi a dans son Royaume ; par le génitif, lorsque les Princes & les grands Seigneurs pourvoient ou font pourvoir aux bénéfices leurs enfans, ou les enfans de leurs domestiques & serviteurs ; par le datif, lorsqu’on dit, quand il est question d’avoir un bénéfice ; date, & dabitur vobis ; par l’accusatif, lorsque par une accusation fausse, ou véritable, on veut déposséder d’un bénéfice celui qui en est bien pourvu ; par l’ablatif, lorsqu’on ravit les bénéfices par sa puissance & son autorité aux pauvres & aux foibles qui les possèdent. Le vocatif, qui est le cas le plus juste & le plus légitime, est aujourd’hui fort peu en usage, c’est pourquoi il a été omis ; car le corbeau de la brigue, ou simonie, a suffoqué la colombe, qui est le symbole de S. Esprit ; de sorte que le nominatif est pour le Roi ; le génitif, pour les grands & les puissans ; le datif, pour les riches & les simoniaques ; l’accusatif, pour les ambitieux ; l’ablatif, pour les méchans & les chicaneurs ; mais le vocatif est réservé au S. Esprit seul, qui ouvre la vraie porte pour y entrer.

En général il n’y a que deux sortes de bénéfices : car tout bénéfice est ou séculier, ou régulier. Les différentes espèces de bénéfices sont bénéfices à charge d’ames, ou simples, électifs, collatifs, ou mixtes, en titre, ou en commende : les Evêchés, Abbayes, Cures, Chanoinies, Chapelles, Prieurés, sont encore sous ces espèces générales des espèces particulières de bénéfices. Deux bénéfices sous un même toit, ou dans une même Eglise, sont incompatibles : on dit que c’est épouser la mere & la fille.

Il y a de Pastor un Traité De beneficiis, & censuris Ecclesiasticis, & de bonis temporalibus, qu’on réimprima à Toulouse en 1711, ou 1712, avec des notes de M. Solier, savant canoniste.

Benefice en commende. C’est en Droit Canon celui dont on a donné pour six mois la régie ou l’économat à un ecclésiastique. Mais en France c’est un vrai titre, & perpétuel, qu’on donne à un séculier ecclésiastique, avec faculté de disposer de tout le revenu à son profit, & sans en rendre compte. Beneficii fiducia auctoritate Pontificis concessa. Le Pape seul peut donner des provisions en commende, & dispenser de la règle, regularia regularibus. Mais le bénéfice en commende demeure toujours en règle, & ne change point de nature.

Benefice consistorial, est celui qui étant à la nomination du Roi, doit être proposé dans le consistoire de Rome, c’est-à-dire, la congrégation des Cardinaux où préside le Pape ; comme les archevêchés, évêchés & abbayes. Beneficium in sacro Pontificis consilio proponendum. Ces sortes de bénéfices étoient autrefois électifs : mais par le concordat qui a aboli les élections, ils sont conférés par le Pape sur la nomination du Roi. Les provisions des autres bénéfices s’expédient à la Chancellerie. Pour les bénéfices consistoriaux, il faut payer l’annate, & obtenir des Bulles.

Le bénéfice non consistorial, est ou électif ou collatif. Les collatifs sont en la libre disposition du collateur ordinaire, ou en patronage. Les bénéfices collatifs dépendent du seul collateur, qui les confère à qui bon lui semble, sans avoir besoin de confirmation, pourvu que ce soit à une personne qui ait les capacités requises. Les bénéfices en patronage sont ceux qui ne peuvent être conférés par les collateurs ordinaires, le collateur est obligé de les conférer à ceux qui sont présentés par le Patron. Les bénéfices électifs sont ceux qui sont remplis par élection ; seulement l’élection doit être confirmée par le Supérieur. Présentement il y a peu de ces bénéfices en France.

Bénéfice manuel, est un bénéfice dépendant d’une abbaye, qu’on envoie desservir par un Religieux qui est amovible, & qu’on change quand il plaît au Supérieur. Manuale.

Bénéfice sacerdotal à charge d’ames, est celui qui oblige à être Prêtre, & qui est chargé de la direction des âmes soumises à la conduite, & sur lesquelles il a juridiction pour le for intérieur, & la conscience. Sacerdotale. Les évêchés, les cures, les abbayes régulières, les prieurés conventuels, les premières dignités des chapitres, sont des bénéfices à charge d’ames. Ceux qui sont pourvus de bénéfices sans charge d’ames, ne sont obligés qu’à prier Dieu ; comme les Chanoines, les Chapelains.

Bénéfice sécularisé, est un bénéfice qui étant régulier de sa nature, & n’étant auparavant possédé que par des réguliers, devient séculier pour toujours, par une Bulle du Pape qui éteint la règle, & en change l’état ; en sorte qu’il n’est possédé à l’avenir que par des séculiers ; comme le Chapitre de Véselay, de Tulle, de Clérac, &c. Beneficium à religioso statu ad sæcularem auctoritate Pontificis traductum.

Bénéfice séculier, est celui qu’on doit donner aux séculiers, comme sont presque toutes les cures. Sæculare. Tous bénéfices sont présumés séculiers, s’il n’est justifié du contraire. On appelle bénéfice séculier, parce qu’il est affecté aux Prêtres séculiers, c’est-à-dire, à ceux qui vivent dans le monde, ou dans le siècle, & qui ne sont engagés dans aucun Ordre Monastique.

Bénéfice simple, est celui qui peut être possédé à sept ans par un Clerc tonsuré, qui n’a autre obligation que de dire son Bréviaire. Simplex. On l’obtient sur une simple signature de Rome. Il y a des bénéfices simples qui ont prééminence & dignité, & d’autres qui n’en ont point.

Bénéfice en titre, ou règle ou régulier, est celui qui est possédé par un Religieux, ou un Régulier, lequel a fait profession dans quelque Ordre Religieux ; comme les Abbayes, les Prieurés Conventuels, &c. Regulare. On appelle bénéfice régulier, celui qui ne doit être conféré qu’à des Religieux, soit par sa fondation, soit par l’institution du Supérieur, soit par prescription ; car c’est à celui qui prétend qu’un bénéfice est régulier, à le prouver : autrement il est censé séculier. Un bénéfice est réputé régulier quand il a été possédé pendant 40 ans par un régulier sans dispense.

Bénéfices vacans in Curiâ. Ce sont les bénéfices dont les Titulaires meurent en Cour, c’est-à-dire, dans les dix lieues autour de Rome. Le Pape a droit de les conférer, & ce droit est une espèce de réserve dont le Pape Clément IV est Auteur. On trouve la Constitution de cette réserve dans le Sexte au chap. Licet ; & comme il n’y est point parlé des Evêchés & des Abbayes, quelques-uns ont prétendu qu’ils n’étoient point du nombre des bénéfices vacans in curiâ ; mais le Concordat, qui nous sert de règle, les y comprend. C’est pourquoi Charles Du Moulina été obligé de dire qu’il y avoit eu en cela de la surprise, les Commissaires du Roi pour le Concordat ayant laissé passer cet article.

Le Roi reconnoît cette réserve des bénéfices vacans in curiâ, par les Brevets qu’il accorde aux Bénéficiers qui ne sont point du Royaume, & qui pourroient mourir en Cour. Il ne leur donne leurs bénéfices qu’à condition qu’ils obtiendront du Pape un Bref de non vacando in curiâ. Après cela, soit qu’ils obtiennent ce Bref, ou qu’ils ne l’obtiennent point, les bénéfices dont ils sont pourvus, ne peuvent plus vaquer in curiâ M. Doujat a fait imprimer en 1667 le Bref De non vacando in curiâ, que le Pape Clément IX accorda au Cardinal Mancini, pour les Abbayes que ce Cardinal possédoit en France. Il est adressé au Roi sur sa supplique en ces termes, Nos, ne prædicto Cardinale fortè apud sedem Apostolicam decedente, majestas tua impediatur, quominùs ad monasteria hujus, moderatione dictorum concordatorum aut specialis indulti Apostolici, nominare possit, opportune providere volentes, supplicationibus ejusdem majestatis tuæ nomine nobis super hoc humiliter porrectis inclinati, eidem majestati tuæ, &c. On voit que le Pape prétend que tous les bénéfices vacans in curiâ, lui sont réservés par les articles du Concordat, & que le Roi reconnoît cette réserve du Pape. Les Papes accordent assez rarement ces sortes de Brefs. M. le Prince de Neubourg en obtint un pour son Abbaye de Fescamp en 1673, qui est semblablement adressé au Roi.

