Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/741-750

Fascicules du tome 1
pages 731 à 740

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 741 à 750

pages 751 à 760


d’ancienne bannière, à vous sujette… Il vous supplie le faire Banneret & le relever en bannière. Il vous présente son pennon, accompagné de 25 hommes d’armes. Le Roi d’arme bailla un couteau au Duc : le Duc prit autour de sa main la queue du pennon, & de l’autre main coupa cette queue avec le couteau, & ce pennon demeura carré en bannière, qui auparavant étoit étendu en queue venant en pointe. Coquille, Hist. du Nivern. p. 190, 191. La même cérémonie s’observoit en Angleterre. Harris. Apparemment parce que le Conquérant l’y porta.

Les Anciens donnoient le nom général de bannière aux étendards, qu’on nommoit aussi pennons, gonfanon & bassinets, avec cette différence que le gonfanon étoit une bannière d’Eglise, pendant & voltigeante ; au lieu que la bannière étoit carrée, attachée comme les cornettes à une lance à la manière du panneton d’une clef ; & le pennon ou guidon étoit à la longue queue, & l’on ne faisoit que couper cette queue pour faire une bannière d’un pennon. La plûpart des anciens Seigneurs sont représentés dans leurs sceaux avec des bannières à la main, & entroient ainsi dans la lice aux tournois. Il y avoit douze bannières dans ce bataillon : c’est comme l’on parloit alors. (au XIVe siècle.) Douze des principaux Seigneurs faisoient marcher ces douze bannières. Chorier.

Les bannières sont en plusieurs pays des marques de Connétable, comme les Colonnes en Italie ont deux bannières, l’une d’Eglise, l’autre de l’Empire, derrière leur écu. En Allemagne & en Suède plusieurs les portent en cimier, comme font aussi en France le Colonel de l’infanterie, qui porte quatre drapeaux ; & le Général de la cavalerie quatre cornettes. Les Officiers de la Couronne & leurs Lieutenans avoient droit autrefois de porter bannière, & les seuls Seigneurs Bannerest. On donnoit autrefois l’investiture par la bannière, lorsque les Seigneurs se présentoient à genoux devant l’Empereur avec la bannière en main armoyée du blason de leurs armes. L’ancienne bannière de France étoit chargée de fleurs de lis sans nombre. Voyez au mot Banneret la différence des bannières des Barons & de celles des Bannerets.

Les armes en bannière sont des armes carrées. Je n’ai guère vû que les Bretons porter les armes carrées, que nous disons en bannière, pour montrer qu’ils sont descendus de Chevaliers Bannerets. Favyn. Hist. de Navarre, Liv. XI, p. 620. Voyez aussi la suite ; il y a beaucoup de choses sur les anciennes bannières. Aux derniers Chevaliers du S. Esprit faits par notre Roi aux Augustins, entre toutes les armes des Princes & Seigneurs, je n’ai remarqué d’armes en bannière que celles du Maréchal de Biron purement écartelées d’or & de gueules, sans aucune charge, & je crois que la façon de ces armes en bannière est passée d’Angleterre en Bretagne. Id. p. 621.

On dit aussi écu en bannière. Je n’ai vû en tout Paris qu’un écu en bannière, en la rue de Joüi sur une porte. Id.

Bannière de France, ou Pennon royal. C’étoit le drapeau de nos anciens Rois quand ils alloient à la guerre. C’étoit le plus grand étendard & le plus orné de tous. On s’avisa vers l’an 1100 d’attachr ce pennon au haut d’un mât, ou gros arbre planté sur un échafaud, qui posoit sur un charriot tiré par des bœufs couverts de housses de velours, ornées de devises, ou des chifres du Prince règnant. Au pied du gros arbre, un Prêtre de fort grand matin disoit la Messe tous les jours. Dix Chevaliers jour & nuit montoient la garde sur l’échafaud, & autant de trompettes qui étoient au pied du gros arbre ne cessoient de jouer des fanfares, afin d’animer les troupes. Cette embarrassante machine, dont la mode venoit d’Italie, fut en usage en France 120 ou 130 ans. Elle étoit au centre de l’armée. C’est là que se donnoient les plus grands coups pour enlever le pennon royal, ou pour le défendre ; car on n’étoit point censé vainqueur, si on ne s’en rendoit maître, ni vaincu, qu’on ne l’eût perdu. Le Gend. Mœurs & Cout. des Fran. p. 105, 106.

Outre cette bannière, qui étoit proprement la bannière de France, nos Rois faisoient encore porter celle du Saint le plus célébre qu’on réclamait dans leurs Etats. Il n’est mention dans nos Histoires de la première & seconde race que de la chape de S. Martin, qui étoit un voile de taffetas, sur lequel le Saint étoit peint, & qui avoit posé un jour ou deux sur son tombeau. Ce voile étoit gardé avec respect sous une tente. Avant que d’en venir aux mains, on le portoit comme en triomphe autour du camp. Id.

A la chape de S. Martin qui fut en vogue 600 ans, succéda une autre bannière non moins fameuse, appelée l’oriflamme, dont nous parlerons en son lieu. On ne se servoit de ces bannières que dans les grandes expéditions. Les Rois ne faisoient porter qu’un étendard beaucoup moins grand dans les petites guerres, qu’ils eurent 200 ans durant contre les Comtes & les Ducs, & quelquefois contre de simples Gentilshommes.

Bannière. Dans deux ou trois titres de 1451, qui sont des créations de Barons faites par le Duc Pierre de Bretagne, ce mot se trouve synonyme de Seigneurie. Ice-lui nostre dit nepveu & cousin de Derval avons aujourd’hui de nostre pleine puissance, authorité & grâce spéciale, fait, institué, & croyé, faisons, instituons, & croyons par ces présentes, Baron en notre pays & Duché de Bretagne, par raison & à cause de sadite Seigneurie & bannière ancienne de Derval. Voyez l’Hist. de Bretagne, Tom. II, p. 1145, 1146, 1147 & 1148.

Ménage dérive ce mot du latin bandum, & croit qu’on a dit bannière pour bandière. On trouve en effet banderia dans la plus basse latinité pour bannière, étendard. On trouve aussi bannerium, & bandora, dans Anastase. Voyez de Hautesser, Not. in Anastas. p. 116, & les Antiquit. de Bourg. de P. de S. Julien, ch. 26, p. 146. Hotman le dérive de l’allemand bannier ; & Pasquier du vieux mot ban, qui signifie la publication qu’on fait pour obliger les vassaux d’aller à la guerre. Nicot le dérive de ban, aussi allemand, qui signifie héritage, ou champ, parce qu’il n’y avoit que les Seigneurs de fiefs qui portoient bannière. D’autres disent que c’est un vieux mot françois qui signifioit commun. On trouve dans Jean de Mehun, mort est à tous bannière ; pour dire, commune. Borel croit qu’il a été fait par corruption de pannière, dérivé de pannus, parce qu’on les faisoit de drap au commencement ; d’où vient qu’on appeloit, pans, pennons, ou penonceaux, les bannières des Barons & des Capitaines particuliers, qui venoient aussi de pannus, d’où a été fait encore par corruption fanon & gonfanon. Saumaise dit que bandum vient du nom persan ban, parce que l’étendard étoit une bande d’étoffe. D’autres soutiennent que ban étoit un vieux mot cimbrique, qui signifioit bannière ; & Chorier, que banner est un ancien mot allobrogique qui avoit le même sens.

Bannière, est aussi un grand étendard carré qu’on porte à une procession, qui marque de quelle Paroisse elle est, parce qu’elle porte ordinairement l’image de son Patron. Sacrum Vexillum.

Bannière, est aussi une pièce d’étoffe que quelques Tailleurs ménagent & dérobent en coupant un habit.

On dit proverbialement, que les Tailleurs vont les premiers à la procession, car ils portent la bannière. On dit aussi d’un homme qu’on a de la peine à faire venir chez soi, qu’il faut avoir la croix & la bannière pour l’avoir. On dit aussi de ceux à qui on fait quelque belle réception, qu’on va au-devant d’eux avec la crois & la bannière. On dit aussi, cent ans bannière, cent ans civière ; pour dire, qu’avec le temps on décheoit de la plus haute Noblesse.

Bannières. s. f. & pl. Recueil, ou registre pour l’enregistrement de toutes les Ordonnances, & Lettres Patentes adressées au Châtelet, & pour tous les autres actes, dont la mémoire doit être conservée à la postérité. Les bannières sont des registres séparés de celui des audiences. Ils furent commencés en 1461 par Robert d’Estouteville Prévôt de Paris. On les a toujours continués. Ils ont été nommés bannières, du mot ban, publication, & du verbe bannire, publier, parce que ce sont les registres des publications. C’est le Greffier des insinuations qui en est le dépositaire, & qui en délivre les expéditions. Voyez M. De la Mare, Traité de la Police, Liv. I, Tit. XV, ch. 2.

BANNIMENT. s. m. Terme usité au Parlement de Toulouse, pour signifier, saisie. Sans préjudice des bannissemens, c’est-à-dire, des saisies.

BANNIR. v. a. Exiler quelqu’un, le faire sortir d’une Juridiction, d’une Province, d’un Royaume, par sentence ou condamnation de Justice, à perpétuité, ou pour un temps. Aliquem exilio mulctare, afficere, in exilium ejicere. A Rome, dans les premiers temps, on ne pouvoit pas bannir un Citoyen ; mais on lui interdisoit l’usage de l’eau & du feu, afin que se voyant privé de deux élémens si nécessaires à la vie, il fut obligé de se retirer lui-même de la ville pour les aller chercher ailleurs.

Bannir, se dit par extension, pour chasser, éloigner quelqu’un de sa présence. Expellere. Cette fille a banni son amant, elle ne le veut plus voir. ☞ Bannir quelqu’un d’une société, des bonnes compagnies.

On dit aussi, se bannir de la Cour. Secedere ex Aulâ ; se bannir du monde, mundo valedicere ; pour dire, s’en retirer. ☞ Se bannir d’une compagnie, s’abstenir d’y aller.

Bannir, se dit figurément. Eloigner de soi. Expellere, depellere. Il faut bannir le chagrin. Il faut bannir un ingrat de sa mémoire, une pensée criminelle de son esprit. ☞ Bannir toute crainte. Cette fille a banni toute pudeur.

Laissons-les s’applaudir de leur pieuse erreur,
Mais pour nous bannissons une vaine erreur. Boil.

Bannir, en quelques coutumes, signifie publier, & ainsi on dit, que les vendanges ont été bannies, quand on a publié la permission de les faire. Promulgare. On dit en plusieurs lieux, qu’une personne a été bannie, quand on a fait dans l’Eglise la publication des bans de son mariage.

