Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/581-590

Fascicules du tome 1
pages 571 à 580

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 581 à 590

pages 591 à 600



pousse des feuilles semblables à celle de la sanicle, attachées à de longues queues, & un peu rudes au toucher. Il s’en éleve deux ou trois tiges chargées de quelques feuilles, & portant à leurs sommités des bouquets en ombelles de fleurs blanches, tirant sur le purpurin, soutenues par des couronnes de feuilles. Chacune de ces fleurs est composée ordinairement de cinq feuilles disposées en rose, rabattues & repliées souvent vers le centre, & attachées à un calice qui devient un fruit composé de deux bourses, remplies chacune d’une graine oblongue. Elle croît dans les bois, & la petite espèce dans les lieux montagneux, comme les Alpes & les Pyrénées. Leurs racines purgent, comme celles de l’ellébore noir. On l’appelle en latin Astrantia, d’aster, parce que les sommités sont disposées en étoile.

ASTRE. s. m. ☞ Qui s’applique généralement à tous les corps célestes, qui ont une lumière propre, ou refléchie, & se dit du soleil, des étoiles, des planètes, des comètes. Cependant on le dit plus ordinairement des corps lumineux par eux-mêmes, comme les étoiles fixes & le soleil. Astrum. Le mouvement des astres, le cours des astres. Observer les astres. Calculer le mouvement des astres. Les lunettes ont fait découvrir plusieurs nouveaux astres dans le ciel. Le peuple croit que les comètes font des astres de mauvais préiage. Les habitans de la lune prennent la terre pour un astre, & je vous garantis que nous leur paroissons faire assez régulièrement nos fonctions d’astre. Fonten. Les Poëtes appellent le soleil, l’astre du jour ; & la lune l’astre de la nuit.

Le tombeau du Calvinisme, Sonnet du P. Commire, commence ainsi,

J’eus pour père l’orgueil, & pour mère l’erreur ;
L’Astre sanglant de Mars éclaira ma naissance ;
Avec l’impiété, la révolte sa sœur
Prit le soin d’élever en secret mon enfance.

Ce mot vient du Grec ἄστρον.

Astre, se dit figurément d’une personne extraordinaire en mérite, en beauté. Quand ce Prince naquit, ce fut un nouvel astre qui parut sur l’horizon. Cette beauté est un astre qui brille dans son quartier. La métamorphose des yeux de Philus en astres est un Poëme de l’Abbé de Cerisy.

☞ On a cru pendant long-temps que les astres influoient sur les corps sublunaires. Peut-être même n’est-on pas encore bien revenu de cette erreur. Par rapport au pouvoir que les Astrologues attribuent aux astres sur les corps terrestres, on distingue des astres bénins, heureux, favorables, malins, malheureux, &c. des astres qui président à la naissance, &c. En supposant l’influence des astres. Racine a dit Poétiquement :

Sous quel astre ennemi faut-il que je sois née ?
Et que craindre en ce siècle, où toujours les beaux arts
D’un astre favorable éprouvent les regards ?

Astre, chez les chimistes, signifie la plus haute vertu & la plus grande efficacité que les choses acquièrent au moyen de leur préparation : ainsi l’astre de soufre, c’est lorsqu’on l’allume pour le changer en une huile très excellente ; l’astre de sel, c’est ce minéral dissous dans de l’eau ou de l’huile, pour augmenter sa force. L’astre du mercure, c’est la sublimation, par le moyen de laquelle il acquiert plus de force & de subtilité qu’il n’en avoit naturellement. On l’appelle encore Alcohol, quintessence, extrait, sperme, &c. Ruland. Johns.

C’est encore un nom que l’on donne à certains médicamens, tels que les trochiques, ou ceux qui ont la figure d’un petit gâteau marqué d’un astérisque. Nous trouvons dans Galien, L. VIII, de C.M.S.L.C., 3 & dans plusieurs autres endroits, le nom d’aster invincible, somnifère anodyn. Quelques Chimistes donnent ce nom à un remède, non point tant à cause de l’empreinte, qu’à cause qu’il est extraordinaire. Ainsi je puis, dire, par exemple, des vertus astrales, astre des serpens. Dict. de James.

Astre du monde. Terme de Fleuriste. C’est un œillet piqueté, extrêmement moucheté sur l’extrémité de ses feuilles. Sa fleur n’est pas fort large, mais elle est fort ronde, & bien prise dans ce qu’elle contient. Sa plante n’est pas fort robuste. Elle est susceptible de blanc &c de pourriture. Cet œillet se trouve à Lille, à d’Amiens, &c.

Astre du monde violet. Terme de Fleuriste. Espèce d’œillet. C’est un violet pourpre clair, extrêmement rond, qui tourne bien les feuilles ; son blanc est assez fin, & son panache régulier, mais il est marqué de quelques mouchetures, qui ne le rendent pourtant point brouillé. Sa plante est robuste & vigoureuse, mais les marcottes ont peine à prendre racines. Sa fleur est assez large.

Astre triomphant. Terme de Fleuriste. Espèce d’œillet piqueté. Il est large & fort piqueté, sa plante médiocrement forte. Il est à Lille.

ASTRÉE. s. f. Terme de Mythologie. La Déesse de la Justice. Astrea. Hésiode dit qu’elle étoit fille du Titan Astréus & de Thémis ; mais d’autres Mythologistes, en suivant Ovide, la font fille de Jupiter & de Thémis. Pendant le siècle d’or elle descendit sur la terre pour habiter avec les mortels ; mais elle eut tant d’horreur de leurs crimes, qu’elle les abandonna pour remonter au Ciel : elle y occupe une place dans le Zodiaque, où on la représente tous le nom de la Vierge. Depuis ce temps-là tous les Poëtes ont célébré la candeur d’Astrée, & ont regreté le temps où elle vivoit.

ASTREINDRE. v. a. J’astreins. J’ai astreint. J’astreignis. J’astreindrai. Que j’astreigne. Contraindre quelqu’un à faire quelque chose. Astringere, obstringere, obligare. ☞ Astreindre quelqu’un à l’étude, au travail. L’astreindre à des conditions injustes. Avec le pronom personnel, s’obliger à faire quelque chose, s’assujettir. Le dégoût qu’on a des sciences, vient de ce qu’on est obligé de s’astreindre à certains principes fatigans.

ASTREINT, EINTE. part. Astrictus.

ASTRÉUS. s. m. Terme de Mythologie. L’un des Titans de la Fable. Il étoit fils de Crius & d’Euribée, fille de Pluton. Il eut d’Aurore les Astres & les vents ; il arma ceux-ci pour exercer leur furie contre les Dieux, afin, de favoriser ses frères qui alloient déclarer la guerre à Jupiter. Hésiode le fait aussi père d’Astrée.

ASTRICTION. s. f. Terme de Médecine. Qualité d’une chose astringente. Tous les astringens ont par conséquent de l’astriction. Il faut observer d’abord que la plante nommée Scordium, est de faveur acre & amère, mêlée d’un peu d’astriction. Journ. des S. La saveur de cette eau a quelque chose de salé & de sulfureux, mais presque sans aucune astriction.

ASTRINGENT, ENTE. adj. Qui a la propriété de resserrer, & de rendre les pores plus petits. Astringens, stypticus, adstrictoriam vim habens. Les Teinturiers appellent matériaux astringens, l’écorce d’aune, de grenade, de chêne en sève, de pommier sauvage, la sciure de chêne, les coques de noix, la racine de noyer, les galles & le sumac. On a inventé une poudre styptique ou astringence, composée avec le vitriol commun, calciné à rougeur, & l’alun calciné en blancheur. Quelques-uns mettent ces poudres dans l’eau de plantin, & de roses, & urine, & en composent l’eau styptique.

Astringent, se dit des remèdes qui ont la propriété de resserrer, c’est-à-dire, de corriger la trop grande fluidité des déjections d’un malade, & de leur donner la consistance convenable, qui annonce la bonne disposition des organes de la digestion. Remède, médicament astringent.

Astringent, se prend aussi substantivement en médecine. Ayant arrêté l’hémorragie, tantôt par de petits morceaux de vitriol que nous mettions avec du coton, & par les autres astringens… Tantôt, &c. Degori. Faire usage des astringens, Prescrire les astringens à un malade.

ASTROC. Terme de Marine. Grosse corde que l’on attache à une cheville de bois nommée Escome. Rudens.

☞ ASTROCHYNOLOGIE. s. f. Astrocynologia. Nom d’un traité sur les jours caniculaires. ἄστρον, astre, κύων, chien, λόγος, traité.

ASTROÏTE. s. f. Pierre astroïte. Astroïtes. Plante pierreuse qui végète au fond de la mer comme le corail, ou plutôt espèce de madrépore & de corps marin, Il y en a de plusieurs sortes. La plûpart ressemblent a des cerveaux pétrifiés, dont les anfractuosités sont marquées par des sillons plus solides, qui sont écartés les uns des autres par une substance plus spongieuse, composée de plusieurs lames très-minces. Dans d’autres espèces ce sont des pierres formées de plusieurs tuyaux joints ensemble par leurs côtés, & dont la cavité est remplie de plusieurs lames qui partent de leurs parois, & vont comme des rayons aboutir à un centre. On scie ces pierres en lames minces, & on les polit, ce qui fait paroître à leur surface plusieurs soleils. Le vulgaire croyoit autrefois que cette pierre avoit des propriétés particulières à cause de ces figures qu’elle exprimoit. On trouve ces pierres vers nos îles de l’Amérique, & sur la côte de Carthagène, où on les calcine pour en faire de la chaux. De savans hommes soutiennent que les plus curieuses pierres de cette nature, étoient véritablement des animaux pétrifiés par quelque suc dans lequel ils s’étoient plongés.