Au reste, le terme de bénéfice est venu des Romains. Ils avoient accoutumé de distribuer aux gens de guerre sur les frontières de l’Empire une partie des terres qu’ils avoient conquises : ces gens d’armes, qui jouissoient de ces sortes de récompenses s’appeloient bénéficiers, Beneficiarii, & la terre qu’on leur donnoit, bénéfice, beneficium, & on l’appela ainsi, parce que c’étoit un pur bienfait, & une libéralité du Prince. Voyez Bollandus, Act. Sanct. Jan. Tom. II, p. 341. Les François qui passèrent dans les Gaules, firent les mêmes libéralités aux soldats ; & en conservant le nom aussi bien que la chose, ils appelèrent bénéfices, les terres qu’on leur assigna. Ainsi dans l’origine, bénéfice signifie ce que nous appelons Fief ; & en effet ceux qui ont écrit des Fiefs en latin, se servent du mot beneficium. Ces bénéfices se donnoient à vie seulement, & par privilège à ceux qui faisoient profession des armes. Depuis, c’est à-dire, sous Louis le Débonnaire, & Charles le Chauve, ces bénéfices sont devenus héréditaires & patrimoniaux. Cependant sous ces Princes on demandoit encore leur consentement pour faire passer les bénéfices aux enfans ; mais dans la décadence de la seconde race, on ne le demanda plus, & ils passerent comme de plein droit aux héritiers de ceux qui les possédoient. Voyez de Hauteserre, Orig. Feudor. c. 2. C’est sans doute de-là qu’est venu le nom de bénéfices, qui a été donné aux biens de l’Eglise ; car outre que les Ecclésiastiques les possèdent à vie, à l’exemple des gens de guerre, à qui cet usufruit tenoit lieu de récompense pour leurs services, les richesses de l’Eglise proviennent de la libéralité & des bienfaits des Princes ou des particuliers. Avant que le mot de fief fût en usage, on se servoit de celui de bénéfice, qui signifioit la même chose. Les bénéfices, ou fiefs, ne changèrent de nature que par la décadence de la seconde race des Rois : alors chacun s’attribua la propriété de son bénéfice, pour le transmettre à sa postérité.

A l’égard des bénéfices ecclésiastiques, on ne sait pas fort exactement en quel temps s’est fait ce partage des biens de l’Eglise : il est certain qu’avant le quatrième siècle, tous les revenus étoient entre les mains de l’Evêque, qui en faisoit la distribution par des Economes. Ces biens ne consistoient qu’en aumônes, & en collectes. Quand l’Eglise eut acquis des héritages, les Evêques en assignoient une portion pour la subsistance des Clercs : & c’est ce qu’on appela bénéfice. Dès le commencement du VIe siècle, on trouve des traces de cet usage ; car dans le Concile de Rome convoqué par le Pape Symmaque, dans son Epître à Cæsarius, l’an 502, on défend d’aliéner à perpétuité aucun héritage de la campagne, ni de le donner en usufruit, si ce n’est aux Clercs qui l’auront mérité, aux captifs & aux étrangers, ou en faveur de quelques monastères, ou des Hôpitaux, & cela pour la vie seulement de ceux qui l’auront mérité. Voyez le premier tome des Conciles de France, ann. 513. Les paroles de Symmaque ont aussi été insérées dans le décret de Gratien, caus. 16, q. 1, can. 61. On connoît par-là qu’il y avoit dès ces anciens temps quelque espèce de bénéfice, quoique la portion des biens ne fût pas encore faite aux Ecclésiastiques en particulier ; mais cela étoit alors fort rare, & ne s’accordoit que pour des causes extraordinaires. Il y a de plus quelques vestiges de fondations de bénéfices & du droit de patronage dans le Canon 10 du premier Concile d’Orange ; mais l’usage de ces temps-là est bien éloigné de celui des derniers siècles. On donnoit donc dès-lors du bien de l’Eglise aux Clercs en usufruit. En 506 le Concile d’Agde permet aussi aux Clercs de retenir les biens de l’Eglise, suivant la permission de l’Evêque, sauf le droit de l’Eglise, & sans pouvoir les vendre, ou les donner, sous peine d’indemniser l’Eglise de leur bien propre, & d’être privés de la Communion. Le IIIe Concile d’Orléans en 558, indique encore la même chose dans son 17e Canon. Telle fut donc l’origine des bénéfices, qui commencèrent par conséquent avec le VIe siècle ou même dès le Ve : car en tous ces Canons, on en parle comme d’une chose déjà établie, & en usage au moins pour quelques cas particuliers. Le plus souvent les offrandes & les revenus se partageoient par l’avis du Clergé, selon le mérite de chaque Prêtre ; & cela se pratiquoit encore au VIIIe & au IXe siècle à la fin duquel le P. Thomassin remarque néanmoins que le nom de bénéfice étoit déjà en usage dans l’Eglise. Dans le XIIe siècle on partagea les revenus, et on fixa à chacun une portion & une subsistance certaines : de-là font venues tant de lois qui composent la Jurisprudence Canonique. Chacun se contenta d’abord d’un seul bénéfice ; mais la pluralité s’introduisit dans la suite sous prétexte d’équité ; parce qu’un Prêtre n’avoit pas assez d’un bénéfice pour subsister, on lui permit d’en posséder deux, & enfin plusieurs, jusqu’à ce qu’il fût rempli du nécessaire. Mais on étendit si loin ce nécessaire, qu’il n’y eut plus de règle fixe. On regarda la personne autant que la qualité ; en sorte que les Cardinaux, qui prétendent s’égaler aux Princes, prétendent aussi avoir un revenu conforme à leur condition. On peut ajouter ici ce mot de la Bruyère : Que tel homme monte en chaire, sans autre talent ni vocation, que le besoin d’un bénéfice.

Le ministère, ou bénéfice, n’étoit point autrefois distingué de l’ordination ; c’est pourquoi lorsque par l’introduction du droit nouveau ils ont été séparés, on a toujours gardé l’ancienne maxime ; savoir, que celui qui ordonne confère aussi le bénéfice, & que celui qui ne peut point ordonner, ne peut conférer aucun bénéfice. Mais peu-à-peu les Papes ont dérogé par leurs privilèges & leurs exemptions au droit commun, qui étoit fondé sur le droit ancien. Nous voyons présentement que les Abbés exempts de la Juridiction des Ordinaires confèrent de plein droit des Cures & d’autres bénéfices.

On a beaucoup écrit contre la pluralité des bénéfices. La Place, Recteur de l’Université de Paris, a fait un traité qui a pour titre, De singularitate beneficiorum. Le Sieur De la Roque, Ministre Calviniste, écrivit aussi en 1688 contre la pluralité des bénéfices ; & jusqu’ici personne n’avoir osé se déclarer publiquement, ni écrite en faveur de cet abus, qu’un Auteur anonyme qui sous le nom d’Abbé de Sidichembech (Jac. Boileau) fit paroître en 1710, un ouvrage intitulé, De Re Bénéficiarià Liber singularis, sive Questionis celebris ac difficilis, &c. Ἀνάϰρισις. Il fut aussitôt solidement réfuté par plusieurs écrits. Le IIIe & le IVe Concile de Latran ont condamné la pluralité des bénéfices.

Contentez-vous d’un bénéfice.
Ce point n’est pas indifférent :
En avoir dix, c’est avarice ;
S. Augustin n’en veut pas tant.

Ce mot se trouve aussi dans le Catholicon d’Espagne en une autre acception.

A chacun le sien, c’est justice :
A Paris seize quarteniers,
A Montfaucon seize piliers,
C’est à chacun son bénéfice.


c’est-à-dire, ce qu’il mérite.

Bénéfice, se prend aussi pour le lieu même où est l’Eglise & le bien du Bénéficier. Ce bénéfice est bien situé. Acad. Fr.

Bénéfice, signifie aussi, gain, profit, avantage. Lucrum, commodum, fructus, utilitas. Les Banquiers de Lyon font souvent tenir de l’argent à Paris avec bénéfice ; c’est-à-dire, qu’au lieu de demander des remises pour le change, ils donnent du profit. Les Changeurs donnent du bénéfice en leur postant à changer des louis d’or. On dit, qu’un Traitant a eu du bénéfice dans une affaire, quand il a profité ; qu’une telle somme a tourné à son bénéfice. En matière de loterie on appelle avoir un bénéfice, pour dire, avoir un billet marqué, avoir un bon lot.

☞ Le gain, dit M. l’Abbé Girard, semble être quelque chose de très-casuel, qui suppose des risques & du hasard ; voilà pourquoi ce mot est d’un grand usage pour les joueurs & pour les commerçans. Le profit paroît plus sûr, & venir d’un rapport habituel, soit du fonds, soit d’industrie, ainsi l’on dit les profits du jeu, pour ceux qui donnent à jouer, ou fournissent les cartes : & le profit d’une terre, pour exprimer ce qu’on en retire outre les revenus fixés par les baux. Le bénéfice semble dépendre de la bienveillance des autres. Il ne le dit guère que pour les Banquiers, les Commissionnaires, le Change, & le produit de l’argent ou dans la Jurisprudence, pour des héritiers, qui, craignant de trouver une succession surchargée de dettes, ne l’acceptent que par bénéfice d’inventaire.

Le joueur dit, j’ai peu gagné ; le marchand, je n’ai fait aucun profit ; le banquier & le vendeur, je n’en tire aucun bénéfice. Voyez tous ces mots, ainsi que Lucre & Emolument, Avantage, Utilité.

En termes de Médecine, on appelle bénéfice de ventre, un dévoiement naturel & spontané qui arrive sans aucune médecine. Alvi profluvium. On dit aussi, bénéfice de nature.

En termes de Jurisprudence, il signifie grâce, concession gratuite du Prince. On dit qu’on est reçu au bénéfice de cession, quand on reçoit un homme à abandonner les biens à ses créanciers ; moyennant quoi il est élargi des prisons, excepté pour les cas réservés par les Ordonnances.