Bannir, au Parlement de Toulouse, signifie saisir.

BANNI, IE. part. Exilio affectus, in exilium pulsus. Il est aussi substantif. Un banni à perpétuité & hors du Royaume ne peut ni succéder, ni recevoir un legs, parce qu’il est mort civilement, & par conséquent il est incapable de tous effets civils ; ensorte même que s’il se marie, ses enfans, quoique légitimes, ne peuvent lui succéder : on leur accorde seulement pour alimens une pension viagere ; mais ils ne sont point régnicoles, ils sont réputés étrangers. Dans la coutume de Bretagne on appelle contrat banni, le contrat qui a été publié en justice, ou en la cour du Seigneur ; & dans la coutume de Normandie on dit, Ost banni ; pour dire, armée convoquée ; ce qui se fait quand les vasseaux sont appelés pour aller en guerre, quand le Prince fait crier & convoquer ceux qui sont tenus de lui faire service en guerre à cause de leurs fiefs.

BANNISSABLE. adj. de tout genre. Qui mérite le bannissement, l’expulsion. Allez, vous êtes un impertinent, mon ami, un homme ignare de toute bonne discipline, bannissable de la République des Lettres. Molière. Mariage forcé. Sc. 4.

BANNISSEMENT. s. m. Exil ordonné par un jugement contre un accusé convaincu de crime. Exilium. Un bannissement perpétuel emporte confiscation. Un bannissement à temps, & hors le ressort de la Province seulement, ne va point au-delà de neuf ans. Autrement le bannissement hors du Royaume, qui excède le temps de neuf ans, emporte la confiscation. Parmi les Romains on perdoit le droit de bourgeoisie par le bannissement. Il y avoit deux sortes de bannissemens : la déportation, & la relégation. Par la déportation les bannis étoient transportés dans un lieu qui leur étoit désigné, avec défense d’en sortir ; & la relégation n’étoit qu’un simple exil pour un certain temps, sans perdre les droits de Citoyen. Le bannissement se faisoit autrefois à son de trompe & cri public ; ce qui lui a donné son nom. Les Officiaux en France ne condamnent point au bannissement, parce que l’Eglise n’a point de territoire, outre que ce seroit un attentat sur l’autorité royale, à laquelle seule il appartient d’ôter à une personne la qualité de Citoyen ; mais un Evêque peut ordonner à un Prêtre étranger de se retirer de son diocèse, sous peine d’être procédé contre lui par les voies de droit. Ducasse. Auboux. Le bannissement soit à perpétuité, soit pour un temps, est une peine infamante, qui rend un homme incapable d’exercer aucune charge publique. Voyez sur cette matière Brodeau sur M. Louet, Ricard, Traité des Donations, Imbert en sa Pratique, le Journal des Audiences. En France les condamnations au bannissement perpétuel doivent être écrites seulement dans un tableau sans aucune effigie, suivant l’Ordonnance pour les matières criminelles faite en 1670.

Tous ces mots viennent de l’ancien mot françois & allemand ban, qui signifie proclamation, publication, comme on l’a dit en sa place. Ces bans ou proclamations se faisoient pour obliger un homme à comparoir, soit pour levée de troupes, soit en Justice ; & parce que ceux que l’on cite ainsi par des bans ou proclamations publiques, sont ou gens absens, ou gens qui se cachent, & que d’ordinaire ils se cachent pour quelque forfait, & que plus on les cite, plus ils ont coutume de se cacher, & qu’ainsi ils s’exilent eux mêmes & se rétranchent de la société ; c’est pour cela que dans la suite le mot de bannir, c’est-à-dire, citer, s’est pris pour exiler. Voyez Chifflet dans son Glossaire salique aux mots bannire, perbannire & perbannitus, qui se trouvent dans les Lois Saliques, Tit. 52.

Ce mot se dit aussi quelquefois d’un bannissement volontaire, d’une retraite du monde, & figurément d’un ordre de s’éloigner. Cet Amant a reçu de sa maîtresse un arrêt de bannissement.

BANON. s. m. Terme de coutume. Dans celle de Normandie il y a un titre du banon & défens. On appelle banon, le temps auquel toutes les terres sont ouvertes, de sorte que chacun y peut faire pâturer ses bestiaux. Par la même coutume, les prés, & terres vides & non cultivées sont en défens depuis la mi-Mars jusqu’à la sainte Croix en Septembre, & en autre temps elles sont communes & en banon, excepté pour les porcs, chèvres & autres bêtes malfaisantes, pour lesquelles elles sont en tout temps en défens. Tempus quo prædia pascendis pecoribus patent. Jus pascendi in agris liberè. Voyez Pasquier en ses Rech. Liv. VIII. ch. 36.

BANOW. Voyez Banne.

BANQUE, s. f. Trafic d’argent qu’on fait remettre de place en place, d’une ville à une autre par des lettres de change, par des correspondances. Argentaria. Il est permis à toutes sortes de personnes de faire la banque sans être Marchand. Ce Marchand a quitté le négoce, il ne fait plus que la banque. Faire la banque ; quitter la banque. Argentariam facere, dissolvere.

Ce mot vient de l’italien banca, qui a été fait de banco : c’étoit un siége où les Banquiers s’asseyoient dans les places de commerce, d’où l’on a fait aussi banqueroute. Mén.

Ricard, dans son parfait Négociant, dit que c’étoit un banc sur lequel ils comptoient leur argent. Covarrurias dit que ce mot a la même origine que banc ; car l’espagnol banco se prend aussi pour une table ; τράπεζα, qui signifioit chez les Grecs une table, se prend aussi pour une banque, τραπεζίτης, un banquier. Guichard croit que de l’hébreu אבכ, abach, s’est fait abacus, de la banc, & de banc, banque, qui signifie banc, ou table des trafiquans en argent.

Banque. Capsa, capsula, arca. C’est la caisse ou le coffre où les Banquiers enferment leur argent, & ce qu’ils ont de plus précieux.

Banque, se dit aussi du lieu public où s’exerce ce trafic, où les Banquiers s’assemblent, & où ils avoient autrefois un banc. On lui donne aussi d’autres noms ; à Londres, c’est la Bourse ; à Lyon, le Change ; à Paris, la Place du change. On met son argent à la banque ; on y prête & on fait valoir son argent à gros intérêt ; même en quelques lieux à fonds perdu.

Banque, se dit aussi d’une caisse publique, tenue sous la direction des Magistrats, & dans laquelle l’argent des particuliers est en dépôt, pour le faire valoir à gros intérêt, ou pour le mettre en sûreté. La banque de Venise, de Hollande. La ville de Lyon a établi une banque pour prendre de l’argent à fonds perdu au denier huit & une tiers.

Banque d’emprunt. C’est une espèce de mont de piété établi à Amsterdam, où l’on prête de l’argent aux particuliers qui en ont besoin, moyennant qu’ils y déposent des gages pour la sûreté des sommes prêtées, & qu’ils en payent l’intérêt réglé à tant par mois par les Bourguemestres ou Echevins.

Banque, se dit aussi en plusieurs jeux, comme au Hocca, à la Bassete, du fonds de celui qui tient le jeu, pour payer ceux qui gagnent contre lui.

Banque, chez les Imprimeurs, se dit du payement qu’on fait du travail aux ouvriers de l’Imprimerie. Le joue de la banque est le samedi. On entend aussi par banque, la somme entière que chaque ouvrier reçoit. Encyc.

Banque, chez les Passementiers, est l’instrument propre à porter les rochers, ou bobines, pour ourdir. Il y en a de plusieurs sortes pour différens usages.

Banque, chez les Tabletiers, est une espèce de banc triangulaire, sur lequel l’ouvrier en peignes travaille à califourchon.

BANQUÉ. adj. m. Il se dit d’un vaisseau qui va à la pêche de la morue sur le grand banc de Terre neuve. Voyez Navire. On dit aussi qu’on est banqué, quand on est sur le grand banc, débanqué, quand on l’a quitté.

BANQUEREAU. s. m. Petit banc de mer. Il se dit principalement des petits bancs qui ne sont pas éloignés du grand banc où l’on pêche ma morue.

BANQUEROUTE. s. f. Faillite que font les Négocians qui manquent à payer leurs créanciers, par insolvabilité feinte ou véritable. On le dit dans un sens plus étendu, de l’abandon qu’un homme fait de tous ses biens à ses créanciers, faute de pouvoir les payer. Comme l’insolvabilité peut être vraie, ou feinte, on distingue deux sortes de banqueroutes ; banqueroute forcée, qui est causée par quelque accident, par des pertes qui ont rendu le débiteur insolvable. Argentariæ ob inopiam dissolutio. On l’appelle proprement faillite. Voyez ce mot.

Banqueroute volontaire, ou frauduleuse, est celle qui se fait avec fraude & maline, quand le banqueroutier s’enfuit & emporte le plus liquide de ses biens. On l’appelle simplement banqueroute. Creditorum per inopiæ speciem simulatam fraudatio. Beaucoup de Marchands s’enrichissent par des banqueroutes frauduleuses, en mettant leurs biens à couvert. Les banqueroutiers frauduleux encourent tout la rigueur des lois : elles prononcent la peine de mort contre eux, quand la fraude est bien justifiée, comme quand ils ont diverti leurs effets, supposé des créanciers, ou déclaré plus qu’il n’étoit dû aux véritables créanciers. Voyez l’Ordonnance de 1673.

Banqueroute, se dit dans une signification plus générale de tout abandon de biens que fait un homme devenu insolvable de quelque manière que ce soit. Il a fait tant de folles dépenses, il a essuyé tant de pertes, qu’il a été obligé de faire banqueroute.

☞ Dans le sens figuré, on le dit des manquemens de foi, de parole. Vous aviez promis d’être de notre partie, vous nous avez fait banqueroute.

☞ On dit aussi faire banqueroute à l’honneur, à son devoir, &c. Manquer à son honneur, à son devoir.

Iris n’a plus rien qui me touche :
J’au fait banqueroute à ses lois. Main.

Toute cela n’est bon que dans le style simple & familier.

Ce mot vient de l’italien banca rotta, banque rompue, ou plutôt banco rotto. Ce mot vient de ce que les Italiens autrefois faisoient le change en place publique, & qu’ils avoient des bancs où ils comptoient leur argent. Quand quelqu’un de ces Négocians avoit mal fait ses affaires, & qu’il ne revenoit plus à la place, on disoit que son ban étoit rompu, banco rotto ; d’où est venu en françois banqueroute, &c. & de-là banqueroutier, qui suit.