Astroïte, ou cymatyte, ou hydatyte. Pierre ronde, distinguée par des lignes en zigzac, qui imitent les ondes.

ASTROLABE. s. m. Instrument de Mathématique, gradué, & plat en forme de planisphère, ou d’une sphère décrite sur un plan, servant principalement sur mer pour observer la hauteur du pôle & des astres. Astrolabium. On le suspend avec un anneau, & il a une alhidade, ou règle mobile garnie de sespinnules, laquelle marque les hauteurs sur le cercle qui est sur ses bords divisé en 360 degrés. Il y a un creux au dedans de son limbe, où l’on enchâsse diverses planches où sont marqués les azymuths, & autres cercles, pour faire diverses observations ; & celle du dessus qui est percée à jour, & qu’on nomme pour cela araignée, sert à faire plusieurs observations sur les autres étoiles. Il a divers autres usages dont on a fait des livres entiers, comme Staufler, Henrion, Clavius, & autres.

Ce mot vient d’ἄστρον, & de λαμϐάνω, capio, colligo. Les Arabes l’appellent en leur langage Astharlab, mot corrompu du vrai nom Grec ; & ils tâchent quelquefois de lui donner une étymologie arabique ; mais tous les savans reconnoissent de boenne foi qu’ils ont appris des Grecs le nom & l’usage de cet instrument. Nassi-Reddi-Thoufî a fait un Traité en persien, qu’il a intitulé, Bait Bal fil Astharlab, où il traite de la structure, & de la pratique de l’Astrolabe. d’Herb.

Astrolabe universel. On a anciennement appelé astrolabe, un assemblage de différens cercles de la sphère, posés comme ils doivent être les uns par rapport aux autres. Nos sphères armillaires sont la même chose que ces astrolabes. Hipparque en avoit fait construire un à Alexandrie. Il étoit immobile, il s’en servoit à différentes opérations astronomiques. Ptolomée en fit aussi le même usage. Mais comme cet instrument avoit beaucoup d’incommodités, ce grand astronome s’avisa d’en changer la figure, quoique naturelle & parfaitement conforme au système de la sphère, & de réduire tout l’astrolabe sur une superficie plane, ce qui a été appelé Planisphère. Cette réduction n’est possible qu’en supposant qu’un œil qui n’est pris que pour un point, voit tous les cercles de la sphère, & mes rapporte à un plan ; alors il se fait une représentation ou projection de la sphère aplatie, & pour ainsi dire, écrasée sur ce plan, qu’on appelle Plan de projection. Et en fait de planisphères, ou d’astrolabes, le plan de projection est placé au-delà de l’objet, qui est toujours la sphère, & non pas entre l’œil & l’objet, comme le plan de la projection d’un tableau.

Il est naturel, & même indispensable, de prendre pour plan de projection de l’astrolabe, quelqu’un des cercles de la sphère, ou du moins un plan qui lui soit parallèle, après quoi reste à fixer la position de l’œil par rapport à ce plan.

Entre le nombre infini de planisphères que pouvoient donner les différens plans de projection & les différentes positions de l’œil, Ptolomée s’arrêta à celui dont le plan de projection seroit parallèle à l’Equateur, & où l’œil seroit placé à un des pôles de l’Equateur ou du monde. Cette projection de la sphère est facile, & on l’appelle l’astrolabe polaire ou de Ptolomée. Tous les méridiens qui passent par le point où est l’œil, & sont perpendiculaires au plan de projection, deviennent des lignes droites, ce qui est commode pour la projection du planisphère. Mais leurs degrés, qui sont égaux dans la figure circulaire, deviennent fort inégaux, quand le cercle s’est changé en ligne droite. Ainsi dans l’astrolabe de Ptolomée, les degrés des méridiens sont fort grands vers les bords de l’instrument, & fort petits vers le centre ; ce qui cause deux inconvéniens : l’un qu’on ne peut faire aucune opération exacte sur les degrés proche du centre, parce qu’ils sont trop petits pour être aisément divisés en minutes, & moins encore en secondes ; l’autre, que les figures célestes telles que les constellations, deviennent difformes & presque méconnaissables, en tant qu’elles se rapportent aux méridiens, & que leur description dépend de ces cercles. Quant aux autres cercles de la sphère grands ou petits, parallèles ou inclinés à l’équateur, ils demeurent cercles dans l’astrolabe de Ptolomée. On peut voir Ptolomée lui-même au chapitre I de son Ve livre.

Comme l’horizon & tous les cercles qui en dépendent, c’est-à-dire, les parallèles & les cercles verticaux, sont différens pour chaque lieu, on décrit à part sur une planche qu’on place au-dedans de l’instrument, l’horizon & tous les autres cercles qui y ont rapport, tels qu’ils doivent être pour le lieu ou pour le parallèle où l’on veut se servir de l’astrolabe de Ptolomée ; & par cette raison, il ne passe que pour un astrolabe particulier, c’est-à-dire, d’un usage borné à des lieux d’une certaine latitude ; & si l’on veut s’en servir en d’autres lieux, il faut changer la planche, & y décrire un autre horison.

Gemma, Mathématien de Frise, a inventé un autre astrolabe, dont le plan de projection est le colure ou méridien des solstices, & où l’œil est placé à l’endroit où se coupent l’équateur & l’écliptique : ce point est le pôle de ce méridien. Ainsi dans cet astrolabe, l’équateur qui devient une ligne droite, est divisé fort inégalement, & a ses parties beaucoup plus serrées vers le centre de l’instrument que vers les bords, par la même raison que dans l’astrolabe de Ptolomée, ce sont les méridiens qui sont défigurés de cette sorte. En un mot, c’est l’astrolabe de Ptolomée renversé. Seulement pour ce qui regarde l’horizon, il suffit de faire une certaine opération, au lieu de mettre une planche séparée, & cela a fait donner à cet astrolabe le nom à d’Universel.

Il a paru encore une troisième espèce d’astrolabe, inventée par Jean de Royas, Espagnol. Son plan de projection est un méridien, & il place l’œil, sur l’axe de ce méridien à une distance infinie. L’avantage qu’il tire de cette position de l’œil, est que toutes les lignes qui en partent sont parallèles entre elles, & perpendiculaires au plan de projection. Par conséquent non-seulement l’équateur est une ligne droite, comme dans l’astrolabe de Gemma, mais tous les parallèles de l’équateur en sont aussi ; puisqu’en vertu de la distance infinie de l’œil, ils sont tous deux dans le même cas que si leur plan passoit par l’œil : par la même raison, l’horizon & ses parallèles sont des lignes droites. Mais dans les deux astrolabes précédens, les degrés des cercles devenus lignes droites, sont fort petits vers le centre ; ce qui se verra facilement en tirant sur la tangente d’un quart de cercle des parallèles au diamètre par toutes ses divisions égales. Les figures ne font donc pas moins altérées que dans les deux autres. De plus, la plupart des cercles dégénèrent ici en ellipses, qui sont souvent malaisées à décrire. Cet astrolabe est appellé Universel, comme celui de Gemma, & à même titre. On lui donne aussi le nom d’Analemme.

Un quatrième astrolabe est celui de M. de la Hire, & dont il a donné la description dans les Mémoires de l’Académie des Sciences de l’an 1701, p. 255. Les défauts communs des trois premiers astrolabes, sont d’altérer tellement les figures des constellations, qu’elles ne sont pas faciles à comparer avec le ciel, & d’avoir en quelques endroits des degrés si serrés, qu’ils ne laissent pas assez d’espace aux opérations.

Comme ces deux défauts ont le même principe, M. de la Hire y a remédié en même temps, en trouvant une position de l’œil, d’où les divisions des cercles projetés, fussent très sensiblement égales dans toute l’étendue de l’instrument. Les deux premiers astrolabes plaçoient l’œil au pôle du cercle ou du plan de projection, le troisième à distance infinie, & ils rendoient les divisions inégales dans un ordre contraire. M. de la Hire a découvert un point moyen d’où elles sont suffisamment égales. Il prend pour plan de projection celui d’un méridien, & par conséquent fait un astrolabe universel, & il place l’œil sur l’axe de ce méridien, prolongé de la valeur de son sinus de 45 degrés, c’est-à-dire, que si le diamètre ou axe du méridien est supposé de 200 parties, il le faut prolonger de 70 à peu près. Delà s’ensuit une projection avec tous les avantages qu’on peut désirer.

C’est sur cette manière de projection, comme la plus conforme au globe que l’on puisse trouver, que M. de la Hire a construit les deux planisphères célestes qu’il a donnés au public, & dont les pôles de l’écliptique sont au centre, l’écliptique en faisant le cercle extérieur.