En termes de Chancellerie, on appelle des Lettres de bénéfice d’âge, celles que les mineurs obtiennent pour être émancipés, & avoir la faculté de gouverner leur revenu depuis dix-huit ans jusqu’à la pleine majorité ; mais ils ne peuvent vendre ni aliéner, ni hypothéquer leurs immeubles, qu’ils n’aient atteint l’âge de majorité. Les clauses des lettres de bénéfice d’âge font que les parens paternels & maternels seront appelés, qu’ils donneront leur consentement, & que le mineur est capable d’administrer ses biens, & de jouir de ses revenus. Litteræ Principis quibus administrare bona minoribus conceditur.

Il y a aussi des Lettres de bénéfice d’inventaire, qu’on obtient pour être héritier d’un homme sans être obligé de payer les dettes au de-là des forces de sa succession, de laquelle à cet effet on fait inventaire, pour en rendre compte, s’il est besoin. Litteræ Principis quibus hæreditatem adeunti conceditur, tantùm teneri, quantùm valere bona hæreditatis contingit. C’est Justinien qui a mis dans l’usage commun le bénéfice d’inventaire, par lequel l’héritier n’est responsable ni envers les créanciers, ni envers les légataires, que jusqu’à la concurrence des biens. C’est une grâce du Prince qui fut d’abord introduite par l’Empereur Gordien, en faveur des gens de guerre. L’Empereur Justinien l’étendit ensuite à tous ses sujets ; ce qui étoit nécessaire dans un temps où les successions étoient tellement obérées, à cause des grandes guerres que l’Empire avoir soutenues, que personne n’osoit se déclarer héritier. L’héritier présomptif, qui n’accepte la succession que sous bénéfice d’inventaire, ne peut être exclus par un parent plus éloigné qui se déclare héritier pur & simple. Les Lettres de bénéfice d’inventaire s’adressent au Juge de l’impétrant, s’il est royal, sinon mandement est fait au premier Huissier, ou Sergent Royal, de faire commandement au Juge du Seigneur haut Justicier, de procéder à l’entérinement. Les conditions des Lettres de bénéfice d’inventaire sont de faire l’inventaire des biens, de n’avoir fait aucun acte d’héritier, & de payer les dettes jusqu’à concurrence de l’inventaire. Il faut que l’impétrant donne caution du contenu en l’inventaire. Les Lettres de bénéfice d’inventaire ne servent de rien à l’égard du Roi, aux héritiers de ceux qui sont comptables des deniers du Roi, parce qu’il ne donne rien, ni aucun privilège contre ses droits. Nul n’est admis à jouir du bénéfice d’âge, ou du bénéfice d’inventaire, sans Lettres scellées des Chancelleries. Voyez plusieurs Arrêts sur cela dans l’Hist. de la Chancel. Tom. II. Le Roi en a cependant exempté les Provinces régies par le Droit écrit, par un Arrêt du 7 Janvier 1684. Ibid. pag. 121.

Bénéfice, se dit aussi en parlant du temps, & veut dire, grâce faveur, dont le temps est souvent la seule cause. Il faut attendre le bénéfice du temps. La Rochef.

Bénéfice, se dit aussi en ces phrases proverbiales. Il faut prendre le bénéfice avec les charges : ce qui se dit tant au propre, des charges d’un vrai bénéfice, qu’au figuré, de toute autre chose qui a des avantages, & des inconvéniens. On dit aussi que les chevaux courent les bénéfices, & que les ânes les attrapent. On dit encore, d’un homme qui n’a point de revenu, qu’il n’a Office, ni bénéfice ; qu’il est obligé de vivre du travail de ses mains. On dit d’un homme qui n’a point de Religion, qu’il croit en Dieu par bénéfice d’inventaire, c’est-à dire, qu’il fait profession de la Religion autant qu’il y trouve son profit & son intérêt.

Qui sentoit quelque peu le fagot
Et qui croyait en Dieu, pour user de ce mot,
Par bénéfice d’inventaire. La Font.

BÉNÉFICENCE. s. f. Penchant à faire du bien, grâce extraordinaire. Beneficentia. Ce mot de bénéficence, quelque doux qu’il soit, n’est pas assez heureux pour plaire à tout le monde ; au contraire le nombre de ceux à qui il déplaît, est bien plus grand que le nombre de ceux à qui il plaît. M. de la Mothe le Vayer, de l’Académie Françoise, a dit que les peuples avoient adoré le soleil à cause de sa benéficence. Bénéficence s’est établi dans les pays étrangers. On le trouve dans l’Oraison funèbre de la Princesse d’Orange par Labadie, & dans plusieurs autres écrits de gens qui se piquent de parler le trançois. ☞ Il n’a pas réussi chez nous ; mais nous avons reçu bienfaisance qui signifie la même chose.

☞ BENÉFICIABLE. adj. dont on peut retirer du bénéfice. Il se dit ordinairement d’une mine. On dit qu’une mine est bénéficiable, lorsqu’on veut dire qu’elle peut être exploitée avec profit, qu’on en peut tirer du bénéfice.

BÉNÉFICIAIRE. adj. m. & f. Hérétier qui a obtenu des Lettres de bénéfice d’inventaire. Beneficiarius. Un héritier pur & simple n’exclut point le bénéficiaire en ligne directe. Les deux frères étoient héritiers bénéficiaires, & créanciers de leur père. Guillet de Blaru.

☞ BÉNÉFICIAIRES, ou BÉNÉFICIERS. Milites Beneficiarii. On appeloit ainsi dans les troupes Romaines ceux à qui l’on donnoit pour récompense de leurs services une partie des terres conquises, qu’on appeloit bénéfice, beneficium ; parce que c’étoit un pur bienfait, une libéralité du Prince. Voyez ci-dessus au mot Bénéfice.

BÉNÉFICIATURE. s. f. Terme de Jurisprudence Canonique, sorte de bénéfice. On appelle ainsi les bénéfices de Chantres ou Vicaires Choristes Chapelains : Non tam beneficia dicuntur, quàm officia, seu potiùs onera. Ces bénéficiatures ne sont pas de véritables bénéfices, & l’on doit regarder ceux qui en sont revêtus plutôt comme des Chantres gagés, que comme de vrais bénéficiers. Elles ne peuvent se résigner, & leurs possesseurs peuvent être destitués par le Chapitre en cas d’absence de deux mois, sans qu’il soit nécessaire de faire précéder aucune monition canonique ; monitions sans lesquelles, suivant le droit commun, on ne peut priver un Bénéficier de son bénéfice. Ce sont donc plutôt des places destinées à des Prêtres qui sont chargés de rendre un service actuel à l’Eglise. Procès verb. de l’Assemblée du Clergé de 1726. On les appelle aussi Bénéfices-serfs.

BÉNÉFICIER. s. m. Celui qui possede un ou plusieurs bénéfices. Beneficia Ecclesiastico præditus. On distingue les Bénéficiers du Royaume payans décimes, d’avec ceux qui n’en payent point, qui n’ont que de simples administrations. Le Bénéficier n’est pas propriétaire des biens de l’Eglise ; il n’en a que l’administration, dont néanmoins il ne rend compte qu’à Dieu. Cependant à l’égard des hommes, il est tenu des réparations, des décimes, & des droits attribués aux Evêques. Fleur. Un Bénéficier qui a assisté à un jugement de mort, devient irrégulier, & privable de son bénéfice. De Lange. Le Bénéficier condamné à mort ne peut résigner pendant l’appel, son bénéfice est vacant de plein droit. Id. Par l’art. 14 de l’Ordonn. de 1667 les Bénéficiers mineurs de 25 ans peuvent agir, & sont réputés majeurs, pour ce qui concerne les bénéfices dont ils sont pourvus.

BÉNÉFICIER. v. n. Terme usité parmi les ouvriers qui travaillent aux mines d’or, d’argent & d’autres métaux. Il se dit du plus ou du moins de facilité qu’on a à tirer le métal du minéral ou pierre métallique. ☞ Bénéficier dans l’exploitation d’une mine, c’est l’exploiter avec bénéfice, avec profit.

BÉNÉFICIÈRE. s. f. Fille consacrée à Dieu, qui est pourvue d’une prébende, d’un bénéfice, comme les Chanoinesses. Beneficiaria. Ce mot n’est point dans l’usage ordinaire. Il se trouve cependant en quelques livres. Il y a des Auteurs, du nombre desquels est le P. Thomassin, qui ont regardé les Béguines comme des espèces de Chanoinesses, ou bénéficières. P. Hélyot. T. VIII, pag. 2.

BÉNÉFIQUE. adj. m. & f. Terme d’Astrologie, qui se dit des astres auxquels on attribue des influences favorables. Beneficus. Jupiter & Venus sont des Planètes bénéfiques, c’est-à-dire, bienfaisantes.

BÉNEISON, ou BÉNEIÇON. s. f. Vieux mot. Bénédiction. On a dit aussi, bénoyer, pour bénir.

BENÊT. adj. souvent employé substantivement. Niais, nigaut, qui n’a point vû le monde. Insulsus, stolidus. Molière a dit, un grand benais de fils aussi sot que son père. Mais l’usage est pour benêt. C’est un benêt, un franc benêt.

Du Cange dérive ce mot de bonifacies, qui signifie bon enfant. Quelques-uns disent encore Boniface en la même signification.

Je viens pour offrir au jour de votre fête,
De ma Philosophie un hommage nouveau :
Présenté par moi-même, il sera plus honnête,
Que par certain benêt qui s’est mis dans la tête
De faire de son chef cet hommage si beau.