BANQUEROUTIER, IÈRE, s. m. & f. Marchand, ou Banquier qui fait banqueroute. Conturbator, creditorum fraudator. On condamnoit autrefois les banqueroutiers frauduleux au pilori & au gibet. On les condamne en quelques lieux à porter le bonnet vert, & à Luques à porter le bonnet orangé. L’Ordonnance de Henri IV, de l’an 1609, & celle de l’an 1673, ordonnent qu’ils soient poursuivis extraordinairement, & punis de mort ; ce qui a eu peu souvent son exécution. On appelle proprement banqueroutiers frauduleux, ceux qui divertissent leurs effets, ou qui les mettent à couvert sous des noms interposés par de fausses ventes, ou des transports simulés, ou qui font paroître de faux créanciers.

BANQUET. s. m. Festin, grand repas. Epulum, epulæ. Assuérus fit un fameux banquet à toute sa Cour, dont il est parlé au livre d’Esther. Plutarque a écrit du banquet des sept Sages. Suétone parle d’un banquet que le frere de Vitellius fit à cet Empereur, où on servit deux mille poissons différens, qui étoient tous rares. God.

Banquet. Terme de coutume, s’est dit autrefois d’un repas qu’un vassal étoit obligé de fournir à son Seigneur une ou deux fois l’année.

☞ On nomme banquet Royal un répas de cérémonie, où le Roi mange en public avec toute sa famille, & tous les princes & princesses du sang. Acad. Fr.

Ce mot vieillit, & on ne s’en sert plus que quand on parle ou du banquet de Platon, ou du banquet des Lapithes, ou dans certaines phrases particulières. Vaug. Rem. Il vient de l’allemand pancket, dont les Italiens ont fait banquetto, & les Espagnols banquette. Le P. Pezron croit que banquet est un mot celtique.

Banquet, se dit aussi en matière spirituelle. Sacrum epulum, sacra mensa. Tous les Chrétiens doivent participer au sacré banquet (la sainte Communion) au banquet céleste. Le banquet des Elus, le banquet de l’Agneau ; pour dire, la joie de la béatitude céleste.

Banquet, en termes de Manége, est la petite partie de la branche de la bride qui est au-dessus de l’œil, qui assemble les extrémités de l’embouchure avec la branche, & qui est cachée sous le chaperon ou fonceau.

BANQUETER. v. a. Faire un festin, faire grand’chère avec ses amis, epulum dare, epulum agere. Ch. Est. Dict. Ce mot vieillit, & n’a guère d’usage que dans le style familier.

Banqueter. v. n. Être en un banquet. epulari. Cet homme ne fait que banqueter.

BANQUETTE. s. m. Terme de fortifications. C’est un degré ou deux qui règnent tout le long des parapets, afin qu’on puisse tirer par-dessus, & faire feu dans le fossé, & sur les chemins couverts. C’est une petite élévation de pierre, de terre ou de gason. Cespes sedilis in morem ad loricam aggestus. La banquette doit avoir un pied & demi de haut, & trois pieds de large.

Banquette, se dit aussi d’un petit chemin relevé, ou d’une petite élévation au-dessus du niveau de la rue, pour servir de chemin commode aux gens de pied, comme il y en a à Paris au Pont-Neuf & au Pont-royal. Crepido. On appelle tablettes, les plus basses banquettes, qui ne sont élevées que d’un cours d’assise, & les assises de pierre de taille qui soutiennent les banquettes du côté du milieu du pont.

Banquette. Banc de peu de conséquence, qu’on met dans les antichambres, les vestibules & les galeries. Les banquettes sont quelquefois toutes nues, & quelquefois elles sont couvertes & garnies.

Banquette, en jardinage, se dit des palissades à hauteur d’appui ; elles servent dans les côtés des allées doubles, où étant ainsi ravalées, elles n’interrompent point le coup d’œil entre la tige & les arbres. On y laisse quelquefois d’espace en espace des boules échappées de la banquette même.

Banquette, en menuiserie, est une boisure qu’on pratique aux croisées.

Banquette, se dit aussi d’un morceau de bois servant à quelques ouvriers pour s’asseoir quand ils veulent travailler.

BANQUIER. s. m. Négociant en argent, qui donne des lettres de change pour faire tenir de l’argent de place en place. Argentarius, Mensarius, Trapezira, Nummularius. Dans l’ancienne Rome il y avoit des banquiers, qui étoient des personnes publiques. C’étoit par leur ministère que se faisoient les dépôts, les changes, les ventes, les achats. Ils exerçoient la Charge de Notraire d’aujourd’hui. Comme l’usure étoit permise à Rome, ils faisoient profiter l’argent qu’on leur mettoit entre les mains, & en tiroient intérêt sans l’aliéner. Parmi nous la banque n’est permise que par nécessité, & pour faire tenir de l’argent d’un lieu à une autre, à cause des correspondances que les Banquiers ont dans les pays étrangers, ou dans les villes du Royaume. Cela se fait par le moyen des lettres de change qu’on tire de place en place, c’est-à-dire, d’une ville à l’autre. Les Banquiers, pour récompense de leurs soins, exigent une petite remise, qu’on appelle le change, qui est un quart, un tiers, ou un demi pour cent par mois, suivant le cours du change. Voyez les Ordonnances, & le Diction. de Droit.

Si l’on en croit de Rubis dans l’Hist. de Lyon, Liv. III, p. 289, des Guelphes & des Gibelins qui, au XIIIe siècle ne se croioient pas en sûreté, obtinrent, moyennant une grosse somme qu’ils payeroient au Roi, la permission de se retirer à Lyon, & par-tout ailleurs où bon leur sembleroit en France, & d’y lever train de banque ; & ce fut alors qu’il commença à y avoir des Banquiers à Lyon, qui y attirerent depuis le commerce des foirs. Le P. Menestrier, dans son Hist. Consul. de Lyon, semble en fixer l’époque plus haut ; car il montre, p. 92, que dès 1209, il y avoit de puissans Banquiers à Lyon & entr’autres Ponce de Chapponay.

Banquier expéditionnaire en Cour de Rome, est un Officier de nouvelle création, qui se charge de faire venir toutes les bulles, dispenses, & autres expéditions qui se font en Cour Romaine, & en la Légation d’Avignon, soit de la Chancellerie, soit de la Pénitencerie. Les Banquiers sont créés en titre d’Office formé & héréditaire, & dispersés dans toutes les villes où il y a Parlement, ou présidial. Edit du mois de Mars 1673. Ils ont pouvoir, à l’exclusion de tout autre, de solliciter & de faire venir des rescrits, signatures, &c. de la Cour de Rome ; & les Juges ne doivent point ajouter foi à ces expéditions, si elles ne sont vérifiées par les certificats des Banquiers. Voyez l’Ordonnance de 1667, le Diction. de Droit.

L’origine de ces Banquiers, comme celle des autres, vient de ce que les Guelphes du temps des guerres civiles d’Italie se réfugioient à Avignon, & dans le pays d’obédience ; & comme ils étoient favorisés des Papes, dont ils avoient soutenu le parti, ils se mêlerent de faire obtenir les grâces & les expéditions de la Cour de Rome, & s’appelerent Mercatores & Scanbiatores Domini Papæ, comme témoigne Matthieu Paris. On les appelle aujourd’hui institutores bullarum & negotiorum Imperii Romani. Bornier. Mais comme ils se rendirent odieux alors par de grosses usures, on les appela Carsius, ou Caorsius, du nom de Cahors ville de Querci, dont le Pape Jean XXII qui occupoit alors le S. Siége, étoit natif, à cause que de son temps ces usuriers étoient en leur plus haute élévation, comme tamoigne Adam Thevenau en ses Commentaires sur les Ordonnances, au titre des usures. Les Italiens en firent aussi pour eux le mot de scarci, qui signifie avare ; & ils eurent tant de haine pour cette ville, que le Poëte Dante dans son enfer, met au même rang Sodome & Cahors, & y place tous les scélérats & les usuriers. Les marques de cette haine pour cette ville, que le Poëte Dante dans son enfer, met au même rang Sodome & Cahors, & y place tous les scélérats & les usuriers. Les marques de cette haine ont duré long-temps en France ; & on a appelé en Chancellerie les Lettres Lombardes, les Lettres qui s’expédioient en faveur des Lombards & Italiens qui vouloient trafiquer, ou tenir banque en France, qui se taxoient au double des autres, en haine de ce qu’on appeloit alors tous Changeurs, Banquiers, Revendeurs & Usuriers, Lombards, de quelque nation qu’ils fussent ; & on les appelle encore ainsi en plusieurs lieux d’Allemagne & de Flandre même. La place du Change & la friperie d’Amsterdam s’appellent Places Lombardes. Ce nom de Caorsin a été aussi donné à tous les Banquiers & Usuriers, qu’on a appelés en plusieurs titres latins Caorcini, Caturcini, Coursici, Corsini. Voyez Caorsin.

Banquier, se dit aussi en de certains jeux, comme au Hocca, à la Bassette, de celui qui tient le jeu & l’argent, & qui a le fonds devant lui pour payer ceux qui gagnent. Tous les Pontes conspirent contre le Banquier.

☞ BANS. s. m. pl. Terme de Chasse. Nom qu’on donne aux lits des chiens.

Bans, Banni, étoient anciennement des Gouverneurs de province qui relevoient de la Couronne de Hongrie, comme ceux de Dalmatie, de Servie, & ce nom est encore en usage parmi les Turcs, qui mettent les Bans au même rang que les Beglerbeis, leur donnant, comme à ceux-ci, des provinces & des royaumes entiers à gouverner.

☞ On n’établissoit pour Bans dans les provinces qui relevoient de la Hongrie, que des freres ou fils de Roi, tant cette dignité étoit considérable.

☞ On croit que ce nom de Bans, vient du mot band, bando, ou banno, dont on se servoit dans la moyenne latinité, pour signifier un étendart, une bannière ; parce que ceux des provinces, dont ils étoient Bans ou Gouverneurs, étoient obligés d’aller à la guerre sous l’étendard de ces mêmes Bans.

☞ Le Viceregent, ou le Lieutenant-Général du Ban, ou Gouverneur, s’appeloit Vicebanus, & la dignité de Ban, s’appelle le Bannat, ou Banat ; pour dire, un Comté, un Gouvernement, une Principauté.

BANSE. s. f. Grande manne carrée, longue & profonde, faite de menus morceaux de bois entrelacés, ordinairement de châtaignier, qui sert à transporter plusieurs sortes de marchandises, particulièrement des chauderons & autres ouvrages de chaderonnerie.

BANTAM. Bantanum. Ville des Indes Orientales, dans l’île de Java, qui est une de celles de la Sonde. Bantam est capitale d’un Royaume qui porte le même nom. Le Roi de Bantam est allié des Hollandois, qui ont Batavia à dix ou douze lieues de Bantam. Maty.