Le P. Briet, Jésuite, dans ses parallèles de la Géographie ancienne & nouvelle, L.IV, C. 5, propose la manière de décrire ainsi un planisphère terrestre, en l’écrasant, pour ainsi dire, par les pôles. Il ajoute que cette méthode a l’approbation de tous les Géographes & Cosmographes, & qu’ils souhaitent, mais en vain, que toutes les tables générales fussent tracées sur ce plan : qu’il en avoit cependant deux de cette forme qui étoient poussées jusqu’au Capricorne, mais qu’il est mieux de ne les point étendre au-delà de l’équateur. C’est ce qu’a fait M. de la Hire, substituant pour le ciel les pôles de l’écliptique à ceux du monde, & l’écliptique à l’équateur.

ASTROLOGIE. s. f. ☞ Suivant son étymologie, ce mot signifie la connoissance du ciel & des astres, & il ne signifioit que cela dans son origine. Mais on appelle maintenant astronomie, ce qu’on appeloit autrefois astrologie, & l’on entend par astrologie, un art chimérique qui enseigne à juger des effets & des influences des astres, & à prédire les événemens, par la situation des planètes, & par leurs différens aspects. Astrologia. On. l’appelle autrement Judiciaire. Astrologia divinans. Ceux qui les premiers ont étudié les mouvemens des cieux, ne prétendoient pas faire de l’astrologie un art de filou ; mais d’autres plus rusés ont voulu profiter du foible de l’homme pour savoir l’avenir, & ont débité qu’on le peut apprendre.

Il y a des effets naturels, comme les vents, les pluies, les grêles, les tempêtes, &c. que l’on peut prédire, quoiqu’on ne le connoisse que par conjecture ; c’est ce que fait l’Astrologie naturelle. Mais les effets libres qui dépendent de la volonté des hommes, ne peuvent être connus, ni prédits, par le moyen des astres, ni par aucun autre moyen naturel. On appelle Astrologie judiciaire cette science fausse, téméraire & abusive, par laquelle on prétend connoître ces sortes d’événemens. M. Crassot, au second tome de ses Commentaires sur Aristote, demande 1°. Si les astres ont la force de signifier : il répond qu’oui ; mais qu’ils ne signifient que comme la cause signifie l’effet, ou comme l’effet signifie la cause, & non pas comme un livre dans lequel Dieu auroit écrit dès le commencement du monde les choses qui arriveront, & qu’il a prévues. Voyez Pic de la Mirand. S. Clément dans ses Rec. 2°. Il demande quelles sont les choses qu’on peut connoître par l’observation des astres, & il dit qu’il y a trois sortes de choses qui dépendent des astres & des cieux, dont les unes sont nécessaires, les autres arrivent ordinairement & le plus souvent, les autres par hasard & rarement : les premiers sont le lever & le coucher des astres, leurs conjonctions, éclipses, aspects, & autres choses qui ne concourent en rien aux choses sublunaires. La science qui les prédit, s’appelle Astronomie, & non pas Astrologie. Les secondes qui regardent l’état & la constitution de l’air dans les quatre saisons de l’année en chaque région. 3°. Les troisièmes sont celles qui arrivent par hasard, & par accident ou rarement, comme cette pluie, ou celle-là, la naissance de cet animal, ou de celui-là. Les choses du premier genre se peuvent connoître & prédire avec certitude ; celles du second se connoissent, & sont prédites seulement avec probabilité ; celles du troisième genre ne le peuvent être qu’avec témérité sur-tout si elles dépendent de la liberté de l’homme, comme cette paix, ou celle-là ; cette guerre, ou celle-là ; ce meurtre, ou celui-là. Il ajoute que le ciel ne contraint point la volonté ; il l’incline pourtant, parce qu’il produit & cause le tempérament ; & la plupart suivent les inclinations de leur tempérament, & n’y renoncent pas, quoiqu’ils y puissent résister. De-là il arrive qu’on prédit certaines choses probablement, qui dépendent néanmoins de la liberté de l’homme, comme la pluralité des dissensions & des querelles en telle & telle année ; mais ce n’est pas de l’inspection des astres, mais des dispositions que l’on remarque dans les hommes à tel ou tel événement, que l’on tire ces conjectures.

L’Astrologie est venue des Chaldéens, & elle a passé jusqu’à nous par les ouvrages des Arabes. On en étoit tellement infatué à Rome, que les Astrologues s’y maintinrent malgré les édits que les Empereurs firent pour les en chasser : & il est certain que l’Astrologie, toute trompeuse qu’elle est, s’étoit établi une espèce de domination dans le monde. La même superstition a régné parmi les Chrétiens. Un Auteur anglois, nommé Goad, qui a composé deux volumes sur l’Astrologie, prétend qu’on peut prévoir les inondations, & expliquer une infinité de phénomènes physiques par la contemplation des astres. Il tâche de rendre raison de la diversité des mêmes saisons par la situation différente des planètes, par leurs mouvemens rétrogrades, le nombre d’étoiles fixes qui se rencontrent dans un signe, &c. Du temps de la Reine Catherine de Médicis, l’Astrologie étoit si fort en vogue, qu’on ne faisoit rien sans consulter les Astrologues. On ne parloit que de leurs prédictions à la cour de Henri IV. La nation s’est guérie de cette foiblesse : on a reconnu que l’Astrologie n’a pas même un principe probable, & qu’il n’y a point d’imposture plus ridicule. Tout le monde convient enfin que l’Astrologie est une science vaine & incertaine. Les Brames ont introduit dans les Indes l’Astrologie judiciaire. Par-là ils se sont rendus comme les arbitres des bons & des mauvais jours. On les consulte comme des oracles, & ils vendent bien cher leurs réponses. Lettres Ed.

ASTROLOGIQUE. adj. m. & f. Qui appartient à l’Astrologie. Astrologicus, ad Astrologiam pertinens. Une prédiction astrologique. Une figure astrologique, ☞ On appelle ainsi la description du thème céleste ou de la position dans laquelle se trouvent les corps célestes dans le temps dont il est question.

☞ ASTROLOGUE. s. m. Astrologus. On nomme ainsi celui qui fait profession de l’Astrologie judiciaire, qui prétend connoître l’avenir par l’inspection, la position & l’influence des corps célestes, en dressant une figure du ciel. Le peuple confond mal-à-propos ce mot avec celui d’Astronome. Le premier s’occupe d’une science chimérique & le second d’une science très-belle & très-utile. Les anciens les confondoient souvent. Thalès & Pherecydes sont appelés Astrologues, quoiqu’ils fussent très-habiles Astronomes. Voyez Saumaise sur Solin, p. 641 & Vossius de Artibus Mathemat. Un Comique a appelé un Astrologue le truchement des étoiles. Si l’on en croit les Astrologues, le ciel est un livre où Dieu a écrit l’histoire du monde, & où un chacun peut lire sa destinée. Ce qui a maintenu si longtemps ses Astrologues en crédit, c’est qu’on oublioit aisément leurs bévues, & leurs fausses prophéties, & qu’on faisoit beaucoup valoir leurs oracles quand par hasard ils avoient dit vrai. On rapporte de Cardan, qu’ayant fixé sa mort à un certain jour, il se laissa mourir de Faim, pour confirmer la prédiction, & ne pas décrier le métier d’Astrologue. Pic de la Mirandole, Sextus ab Heminga, Alexander ab Angelis, le P. Mersenne, &c. ont fortement écrit contre les Astrologues. Ptolomée, Cardan, Jonctin, Jean de Montroyal, Argolus, Regiomontanus, ont été de grands Astrologues. Sous Tibère on fit des Edits pour chasser les Astrologues d’Italie. Tillem.

Ce mot vient du Grec ἄστρον, & λόγος.

On appele aussi Astrologues, tous les faiseurs d’Almanachs. Devins, & Charlatans qui se mêlent de prédire par le moyen des astres.

On dit proverbialement, qu’un homme n’est pas Astrologue ; pour dire, qu’il est ignorant en quelque profession que ce soit ; & ironiquement, c’est un grand Astrologue, il devine les Fêtes quand elles font venues.

☞ ASTROMÈTRE. s. m. Voyez Héliomètre.

ASTRONOME. s. m. Celui qui observe les astres, qui connoît leur mouvement, & qui explique tous les phénomèmes du ciel. Astronomus. Eudoxe, Bérose, Thalès, Hipparque, Pherecydes, Ptolomée, Copernic, Tychobrahé, Kepler, ☞ Clavius, Descartes, Mersenne, Neper, Riccioli, Grimaldi, Hevelins, Cassini, Huygens, Newton, Roemer, Halley, de Chale, Wolfius, de la Hire, &c. ont été de grands Astronomes. (pendant leur vie disent les Vocabulistes.)

Ce mot vient du Grec ἄστρον, & νόμος.