BENETIER, Voyez Bénitier.

BÉNÉVENT, ville archiépiscopale du royaume de Naples, dans la Principauté citérieure, au confluent, du Sabato, & du Calore. Bénévent a titre de Duché. Bénévent fut nommé d’abord Maleventum, si l’on en croit Pline, Liv. III, c. 11 ; & si l’on en croit Procope, ce fut à cause des vents malins qui y soufflent. D’autres le tirent de malus eventus, mauvais événement, & disent qu’il lui fut donné à cause de la défaite des Samnites, qui perdirent là auprès plus de 30000 hommes. Mais Vigenère, Annot sur Tite-Live, Tome I, pag. 1757, remarque fort bien que Tite-live dit qu’elle s’appeloit dès-auparavant Malevent ; & il ajoute que plutôt les Romains à raison de leur heureux succès lui auroient donné le nom de Bénévent. Quoi qu’il en soit, elle changea dans la suite ce nom de Malevent en celui de Bénévent. Beneventum. Festus dit que ce fut lorsqu’on y conduisit une colonie, afin que ce nom fût d’un meilleur augure que celui qu’elle avoit, parce qu’auparavant les Grecs qui l’habitoient, l’appeloient Μαλοίτιον, apparemment de μάλος, qui signifie, pernicieux. Ces mots de Festus confirment l’étimologie de Bonus eventus, ou Bene eveniat, ou Bene ventum, qui est pour marquer l’heureuse arrivée de la colonie. La première colonie romaine fut menée à Bénévent, l’an de Rome 485, Paterc. L. I. Elle fut ensuite renouvelée par Auguste, & encore depuis par Néron, & appelée Concorde, & son territoire fut assigné aux Vétérans, avec celui de Claudium. Frontin. Une ancienne inscription porte IMP. CÆSARI AUGUSTO ET COLONIAI BENEVENTANAI. Voyez Pline, Liv. III. c. ii. Strabon, Etienne de Byzance, & Vigenère cité.

Quelques-uns disent que c’étoit une ville des Samnites, & d’autres des Hirpiniens. Solin veut que Bénévent ait été bâti par Diomède ; & Pline que ce fut par les Hirpiniens ; d’autres par les Sabelliens, & qu’il fut seulement réparé par Diomène. Voyez sur cette Ville le P. Cantel, Hist. des Métrop. pag. 409. Il y a une Chronologie des Evêques & Archevêques, & du Chapitre de Bénévent, par Mario de Vipera, en latin, à Naples 1656, in-4o.

☞ BÉNÉVENT. (Duché de) Beneventanus ducatus. État souverain en Italie, du temps des Lombards qui le formèrent. Il renfermoit la Campanie, le Samnius, L’Apouille, la Lucanie & une bonne partie du pays des Bruliens. Il fut éteint en 851

Bénévent, ou Bènavente. Petite ville d’Espagne, au royaume de Léon, dans la province de Campos, sur la rivière d’Ezla.

Bénévent, ou Bénévente, ville de l’Estramadure, de Portugal sur le Tage, vis-à-vis d’Alanguer.

BÉNEVENTAIN, AINE, ou BÉNÉVENTIN, INE. s. m. & f. Qui est de la ville ou du duché de Bénévent. Beneventanus. Pierre Bénéventain, ou de Bénévent, Secrétaire ou Notaire d’Innocent III. est un Collecteur des Decrétales. Les deux Orbilius excellens Grammairiens, & Odofredus Denarius, Professeur du Droit à Boulogne vers l’an 1200, étoient Bénéventins.

BÉNÉVISER. v. a. Vieux terme de Coutume. Il signifie Fixer, abonner, & dans le Lyonnois une dixme bénévisée, un service bénévisé, ne sont autre chose qu’une dixme & un service abournés, ou abonnés. Clientelaria jura certo pretio vendere, ou mancipare. On dit aussi abénéviser dans le même sens. De Laurière.

☞ BÉNÉVOLE. s. m. En droit ecclésiastique, est un acte par lequel un Supérieur accorde une place monacale dans sa maison à un Religieux d’un autre ordre qui est dans le dessein de s’y faire transférer. Il doit avoir ce bénévol, pour être en état d’obtenir le bref de translation, de peur qu’il ne se trouve sans cloître & sans demeure fixe.

BÉNÉVOLE. adj. de t. g. Bienveillant, favorablement disposé. Il ne se dit qu’en badinant dans ces phrases. Lecteur bénévole, Auditeur bénévole, Spectateur bénévole. Que je suis heureux, dit le Poëte Nugnez, d’avoir été sifflé à double carillon ! Si le Public plus bénévole m’eût honoré de ses applaudissemens, à quoi cela m’auroit-il mené ? à rien. Je n’aurois tiré de mon travail, qu’une somme allez modique, au lieu que les sifflets m’ont mis tout d’un coup à mon aise pour le reste de mes jours. Le Sage.

Quoi qu’ordonne le fort
Au châtel enchanté vers six heures je vole,
Et vous m’aurez vif ou mort
Pour spectateur bénévole. L’Ab. de Chaulieu.

Voyez Malevole.

BÉNEURETÉ. s. f. Vieux mot. Bonheur. On a dit aussi Béneuré & Béneurté, pour Bienheureux.

BÉNÉZET. s. m. Nom d’homme. Benedictus. S. Bénézet étoit un simple Pasteur, qui fut envoyé de Dieu pour bâtir un pont sur le Rhône, à Avignon, & fut fondateur des Religieux Pontifs, ou faiseurs de pont. Il commença ce pont en 1176, & fut 12 ans à le bâtir. Il y a eu 18 arches. Il est aujourd’hui presque tout à bas. Sa vie a été écrite par Magne Agricole, & imprimée à Aix en 1708. Voyez encore Bouche, Hist. de Prov. T. II. p. 162. Ce nom s’est formé de Benedictus. On a fait d’abord Bénédet : les Italiens & nos Provinces voisines d’Italie disent Benedetto, puis on a changé le d en z, ce qui est fort ordinaire, sur-tout dans les Provinces d’où étoit S. Bénézet, où il est plus connu, d’où nous vient ce nom. C’est ainsi que de Baudelius on a fait en Languedoc Bauzile, en Auvergne, Bauzire, en Rouergue Bauzely, de Benitti, Benizzi, & de Quinidius, Quiniz, &c. M. Baillet prétend néanmoins que Bénézet est un diminutif, comme qui auroit dit Petit Benoît, à cause de son âge & de sa taille. Quoi qu’il en soit, puisque l’usage l’a voulu, il faut dire Bénézet, & non pas Bénédict, ni Bénédet, comme M. Baillet a fait d’abord. Bénédict n’est pas françois, & Bénédet est appliqué par l’usage à un autre Saint.

BENFELD. Ville de France, en Alsace, Benefeldia, sur la rivière de l’Ill, à trois lieues de Strasbourg.

BENGALE. La ville de Bengale, Bengala, est dans l’Inde, sur la rivière de Colmin, selon quelques Géographes, ou sur celle de Caor, selon d’autres, vis-à-vis de Chatigan. La plupart des Géographes modernes prétendent que Bengale n’est autre chose que Chatigan, à laquelle on a mal à-propos donné le nom du Royaume dans lequel elle est ; mais les cartes marines des Hollandois, qui fréquentent beaucoup ces pays-là, distinguent Chatigan & Bengale. Maty. Bengale est à 122° 46′ 18″, de longitude, & à 21° 56′ 0″ de latitude nord.

Le Royaume de Bengale, Bengalæ regnum, est un grand pays d’Asie, qui a eu autrefois les Rois particuliers, mais qui dépend aujourd’hui du Mogol. Le Gange le coupe presque par le milieu. Le Golfe de Bengale, en latin, Bengalæ sinus, sinus Gangeticus : c’est la partie de l’Océan Indien, qui est entre les deux presqu’îles de l’Inde, & s’étend jusqu’aux Îles de Sumatra & de Céilan au midi. Maty.

☞ BENGALI. s. m. Plante du Brésil dont les feuilles ont la couleur & l’odeur des feuilles de choux : le fruit est gros comme une pomme, d’un goût agréable, mais dangereux, parce qu’il est trop froid.

BENGE, ou BENGHE. Voyez Bangue.

BENGI-EIRI. s. m. Espèce de ricin Indien toujours vert, qui croît dans le Malabar. Ses feuilles réduites en poudre, & répandues sur les ulcères, emportent les chairs fongueuses & luxuriantes. Dict. de James.

☞ BENGUELA, ou BENGUELE. Royaume dans la partie occidentale de l’Afrique, avec une capitale de même nom, sur l’Océan ou mer de Congo, avec un bon port. Les Hollandois en sont maîtres.

☞ BENI-ABDALA, Ville d’Afrique, dans la province d’Alger, ainsi nommée d’un peuple qui s’y est habitué, & se nommoit autrefois Silsi.