BANTAMOIS, OISE. s. m. é f. Qui est de la ville ou du Royaume de Bantam. Le Roi de Bantam hérite de tous ceux de ses sujets, qui en mourant laissent des enfans mineurs, ce qui oblige les Bantamois à marier leurs enfans dès l’âge de huit ans.

BANVIN. s. m. Terme de Coutume. Est un privilége, ou droit qui donne pouvoir aux Seigneurs de vendre le vin de leur crû durant le temps porté par les coutumes, ou par leurs titres, à l’exclusion de tous autres demeurans en la Paroisse. Jus quod Domino competit, ut vinum fundo in suo natum apud se divendat. Les titres de banvin doivent être établis auparavant le premier d’Avril de l’an 1560. Le vin doit être vendu dans la maison Seigneuriale, & n’ont point emmené ailleurs. Ce droit s’est étendu aussi aux autres liqueurs & même à la chair. Thibaud II, Comte de Champagne, avoit accordé aux Religieux de Nanteuil-le-Haudouin, pendant tout le mois d’Août le droit de banvin, qui leur fut ôté par Thibaud IV, l’un de ses descendans. Hist. de l’Eg. de Meaux, Tom. I. pag. 121.

☞ BANZA. Ville d’Afrique, au royaume de Congo, dont elle est capitale.

BAO.

BAOABAS, ou plutôt BAHOBAB. s. m. C’est un fruit d’Afrique, dont Prosper Alpin donne la description suivante. Il est de la grosseur d’un limon ; il ressemble à une courge, & renferme ses semences noires, dures, dont les extrémités, forment un demi arc. Sa pulpe est semblable à celle de la courge ; & lorsqu’elle est récente, elle est humide, rouge, & d’un goût acide fort agréable. Ce fruit est savoureux. Il rafraichit & désaltère beaucoup. On l’emploie en Ethiopie contre toutes les maladies chaudes, les fièvres putrides, surtout contre celles qui sont d’une nature pestilentielle. Voyez le Dict. de James.

☞ BAOL. Royaume d’Afrique, dans le pays des Nègres.

☞ BAORUCO. Contrée de l’Amérique, dans l’île Espagnole, ou Hispaniola.

BAP.

BAPAUME. Ville des Pays-Bas, dans l’Artois. Bapalma, Palma. Les François prirent Bapaume en 1641, & elle leur fut cédée par le 45e article de la paix des Pyrénées en 1659. Elle a de longitude 19° 20′ 36″ ; de latitude, 50° 6′ 8″. Cassini.

Bapaume. Petite rivière de France, en Normandie, qui prend sa source à Cailly, dans le pays de Caux, passe à Bapaume, Hameau, & se jette dans la Seine, une demi-lieue au-dessous du Château de Rouen.

BAPTE. s. m. Bapta. Les Baptes étoient à Athènes les Prêtres de Cottito, Déesse de l’impureté. Ils faisoient les sacrifices de cette divinité abominable pendant la nuit, en s’abandonnant à des danses lascives, & à toutes sortes de débauches. Ils furent appelés Baptes, du mot grec Βαπτειν qui signifie baigner parce qu’auparavant que de commencer leurs cérémonies exécrables, ils se baignoient dans de l’eau chaude. Eupolis ayant fait une comédie contre eux, qu’il avoit intitulée Βαπτος les Baptes ; pour s’en venger, le plongerent dans la mer. On dit que la même chose arriva aussi) Cratinus, qui avoit aussi fait une comédie contre les Baptes, & à laquelle il avoit donné le même nom. Voyez Scaliger dans sa Poëtique, Liv. I, ch. 8.

BAPTÊME. s. m. On ne prononce pas le p. Le premier des sacremens de l’église qu’on donne à celui qu’on veut faire chrétien. Baptismus, baptisma, prima christianæ religionis initiamenta. Le catéchisme romain définit le baptême, le sacrement de la régénération qui se confere avec de l’eau & des paroles de vie. On peut encore le définir le premier sacrement de la loi chrétienne, institué par Jésus-Christ, pour effacer le péché originel dans les enfans, & les péchés actuels dans les adultes qui le reçoivent, & pour nous faire membres de l’église chrétienne, enfans adoptifs de Dieu, & cohéritiers de Jésus-Christ. Le baptême se donne avec de l’eau au nom des trois Personnes de la Trinité. Toute eau naturelle est bonne pour le baptême. Tertullien, dans son Traité du baptême, dit qu’il n’y a point de différence d’être baptisé dans la mer, ou dans un étang, dans une rivière, ou une fontaine, une mare, un bassin, ni entre l’eau du Tibre, ou celle du Jourdain.

Tenir un enfans sur les fonts de baptême, c’est être son parrain ou sa marraine ; c’est-à-dire, celui ou celle qui lui impose le nom.

Quelques Théologiens ont crû que le baptême administré au nom de Jésus-Christ seul étoit valable ; mais ce sentiment est rejeté : le baptême au nom de Jésus-Christ, est le baptême que Jésus-Christ a institué, & qui comme les autres sacremens, tire sa vertu & son efficace des mérites de Jésus-Christ.

Avant la venue de Jésus-Christ, la cérémonie du baptême se pratiquoit déjà chez les Juifs, qui baptisoient leurs prosélytes, c’est-à-dire, ceux qui embrassoient leur religion. Voici ce que dit Léon de Modène, Rabbin de Venise, dans son Livre des Cérémonies é Coutumes des Juifs, part. 5, ch. 3. Celui qui veut se faire Juif, on le circoncit ; & quand il est guéri, on le baigne tout entier dans l’eau en présence des trois Rabbins qui l’ont examiné, après quoi il est censé Juif comme les autres.

On dit, la matière du baptême, la forme du baptême, le ministre du baptême. La matière du baptême, c’est ce qui fait l’ablution extérieure du corps de celui qu’on baptise. Il y a la matière prochaine & la matière éloignée du baptême. Celle-ci est la matière que l’on applique au corps de celui qu’on baptise, & c’est l’eau : celle-là est l’application de l’eau au corps de celui qu’on baptise ; application que se peut faire en plusieurs manières. Le baptême ne peut être donné qu’avec de l’eau ; c’est pourquoi le Pape Etienne II déclara excommunié un Prêtre qui avoit baptisé un enfant avec du vain, parce qu’il avoit péché contre les canons de l’Eglise. Le Pape Grégoire IX ayant été consulté par un Evêque de Norwège, si au défaut d’eau l’on ne pouvoit pas baptiser les enfans avec de la bière, il lui fit réponse que les paroles de Jésus-Christ étoient si expresses dans l’évangile : si quelqu’un ne renaît de l’eau, &c. que le baptême donné avec de la bière étoit nul.

Dans la primitive Eglise, le baptême se faisoit par immersion, & même encore aujourd’hui dans toute l’Eglise orientale, il ne se fait point autrement : en effet, le mot grec βαπτιζειν, signifie plonger, comme Henri Etienne, Casaubon, & quelques autres personnes savantes dans la langue grecque, l’ont remarqué. Les Eglises d’Occident, qui ont changé cet ancien usage, ne l’ont fait que parce que c’est une chose de discipline, & qui ne regarde nullement l’essence du baptême. On ne peut pas même dire proprement que les Eglises d’Occident aient changé sur ce point ; car quoique communément on donnât dans les premiers siècles le baptême par immersion, cependant on reconnoissoit que cela n’étoit point nécessaire, qu’on le pouvoit donner par aspersion ; & on le donnoit en effet souvent ainsi ; par exemple, à tous ceux que l’on appeloit Cliniques, c’est-à-dire, qui étoient baptisés dans leur lit, étant dangereusement malades. Voyez S. Cyprien, Lett. à Magnus, où il prouve que l’aspersion suffit. En 754, l’assemblée que Pepin tint à Quiercy sur l’Oise, approuve le baptême donné en cas de nécessité par infusion, en versant de l’eau sur la tête avec une coquille, ou avec les mains ; ce qui montre que, quoiqu’on baptisât encore par immersion, on ne croyoit pas que cette manière de baptiser fût nécessaire, ou de l’essence du Sacrement. Les Protestant ont suivi en cela l’Eglise Romaine ; en sorte que dans tout l’Occident on ne donne plus le baptême que par infusion, en versant de l’eau sur la tête de l’enfant ; il en faut néanmoins excepter l’Eglise de Milan, qui marque dans son Rituel qu’on plongera trois fois dans l’eau la tête de l’enfant.

Pendant très-long-temps on a fait trois immersions, pour marquer les trois jours de la sépulture de Jésus-Christ, ou les trois personnes de la très-sainte Trinité, ainsi que S. Grégoire le dit dans sa Lettre à Léandre, qui est la 41e du I Livre ; & cet usage duroit encore en ce temps-là. On ne le regardoit pas cependant comme nécessaire, puisque ce Pere dit à ce S. Evêque qui le consultoit là-dessus, que puisque les Ariens plongent trois fois, il est d’avis que les Catholiques ne le fassent qu’une fois, de peur qu’il ne semble aux hérétiques que l’on divise, comme eux, la Divinité. Et il paroît que c’est par-là, & pour cette raison, que cet usage se changea dans la suite. Nous apprenons de la vie de S. Otton, Apôtre de Poméranie, de quelle manière ce Saint donnoit le baptême par immersion ; & l’on ne doit point douter que dans les autres Eglises, on ne prît des précautions semblables, pour empêcher que la pudeur ne fut blessée dans une si sainte cérémonie. Ce Saint avoit fait enfoncer dans la terre des cuves ou tonneaux, qui ne s’élevoient de terre que jusqu’à hauteur du genou : il y en avoit pour les femmes au côté gauche du baptistère, & du côté droit pour les hommes. Ces tonneaux étoient entourés de rideaux, qui en formoient autant de loges différentes. Lorsque le Catéchumène étoit descendu dans le tonneau qui étoit plein d’eau, le Prêtre levant doucement le rideau, lui plongeoit trois fois la tête dans l’eau, que l’on tenoit chaude en hiver. Martene.

Quelques-uns ont cru que le baptême par infusion avoit commencé à s’introduire par les pays froids. Il paroît qu’en Angleterre le baptême par infusion s’introduisoit fort au commencement du IXe siècle ; car le concile de Calchyt, ou Calchut, en 816, ordonne dans son IIe canon, que les Prêtres en baptisant ne répandront pas seulement l’eau sainte sur la tête des enfans, mais les plongeront toujours dans le bassin.

On trouve dans les Auteurs Ecclésiastiques beaucoup de cérémonies qui ne sont plus en usage, comme de donner à ceux qui étoient baptisés, du lait & du miel, ce qui se faisoit en Orient ; ou du vin & du lait, comme en Occident ; de leur laver les pieds, de leur donner la Sainte Eucharistie. Voyez Durand. On donnoit, dit Tertullien, du lait & du miel au baptême, pour apprendre aux Néophytes, que le Christianisme étoit une loi de douceur & de concorde.