ASTRONOMIE. s. f. Science qui enseigne à observer & à connoître le mouvement & la disposition des astres, leurs grandeurs, leurs distances, & leurs éclipses. Astronomia. L’Astronomie est une science certaine & sublime, & c’est le plus haut effort de l’esprit humain. L’Astronomie fut premièrement enseignée aux Grecs par Thalès, & selon Diogène Laërce, ils la tenoient des Egyptiens, & ceux-ci des Chaldéens. Eudoxe, qui l’enseignoit vers la 103e Olympiade, l’avoit aussi apprise des Egyptiens. Vitruve, Liv. IX, ch. 1, dit qu’un certain Bérose, Babylonien, apporta cette science de la Babylonie même en Grèce, & qu’il ouvrit même une Ecole d’Astronomie dans l’ile de Cos. Pline ajoute Liv. VII, ch. 37, qu’en considération de ses prédictions admirables, les Athéniens lui érigèrent dans la place publique, appelée Gymnase, une statue dont la langue étoit dorée. Si ce Bérose est le même que l’Auteur des Babyloniques, il florissoit vers le temps d’Alexandre. On ne remonte pas plus haut que les Chaldéens, & même parmi les Anciens le mot de Chaldéen se prend pour Astrologue. Vail. Quelques Auteurs ont cependant attribué l’invention de l’Astronomie aux premiers Hébreux, & quelques-uns même aux premiers hommes, fondés sur l’autorité de Josephe, & sur ce qu’il rapporte des deux colonnes de Seth : les Musulmans l’attribuent à Hénoch, qu’ils appellent Edris. D’autres "Orientaux l’attribuent à Caïnan fils d’Arphaxad. Mais il ne paroît pas à d’autres que ces sentimens soient vraisemblables, parce que dans la langue de ces premiers hommes, c’est-à-dire, la langue hébraïque, ils ne trouvent point de termes d’Astronomie, qui se trouvent au contraire tres-souvent dans le chaldéen. Cependant il y en a dans quelques endroits de l’Ecriture, & sur-tout dans Job & dans les livres de Salomon.

Rudbeck, dans son Atlantide, a soutenu que les Suédois sont les inventeurs de l’Astronomie. Il en allègue pour raison, que la grande variété de leurs jours leur fit soupçonner de la rondeur de la terre, & qu’ils étoient à l’une des extrémités du globe. Ceux qui sont situés vers le milieu, n’appercoivent presque point les divers changemens que produit l’ombre, & la figure convexe de la terre. Mais les Suédois qui en faisoient la triste expérience, s’appliquèrent à en rechercher la cause ; & guidés & instruits par l’extrême opposition des saisons, ils découvrirent aisément que le soleil borne & renferme son cours dans certains espaces du ciel, & qu’il roule invariablement sur certains cercles par une vicissitude perpétuelle. Mais on ne prouve point des faits historiques par de semblables raisonnemens, qui prouvent tout au plus que cela a pu être, mais non pas que cela ait été.

L’Astronomie fut cultivée en France du temps de Charlemagne ; & l’an 807 on fit à Aix-la-Chapelle des observations d’éclipses & du cours des Planètes. P. Daniel. Longomontanus a fait un livre intitulé Astronomia Danica ; Jean-Baptiste Morin un autre, de Astronomia Gallica.

Il est probable que l’Astronomie a été en usage parmi les Indiens. Les Brames ont les tables des anciens Astronomes pour calculer les éclipses & ils savent même s’en servir. Leurs prédictions sont assez justes aux minutes près, qu’ils semblent ignorer, & dont il n’est point parlé dans leurs livres, qui traitent des éclipses du soleil & de la lune. Eux-mêmes, quand ils en parlent, ils ne font aucune mention des minutes, mais seulement de gari, de demi-gari, & d’un quart & demi-quart de gari ; le gari est de 29 minutes. Et par conséquent le demi-quart de gari est 1 minutes 3 second. 45 troisièmes.

Astronomie, Astrologie, dans une signification synonyme. L’Astronome, dit M. l’Abbé Girard, connoît le cours & le mouvement des astres. L’Astrologue raisonne sur leur influence. Le premier observe l’état des cieux, marque l’ordre des temps, les éclipses & les révolutions qui naissent des lois établies par le premier mobile de la nature dans le nombre immense des globes que contient l’univers ; il n’erre guerre dans ses calculs. Le second prédit les événemens, tire des horoscopes, annonce la pluie, le froid, le chaud, & toutes les variations des météores ; il se trompe souvent dans ses prédictions. L’un explique ce qu’il fait, & mérite l’estime des Savans. L’autre débite ce qu’il imagine, & cherche l’estime du peuple. Le désir de savoir fait qu’on s’applique à l’Astronomie. L’inquiétude de l’avenir fait donner dans l’Astrologie.

☞ La plupart des gens regardent l’Astronomie comme une science inutile & de pure curiosité ; parce qu’apparemment ils ne font pas réflexion qu’ayant pour objet l’arrangement des saisons, la distribution du temps, la diversité de la route des mouvemens célestes, elle aide à l’agriculture, met de l’ordre dans toutes les choses de la vie civile & politique, & devient un fondement nécessaire à la Géographie & à l’art de la navigation. Mais si, avec toutes ces réflexions, ils n’ignorent pas encore que sans cette science l’histoire & la chronologie ne seroient que confusion, perpétuellement contraires à elles-mêmes, à cause des différentes manières dont les nations différentes ont réglé leurs jours & leurs années ; alors ils rendront à l’Astronomie & à ceux qui la cultivent, l’estime dûe à leur mérite.

☞ L’Astrologie est à présent moins à la mode qu’autrefois, soit parce que le commun des hommes est plus déniaisé, soit parce que l’amour du vrai est plus du goût des habiles gens, que l’envie d’éblouir & de duper le monde ; soit enfin parce que le brillant de la réputation ne dépend pas aujourd’hui du nombre des sots, mais du discernement des sages.

ASTRONOMIN. adj. masc. Chapelle a donné le nom de Troupe du Parnasse astronomin à une assemblée d’Astronomes. C’est la rime qui lui a fait inventer ce mot, sans quoi il se seroit servi de celui d’astronomique. Voyez Luneter.

ASTRONOMIQUE. adj. m. & f. Qui appartient à l’Astronomie. Astronomicus. On dit, des observations, des Tables Astronomiques ; le lever & le coucher astronomique du soleil ; l’anneau astronomique, & autres instrumens avec lesquels on observe les astres. Les Astronomiques. Astronomica, est le titre que Manilius a donné à son Poëme.

ASTRONOMIQUEMENT. adv. D’une manière astronomique & exacte. Astronomicè. Il faut parler des comètes astronomiquement, & non pas populairement.

ASTROPOLE. s. m. Terme de Fleuriste. Espèce d’œillet. C’est un vjolet brun admirable, sur un blanc de lait fort détaché : sa fleur est assez large ; mais sa plante est délicate & sujette aux pucerons. Il graine, & les marcottes prennent facilement racine. Il a été élevé à Lille. Morin, Traité de la culture des fleurs.

ASTRUNO. Montagne du Royaume de Naples. Astrunus. Elle est près de Puzzol, dans la terre de Labour. Les bains d’Astruno sont des eaux minérales près de cette montagne. Thermæ Astrunianæ. C’est un petit lac où il y a des bains, que l’on prend pour la fontaine que l’on nommoit autrefois Oraxus.

ASTUCE. s. f. Vieux mot & hors d’usage, qui signifioit autrefois finesse. Astutia, calliditas, dolus. Le renard est une bête qui a beaucoup d’astuce, de finesse.

Astuce enfin & fraude au regard louche,
Vices hideux. R.

☞ Le mot d’astuce n’est plus d’usage, & nous devons le regretter. Il a sa nuance qui le distingue de la finesse & de la ruse. C’est proprement une finesse pratique dans le mal, mais en petit. C’est la finesse qui a pour objet le mal, qui nuit ou qui veut nuire. Dans l’astuce La finesse est jointe à la méchanceté, & à la fausseté dans la ruse.

Ce mot est dérivé du latin astutia, signifiant la même chose. Le latin astutia vient du grec ἄστυ, qui signifie Ville ; parce que ceux qui habitent dans les villes, sont plus rusés.

ASTURA. Rivière & bourg de la Campagne de Rome. Astura. La rivière d’Astura se décharge dans la mer de Toscane, à dix lieues au-dessus de Rome : elle a à son embouchure le bourg d’Astura. C’est près de cet endroit que Cicéron fut tué, après avoir été proscrit par Antoine.

ASTURCON. s. m. Qui est des Asturies. Asturco. Entre les chevaux d’Espagne, les Andalous sont estimés pour la beauté, les Portugais pour la légèreté, & les Asturcons pour la force. ☞ Maty. Asturco en latin signifie un cheval d’Espagne, qui va l’amble ; mais le mot françois asturcon n’est pas reçu.

ASTURIE. Asturia, ou comme on, dit plus communément, Asturies. Asturiæ. Province d’Espagne, qui a titre de principauté, & qui est baignée au nord par la mer de Biscaye ; les montagnes des Asturies la séparent au midi de la vieille Castille, & du royaume de Léon ; elle a au levant la Biscaye, & la Galice au couchant. Il y a l’Asturie d’Oviédo, Asturia Ovetana, & l’Asturie de Santillana ou Santillane, Asturia S. Julianæ. La première est la partie occidentale de la principauté des Asturies : Oviédo en est la capitale ; l’autre est la partie orientale, dont Santillana est capitale ; nom corrompu de Sancta Juliana. Le premier Infant d’Espagne porte le titre de Prince des Asturies. Les montagnes des Asturies, Vindius ou Vinnius mons, Asturiarum montes : c’est une grande chaîne de montagnes, qu’on regarde comme une branche des Pyrénées. Elle s’étend de l’orient à l’occident, & sépare les Asturies du royaume de Léon, & d’une partie de la Castille vieille.