BENJAMIN. s. m. Nom d’homme. Benjaminus. Le premier qui a porté ce nom, est Benjamin fils de Jacob, & de Rachel. Sa mère l’avoit appelé Bénoni, mais son père lui donna le nom de Benjamin. Ce mot, suivant l’étymologie, veut dire, enfant de la droite ; c’est-à dire, enfant très-cher. D’autres veulent qu’il signifie enfant du Midi, parce que Benjamin naquit dans un pays qui est plus au Midi, que celui où ses frères étoient nés. D’autres enfin prétendent que ce mot veut dire enfans des jours ; c’est-à-dire, enfant né durant la vieillesse de son père, ou lorsque son père étoit déjà avancé en âge. Ceux qui sont pour cette dernière étymologie, avouent qu’elle n’est point hébraïque, mais chaldaïque ; & ils disent que Jacob, qui avoit parlé long-temps la langue chaldaïque en Mésopotamie, donna à son fils Benjamin un nom en cette langue. La peine que Jacob eut à souffrir que Benjamin s’éloignât de lui, & qu’il allât en Egypte avec ses frères, marque que ce Patriarche aimoit plus Benjamin que ses autres enfans. C’est par allusion à cet amour particulier qu’il lui portoit, que nous appelons Benjamin un fils que son père ou sa mère aiment plus que leurs autres enfans. Celui-là est le Benjamin du père, & celui-ci le Benjamin de la mère. Philippe-Auguste fut bien aise de donner à Henri II Roi d’Angleterre, la mortification de voir à la tête des Conjurés son fils Jean, dont il faisoit son Benjamin. Larrey.

Benjamin. Nom d’une des douze Tribus d’Israël composée des descendans de Benjamin, le dernier des enfans de Jacob. Benjamini Tribus, ou Benjamina, Benjaminitica Tribus. La Tribu de Benjamin étoit entre celle de Juda au midi, & celle d’Ephraïm au septentrion, & le Jourdain au levant. Voyez le livre de Josué, C. XVIII, v. 11, & suiv.

Les enfant de Benjamin, en style de l’Ecriture, sont aussi la Tribu, ou les descendans de Benjamin. Les enfans de Benjamin se rallièrent auprès d’Abner, Hc ayant fait un gros, demeurèrent sur le sommet d’un côteau. Sacy. 2 des Rois, C. II, v. 25.

Benjamin. Terme de Fleuriste. C’est un œillet incarnat clair sur un fin blanc, mais dont les panaches sont confus. Sa plante est assez robuste, mais tardive à porter fleur. Le Benjamin ne casse pas, si on lui laisse quatre à cinq boutons. Cult. des Fleurs.

BENJANS. s. m. pl. Sorte d’Indiens répandus dans toute l’Asie, par les mains desquels passe presque tout le commerce que les Européens y font. Voyez Banianes.

☞ BENI AKAX, ou BENI-RASID. Beniaraxa. Contrée d’Afrique, ou état particulier du royaume de Telefin, faisant partie de celui d’Alger, autour de la rivière de Mina.

Béni arax, dans la montagne, à vingt lieues d’Oran, en est la capitale.

BENIBEL. s. m. Terme de Philosophie hermétique, qui signifie le mercure hermétique.

☞ BENIBESSERI, ou BENIBESSERA. Grand pays d’Afrique, dans la Lybie, ou dans la contrée de Segelmesse, qui est dans le Biledulgerid.

BÉNIÇON. Vieux mot qui signifie épousailles, de benedictio, comme maudiçon de maledictio, cuiçon de coctio, façon de factio, leçon de lectio. Men.

BÉNIGNE. s. m. Benignus. Nom propre d’homme. S. Benigne, Apôtre de Bourgogne, & Martyr, y fut envoyé, selon la tradition du pays, par S. Polycarpe. Bénigne établi à la Cour dégénéra-t-il de lui-même ? Ignora-t-il ses amis ? P. de la Rue, dans l’Oraison Funèbre de M. Jacques-Bénigne Bossuet.

BÉNIGNEMENT. adv. D’une manière bénigne, douce, humaine. Benignè, humaniter. Il a été reçu bénignement de son Prince. Rien n’est plus méprisable que la sotte patience d’un mari qui souffre bénignement les infidélités de sa femme. S. Evr.

☞ BÉNIGNITÉ. s. f. Benignitas. C’est une qualité qui affecte proprement la volonté dans l’ame, par raport aux biens & aux plaisirs qu’on peut faire aux autres ; ce qu’il y a de plus éloigné d’elle est la malignité ou le secret plaisir de nuire. M. l’Abbé Girard. Alexandre reçut avec bénignité la mère, la femme & ses filles de Darius.

☞ Il se dit aussi en parlant des astres. Jupiter & Venus sont les planètes qui ont le plus de bénignité.

☞ BENI-HULUD. Ville de la province de Chaüs, en Afrique. C’étoit autrefois Benta.

☞ BENIN, BÉNIGNE. adj. Qui a de l’inclination ou de la disposition à faire du bien. Benignus. Ce mot se dit principalement des remèdes & des influences célestes. Un remède benin est celui qui purge doucement & sans tranchées. Les astres benins ont favorisé son voyage. On le dit aussi des Princes, mais rarement des particuliers, excepté dans un sens ironique, lorsqu’ils souffrent des injures avec bassesse. Molière a dit, en parlant des maris de Paris : les maris sont ici les plus benins du monde. Voyez M. l’Abbé Girard. Syn. Voyez aussi Doux, Humain.

Benin, ou Benim. Ville, rivière & Royaume d’Afrique, dans la Guinée.

BENINGANIO. s. m. Fruit qui croît dans la baie de S. Augustin, de la grosseur du limon, rouge au-dehors, & bienfaisant à l’estomac. Dict. de James.

BENJOIN. s. m. Sorte de résine excellente, qu’on apporte du royaume de Lao, & d’autres pays des Indes orientales. Benzuinum. On la tire par incision d’un arbre qui est beau & très-grand, dont les feuilles ressemblent à celles de citronnier, & qui, selon Dapper, s’appelle fatra. Elle est de couleur jaune, d’une odeur fort agréable, & facile à fondre. Il y en a de trois sortes. La première s’appelle amygdaloïdes, parce qu’elle est tachetée de plusieurs marques blanches, qui ressemblent à des amandes rompues : elle vient de Siam. La seconde est noire & fort odoriférante, & coule des jeunes arbres : elle nous vient de Sumatra. On l’appelle benjoin de boninas. La troisième est aussi noire, mais de moindre odeur. On la cueille dans les îles de Java & de Sumatra. Le benjoin est différent de la gomme de Laser ou assa fœtida. Il l’est aussi de la mirrhe.

M. d’Herbelot, au mot Ban, rapporte que quelques-uns disent que le Benjoin que les Persans nomment bassam-pieh, huile ou graille de baume, se tire du fruit d’un arbre appelé ban, semblable au tamarin, & qui croit en abondance dans l’Iémen, ou Arabie heureuse, & particulièrement au terroir de Mahara ; & il dit au mot hassalban, que les Turcs appellent le benjoin, hassalban, mot dérivé ou corrompu de celui de ban. Chorier dit, dans son Histoire de Dauphiné, p. 58, que les mélèses, qui font fréquens dans les Alpes aux environs de Briançon, produisent une espèce de résine si excellente, qu’on ne lui refuse pas communément le nom de térébenthine & de benjoin.

Nos habitans de l’île Bourbon nous envoient une résine odorante, qu’ils qualifient de benjoin. Elle a quelque chose à la vérité d’aussi suave que le benjoin, lorsqu’on l’écrase entre les doigts, & qu’on la brûle : cependant comme à la vue elle paroît en être différente, il y a lieu de croire que ce n’est pas le même arbre qui la porte : quoi qu’il en soit, ele a les deux qualités du benjoin, & peut être substituée à cette drogue si chère & si nécessaire dans la composition des parfums, des baumes, des cérats, des onguents, & des emplâtres. Si l’on envoie de cette colonie des branches de l’arbre qui donne cette résine, garnies de feuilles & de fruits, une description de la manière dont on retire cette résine de la partie de l’arbre qui la fournit, & les usages qu’on en fait dans le pays, cela pourra nous conduire à la connoissance de l’arbre du vrai benjoin, dont l’origine est encore ignorée. M. De Jussieu, Mem. Mss. Le benjoin commun est ordinairement fort brun : le meilleur est celui qui est perlé, plein de grosses larmes blanches, clair, luisant, ayant l’odeur bien forte & bien net : il ressemble à des amandes, qui seroient confites dans du miel. Barbe.

☞ BÉNIR. v. a. En général, c’est souhaiter quelque chose d’heureux. Fausta precari. Dans ce sens on le dit des vœux que les pères font en faveur de leurs enfans. Isaac bénit Jacob au lieu de son frère Esaü. Noë bénit Sem & Japhet, & maudit Cham.

☞ On le dit de même des puissances temporelles, des, bienfaiteurs, & même des choses inanimées. Les Princes bienfaisans sont bénits de leurs peuples. Bénissons le jour que nous commençâmes à nous connoître.

Bénir, se dit aussi des faveurs, des grâces que le Ciel nous accorde. Fortunare, beneficiis cumulare. Dieu a bénit les armes du Roi, & lui a fait obtenir la victoire. Dieu bénit le travail des gens de bien.

Bénir, signifie aussi louer Dieu, le glorifier, le remercier de les grâces. Deum laudare, benedicere. Les trois enfans bénissoient Dieu dans la fournaise. Job dans toutes ses afflictions disoit seulement, Dieu soit béni. Que la terre bénisse le Seigneur, & qu’elle célèbre éternellement ses louanges. P. R. Il est aisé de louer Dieu & de le bénir, quand il nous fait riches, & qu’il ne nous laisse manquer de rien. Flech. Voyez Bénédiction.