Quelques Auteurs ont cru que dans les premiers temps on ne baptisoit que les seuls adultes. Walafride Strabon dans son Livre {{lang|la|de rebus ecclesiasticis, ch. 26, a prétendu que c’étoit l’usage de la primitive Eglise. Louis Vivès, dans ses notres sur le i. liv de la Cité de Dieu, de S. Augustin, appuie ce sentiment. Mais le baptême des enfans est autorisé par toute l’ancinne tradition de l’Eglise depuis les Apôtre. Voyez ce que S. Cyprien dit sur cela d’un Concile d’Afrique, dans son épître ad Fidum. Le premier Concile de Milève, Can. 2 ; le second, Can. 3 ; le Concile d’Auxerre, Can. 18 ; celui de Girone tenu sous Hormisdas l’année 4e du roi Théodoric ; le Concile Général de vienne, sous Clément V ; le Concile de Trente, Sess. VII, Can. 13 ; l’Epitre de Siricus ad Himer. Tarrac ; celle d’Innocent I, au Concile de Milève ; Clementin. de summâ Trinitate, & fide Cath. Innocent III. Extra C. Majores de Baptismo ; S. Irénée, Liv. II, ch. 8. Origène, L. V, in cap. IV, epist. ad Roman. Le Livre de cœlesti hierarch. attribué à S. Denys, au dernier chapitre ; S. Grégoire de Nazianze, orat. in S. baptisma ; S. Jean Chrysostôme, ad Neophyt. S. Cyprien, ep. ad Fium ; S. Augustin, ep. ad Hieronymum, serm. 10, de verb. Dom. l. III, de peccatorum meritis, c. 1 & 26, L. IV. de bapt. c. 23 ; S. Jérôme, Dialog. III. contra Pelag. S. Ambroise, L. de Myst. Pasch. c. 5. L. I. de Vocat. Gent. c. 6. S. Grégoire le Grand, L. I. ép. 17.

La coutume d’imposer un nom au Baptême, & un nom de Saint, est très-ancienne. Grégoire de Tours rapporte que S. Herménégilde fut nommé Jean à son Baptême. Voyez Denys d’Alexandrie, L. VIII. c. 20. S. Jean Chrysostôme, hom. 12. sur la Ie ep. aux Corinth. Vicecomes de bapt. L. II, c. 15. de Hautessere sur Grég. de Tours, L. V, p. 201.

Le Baptême signifie en un sens figuré de grandes afflictions, comme quand Jésus-Christ dit aux fils de Zébédée, au ch. 10 de S. Marc, v. 38. Pouvez-vous boire le Calice que je dois boire, ou être baptisés du Baptême dont je dois être baptisé ? Jésus-Christ dit encore au chap. 12 de S. Luc. v. 50. Je doit être baptisé d’un Baptême, & combien me sens-je pressé jusqu’à ce qu’il s’accomplisse ? Il marque par cette expression métaphorique ses souffrances & sa mort. C’est aussi dans ce sens, qu’il faut entendre ces paroles du ch. XV. de la I. épitre aux Corith. Que feront ceux qui sont baptisés pour les morts, s’il est vrai que les morts ne ressuscitent point ?

Pour ce qui est de la forme du Baptême, ce sont les paroles que l’on prononce en appliquant l’eau au corps du baptisé. Jésus-Christ a prescrit cette forme en S. Math. chap. XXVIII. v. 19. Allez, enseignez toutes les nations, & baptisez-les au nom du Pere, & du Fils, & du S. Esprit. Elle est la même dans toutes les Eglises, soit d’Orient, soit d’Occident ; car ces paroles dont on se sert dans l’Eglise Romaine, Je te baptise au nom du Pere, &c. sont entièrement les mêmes que celles-ci, qui sont en usage chez les Grecs : N. serviteur de Dieu est baptisé au nom du Pere, &c. Les Grecs se servent de cette expression, parce qu’ils croient qu’il est plus modeste de s’exprimer en troisième personne. Plusieurs Théologiens ont prétendu que les Grecs ne disent pas baptisatur, c’est-à-dire, est baptisé, mais baptisetur, soit baptisé, en quoi ils se sont trompés.

Le ministre du Baptême, c’est celui qui donne, qui confère le Baptême, c’est-à-dire, qui fait l’application de l’eau au corps de celui qui est baptisé, en prononçant la forme. Les anciens Canons de l’Eglise ne donnent le droit de baptiser qu’aux Evêques seuls, puis aux Prêtres & aux Diacres par la permission des Evêques. C’est ce que nous apprenons aussi de Tertullien dans son Traité du Baptêle, & de S. Jérôme qui, dans son Dialogue contre les Lucifériens, dit que ni les Prêtres ni les Diacres n’ont le droit de baptiser que par l’ordre de l’Evêque. Inde venit ut fine Espicopijissione, neque Presbyter neque Diaconus jus habeant baptisandi. Le Diacre n’avoit ce pouvoir qu’en l’absence du Prêtre, & en cas de nécessité. Les Laïques même pouvoient baptiser dans le cas de nécessité, comme l’assurent Tertullien & S. Jérôme aux mêmes endroits. Si necessitas cogit, scimus etiam licere Laïcis baptisare. Tertullien ajoute même que le Laïque qui manque d’administrer ce Sacrement dans ce cas, est coupable de la perte d’un homme.

Il y a eu autrefois de grandes disputes sur le Baptême administré par les Hérétiques, savoir qu’il étoit valide. La tradition constante a toujours été, que le Baptême administré par les Hérétiques au nom de la Trinité étoit bon & valide, lorsqu’il est conféré par un Chrétie, quoiqu’il soit en péché mortel & lié par des censures. Les femmes même le peuvent conférer en cas de nécessité ; mais hors le cas de nécessité ce doit être un Prêtre. On se plaignit au Concile de Limoges en 1031, que l’on baptisoit dans le Monastère de S. Martial, à Paques & à la Pentecôte, ce que les Clercs de la Cathédrale soutenoient ne se devoir faire que chez eux. Mais on représenta que c’étoit un ancien privilége de S. Martial, & de quelques autres Monastères ; à la charge que ceux qui auroient été baptisés, seroient présentés le même jour devant l’Evêque pour la Confirmation. Fleury.

Le Concile de Rouen en 1072 ordonne au Prêtre de conférer le Baptême à jeu, revêtu d’une aube & d’une étole, hors les cas de nécessité.

Le Baptême a succédé à la Circoncision, en ce que le Baptême fait enfans de l’Eglise ceux qui le reçoivent, comme la Circoncision rendoit sujets de la Synagogue, ceux qui étoient circoncis ; & le Baptême depuis Jésus-Christ distingue les Chrétiens des Infidelles, comme la Circoncision distinguoit les enfans mâles descendus d’Abraham des autres hommes.

On distingue trois sortes de Baptême. Le Baptême d’eau, dont nous avons parlé ; le Baptême de sang & le Baptême de feu. Baptismus fluminis, Baptismus sanguinis, Baptismus flaminis.

Baptême de feu. C’est un acte de parfait amour de Dieu, lequel joint à un désir véritable de recevoir le Baptême, & une résolution de le recevoir en effet quand on le pourra, supplée au Baptême d’eau, & a les mêmes effets. On appelle ces actes Baptême de feu, Baptismus flaminis, c’est-à-dire, Baptême du S. Esprit, ou Baptême de charité, d’amour de Dieu, parce que le feu est le symbole de la charité, & qu’en cas de nécessité, cet acte d’amour parfait supplée au Baptême ; ensorte qu’un infidelle adulte qui étant dans ces dispositions seroit surpris de la mort, sans pouvoir recevoir le Baptême, seroit néanmoins justifié & sauvé. Mais ce qu’a dit Cajetan, qu’un pareil souhait dans les parens, (car on l’appelle aussi votum Baptismi, vœu, sougait du Baptême, résolution de le recevoir) que ce vœu, dis-je, avec quelque bénédiction ou oblation de l’enfant à Dieu, jointe à l’invocation de la Sainte Trinité, peut suffire dans le danger pour un enfant encore dans le sein de sa mere, est une erreur réfutée entre autres par Alphonse de Castro adv. hær. L. III, au mot Baptismus hær, 9. On appelle aussi ce Baptême de feu, Baptême de désir, baptismus in voto ; parce que la charité parfaite emporte toujours la résolution de garder tous les Commandemens & par conséquent celui qui oblige de recevoir le Baptême.

Baptême du Martyre, ou le Baptême de Sang. On appeloit ainsi le martyre des Catéchumènes, qui mouroient pour la cause de l’Evangile avant que d’être baptisés. On croyoit que le martyre leur tenoit lieu de Baptême. Les premiers Chrétiens faisoient profession de désirer avec ardeur le Baptême de sang.

Le Baptême est absolument nécessaire pour le salut ; & parce qu’on ne peut pas toujours le recevoir, il étoit de la bonté de Dieu de suppléer par quelque chose à l’impossibilité de recevoir un Sacrement si nécessaire ; ce qui se fait par le Baptême de sang, & par le Baptême de feu.

Cette distinction de ces trois Baptêmes, le Baptême d’eau, le Baptême de feu, & le Baptême de sang, s’est toujours faite dans l’Eglise. Il y a parmi les ouvrages de S. Cyprien, un Traité De baptismo hæreticorum, dont nous ne connoissons point l’Auteur ; c’est peut-être S. Etienne, ou quelqu’un des Papes suivans. Cet Auteur distingue d’abord le Baptême du S. Esprit, & le Baptême d’eau. Le Baptême du S. Esprit se trouve séparé, dit-il, du Baptême d’eau dans le Centenier Corneille, qui reçut le Saint-Esprit, avant que d’avoir reçu le Baptême d’eau. Le Baptême d’eau, continue-t-il, se trouve séparé dans les Apôtres, qui avoient été baptisés long-temps avant que de recevoir le S. Esprit ; ce qui n’empêche pas que l’un & l’autre ne doivent ordinairement être joints ; le Baptême d’eau ne serviroit de rien sans celui du S. Esprit. Ensuite il explique le Baptême de sang. Il supplée au Baptême d’eau pour les Catéchumènes, & remplit ce qui manquoit au Baptême des hérétiques convertis ; c’est-à-dire, la charité, la grâce. Ce ne sont pas, dit-il, deux Baptêmes différens, mais deux matières qui concourent à donner le même salut : on peut se passer de l’un des deux. Les Catéchumènes Martyrs se passent d’eau ; néanmoins s’ils ont quelque relâche, on leur donne le Baptême d’eau. Les Fideles baptisés régulièrement se passent du Baptême de sang, &c. voilà la Doctrine de l’Eglise expliquée dès les premiers siècles, comme on le fait encore aujourd’hui. Fleury.