Les Auteurs sont partagés sur l’origine de ce mot : les uns disent que dans la langue des Basques, Asturia veut dire une terre oubliée, un pays oublié, & que ce nom a été donné à cette province à cause de sa stérilité. D’autres disent que le nom d’Asturie vient d’un Capitaine Grec nommé Astur, qui vint peupler cette province après la prise de Troye. Quelques autres disent que la rivière nommée Asturia qui coule dans ce pays, lui a donné son nom. Enfin il y en a qui disent que des troupes de Celtes, nommés Astires, passerent de Galice, où ils avoient demeuré quelque temps, dans la province qu’on nomma depuis Asturie, du nom de les nouveaux habitans. Voyez Covarruias.

ASTURIEN, ENNE. s. m. & f & adj. Qui est des Asturies. Astur. Orose décrit assez amplement la guerre qu’Auguste fit contre les Asturiens. Tillem.

La nouvelle de tout ce qui s’étoit fait dans ce conseil des Asturies, étant portée en même-temps aux Chrétiens de Cantabrie & de Galice, on vit bientôt des Députés de leur parti venir secrétement offrir leur secours, & demander à être admis dans la confédération des Asturiens. P. d’Orl.

☞ ASTYNOMES. Voyez l’article suivant.

ASTYNOMIE. s. f. Terme grec. Police, Astynomia. On appeloit Astynomes, à Athènes, les Magistrats qui avoient soin des édifices, & de tout ce qui regardoit la police. C’étoit la même chose que les Ediles plébéiens.

☞ Les Astynomes, selon quelques-uns, étoient dix hommes établis pour avoir l’œil sur les chanteuses & sur les joueurs de flûte. Quelques-uns ajoutent qu’ils avoient aussi l’intendance des grands chemins. Ce nom est grec, ἀστυνόμοι, composé d’Ἄστυ, ville, & de νόμος, loi, ou νέμειν, diviser. Mor.

ASY.

☞ ASYLE. s. m. Voyez Asile.

ASYMMÉTRIE. s. f. Terme d’Arithmétique. Asymmetria. ☞ On le dit d’un défaut de proportion entre deux quantités qui n’ont point de commune mesure. Ce mot est composé de ά privatif, de σύν, avec, & de μέτρον, mesure. C’est en général un défaut de proportion ou de correspondance entre les parties d’une chose. En Mathématique, ce mot est synonyme à incommensurabilité. Voyez ce mot.

ASYMPTOTE. adj. Terme de Géométrie, qui se dit de deux lignes qui s’approchent toujours, & qui ne se coupent jamais, quoique prolongées à l’infini, telles que la Conchoïde, ou Conchyre. Asymptotos. Bertinus a donné des exemples de plusieurs lignes asymptotes, tant droites qu’hyperboliques, tant concaves que convexes ; & il propose un instrument propre pour les décrire, qui est une double équerre qui a la figure d’un T, sur le pied droit de laquelle est une règle mobile, dont l’autre extrémité qui avance au-dessus de l’équerre décrit la figure requise. Les asymptotes d’une hyperbole, sont deux diamètres indéfinis qui passent par les extrémités de deux lignes droites, tirées de côté & d’autre par le sommet de l’hyperbole, perpendiculairement à l’axe déterminé, & égales chacune à la moitié du second axe. Ceux qui ont traité des lignes asymptotes sont chez les Anciens, Proclus, Geminus, Georgius Valla, Rabbi Moses Ægyptius, & Moses Narbonensis, Apollonius Pergeus, Pappus Alexandrinus, Eutocius ; & chez les Modernes, Joannes Vernerus, Marius Bertinus, Oronce Finé, Jérôme Cardan, Jacques Pelletier, & sur-tout François Barocio, Sénateur de Venise, qui en a fait un excellent livre exprès, imprimé en 1586. M. de la Hire a fait imprimer de nouvelles découvertes qu’il a faites dans les sections coniques par des lignes asymptotes.

Ce mot vient d’ά privatif, de σύν, avec, & de πίπτω, je tombe.

ASYMPTOTIQUE. adj. m. & f. Qui appartient à l’asymptote. Asymptoticus, a, um. Si un vaisseau courre entre le méridien & l’équateur, il décrit une espèce de spirale, qui, comme la spirale logarithmique, fait une infinité de tours, sans pouvoir arriver à un certain point où elle tend, & dont elle s’approche à chaque pas. Ce point asymptotique de la Loxodromie est le pôle. Ac. de Sc. 1702. Hist. p. 87.

☞ ASYNDETON. Figure de Grammaire, qui consiste à supprimer les particules qui devroient être entre les mots d’une phrase, & donne par-là plus d’énergie au discours. Par exemple, le veni, vidi, vici, je suis venu, j’ai vu, j’ai vaincu, de César, où la particule copulative est omise. Ce mot est composé d’ά privatif, & de συνδέω, colligo, j’unis. Elle est opposée à la figure appelée Polysyntheton, qui consiste à multiplier les conjonctions.

ATA.

ATABALE, ou ATTABLE. s. m. C’est une espèce de tambour dont se servent les Maures. Atabalus. Quand on fait des entrées de balets composées de Maures, on leur met en main des atabales, & des nacaires.

☞ ATABEK. s. m. Mot Turc, qui signifie proprement Pere du Prince. C’est un nom qu’ont porté plusieurs Seigneurs, Gouverneurs & Instituteurs des Princes de la Maison des Selgiucides. Ces Seigneurs que les Persans appellent Atabékian, devinrent si puissans par la faveur ou par la foiblesse de leurs Maîtres, qu’ils fondèrent & établirent en Asie quatre branches, qu’on appelle ordinairement Dynasties. Voyez ce mot.

ATABULE. s. m. Vent orageux qui règne dans la Pouille, & qui nuit aux arbres & aux vignes. Atabulus. C’est le vent du nord-ouest.

ATACAMA. Grand désert de l’Amérique méridionale. Atacama. Il est dans la province du Pérou, appelée Los Charcas, & s’étend plus de cent lieues entre les Andes & la mer Pacifique, depuis la ville d’Arica jusqu’à la rivière de Capiapo.

ATAD. La place d’Atad, Area Atad. C’est un lieu situé à l’orient du Jourdain, jusqu’où les Egyptiens conduisirent le corps de Jacob, avec Joseph, & où ils firent ses obsèques. Gen. c. V. l. 10. Comme ils pleurerent le mort, ce lieu fut depuis appelé la plainte d’Egypte. Adrichomius prétend que la place d’Atad étoit en-deçà du Jourdain, & que c’est Bethagla. Il se trompe.

☞ ATALA, ou ITALA. Bourg de Sicile. (Les Vocabulistes en font une petite ville) dans la vallée de Démona, entre Messine & Taormina.

ATAMADAULET. s. m. Nom du premier Ministre des Rois de Perse. C’est la même chose que le Grand Visir en Turquie, & à peu-près ce qu’étoit autrefois le Maire du Palais en France. Primus Regni Persici administer. Tavernier écrit Athemat-doulet, & M. Samson Etmadaulet. Ce nom est Arabe, composé de deux mots, Itimade & daulet : il signifie la confiance de la Majesté, ou de la Puissance, ou de l’Empire ; ou, selon Tavernier, l’appui des richesses ; ou, selon M. Samson, l’appui de la Puissance. L’Atamadaulet ne commande pas ordinairement les armées en Perse, comme le Grand Visir les commande en Turquie. L’Atamadaulet en Perse est Chancelier du royaume, chef du conseil, sur-Intendant des Finances ; il prend soin des affaires étrangères, du commerce ; les pensions & les gratifications ne se payent que par son ordre : il est comme le Viceroi de Perse ; il vise les mandemens du Roi en écrivant au dos ces paroles, Bende derga Ali il Alia Etmadoulet ; c’est-à-dire, Moi qui suis soutien de la puissance, créature de cette Porte, qui est la plus sublime de toutes les Portes.

L’Atamadaulet tire chaque mois lunaire mille tomans du trésor pour la dépense, qui font cinq cent quarante mille livres de notre monnoie ; mais c’est là le moindre de ses revenus, car étant comme le maître de faire donner les gouvernemens, & les charges de la guerre & des finances à qui il lui plaît, il tire de grosses sommes des compétiteurs. De plus, tous les Gouverneurs des provinces, & les Officiers de la Cour étant obligés de donner les étrennes au Roi, ils n’osent oublier l’Etmadaulet. Il tire aussi un droit des provisions des charges qu’il distribue. Il a sous lui six Visirs ou Substituts qui l’aident à manier les finances, & qui composent le conseil dont il est le chef. L’Etmadaulet a encore sous lui deux Secrétaires qui expédient tous les mandemens de la Cour. Samson.