Bénir, qui est si souvent dans le Nouveau Testament, signifioit chez les Juifs, prononcer une certaine formule de prière sur quelque chose. Ils ont dans leurs Rituels un grand nombre de ces sortes de prières ou bénédictions. Ils en ont de différentes pour diverses choses, croyant que c’est un péché d’ingratitude de jouir ou de se servir de quoi que ce soit au monde, sans premièrement reconnoître par quelques paroles de louange ou de bénédiction, qu’on le tient de Dieu, qui est le maître de tout. Ils sont obligés de dire au moins cent bénédictions par jour, & la plupart les récitent le matin. Consultez Léon de Modène dans son Traité des cérémonies des Juifs. part. I, Chap. IX.

Bénir, est quelquefois dans le Nouveau Testament la même chose que faire des actions de grâces, ensorte que ces deux mots s’y prennent l’un pour l’autre au Ch. 26 de S. Matthieu, v. 26, où il dit que Jésus-Christ prit le pain & le bénit : on lit dans plusieurs exemplaires grecs, fit des actions de grâces, & c’est la même chose quant au sens, parce que la prière de bénédiction ou consécration, s’appelle aussi action de graces. C’est en ce sens que S. Paul, dans la première Epître aux Corinthiens, ch. 10, où il passe de la liberté que les Chrétiens avoient de manger de tout, dit v. 30 : Si je mange avec actions de grâces, pourquoi serai-je accusé d’impiété pour une chose dont je fais des actions de grâces ? Les Chrétiens aussi bien que les Juifs, ne buvoient ni ne mangeoient jamais sans faire la prière, qui s’appeloit action de grâces, ou bénédiction. Jésus-Christ a fait exactement cette bénédiction, comme quand il bénit les cinq pains dans le désert, benedixit illis.

Bénir, selon plusieurs Interprètes, se prend dans l’Ecriture pour maudire, ou pour injurier, calomnier, parler mal de quelqu’un. Il y a trois endroits dans lesquels ils y donnent ce sens. Job I, 5, 11 & 3, Liv. des Lois XXI, 10. Quelques-uns disent que c’est une ironie ; d’autres une antiphrase. Ce n’est pas le seul verbe qui ait à la troisième conjugaison un sens contraire à celui des précédentes, comme l’a remarqué Codute sur Job, I, 5. Hottinger dans son Héxaméron & Drusius, Observ. XVI, 5. D’autres disent que les Hébreux avoient tant d’horreur du blasphème, (car c’est toujours de Dieu que bénir se prend en ce sens,) qu’ils ne l’appeloient point par ce nom, mais d’un nom tout contraire. Merccrus, Casaubon & Cocq, trouvent des vestiges du même usage dans les autres langues. Les Latins disoient rectè pour nihil, bona fortuna pour nemo, sacrum pour exécrable. D’autres croient que bénir en ces endroits signifie dire adieu, parce qu’en prenant congé de quelqu’un, on le bénissoit, & de même que nous avons transporté le terme de dire adieu à la signification de quitter, abandonner, renoncer, parce qu’on dit adieu en quittant les gens. Les Hébreux l’avoient fait de ברך, bénir. Ce sont les deux interprétations les plus raisonnables.

Celui qui bénit parmi les Juifs le Pain & le Vin, est ordinairement la personne la plus qualifiée de la compagnie. Notre Seigneur fit la cérémonie de la Pâque avec ses Disciples, en qualité de Maître & de Docteur. Saint Luc, qui a rapporté cette Histoire avec plus d’exactitude que saint Matthieu & saint Marc, fait mention de deux coupes, sur lesquelles Jésus-Christ prononça la bénédiction. En effet, quand les Juifs font encore aujourd’hui une espèce de Pâque, ils commencent d’abord par bénir la coupe qu’ils remplissent de vin, & ils appellent cette première bénédiction, la bénédiction de la coupe du manger. Ils prennent quatre coupes durant tout ce repas ; mais ils ne bénissent que la première & la dernière, au moins est-ce l’usage de presque tous les Juifs, à la réserve des Tudesques, qui bénissent toutes les coupes. Consultez les Rituels des Juifs.

Bénir, se dit aussi des cérémonies ecclésiastiques, & des prières que font les Prélats & les Prêtres sur les choses qu’ils consacrent au service & au culte de Dieu. Ainsi, on dit, bénir une Eglise, des Fonts, une pierre d’Autel, un Calice, un Amict, une Cloche. Consecrare. On dit aussi bénir un cierge, des drapeaux. Bénir un Abbé Régulier, une Abbesse. Bénir le lit des nouveaux mariés.

On appelle aussi, bénir la table, faire une prière avant le repas, qu’on appelle, Benedicite, avec un signe de croix sur les viandes. Mensam consecrare, consuetas ante cibum preces recitare.

Bénir se dit aussi en ces phrases proverbiales. Dieu vous bénisse. Adsit tibi Deus : ce qui se dit tant à ceux qui éternuent, qu’aux pauvres qu’on éconduit, & à ceux d’avec qui on sort mal content. On dit aussi, Dieu bénisse Chrétienté, Dieu bénisse qui a été cause de ce procès, pour faire une honnête imprécation. Dieu soit béni.

BÉNI, IE. part. & adj. Cette pieuse famille est bénie de Dieu. Fortunatus, beneficiis cumulatus. Autrefois on disoit toujours bénit : depuis, l’usage a adouci ce participe pour les choses ordinaires ; mais il est demeuré dans les choses de la Religion pour conserver tous les termes consacrés & accoutumés. Ainsi on dit à la Sainte Vierge : Tu es bénite entre toutes les femmes. Vaug. Chap.

☞ BENI SABIH ou MUCUBA. Ville d’Afrique, dans le Royaume de Darha, sur le bord du fleuve Parha.

☞ BENI SUAYD. Ville d’Egypte, sur le bord du Nil, à vingt lieues du Caire.

BENISTRE. v. a. Vieux mot. Bénir. Gloss sur Marot.

BENIT, ITE. adj. Qui a été bénit, consacré à Dieu. Une Abbesse bénite, de l’eau bénite, un pain bénit, des grains bénits.

Benit se dit encore en ces phrases proverbiales. Eau bénite de Cour, ce sont de grandes caresses, de belles protestations d’amitié de gens de Cour, qui sont simulées, & qui n’ont aucun effet. On dit que c’est pain bénit, que d’attraper un homme qui fait le fin, ou quand il arrive quelque infortune à un homme qui l’a bien mérité. C’est pain bénit, de vous montrer à tous tant que vous êtes de pédans, l’impertinence de vos citations, puisque vous en voulez tant faire. Mascur. C’est-à-dire, c’est un avantage, un plaisir, une joie. On dit autrement, c’est bien employé. On appelle aussi les Bédeaux des Paroisses, Ventres bénits, parce qu’ils vivent le plus souvent de pain bénit. On dit qu’un homme est réduit à la chandelle bénite, lorsqu’il est à l’extrémité, qu’il a reçu l’Extrême-Onction. On dit aussi d’un homme qui ne vient point après avoir été prié plusieurs fois de venir, qu’il faut avoir la croix & l’eau bénite pour l’avoir. On dit aussi changement de corbillon, appétit de pain bénit ; pour dire, que la diversité plaît en toutes choses.

BENIT-VŒU. Ce n’est point le nom d’un saint. C’est un nom de lieu. Adelberon II, Evêque de Mets, ayant fait bâtir en cette ville un Monastère proche celui de saint Pierre, pour y mettre une partie des Religieuses, & servir de Noviciat à celles qui y voudroient faire profession, y fit bâtir un Oratoire qu’il dédia à la sainte Vierge, & y fit mettre un Crucifix devant lequel les Novices faisoient leurs vœux solennels ; ce qui fit donner le nom de Benit-vœu à la rue où ce Monastère étoit situé : les gens simples appelèrent ce Crucifix Saint Benit-vœu, & ce nom lui est resté jusquà présent. P. Hélyot, T. VI, C. 52.

☞ BENI-TEUDI. Ville d’Afrique, dans la Province de Habad, royaume de Fez, sur le bord de la rivière d’Erguil.

BÉNITIER, ou BENETIER. s. m. Le premier est le meilleur. M. Ménage est pour benetier, mais il avoue que l’usage est pour bénitier. On disoit autrefois benoistier, & on prononçoit benaitier. Voyez Benoitier.

Un bénitier est un vaisseau où l’on met de l’eau bénite, & qui est placé à l’entrée des Eglises, ou attaché auprès d’un lit.

☞ Il y a aussi dans l’Eglise des Bénitiers portatifs. Aquæ sacra vas.

Mais la fièvre demain se rendant la plus forte,
Un Bénitier aux pieds, va l’étendre à la porte. Boil.

☞ Par rapport à l’Architecture, le bénitier est un vase rond, isolé, porté sur une espèce de balustre, ou une coquille sur quelque console, & attachée à un pilier à l’entrée d’une Eglise.

BENNE. s. f. Petit vaisseau qui sert à charger les bêtes de somme pour transporter des grains, de la chaux, la vendange, & autres choses. Il sert aussi de mesure dans la plupart des Provinces, & tient environ deux minots de Paris.