Le Baptême confère la grâce, & efface le péché originel, & même les péchés actuels des Adultes qui les détestent ; & ils leur sont entièrement remit, & quant à la tâche, & quant à la peine ; outre cela il imprime un caractère, &nous fait enfans de Dieu & membres de l’Eglise, en nous donnant, par les mérites de Jésus-Christ, droit au ciel, qui est l’héritage du Pere céleste. Le caractère qu’il imprime, fait qu’il ne peut pas se réitérer, quand il est valide : quand il est douteux, on le réitère sous condition.

Le Baptême ne s’administroit autrefois dans l’Eglise qu’à Pâques & à la Pentecôte, hors les cas de nécessité, d’où vient qu’on ne fait encore la bénédiction solennelle de l’eau qu’en ces deux temps-là, & qu’on parle des nouveaux baptisés dans la prière du Canon de la Messe qui commence par ces paroles, hanc igitur oblationem, propre de ce temps-là. De Launoy a fait une dissertation sur l’ancienne manière de baptiser les Juifs & les Infidelles, où il montre que la discipline ancienne n’a pas été sur cela la même dans toutes les Eglises. Il en a fait une autre sur les temps de conférer le Baptême, dans laquelle il montre qu’à Rome, & d’abord en Afrique & en Gaule, on ne baptisoit qu’à Pâques & à la Pentecôte. Les Grecs, & dans la suite les Eglises d’Afrique & d’Espagne, baptisoient aussi le jour de l’Epiphanie. En Gaule on ajouta aussi le jour de S. Jean-Baptiste, excepté en quelques Eglises, où l’on ne baptisoit qu’à Pâques. En Angleterre & en Hibernie on administroit aussi le Baptême à Pâques, à la Pentecote, le jour de Noël, & celui de l’Epiphanie.

Dans l’ancienne Eglise les Catéchumènes ne s’empressoient point de recevoir le Baptême. S. Ambroise n’étoit pas même encore baptisé lorsqu’il fut élu Evêque de Milan. Les différens motifs étoient, pour les consciences tendres, qu’on ne pouvoit employer trop de temps pour s’y préparer : & pour les autres qui ne pouvoient se dégager du monde, ils se flattoient que les eaux salutaires du Baptême effaceroient toutes leurs fautes passées ; ainsi ils entassoient tous leurs péchés, dans l’espérance d’en être purgés à l’extrémité de leur vie dans les eaux du Baptême. Les Peres déclamèrent contre cette pieuse finesse, ensotre même qu’on passa dans un autre excès, & que par un zèle ridicule & mal instruit, on administra le Baptême pour le mort.

C’est une coutume en Allemagne de faire des présens d’argent, de vaisselle d’argent, & quelquefois même de fiefs, aux enfans qu’on leve dans le Baptême. Le droit d’Allemagne est qu’on garde ces présens pour les enfans, & que les peres n’ont ont que l’usage, jusqu’à ce que les enfans soient en âge d’en disposer. On a fait un petit traité sur cela, intitulé, de pecuniâ lustricâ.

Baptême, se dit aussi d’une cérémonie ecclésiastique qu’on fait sur les cloches, lorsqu’on leur impose un nom en les consacrant au service divin. On les lave dehors & dedans avec plusieurs bénédictions & prières. Cette cérémonie est fort ancienne, parce qu’Alcuin, disciple de Bede & Précepteur de Charlemagne, qui vivoit en l’an 770, en parle comme d’un chose qui étoit en usage il y avoit long-temps. Letaldus, Moine du Xe siècle, en parle aussi comme d’une coutume ancienne, mais qui n’étoit pas encore universelle.

Baptême, se dit quelquefois pour Christianisme, Religion chrétienne en général, parce qu’il en est la porte. Ainsi, oublier son baptême, c’est oublier la religion chrétienne, oublier qu’on est Chrétien, parce que c’est le baptême qui nous fait Chrétiens. Plusieurs Indiens nouvellement convertis, n’étant ni cultivés par des instructions salutaires, ni édifiés par de bons exemples, oublierent insensiblement leur baptême, & retournerent à leurs anciennes superstitions. Bouh. Vie de Saint Xavier, L. II, p. 73.

Ce mot est grec : Βάπτισμα, lotion, ablution, du verbe βάπτιζω, je lave.

Baptême, en termes de Marine, est une cérémonie profane dont usent tous les matelots envers ceux qui passent la première fois sous le Tropique, ou sous la Ligne, ou le Détroit. Lotio, lavatio. Il y en a quelques-uns qu’on baigne dans la mer, d’autres sur le vaisseau, d’autres à qui on fait essuer quantité de sceaux d’eau que jettent sur eux les matelots, quand ils traversent leurs rangs en allant d’un bout du vaisseau à l’autre. On les fait en même temps jurer de faire la même chose à ceux qui viendront après eux.

☞ Les Officiers & les passagers se rachetent d’une si ridicule cérémonie, en donnant quelque argent à l’équipage.

☞ Un vaisseau qui n’a point encore passé en Ligne y est soumis. Le Capitaine le rechete par quelques rafraîchissemens qu’il donne aux gens de l’équipage.

BAPTEURE. s. f. Terme de Coutume. En Bresse on appelle bapreures les droits & les salaires de ceux qui battent le blé. Merces frumenta terentium, ou frumenti tritorum, ou debita pro frumenti tritura merces. Ces salaires se payent en blé, & se prennent sur le monceau, avant que le Propriétaire & le Granger, ou le Métayer, partagent. Voyez M. De Lauriere sur Ragueau.

BAPTISER. v. a. Prononcez batiser. Conférer le Baptême. Baptisare, Sacro Baptismi fonte aliquem tingere. Notre-Seigneur fut baptisé par S. Jean avec les eaux du Jourdain. On baptise aujourd’hui les enfans dès qu’ils sont nés. On baptise au nom du Pere, & du Fils & du Saint-Esprit.

Baptiser, se dit aussi de certaines ecclésiastiques qui ne sont que des bénédictions. Ainsi on dit, baptiser des cloches. Un Capitulaire de Charlemagne de l’an 789, défend de baptiser les cloches. Cependant on continua encore après de les baptiser, & le Roi Robert faisant faire en 1029, la dédicace de l’Eglise de S. Agnan d’Orléans, avec plusieurs autres présens magnifiques, y donna cinq cloches, qu’il avoit fait baptiser, & dont la plus grosse fut nommée Robert comme lui ; ce qui montre que le Capitulaire de Charlemagne n’eut pas de suite, & que la bénédiction des cloches s’appeloit Baptême ; & le Moine Helgand, qui rapporte ceci, remarque qu’on y employoit l’huile & le chrême.

☞ On dit aussi, baptiser un enfant ; pour dire, faire les seules cérémonies ordinaires du Baptême, quand l’enfant n’a été qu’ondoyé. Cet enfant n’est qu’ondoyé, il faut le porter à l’Eglise pour le baptiser.

Baptiser, signifie dans l’Ecriture, affliger, plonger dans la douleur. Les eaux sont dans le langage des Ecrivains sacrés le symbole des afflictions & des peines, & s’emploient métaphoriquement en ce sens, à peu-près comme orage, tempête, flots, inondation, abyme, dans notre langue ; témoin ces endroits des Pseaumes. Assumpsit me de aquis multis ; eripuit me de inimicis meis fortissimis, que M. Coquelon a fort bien traduit. Il m’a tiré du milieu de tous ces orages ; il m’a délivré de mes ennemis, dont la puissance étoit redoutable ; & au Pseaume LXVIII, 1, 2. Salvum me fac, Domine, quoniam intraverunt aquæ usque ad animam meam ; infixus sum in limo profundi… Veni in altutudinem maris, &c. Sauvez-moi, Seigneur, parce que les eaux sont entrées jusqu’à mon ame, je suis plongé dans la vase… Je suis abymé dans la profondeur d’une vaste mer ; & mille autres pareils. Voyez ce qui a été dit au mot Baptême.

Baptiser, se dit figurément & abusivement en ces phrases : baptiser son vin ; pour dire, mettre beaucoup d’eau dedant ; vinum aquâ diluere. Baptiser quelqu’un dans la rue, se dit en parlant de ceux sur qui on a jeté de l’eau imprudemment par les fenêtres ; aliquem gelidâ aquâ perfundere. On dit aussi, qu’on baptise quelqu’un, quand on lui donne quelque sobriquet. Ludicrum agnomen indere. En tous ces sens le mot de baptiser est burlesque.

Tout beau l’Ami, ceci passe sottise,
Me direz-vous ; & ta plume baptise
De noms trop doux gens de tel accabit. R.

En termes de Palais, on dit baptiser possession contraire ; pour dire, soutenir chacun de son côté qu’on est en possession. On disoit aussi autrefois, baptiser son appel ; pour dire, en déclarer les griefs apparens, & par-devant quels Juges on prétendoit les relever. Car autrefois le mot de baptiser ne signifioit autre chose que énoncer, déclarer, comme on voit dans Masuet, Joannes Galli, & autres vieux Praticiens.

BAPTISÉ, ÉE, part. Sacro Baptismi fonte tinctus. Celui qui croira, & sera baptisée, entrera dans le Royaume des cieux.

BAPTISMAL, ALE, adj. Prononcez ce mot comme il est écrit, qui appartient au Baptême. Les Fonts baptismaux sont la marque d’une Eglise Paroissiale. Sacer Baptismi fons. Une Eglise baptismale est celle où il y a des Fonts baptismaux, & où l’on administre de droit le Sacrement de Baptême. Le Canon 48, du Concile de Meaux tenu en 845, ordonne que les Prêtres ne baptiseront que dans les Eglises baptismales, & aux temps réglés, hors le cas de nécessité. Hist. de l’Egl. de Meaux, Tom. I, p. 83.

☞ On appeloit robe baptismale, une robe blanche que portoit autrefois pendant huit jours celui qui avoit reçu le Baptême.

☞ L’innocence baptismale est celle d’un homme qui a reçu le Baptême, par lequel tous les péchés ont été effacés. Il a gardé l’innocence baptismale. Gratia in Baptismo suscepta.

☞ Eau baptismale, celle avec laquelle on baptise.

BAPTISTE. s. m. Baptista. Le p ne se prononce pas. Qui baptise. C’est un surnom que l’Evangile donne à S. Jean, fils de Zacharie & d’Elisabeth, & précurseur de Jésus-Christ, parce qu’il prêchoit le Baptême de la pénitence, & baptisoit ceux qui venoient à lui. En ce temps-là parut Jean Baptiste, qui prêchoit dans le désert de Judée. Bouh. Matth. III ; 1. Souvent on appelle simplement Baptiste, un enfant qui a reçu au Baptême le nom de S. Jean Baptiste, retranchant le nom de Saint Jean dans l’usage ordinaire & domestique.