ATANAIRE. s. m. ou plutôt adj. pris substantivement. Terme de Fauconnerie. Il se dit d’un oiseau de proie qui a le pennage de l’année précédente sans avoir mué ; & atanaire veut dire pennage d’antan ; vieux mot qui se dit encore en certaines provinces pour marquer l’année précédente.

ATANT. adv. Vieux mot. Alors.

ATARAXIE. s. f. Terme de Philosophie. Il est purement grec. Ataraxia. Les Pyrrhoniens appeloient ainsi un état tranquille, & paisible de l’ame, & cette immobilité de jugement qui exempte des agitations que nous recevons de l’opinion & de la science que nous nous imaginons avoir. Ils faisoient consister le souverain bien dans cette ataraxie. Cette assiette de jugement droite & inflexible des Stoïciens, qui recevoient tous les objets sans application, & sans consentement, les acheminoit à l’ataraxie.

ATARGIER. v. n. Vieux mot. Tarder.

ATAROTH. Ville de la Terre-Sainte. Ataroth. Elle étoit au-delà ou à l’orient du Jourdain, dans la tribu de Gad.

Il y avoit une autre Ataroth en deçà du Jourdain, dans la tribu d’Ephraîm, que l’on appeloit, ou simplement Ataroth, ou Atharoth Addar.

☞ ATAVILLOS. (les) Peuple de l’Amérique méridionale, au Pérou, vers la source de la rivière de Xauca, environ à quarante lieues de la mer pacifique, & à quarante de Lima.

ATAXIE. s. f. Terme de Médecine. Irrégularité, défaut d’ordre, trouble, confusion. Ce mot est grec, ἀταξία, formé d’ privatif, de τάξις, ordre, régularité. Ce mot signifie dans un sens particulier, un dérangement & une irrégularité dans les crises & les paroxysmes des fièvres.

ATC.

ATCHÉ. s. m. C’est la plus petite monnoie qui se fabrique, & qui ait cours dans les Etats du Grand Seigneur. Elle est d’argent, & vaut environ quatre deniers & un neuvième de France.

ATE.

ATÉ. s. f. Terme de Mythologie. Ate. C’étoit chez les Grecs, la Déesse malfaisante, qui envoyoit le mal aux hommes : Ἄτη, Ate, signifie mal, dommage. Ceux qui écrivent Atée, ignorent également & le grec & l’usage ou l’analogie des noms françois. Les noms grecs terminés en η, que nous faisons passer en notre langue, y changent seulement l’η en é fermé ou masculin. Ceux qui sont d’un plus grand usage, prennent l’e muet ou féminin : comme Hélène, Pénélope, Melpoméne, Terpsichore. Ceux qui sont moins usités, ont l’é fermé, marqué d’un accent aigu : Agavé, Zété, Arsinoé, Arété, Daphné : mais jamais nous n’y ajoutons un e, & l’on ne dit point Hélénée, Pénélopée, Agavée, Zétée. Il ne faut donc point dire Atée, mais Ate, Déesse malfaisante, qui prenoit plaisir à engager les hommes dans des malheurs, en leur troublant l’esprit.

ATELIER. s. m. Prononcez l’a long. Lieu où plusieurs ouvriers travaillent ensemble. Officina. Il se dit principalement des bâtimens. Il y a un grand atelier au Louvre, à l’Arsenal. On le dit aussi des lieux où les Charpentiers, Peintres, Sculpteurs, & autres, tiennent plusieurs ouvriers qui travaillent sous leurs ordres.

☞ On dit plus communément Chantier des Charpentiers, Marchands de bois, constructeurs de vaisseaux, & Boutique, de presque tous les Arts mécaniques. Les ouvrages se font dans l’atelier & dans la boutique, & se renferment dans le magasin. Ils restent au contraire sur le chantier jusqu’à ce qu’ils soient vendus ou employés.

Ce mot peut venir de ce qu’en quelques lieux on a donné le nom d’ateliers aux basse-cours des grandes maisons de campagne, à cause que c’étoit le lieu où l’on atteloit les chevaux & les bœufs aux charrues, charriots & charrettes, & où logeoient aussi les Forgerons, Selliers & Charronsn & autres ouvriers nécessaires pour faire valoir les terres ; d’où il a été transporté aux autres lieux où plusieurs autres ouvriers travaillent ensemble.

M. de la Mare, dans son Traité de la Police, Tome II, pag. 1042, rapporte un Arrêt du Parlement, où Hatelier est toujours écrit par un h. Ce n’est pas l’usage.

Atelier, se dit aussi collectivement de tous les ouvriers qui travaillent dans le même lieu sous le même maître. Cet homme sait très bien conduire un atelier.

On le dit quelquefois de la machine dont un ouvrier a besoin pour travailler. Instrumentum. Un tour est l’atelier d’un Tourneur.

Atelier. s. m. En fait de fortifications, se dit d’une excavation de fossé. M. Clermont.

Ateliers de vers à soie. Ce sont des piliers ou des soliveaux dressés dans une chambre avec des perches, des claies, des rameaux, où les vers à soie filent. Isnard.

ATELLA. Ville ancienne de la grande Grèce, aujourd’hui royaume de Naples. Atella. Elle est dans la Basilicate, au pied du mont Apennin, & aux contins de la Principauté Ultérieure. Ce n’est aujourd’hui qu’un bourg.

☞ Il y a eu anciennement une ville de même nom dans la Campanie, entre Capoue & Naples. On en voit encore les ruines à deux milles d’Aversa. La Mart.

☞ Ni l’une ni l’autre de ces villes ne sauroit être Atella, ville de Toscane, où Diomède prétend que l’on commença à jouer ces sortes de Comédies qui furent nommées Atellanes. M. Dacier traduit ainsi le passage de cet Auteur, en expliquant les 225 vers de l’Art Poëtique d’Horace. Il y a une troisième espèce de Comédies Romaines, qui ont été appelées Atellanes, du nom d’Atella, ville de Toscane, où elles ont commencé.

☞ L’Abbé Danet dans son Dict. des Antiq. Grec. & Rom. attribue à l’Atella de la Campanie l’origine des farces Atellanes ; mais cela ne s’accorde pas avec ce que dit M. Dacier, qui met cette ville dans la Toscane. Il est pourtant vrai que Diomède ne parle ni de la Campanie, ni de la Toscane, & qu’il dit simplement, à civitate Oscorum Atella in quâ primum cœptæ, Atellanæ dictæ sunt.

ATELLANES. s. f. C’étoient chez les Romains certaines pièces comiques & satyriques. Fabulæ Atellanæ. Elles étoient moins boufonnes que les petites pièces, & les farces qui se jouent sur le théâtre François ; mais elles étoient moins graves & moins sérieuses que les Tragédies, ou les Comédies grecques, ou latines. On les appeloit Atellanes, d’Atella, ville de Toscane, où ces sortes de pièces furent représentées la première fois. Elles devinrent si licencieuses, & on y mêla tant de représentations lascives & impudiques, que le Sénat fut obligé de les défendre.

ATENANCHE. s. f. Induciæ. Vieux mot, qui a signifié suspension, cessation d’armes pour quelque temps, que des amis communs obtenoient des Gentilshommes qui étoient en guerre. Selon Beaumanoir, quand deux Gentilshommes étoient en guerre, celui qui appréhendoit d’être opprimé, avoit quatre moyens de se délivrer de la fureur de son ennemi. Le premier étoit l’atenanche par amis, le second la trêve par amis, le troisième la trêve par justice, le quatrième l’assurement.

ATÈNE, ou ATHÈNE. Bourg du royaume de Naples. Atina, Athenum. Il est dans la Principauté supérieure, sur le Négro. Athène étoit autrefois épiscopale : elle a aujourd’hui titre de principauté.

ATERGATIS. s. f. Terme de Mythologie. Atergatis. Déesse des Syriens. Strabon, Liv. XVI, l’appelle Atergata, & Desceto. Plin. Liv. V, ch. 33, la nomme Atergatis, & dit que Derceto étoit le nom que les Grecs lui donnoient. Diodore de Sicile dit, Liv. II, qu’elle avoit le visage d’une femme, & le reste du corps de poisson. Lucain, qui avoit vû cette idole, dit qu’elle avoit la moitié du corps de femme, & l’autre de poisson. Cela a fait croire à quelques Savans, & entr’autres à Selden, que c’étoit Dagon dont parle l’Ecriture dans le Livre des Juges. Vossius donne à ce mot une étymologie qui revient à ceci ; car il prétend qu’il est formé de אדיר, adir, grand, puissant, & דג, dag, qui signifie poisson. Quelques-uns disent que la mere de Sémiramis eut tant de regret d’une foiblesse à laquelle elle se laissa aller, qu’elle se jeta dans un lac ; & comme on ne put retrouver son corps, on crut qu’elle avoit été changée en poisson ; que c’est pour cela que les peuples de Syrie ne mangeoient point de poisson, & que ἄτερ γάτιδος signifie en Syrie sans poisson. Macrobe au contraire dit qu’Atergatis étoit la terre qui avec Adad, qui est le Soleil, produisoit tout, selon l’opinion des Assyriens. Mais Arhénée, Liv. VIII, dit que Gatis fut une Reine qui aimoit extrêmement le poisson, & que pour en avoir à souhait, elle avoit défendu que personne en mangeât, ἄτερ γάτιδος, c’est-à dire, excepté Gatis. Ainsi, c’est là, selon lui, l’étymologie de ce nom. Selden croit qu’Atergatis est une corruption d’Astaroth. Voyez ce mot, & Kirker, Œdip. Ægypt. Tom. I.