Ce mot vient de benna, qui étoit une espèce de charriot ou de tombereau des anciens Gaulois dont parle Festus, qu’on nommoit aussi benel, ou venel, donc Monstrelet fait aussi mention. Goropius dérive ce mot de benne, qui a signifié chez les Allemands panier plat, ou une corbeille. Et même Cluvier, Germ. ant. Lib.I. p. 70, remarque qu’encore à présent on appelle en Allemagne benne, une charrette à deux roues. Chorier dit qu’en Dauphiné on dit benna, parmi le bas peuple, & bannante parmi ceux qui parlent plus purement, & prétend que c’est un ancien mot Allobrogique. Voyez Banne.

BENNON. s. m. Nom d’homme. Benedictus Bennon, que nous appellerions Benoît en notre langue, si l’on en croit les Allemands, étoit fils d’un Gentil’homme de Saxe. Il vint au monde près de Goflar, l’an 1010. Bail.

BENOÎT, OÎTE, ad. Vieux mot, qui signifioit autrefois benit. Sacer. Benoît soit Dieu. Le benoît Saint-Esprit. L’eau benoîte. La benoîte Vierge Marie, & tous les benoîts Saints & Saintes de Paradis. Il n’est plus en usage, à moins qu’on ne l’emploie en riant, comme dans cet exemple :

Caillou, noble sans doute & de racine ancienne,
Descendant du Caillou du Benoît Saint Etienne. Sar.

BENOIT est aussi un nom d’homme. Benedictus. Saint Benoît est le Fondateur de l’Ordre des Bénédictins. L’Ordre Militaire de saint Benoît d’Avis. Voyez Avis. Les Célestins sont de l’Ordre de saint Benoît. Beurrier. Un nourrisson du grand saint Benoît. Patru. Pourvu que j’entre dans le sentiment de saint Benoît, cela me suffit. De Rancé. Quatorze Papes & deux Antipapes ont porté le nom de Benoît.

BENOÎTE. s. f. Nom de femme. Benedicta. On fait la fête de sainte Benoîte d’Origny, Martyre, le 8e Octobre. Aux Hospitalières de saint Joseph de Moulins, on honore sous le nom de sainte Benoîte, un corps saint apporté des Cimetières de Rome, où on l’avoit nommé Euphémie ; mais parce qu’il y avoit déjà dans la même ville un corps saint honoré sous ce nom, on a changé celui d’Euphémie en Benoîte, qui est la même chose. Chast.

BENOÎTE. s. f. ou GALLIOTE. Caryophyllata. Plante vivace, ainsi appelée à cause de ses racines qui ont une odeur & un goût qui approche du clou de girofle. On croit que le nom de Benoîte lui a été donné par rapport à ses propriétés, quasi herba benedicta ; d’autres disent Sanamunda. Sa racine est composée d’un paquet de fibres longues & chevelues à leurs extrémités, d’un goût & d’une odeur aromatique, & qui approche du girofle, sur-tout dans le printemps avant qu’elle pousse sa tige. Du collet de sa racine sortent quelques feuilles tapées contre terre, velues & découpées profondément jusqu’à leurs côtés en plusieurs segmens dentelés, dont celui qui termine chaque côté est plus ample, plus arrondi, crénelé sur ses bords, & souvent échancré légèrement en trois quartiers. D’entre ces feuilles s’élèvent quelques tiges menues, velues, remplies de moele blanche, hautes d’un pied & demi, branchues à leurs extrémités, garnies par intervalles de feuilles alternes ; chaque branche est soutenue par une petite feuille en manière d’aileron, & est terminée par des fleurs jaunes à cinq pétales, dont le calice est découpé en dix parties, cinq grandes, & cinq plus petites, vertes. Plusieurs étamines occupent le milieu de la fleur, dont le pistil fait le centre, & devient un fruit arrondi, composé de plusieurs semences ramassées en tête, & terminées par une barbe crochue avec laquelle elle s’attache aux habits des passans. Outre ces fleurs qui terminent les tiges & les branches, il y en a d’autres qui prennent naissance du côté opposé des feuilles, & qui sont portées sur des pédicules assez longs. La Benoîte croît communément le long des chemins dans les bois. On se sert de ses racines pour arrêter les pertes & pour guérir les fièvres. On met ses feuilles tremper dans le vin pour les obstructions.

La Benoite. Terme de Chimie. C’est l’épithéte que donnent encore à présent les Chimistes à la Pierre Philosophale, qu’ils font tantôt adjectif, tantôt substantif, en la nommant absolument la Benoîte.

BENOITIER. s. m. Vieux mot. Bénitier, vase où l’on met de l’eau bénite. Vas aquæ sacræ.

☞ On disoit aussi Bénoyer pour bénir.

BENS, ou BOUGE, ou la Poire de Légat. Espèce de méchante poire qui se mange au mois d’Août. La Quint.

☞ BENSHEIM. Ville d’Allemagne, dans le Cercle du haut Rhin, dans l’Archevêché de Mayence.

☞ BENTHEIM, ou BENTHEN, (Comté de) petit pays d’Allemagne en Westphalie, qui prend son nom d’un Château bâti sur le sommet d’une montagne.

☞ BENTIVOGLIO. Petite ville d’Italie, dans l’Etat de l’Eglise, à dix milles de Bologne.

BENURÉ. adj. Vieux mot qui signifie heureux.

BEO.

BEORI. s. m. Animal des Indes Occidentales. Il ressemble à un veau. Sa peau est extrêmement dure & épaisse. Il vit d’herbes sauvages.

BÉOTARQUE. s. m. Chef des Béotiens, premier Magistrat des Béotiens. Bæotarcha. Les Béotarques étoient chez les Béotiens, ce que les Archontes étoient chez les Athéniens. Voyez Tite-Live, Liv. XLII. C. 43.

Ce mot est formé de Βοιωτός, Béotien, & ἀρχή, Commandement, Empire.

BÉOTIE. Bœtia. Quelques-uns écrivent Bœtie suivant le mot grec, Βοιωτία, dont la première syllabe qui est la diphthongue oi, a été rendue en latin par œ, Bœotes. C’étoit anciennement une contrée de la Grèce, qui avoit porté auparavant les noms d’Aonie, d’Ogygie, d’Hyantide, de Messapie, de Cadmeïde. Diodore l’appelle Arné. La Béotie, dit Etienne le Géographe, touchoit trois mers ; celle du Péloponèse, la mer de Sicile & la mer Adriatique. Elle s’étendoit depuis le golfe de Zeiton, & le détroit de Négrepont, jusqu’au golfe de Lépante. Elle avoit la Mégaride vers le Midi, l’Attique au Levant, la Phocide avec les Locres, ou Locriens Epinémidiens, au Couchant. On divisoit la méotie en haute & basse. La haute étoit au Midi, & la basse au Septentrion. Aujourd’hui ce pays porte le nom de Siramulipa, & fait une partie de la Livadie. La capitale de Béotie étoit Thèbes, bâtie par Cadmus.

Le Géographe Etienne rapporte plusieurs éymologies de ce nom. Quelques-uns le tiroient de Beotas, que les uns font fils d’Itonus, fils d’Amphictyon, le plus jeune des enfans de Deucalion & de Pyrrha ; & d’autres, fils de Neptune & d’Arne. C’est peut-être par allusion à cette fable, ou à cause de la multitude de leurs côtes & de leurs ports de mer, que l’on voit quelquefois sur leurs médailles un Neptune. Quoi qu’il en soit, les Auteurs dont je parle, prétendent qu’il fut ainsi nommé de βοῦς, bœuf, parce que sa mère le cacha dans du fumier de bœufs quand il fut né, pour en dérober la connoissance à son père. Une seconde étymologie dérive ce nom de βοῦς, bœuf, parce que Cadmus trouva un bœuf qui le conduisit dans l’endroit, où ensuite il bâtit Thèbes. D’autres veulent qu’il ait été donné aux Béotiens à cause de leur esprit pesant.

BÉOTIEN, ENNE. s. m. & f. Nom de peuple, & adjectif, qui se dit de ce qui appartient à ce peuple. Bœotus, Bœotius. Les Béotiens passoient pour avoir l’humeur sauvage, de sorte que pour l’adoucir on eut besoin de joueurs de flûtes, ce qui les rendit depuis affectionnés à cet instrument. T. Corn. Les Béotiens furent d’abord sujets à des Rois. Ils établirent ensuite une sorte de République, dont les Thébains furent ordinairement les Chefs. Id. Etienne dit que les Béotiens l’emportoient sur les autres peuples de la Grèce dans les exercices du corps, ou de la Gymnastique. C’est peut-être ce que marquent sur leurs médailles le bouclier & la massue qu’on y voit souvent, aussi-bien qu’une figure d’homme armé qui tient une pique. On disoit d’étranges choses de la stupidité des Béotiens, témoin le proverbe ; un cochon, un esprit, une oreille de Béotie ; pour signifier un sot & un hébété. Homère traite les Béotiens d’hommes fort épais & fort stupides. Pindare & Plutarque, deux Béotiens qui ne sentent guère le terroir, & qui prouvent bien que l’esprit est de tout pays & de tout sexe, passent condamnation sur la bêtise de leurs compatriotes. Lucien, dans ses Dialogues, fait répondre par une interlocuteur : ce que vous dites là est bien sauvage, & diablement Béotien. Horace dit qu’à juger d’Alexandre par son mauvais goût sur la Poësie, on jugeroit que c’est un franc Béotien. Tourr.