BAPTISTÈRE. adj. & subst. Prononcez Baptistère. Registre des Baptêmes. Eorum qui sacro Baptismi fonte tincti sunt index. L’Ordonnance de 1667, veut qu’on garde dans les Sacristies, & qu’on porte ensuite dans les Greffes des Justices, les Registres baptistères qui contiennent le nom de ceux qu’on baptise, & le jour qu’on leur a conféré le Baptême. Ils doivent être signés du pere, s’il est présent, & du parrain & de la marraine. Les majorités se prouvent par les extraits baptistères. Les Romains, pour justifier l’extraction, & conserver la suite des familles, avoient aussi des actes publics, où les peres faisoient enregistrer la naissance de leurs enfans. Servius Tullius institua le premier cet ordre, & Auguste le renouvela.

Baptistère, étoit anciennement une petite Eglise auprès d’une plus grande, où l’on administroit le Baptême, comme le baptistère de Constantin proche de S. Jean de Latran à Rome. Baptisterium. On donnoit le même nom à une Chapelle, qui dans une grande Eglise servoit au même usage. Les baptistères avoient autrefois l’image de S. Jean Baptiste. Fleur. Le baptistère devoit être autrefois de forme ronde. Le baptistère de Constantin étoit magnifique. Durand, dans sont traité des Rits, en donne la description qui suit, qu’il a tirée des Auteurs Ecclesiastiques & des Historiens. Ce baptistère étoit incrusté de Porphyre en dedans & en dehors : le bassin étoit d’argent ; au milieu du baptistère il y avoit une colonne de porphyre, sur laquelle étoit une phiole d’or du poids de cinquante livres, pleine de baume. Sur le bord du bassin on voyoit une figure d’agneau d’or, par où on faisoit couler l’eau dans le bassin : à côté de l’agneau il y avoit une figure de Jésus-Christ, du poids de cent soixante & dix livres ; & au côté gauche, une figure de Saint Jean-Baptiste aussi d’argent, du poids de cent livres, & tout autour du bassin sept figures de cerfs d’argent, chacune du poids de quatre-vingt livres, qui servoient à fournir de l’eau au bassin. Enfin, c’étoit autrefois la coutume de suspendre au-dessus du bassin des figures de colombes d’or, ou d’argent, pour représenter le Saint-Esprit.

Le baptistère a toujours été regardé comme un lieu sacré. On trouve dans l’Ordre Romain les cérémonies de la consécration du baptistère. Le baptistère, pris pour une Eglise, ou une Chapelle où étoient les Fonts baptismaux, est quelquefois appelé par les anciens Auteurs qui ont écrit sur les Liturgies, Salle du Baptême, aula Baptismatis : cette Salle, ou cette Chapelle étoit fermée durant le Carême, & la porte en étoit scellée du sceau de l’Evêque ; & on ne l’ouvroit que le Jeudi Saint. On employoit autrefois le chrême pour la bénédiction ou la consécration du Baptistère, soit qu’on entende par ce mot la Chapelle où étoient les Fonts baptismaux, soit qu’on entende le bassin qui étoit dans la Chapelle. voyez Habert.

Le baptistère étoit à l’entrée de l’Eglise, comme l’a prouvé de Hauteserre dans ses Notes sur Grégoire de Tours, p. 69, & sur Anastase, p. 27. Dans les baptistères il y avoit aussi des oratoires ; c’est-à-dire, des autels, selon la remarque du même Auteur sur Anastase, p. 43. Les baptistères n’ont commencé que sous Constantin, lorsque l’on commença à bâtir & à dédier publiquement des Eglises. Auparavant on conduisoit les Catéchumènes à la rivière la plus voisine, & on les y baptisoit.

Baptistère, s’est pris aussi par les Auteurs payens pour la cuvette dans laquelle on prend le bain. Pline le jeune l’emploi en ce sens, Liv. II, épître 8, & ailleurs.

Baptistère, se prend encore au particulier pour les Fonts baptismaux, qui étoient autrefois une espèce de piscine où l’on plongeoit le Catéchumène. Martyrius d’Antioche ordonna que la ville de la fête de l’Epiphanie on rempliroit d’eau les baptistères. Godeau.

Baptistère, se prend encore quelquefois pour le Rituel où les cérémonies du Baptême sont marquées, & pour l’eau dont on se sert pour baptiser. Voyez le Sacramentaire de S. Grégoire, Burchard, &c. Il se prend aussi pour le Baptême même, & pour les offrandes que les fideles font aux Prêtres qui ont conféré le Baptême.

Baptistère vient du mot grec βαπτιστήριον. Il signifie en général le lieu où l’on baptise, ensorte qu’il se prend quelquefois pour les fonts baptismaux. La figure tant du baptistère, que des Fonts baptismaux, étoit ordinairement d’une forme ronde. M. Du Cange, dans son Glossaire, a remarqué, que dans florence, vis-à-vis de la grande Eglise, il y a un baptistère de forme ronde, dédié à S. Jean-Baptiste. On trouve dans quelques vieux manuscrits grecs des figures de Fonts baptismaux qui sont aussi d’une figure ronde. Et il y avoit plusieurs Fonts baptismaux dans chaque baptistère, parce qu’on baptisoit plusieurs personnes à la fois, & même plusieurs autels, parce qu’on donnoit autrefois la communion immédiatement après le Baptême. Dans les commencemens les baptistères n’étoient que dans les grandes villes où résidoient les Evêques, parce qu’il n’y avoit qu’eux qui eussent droit de Baptiser. Il n’y en avoit même qu’un qui étoit dans l’Eglise Cathédrale : néanmoins Joseph Vicecomes prétend qu’il y a eu dès le commencement dans Rome plusieurs baptistères, & que presque chaque Paroisse avoit le sien : ce qu’il regarde comme un privilége particulier à cette grande ville. A la campagne, les Paroisses d’un Diocèse étoient divisés en Doyennés, c’étoit ainsi qu’on appeloit un certain nombre de Paroisses qui étoient sous la direction d’un Archiprêtre ; & il n’y avoit des Fonts baptismaux que dans une des Eglises de chaque Doyenné. On appeloit en latin cette Eglise Plebs, & celui qui la desservoit s’appeloit Doyen de la Chrétienté, Decanus Christianitatis, parce que c’étoit dans son Eglise que l’on conféroit le Sacrement qui nous fait Chrétiens.Voyez le P. Thomassin. Dans la suite des temps, pour administrer plus facilement le Baptême, les Evêques accorderent aux Paroisses le droit d’avoir des Fonts baptimaux. Ce droit étoit réservé aux seules Paroisses ; & s’il se trouve des Monastères avec des Fonts baptismaux, c’est qu’ils jouissent des Eglises baptismales de quelques lieux. Les Evêques accordoient quelquefois aux Moines ces Eglises, à condition qu’ils auroient avec eux un Prêtre séculier qui prendroit le soin du peuple. Ils trouvoient ensuite le moyen d’éloigner le Prêtre, & par-là ils étoient les maîtres de l’Eglise, qui devenoit un Monastère, auquel les Fonts baptismaux étoient toujours attachés. On trouve des exemples de cela dans les Cartulaires.

Le mot de Baptême & ses dérivés viennent du grec βάπτιζειν, immergere, plonger dans l’eau.

BAPTOYER. v. a. Vieux mot. Baptiser.

BAQ.

☞ BAQUET. s. m. Quelques-uns écrivent BACQUET. Cuvier dont les bords sont plus bas. On le fait quelquefois d’une futaille sciée en deux. Cupa minor, labrum minus, labellum. Les Taverniers donnent souvent du vin du baquet, qui est éventé. Les Marchands de poisson ont besoin de baquets pour mettre leurs carpes, & pour les conserver en vie. Les Maçons, les Brasseurs, &c. se servent de baquets.

Baquet, en termes de Jardinage, est un vaisseau de bois rond, carré, ou oblong, rempli de terre, dans lequel un Jardinier seme quelques graines particulières. La Quint. Lig. Les plus ordinaires sont ronds, & sont proprement la moitié d’un muid ou d’un demi muid scié en deux, ou fait exprès par le Tonnelier. La Quint. Ce baquet sera propre pour y semer des gérofflées. Lig.

Baquet. Terme de Carrier. Les Carriers appellent baquet, ce qu’on nomme plus ordinairement un bouriquet ; c’est-à-dire, une civière sans bras, qui sert à tirer le moellon & les autres échantillons de pierres, qui ne se peuvent pas brider avec le cable.

Ce mot est diminutif de bac. Quelques-uns le dérivent de aquarium, comme étant un vaisseau à recevoir de l’eau.

Baquet d’Imprimerie. C’est une pierre creusée qui sert pour laver les formes.

Baquet de Marbreur de Papier. C’est une boîte carrée, sans couvercle, dans laquelle est l’eau gommée, sur laquelle on répand les couleurs qui font la marbrure.

Baquet chez les Chaudronniers. Ils donnent ce nom à tous les vaisseaux de cuivre qui ne sont qu’ébauchés.

BAQUETER. v. a. Exhaurire aquam. Terme de Jardinier. C’est ôter de l’eau avec une pêle, ou une écope. La Quint. Baqueter de l’eau.

☞ BAQUETÉ, ÉE. part.

BAQUETURES. s. m. pl. Terme de Cabaretier. C’est le vin qui tombe dans le baquet, lorsque le Cabaretier emplit des bouteilles ou autres vaisseaux sous le tonneau. Les Cabaretiers disent qu’ils vendent leurs baquetures aux Vinaigriers ; c’est au moins ce qu’ils devroient faire.

☞ BAQUEVILLE. Petite ville de France, en Normandie, sur la vienne, à trois lieues de Dieppe.

BAQUIER. s. m. Coton de très-médiocre qualité, dont il se fait quelque négoce à Smyrne. Il ne s’y en débite année commune que 4 ou 5 quintaux, qui se vendent depuis 8 jusqu’à dix piastres le quintal.

BAR.

BAR. s. m. Civière renfoncée qu’on porte à deux, à quatre, à six hommes, qui sert dans les ateliers à transporter des pierres, du moilon, & autres matériaux nécessaires aux ouvriers. Crates brachiata. On s’en servoit aussi autrefois sur les ports pour décharger les bateaux de bois, & autres marchandises ; d’où vient qu’on appelle aujourd’hui ceux qu’on y emploie, des bardeurs ; & on en use aussi dans les basse-cours pour transporter du fumier. Quand on se sert d’un bar pour porter des pierres taillées, on met des nattes sur le bar, & alors on dit qu’un bar est armé de ses torches de nattes.