ATERMOIEMENT. s. m. Terme de Palais. ☞ Contrat passé entre un débiteur qui a fait faillite, ou qui est dans le cas de la faire, & ses créanciers, par lequel ils lui donnent un terme pour les payer, quelquefois même en lui faisant remise absolue d’une partie de ce qu’il leur doit. Dilatio diei pecuniæ. L’atermoiement est forcé ou volontaire. Dans l’atermoiement forcé, le débiteur obtient des lettres de Chancellerie, par lesquelles le Prince donne un terme, ou un délai à un débiteur pour payer ses créanciers qui le pressent. On les appelle aussi Lettres de répi. L’atermoiement volontaire est un simple contrat entre les créanciers & les débiteurs. Le débiteur qui a obtenu un atermoiement de ses créanciers, ne peut plus faire cession. Les créanciers hypothécaires ne sont obligés d’entrer en aucune composition, ou atermoiement avec le débiteur.

ATERMOYER. v. a. Terme de Pratique & de Commerce. Accorder un terme pour payer, ou prolonger celui qui est échu. Diem pecuniæ proferre, differre. ☞ Atermoyer un billet, une lettre de change, une promesse.

s’Atermoyer, v. récip. S’accommoder avec ses créanciers pour les payer à certains termes après l’échéance du temps fixé par les titres de créance. Il s’est enfin atermoyé avec ses créanciers à six termes d’année en année ; à tant de temps, & à tant de payemens.

Atermoyé, ée. part. Billet atermoyé. Dilatus pecuniæ dies.

ATERRAGE. Voyez Atterrage.

ATERRIR. Voyez Atterrir.

ATH.

ATH. Ou, comme écrivent les Flamands Aeth. Ville du Hainaut, sur le Dender, entre Mons & Oudenarde. Atham. Cette ville n’est pas grande ; mais elle est belle, & fortifiée. Jean Zuellard d’Ath a fait la description de cette ville, imprimée en 1610.

ATHABOR. s. m. Etoile fixe, qui s’appelle autrement le grand Chien, ou Syrius. D’autres la nomment Ethabor, au lieu d’Athabor.

ATHACH. Ville de la Terre-Sainte dont on ne sait pas trop la situation. Athach. Adrichomius la place dans la tribu de Juda.

ATHALANTE. s. f. Terme de Mythologie. Athalanta. Fille de Schénée Roi de Sciros. Sa beauté la fit rechercher en mariage par la plûpart des Princes voisins ; mais elle déclara qu’elle ne se donneroit qu’à celui qui pourroit la vaincre à la course ; ce qu’aucun ne put faire que le seul Hippomène, qui usa d’adresse en jettant des pommes d’or dans le lieu où elle couroit : Athalante s’étant arrêtée pour les amasser, Hippomène la devança, & ensuite l’épousa.

Dans le langage de la Philosophie Hermétique, Athalante signifie l’eau mercuriale fugitive qui est arrêtée par les pommes d’or, c’est-à-dire, les soufres fixans & coagulant.

ATHANASE. s. m. Athanasius. Nom d’homme, qui signifié immortel ; il vient du grec, & est formé de l’ privatif, & de θνήσκω, morior, je meurs. S. Athanase étoit un grand Docteur de l’Eglise. On fait la fête de S. Athanase le premier jour de Mai.

ATHANASIE. s. f. Ce mot signifié proprement immortalité. Il vient d’ privatif, & de θάνατος, la mort. C’est le nom d’un antidote que Galien décrit dans le huitième livre de ses Topiques, comme un remède propre pour les maladies du foie, la gravelle & la jaunisse. Voyez la manière de le préparer dans le Dictionnaire de James.

C’est encore le nom d’un Collyre blanc, dont Ætius donne la description dans son septième livre des Collyres blancs & doux. Gorrée.

ATHANATE. s. m. Athanatus. Ce mot est grec & signifie immortel, composé de l’ privatif, & de θάνατος, la mort. Les Athanates étoient chez les anciens Perses un corps de cavalerie de dix mille hommes toujours complet, parce qu’aussi-tôt qu’il en mouroit un, on en mettoit un autre à sa place. C’est de-là qu’on les appela Athanates, ou immortels. Hésychius, Suidas, Hérodote, Liv. VII, p. 576. Quint-Curce, Liv.III, ch. 3, ont parlé des Athanates.

ATHANOR. s. m. Terme de Chimie. C’est un grand fourneau immobile fait de brique ou de terre, qui a une tour au milieu, où l’on met le charbon, qui communique sa chaleur par des canaux ou ouvertures qui sont aux côtes du foyer, à plusieurs vaisseaux voisins dans lesquels on fait différentes opérations en même temps. On en voit plusieurs constructions & figures dans la Pharmacopée de Charas.

Ce mot vient des Arabes, qui appellent tanneron un four. Les Grecs le nommoient ἀκηδὴς, qui signifie, ne donnant aucun soin. On l’a nommé aussi, Piger Henricus, parce que quand on a empli la tour de charbon, il est assez long-temps à se consumer, & il n’est pas nécessaire de renouveler l’aliment du feu. On le nomme encore fourneau Philosophique, ou fourneau des Arcanes. D’autres le dérivent du vieux mot françois atta, qui signifioit fournaise, Borelli. D’autres d’ἀθάνατος, immortel, parce que ce fourneau est le plus propre à conserver le feu, dont on a besoin pour les opérations de Chimie.

D’autres disent que ce mot est originairement hébreu שגור, tannour, un four, une fournaise. De-là il a passé dans les autres langues, & sur-tout en arabe, ou tannour signifie un four, une fournaise, & avec l’article אלשגור, altannour, qui à cause du tesdit lambdale se prononce atthanour, d’où s’est fait notre Athanor, que les Chimistes ont pris apparemment des Médecins Arabes.

ATHAR, ou ETHER. Ville de la Terre-Sainte, qui fut ôtée à la tribu de Juda, pour être donnée à celle de Siméon. Athar, Ether.

ATHÉE. s.m. & f. Qui nie la Divinité, qui ne croit pas en Dieu, ni en la providence. Atheos, Atheus. En général on est Athée quand on ne reconnoit point d’Etre supérieur à la nature, c’est-à-dire, aux hommes & aux êtres sensibles du monde : ainsi Spinosa est un véritable Athée, quoiqu’il parle de Dieu dans tous ses ouvrages & quelques Savans ont tort de l’appeler Déiste, puisqu’il ne reconnoît point d’autre Dieu que la nature, dont les hommes font partie, & qu’il n’y a point d’Athée qui nie l’existence du monde, & qui ne soit convaincu de la sienne propre en particulier. On a appelé Lucien Athée, quoiqu’il ne se soit moqué que des faux Dieux.

Dans l’antiquité païenne ce mot avoit un sens plus étendu que celui que nous lui donnons aujourd’hui, & signifioit non-seulement celui qui ne croit point de Dieu, mais encore celui qui croyant des Dieux, soutient qu’ils ne prennent aucun soin de nous, & nie la Providence. C’est pour cela que Evémerus, Diogène le Phrygien, Hippon, Diagoras, Sosias & Epicure ont été compté parmi les Athées. Voyez Ælien.

Platon distinguoit trois espèces d’Athées. Les uns qui nioient absolument qu’il y eût des Dieux : les autres qui, convenant de l’existence des Dieux, soutenoient qu’ils ne se mêloient point des affaires humaines : & les autres qui reconnoissoient aussi des Dieux, mais qui s’imaginoient qu’on les apaisoit aisément par des prières, & qu’on étoit quitte des plus grands crimes pour quelques supplications.

Quelques-uns prétendent que le vulgaire dans l’Antiquité appeloit Athées, ceux qui n’adoroient que le Dieu suprême, & non point ceux qui ne reconnoissoient aucun Dieu. Il n’y avoit point, selon eux, d’Athées en ce sens.

On peut être Athée par le cœur ; mais on ne peut pas l’être par l’esprit. S. Evr. Spinosa, le héros des Athées, crut se distinguer en devenant Athée de système & de spéculation. Id. Il est inutile de raisonner contre ceux qui sont Athées par grossièreté ou par débauche, parce qu’ils ne sentent point la force du raisonnement. Pasc. Les Athées les plus déterminés font semblant de respecter les Dieux, de peur de s’attirer l’horreur des peuples, & le châtiment des lois. S. Evr. La superstition entretient & fortifie l’incrédulité des Athées, & leur éloignement pour la Religion.

Taisez-vous, scélérat, m’écriai-je irritée ;
Tout commerce est fini désormais entre nous ;
J’en aurais avec un Athée,
Mille fois plutôt qu’avec vous. Deshoul.

Le mot Athée vient d’α privatif, & de θεὸς Dieu.