BEQ.

BÉQUE. s. f. Ce mot se trouve dans un voyage pour la partie de l’ancre qui est pointue, & en bec, & qui s’attache au fond à la terre. Rostrum anchoræ. On l’appelle autrement patte. Ce mot se dit apparemment pour bec, & les Mariniers l’ont fait féminin par corruption. Pour surcroît de malheur, la béque de notre ancre rompit, & il étoit à craindre d’aller nous briser sur nos navires, que nous eussions aussi fait périr. Voyage de l’Arab. Heur. p. 208. ☞ Cet Ecrivain ne sera pas pris pour modèle.

BÉQUÉ. Voyez Becqué.

BÉQUÉE. Voyez Béchée, c’est la même chose.

BEQUÊNE. s. f. Sorte de mauvaise poire. La Quint. Quelquefois il dit le béquêne, au masculin, en parlant de toute l’espèce de ce fruit en général.

BÉQUETER. Voyez Becqueter.

☞ BEQUETTE. s. f. pinces ou tenailles à main, diversement façonnées, suivant les différens arts mécaniques où elles sont employées. Cet outil se nomme aussi bec-d’âne & de canne.

BÉQUILLARD. s. m. Mot comique & plaisant, pour signifier un homme qui va avec une béquille. Qui baculo supernè rostrato utitur.

Alors sortit avec grand bruit
Un béquillard de la portière.

BÉQUILLE. s. f. Bâton garni par le bout d’en-haut d’une traverse, propre pour s’appuyer en marchant. Baculum supernè rostratum. Les vieillards, les convalescens sont réduits à se servir de béquilles.

BÉQUILLER. v. n. Ce mot est comique, & signifie, aller avec une béquille. Uti baculo supernè rostrato.

Un béquillard sec & tout gris
Béquilloit de même manière
Que Boyer béquille à Paris.

Béquiller. v. a. Terme de jardinage. Donner un petit labour léger avec la houlette, ou avec la cerfouette. Terram pedo vertere. Béquiller une planche de laitues, une caisse d’arbrisseaux, c’est remuer légèrement la terre, qui paroît battue, en sorte que l’eau dont on les arrose, puisse pénétrer dans le fond, & aller servir de nourriture aux racines. Il est plus d’usage que bêchoter, en sorte que Liger n’a pas même mis celui-ci, comme s’il ne se disoit point, & La Quintinie ne le met que dans béquiller. Voyez Biner. Bêchoter ne se dit que d’un petit labour donné avec la bêche. ☞

BEQUILLON. s. m. Terme de Fauconnerie, qui se dit du bec des menus oiseaux.

Béquillon. Terme de Fleuriste. Petites feuilles arrondies qui forment la peluche de l’Anémone. La peluche de l’Anémone doit être garnie de béquillons. Un béquillon doit être large & arrondi par le bout.

BEQUIN, INE. Voyez Beguin & Beguines.

BER.

BER. s. m. Ber, Acosta. Espèce de pommier ou grand arbre des Indes, chargé de beaucoup de feuilles, de fleurs & de fruits. Ses feuilles ressemblent à celles de pommier, de couleur verte, obscure, blanchâtre par le bas, velues comme celles de la sauge, d’un goût astringent. Ses fleurs sont petites & blanches, à cinq pétales, sans odeur : ses fruits sont semblables aux jujubes, & plus agréables au goût. Cet arbre croît à Malaca, & au Malabar. On le nomme au Malaio. On le voit souvent en été chargé de fourmis ailées, qui font la gomme lacque. Ses feuilles arrêtent le cours de ventre.

BER. Vieux mot qui n’est plus en usage, & qui étoit la même chose que Baron ; de là est venu le Fief de Hautber, qui est cependant moins que Baronnie. Voyez Bouteillier en sa Somme Rurale, & S. Julien, Antiq. des Bourg. Ch. 24 & p. 410.

☞ BERA, en latin Byrrha ou Byrra. Petite rivière du haut Languedoc, qui se jette dans le lac de Sigean entre Perpignan & Narbonne. Charles Martel y remporta une victoire sur les Sarrazins.

☞ BERACA. s. m. Bénédiction que donne parmi les Juifs sur le boire & sur le manger, le plus qualifié de l’assemblée.

BERAM. s. m. Grosse toile toute de fil de coton qui vient des Indes orientales, particulièrement de Surate. Il y a des bérams blancs, unis, & d’autres rayés de couleur. Les blancs sont de neuf aunes à la pièce, sur sept à huit de large, & les rayés sont de douze & demi de long, sur trois quarts de large.

☞ BERANGÉ. Rivière de France, au Languedoc, qui a sa source au dessus de Castries, & se rend dans l’étang de Perols.

☞ BERAR. Berarum regnum. Royaume de l’Indoustan, dans l’Empire du Mogol, dans la partie méridionale.

☞ BERAUN, ou WERAUN. Berauna ou Verona. Ville d’Allemagne, dans le royaume de Bohème, peu distante de Carolstein.

☞ BERBE. s. m. Nom d’une espèce de chat de la Côte d’Or, marqueté comme la civette. Il a le museau plus pointu, & le corps plus petit que les chats ordinaires. Il aime tellement le suc vineux du Palmier, qu’on lui a donné le nom de buveur de vin.

☞ BERBERA. Ville d’Afrique, capitale d’une Province qui porte le même nom, sur la côte des Abissins.

☞ BERBERAC. Ville de France, en Languedoc, sur l’Aude, à quatre lieues de Carcassone.

BERBERIS. s. m. Arbrisseau, Épine-vinette qui porte un petit fruit rouge d’un goût. très-aigu. Syrop de berberis. On croit ce mot arabe, Voyez Épine-vinette. Berberis est dans Nicot.

BERCAIL. s. m. Vieux mot, qui signifioit autrefois bergerie. Ovile. Il n’est en usage qu’en cette phrase figurée : ramener une brebis égarée au bercail ; pour dire, convertir quelqu’un qui s’étoit perverti. Combien de brebis errantes & dispersées, qu’un Pasteur vigilant peut faire rentrer dans le bercail, ou par une douceur salutaire, ou par une discrète sévérité ! Fléch.

BERCE. s. f. Sphondylium. Sa racine est un pivot long, blanchâtre, dont l’écorce est douceâtre, & a quelque acrimonie. De son collet naissent quelques feuilles d’un vert foncé, amples, velues, découpées profondément en plusieurs segmens étroits & refendus, & plus souvent crénelés sur leurs bords. Le segment qui termine sa feuille est ordinairement divisé en trois parties. La tige est environnée dans la naissance par les queues des feuilles du bas : elle est haute de trois pieds, velue, cannelée, creuse, branchue au sortir de terre, & garnie de quelques feuilles moindres que celles qui partent immédiatement de sa racine. L’extrémité de sa tige & de ses branches est couronnée par des ombelles de fleurs blanches fleurdelisées c’est à dire, composées de pétales inégaux, échancrées ordinairement & disposées en fleur de Lis de France, sur l’extrémité d’un embryon qui devient un fruit à deux semences aplaties, ovales, échancrées par le haut, rayées sur le dos, & que l’on dépouille aisément de leur enveloppe. Le nom de spondylium a été donné à cette plante à cause de ses semences, qu’on prétend avoir l’odeur ou la figure d’un insecte appelé Sphondyle. Quelques Auteurs ont recours à d’autres ressemblances.

Les Médecins Allemands emploient les feuilles de berce au lieu de celles d’Acanthe ; c’est pourquoi ils l’ont nommée Acanthus, ou Branca arsina Germanica. On fait en Pologne & en Lithuanie une espèce de Bière avec la semence de berce. Cette sorte de boisson se nomme Parst, & il n’y a, dit-on, que les pauvres gens qui en usent. Les semences de berce sont recommandées pour les vapeurs. Il y a plusieurs espèces de berce ; & dans ce nombre il y en a une qui donne des feuilles plus larges, moins découpées que l’ordinaire qu’on vient de décrire ; la tige de celle-ci est plus haute, les fleurs plus grandes, aussi bien que les semences. Cette espèce est étrangère, & est nommée par les Botanistes Sphondilium majus, sive panax heraclium. On prétend qu’il sort de la racine de cette plante une gomme rousse d’une odeur forte, & d’un goût amer & acre. Cette gomme se nomme communément Opopanax, & par corruption Opoponax.

Berce, s. m. Petit oiseau. Il a un bec fort pointu, & son plumage est de couleur de cendre tirant sur le jaune.. Erithacus. Il vit seul dans les bois: c’est pourquoi Phavorin l’a nommé l’oiseau solitaire. Voy. Gorge rouge.

☞ BERCÉ. Ville des Indes, au royaume de Decan, à trois lieues d’Arecq & de Mirsie.

BERCEAU. s. m. Sorte de petit lit où l’on couche les enfans à la mamelle, & qui est porté sur deux pieds arrondis en forme de croissant, afin qu’on puisse le balancer aisément. Cuna, incunabula.

Ce mot vient de versus & versullus, à vertendo, selon Ménage. C’est pourquoi il soutient qu’on doit écrire berseau avec un s. On disoit autrefois bers au lieu de berceau ; &c on dit encore le bers d’une charrette, pour signifier les ridelles.