Dans la Vie de S. Bernardin de Sienne, Acta SS. Maii. T. V, p. 285. A, on trouve bara synonyme de capsa, & pour signifier une chaise, ou une espèce de litière, dans laquelle un malade est porté par un cheval.

BAR. s. m. Nom d’un poisson de mer. Barbus ou Mulus. Le bar est un très-bon poisson, long de deux à trois pieds. Les Sauvages de l’Acadie le prennent avec une épée emmanchée à un bâton d’environ 7 pieds de long, qu’ils dardent sur le poisson lorsqu’ils l’apperçoivent, & en une heure ils en chargent un canot, qui est environ de ceux cens de ces poissons. Denys, P. I. c. 5. Le bar est le poisson qu’on appelle le maigre à la rochelle ; on en fait une grande consommation tous les printemps en Acadie.

Bar, en termes de Blason, signifie proprement un barbeau, barbus. C’est un poisson qu’on met souvent dans les Armoiries, ordinairement courbé & adossé, comme en celles du duché de Bar. Barbi gemini obver sis dorsis picti.

Bar, nom de plusieurs Villes. Il y a Bar-sur-Aube, Barium ad Albulam, ville de, Champagne en France. Bar-sur-Seine, Barium as Sequanam, petite ville du duché de Bourgogne. Bar-le-Duc, ville capitale d’un petit pays entre la Lorraine & la Champagne. Frédéric I. Comte & puis Duc de la haute Lorraine, appelée Mosellane, fit bâtir Bar-le-Duc en 951 pour arrêter les courses que faisoient les Champenois dans son pays. C’est pour cela qu’il lui donna le nom de Bar, qui signifioit, barrière. On l’appelle en latin Barro Ducum, ou Barium Ducis.

Duché de Bar. Pays de France. Barensis Ducatus. Le duché de Bar a la Lorraine au levant, & la Champagne au couchant. Le duché de Bar est un fief mouvant de la Couronne, qui faisoit partie des Etats du Duc de Lorraine. On l’appelle aussi le Barrois ; mais on le distingue du Barrois François qui est plus au nord, & dont les principales villes sont Longvie, Stenay, Jamets, &c.

Bar. Petite rivière de France, en champagne, dans le Rethelois, qui prend sa source au près d’un village qui lui donne son nom, & se jette dans la Meuse auprès de Doncheri.

Bar. Petite ville de Pologne. Barum, Barium. Elle est dans l’Ukraine, ou, selon quelques autres, dans la Podolie, sur une petite rivière nommée Kou.

Bar. Voyez Barra.

Bar, selon quelques Auteurs, est un ancien mot gaulois, qui signifie Port. Leur raison est que Barbehel, ou Barbeau, est appellé en latin Portus sacer ; & ils ajoutent que les ports étoient peut-être ainsi appelés des barres dont on les fermoit.

☞ BARABINSI, BARABINSKI, & BARABINSKOI Peuple de la Tartarie, au royaume de Sibérie, dont il occupe une province autoure du Lac de Baraba.

☞ BARACAN. Voyez Bouracan.

BARACAQUE. s. m. Terme de Relation. Nom de secte & de Religieux Japonois. Les Baracaques s’occupent continuellement de saintes méditations. Ambass. de Holl. au Jap. I, p. 127.

☞ BARACOA. Ville de l’Amérique, dans l’île de Cuba, sur la côte Septentrionale.

BARADAS. s. m. Terme de Fleuriste. C’est un œillet d’un beau rouge brun, dont la fleur est fort large, grosse, & garnie de quantité de petites feuilles qui lui font faire un dôme au milieu de sa fleur : ses panaches sont gros, mais non pas fort détachés : son blanc n’est ni carré, ni fin. Il est sujet au blanc. Il ne faut lui laisser que quatre ou cinq boutons.

BARADAT. s. m. Nom d’homme. On dit aussi Varadat. Voyez Baillet 22 Févr.

BARAGE. Voyez Barrage.

BARAGOUIN. s. m. Langage corrompu, qu’on n’entend pas, jargon composé de mots barbares, ou si mal prononcés qu’on ne les entend pas. Sermo barbarus. Je ne puis rien comprendre à ce baragouin. Mol. Le discours de cet homme est un vrai bargouin, tant il parle mal.

☞ On le dit abusivement des langues qu’on n’entend pas. Sermo peregrinus. Le Bas-Breton, l’Allemand, &c. est pour nous un vrai baragouin. Il n’est que du style familier.

Ménage a cru autrefois que bargouin venoit de bara, qui signifie pain en bas-Breton, & qui vient de bar, hébreu, qui signifie la même chose ; & de guin, qui signifie vin aussi en bas-Breton, & qui apparemment vient de vinum, parce que ces mots de pain & de vin sont les premiers qu’on apprend des langues étrangères. Le P. Thomassin est aussi de ce sentiment ; mais Ménage a changé depuis ; il fait descendre baragouin de barbarus, barbaracus, baracuinus, & ainsi par degrés. Il n’est pas possible que ce mot vienne de baracuinus. Pour le croire, il faudroit que ce fût un mot commun à l’Italien, & à l’espagnol, qui viennent du latin ; mais puisqu’il est propre à la langue françoise, on ne peut pas douter qu’il ne vienne du bas-Breton, bara & gouin.

BARAGOUINAGE, s. m. signifie la même chose que baragouin. Un Suisse, en écorchant le françois, réduit dans son bargouinage, presque tout à l’infinitif. P. Du Cerc.

BARAGOUINER. v. n. Parler un langage étranger & inconnu, ou parler si mal, qu’on ne peut se faire en tendre à ceux d’un pays. Peregrino ac barbaro uti sermone. Il ne fait que baragouiner : Molière l’a employé activement. Je ne me souviens plus comme ils baragouinent ces mots.

BARAGOUINEUR. s. m. Se dit bien mieux que baragouineux.

BARAGOUINEUX, s. m. EUSE, s. f. Celui ou celle qui baragouïne, qui parle un langage qu’on n’entend pas, qui prononce de manière qu’on a de la peine à entendre. Qui peregrinum ad barbarum sermonem adhibet. Quel baragouineux est-ce là ? Mol. Deux baragouineuses me sont venu accuser de les avoir épousées toutes deux. Id. Ces mots ne sont d’usage que dans le style burlesque.

BARAL. s. m. Mesure de choses liquides, d’usage en Languedoc, en Provence, &c. Le baral contient 45 pichets.

BARALIPTON. Terme de Logique. Mot technique qui se dit du premier mode de la quatrième figure du syllogisme. Dans les mots techniques que l’on a formés pour désigner les modes du syllogisme, A signifie une proposition universelle affirmative, & E une proposition universelle négative, I une proposition particulière affirmative, & O une proposition particulière négative, suivant ces deux vers :

Asserit A, negat E, verùm generaliter ambo :
Asserit I, negat O, sed particulariter ambo.

Et comme il n’y a que trois proposition dans un syllogisme, il ne faut avoir égard qu’aux trois premières voyelles du mot technique, quand il en a davantage, comme baralipton qui en a quatre. Cela supposé, un syllogisme en baralipton est un syllogisme dont la première proposition est universelle affirmative, BA. La seconde de même, RA, & la troisième ou la conclusion affirmative aussi, mais particulière, LI. On n’a point d’égard à la dernière PTON, que l’on n’a ajoutée que pour faire le vers technique :

Barbare, Celarent, Darii, Ferio, baralipton.

De plus le mode baralipton demande que le moyen terme soit l’attribut dans la majeure, & le sujet dans la mineure. Ainsi.

BA Toute créature à des devoirs à remplir à l’égard de son Créateur :
RA Tout homme est créature.
LI Donc quelques hommes a des devoirs à remplir à l’égard de son Créateur.

est un syllogisme en baralipton.

Autre exemple :

BA Tout mal doit être craint :
RA Toute passion violente est un mal :
LI Donc quelque chose qui doit être craint, est une passion violente.

☞ Ne pourroit-on pas apprendre aux jeunes gens l’art de raisonner, sans toutes ces fadaises, qui ne font qu’augmenter la difficulté.

BARALOTTE. s. m. Nom de secte. Baralottus. Les Baralottes sont des Hérétiques de Boulogne en Italie. Parmi eux tout étoit commun, jusqu’aux femmes & aux enfans. Leur facilité à se laisser aller à toutes les débauches les plus affreuses, leur fit aussi donner le nom, d’Obéissans, obedientes. Ferdinand de Cordoue en parle dans son Traité De exig. annonis. C. De Obedientia.

☞ BARAMPOUR. Voyez Brampour.

BARANCA. s. f. Les Espagnols de la Castille d’or & de la Carthagène de l’Amérique, appellent Baranca de Malabo, le Bureau de recette qu’ils ont sur la rivière de la Magedlaine, à six lieues de la mer du Nord, où se déchargent toutes les marchandises d’Europe destinées pour la Nouvelle Grenade.

☞ On donne aussi le nom de Baranca, à une ville de l’Amérique, au Pérou, plus connue sous le nom de Santa-Cruz de la Sierre. Voyez ce nom.

BARANDAGE. s. m. Sorte de pêche qui est défendue par les Ordonnances.

BARANGE. s. m. Barangus. C’est le nom d’un Officier chez les Grecs du bas Empire. Cujas les appelle en latin Protectores, d’autres Securigeri. L’Office des Baranges étoit de garder les clefs des portes de la ville où l’Empereur se trouvoit. Voyez Cantacuzene, L. I, c. 1. codinus, De Off. Constant. c. 5. n. 45. dit que les Baranges sont des Officiers qui sont à la porte de la chambre de l’Empereur, & de la salle où il mange. Codinus, Curopalate, Nicétas, disent que ce mot est anglois ; que les Baranges étoient Anglois de nation, & qu’ils étoient armés d’une hache. Codinus les fait aussi Anglois, & dit qu’ils parloient anglois. Anne Commene dit qu’on les faisoit venir de l’île appelée Thule. Le P. Goar doute si le mot de Thule n’est point corrompu, ou changé. Jean Scylitzes dit qu’ils étoient Celtes. Nicétas dans Alexis dit qu’ils étoient Allemands. Dès le temps de Michel de Paphlagonie il y avoit des Baranges, comme il paroît par Cedrenus ; mais ils n’étoient encore que simples soldats, & non Gardes du Corps. Leur Chef s’appeloit ἀκολουθος, comme qui diroit celui qui suit toujours l’Empereur. il étoit aussi chef des Francs. Vers l’an 1035 un Barange ayant voulu faire violence à une femme Thrace, elle lui arracha son coutelas & lui en perça le cœur ; tous les Baranges la louèrent fort, & lui mirent une couronne sur la tête, &