Quelques Païens dans la primitive Eglise ont donné ce nom aux Chrétiens, parce que leur Dieu n’est point un Dieu visible & sensible, comme les Idoles du Paganisme ; ou parce qu’ils ne reconnoissoient qu’un Dieu ; & ils traitoient la Religion Chrétienne d’Athéisme. Ainsi Julien, dans son Misopogon, dit aux Magistrats d’Antioche : votre peuple me hait, parce que j’ai embrasse l’Athéisme.

☞ On peut en général distinguer trois sortes d’Athées. Ceux qui nient l’existence de Dieu ; ceux qui nient sa providence ou quelques-uns de ses attributs ; enfin ceux qui croient que l’existence de l’Etre suprême n’est appuyée que sur des preuves insuffisantes. Les premiers sont des ignorans, auxquels il faut apprendre à faire usage de leurs lumières naturelles. Les seconds sont ordinairement des débauchés, qu’il faut faire revenir de leurs égaremens pour les familiariser avec une idée qui les fatigue. Les autres sont des gens livrés à leurs préjugés, qu’il faut éclairer pour les en guérir.

Athée, est aussi adjectif, & signifie, qui est Athée, qui est impie. Impius. Ce sentiment est athée. Cette opinion est athée.

ATHÉISME. s. f. Opinion des Athées, de ceux qui défigurent ou qui détruisent entièrement l’idée d’un Etre suprême. Impietas Deum tollens, atheismus. Le libertinage mène à l’athéisme. Les véritables Savans ne donnent point dans l’athéisme. L’athéisme est plutôt sur les lèvres que dans le cœur. Examinez ces braves de l’athéisme à la mort, & vous verrez le masque qui leur tombe du visage. S. Evr. L’athéisme a été foudroyé par des adversaires redoutables, qui en ont fait voir l’absurdité par des argumens démonstratifs. Boss. Spinosa est le premier qui ait réduit l’athéisme en système, & qui en ait fait un corps de doctrine lié & tissu, selon les manières des Géomètres ; mais d’ailleurs son sentiment n’est pas nouveau. Bayl. Si l’idolâtrie est un crime, l’athéisme en est encore un plus grand, parce qu’il détruit ou rend inutiles toutes les vertus que l’idolâtrie laisse au moins subsister.

Les causes de l’Athéisme sont l’ignorance & la stupidité, la débauche & la corruption des mœurs, la spéculation & le faux raisonnement. Cela fait trois espèces différentes d’Athées. Voyez Clark, de l’Exist. de Dieu, ch. I. L’athéisme est une extravagance, dont l’homme n’est point capable, à moins qu’il ne renonce à lui-même. Abadie. Les Grecs soutenoient que nul parmi les Barbares, c’est-à-dire, parmi tous les peuples différens des Grecs, n’étoit tombé dans l’athéisme ; nul ne doutoit s’il y avoit des Dieux, ou s’il n’y en avoit point, & s’ils se mêloient des affaires de ce bas monde, ou s’ils ne s’en mêloient pas. Voyez Ælien, Var. Hist. L. II, ch. 31. On peut distinguer deux sortes d’athéisme ; l’un absolu, qui nie tout-à-fait l’existence de Dieu ; l’autre relatif, qui ne nie que l’immortalité de l’ame.

ATHÉÏSTE. s. m. signifie la même chose qu’athée ; mais ce mot vieillit, & n’est plus en usage, quoique Beaudouin de l’Académie Françoise s’en soit servi. Il y a des athéistes si détestables, qu’ils tâchent d’avoir des disciples. Baud.

ATHEMAT-DOULET. Voyez Atamadaulet.

☞ ATHÈNE, Ἀθήνη, les Grecs nommoient ainsi la déesse que les Latins appeloient Minerve. De-là vint que la capitale de l’Attique en prit le nom.

ATHÉNÉE. s. m. Athenæum. Lieu public à Rome dans lequel les professeurs des Arts libéraux tenoient leurs assemblés, où les Rhéteuts & les Poëtes lisoient leurs ouvrages, & où l’on déclamoit les pièces, comme il paroît par Capitolin, dans Pertinax. c. 11 ; & dans Gordien, c.3 ; par Lampridius dans Alexandre Sévère, c. 35 ; & par Sidonius Apollinaris, L. II. ep. 9, L. VI. ep.8, L. IX. ep. 14. Il paroît par ce dernier Auteur que ces lieux étoient disposés en amphithéâtres, & qu’il y avoit des sièges, que Sidonius appelle cunæi, comme ceux des amphithéâtres. Aléxandre Sévère alloit souvent dans l’Athénée entendre les Rhéteurs & les Poëtes grecs & latins. Gordien s’étoit exercé dans la jeunesse à déclamer dans l’Athénée. Les deux plus fameux Athénées ont été celui de Rome, & celui de Lyon. Aurélius Victor nous apprend que c’est Hadrien qui fit construire l’Athénée de Rome. Caligula fit construire celui de Lyon célèbre par les grands hommes qui y enseignerent, On se sert encore de ce mot latin, pour signifier les Académies des Savans, les lieux où ils s’assemblent ; mais en françois on le dit peu, ou point du tout.

Ce mot est grec, & vient du nom d’Athènes, ville savante, & où se tenoient beaucoup de ces sortes d’assemblées, ou du nom grec de Pallas, Ἀθήνη, Athénée, Déesse des Sciences, comme si Athénée signifioit un lieu consacré à Pallas, ou destiné aux exercices auxquels elle préside.

ATHÉNÉES. s pl. on adj. pris substantivement. Terme de mythologie. C’est le nom d’une fête des Grecs à l’honneur de Minerve, qui s’appelle en grec Ἀθήνη, Athéné. On appela ensuite cette fête Panathénées. Voyez Meursius de Fer. Græc. p. 7, & dans son Livre des Panathénées.

ATHÈNES. Ville de Grèce, dans l’Attique. Ce nom a la forme plurielle, s’écrivant avec un s à la fin, parce qu’il vient du grec Ἀθῆναι, & du latin Athenæ qui sont pluriels. Cependant nous le faisons singulier, & nous ne disons point, les savantes, les doctes Athènes, mais la savante, la docte Athènes.

Du Loir, dans son voyage du Levant, pag. 310, & suiv. nous a donné la description d’Athènes, telle qu’il la trouva. Plusieurs ruisseaux de fontaine coulent dans les rues, que je m’imaginai, dit-il, venir de celle que les anciens habitans du lieu appeloient autrefois ἐννεάκρουνος. La misère & la pauvreté sont extrêmes en cette ville. Il y a pourtant des gens qui tiennent encore le rang de Nobles dans Athènes. Leur habit est différent du commun : ils portent des cheveux, mais courts, & ; au lieu de tulbens ou de bonnets fourrés, ils ont des toques, comme en avaient autrefois les pensionnaires des collèges de Paris. Leurs vestes sons courtes ; & celle qui sert de manteau, est faite comme celle de Messieurs de la Chambre des Comptes.

La situation d’Athènes est autour de la colline où est bâti le château sur un roc, qui, du côté du midi, est de très difficile accès. Les Turcs sont retirés dans l’enceinte de ce château, & ils ne font pas 60 familles, entre trois ou quatre mille habitans qui peuvent être dans Athènes. Ce château est bâti fort irrégulièrement, & n’a, pour toute façon de forteresse, que de grosses murailles, qui sont si vieilles, qu’on pourroit croire que ce sont encore celles que fit faire Cimon, fils de Miltiades, pour ceindre ce rocher. Ils en sont néanmoins si jaloux, qu’ils n’en permettent guère l’entrée aux habitans, & qu’ils la défendent absolument aux étrangers.

On y voit un temple de marbre blanc, élevé beaucoup au-dessus des murs, qu’on assure être celui de Minerve. Il peut avoir 120 pieds de long, & 50 de large, avec une couverture plate, comme un plancher de maison. Le long des murs il y a de chaque côté dix-sept colonnes canelées, hautes environ de quinze pieds, & larges de six. L’entrée de ce temple est vers l’occident, & au-dessus de la porte il y a des figures en basse taille, qu’on dit représenter un combat de cavaliers, mais qu’on ne peut pas bien discerner de loin. On assûre que dans ce temple, dont les Turcs ont fait une mosquée, se lit encore au dessus de la porte d’une petite chapelle, l’inscription, ΑΓΝΩΣΤΩ ΘΕΩ, qui servit de sujet à saint Paul pour prêcher devant les Aréopagites. Mais je doute fort que ce soit la véritable. Pausanias assurément en auroit fait mention, & il n’est pas croyable qu’elle y puisse être à présent, puisqu’elle n’y étoit pas du temps d’un Auteur qui n’a rien oublié des choses remarquables.

Du côté du midi il y a une petite colline détachée du château, où sont les ruines d’un bâtiment, qu’on voulut nous faire passer pour celles de l’Aréopage : mais on n’y voit aucun reste de colonnes, ni du monument d’Œdipus, qui en étoit proche. Je croirois plutôt que ce fut le lieu d’exercice qu’ils appeloient Γυμνάσιον Πτολεμαῖον.

Vers l’occident, le temple de Thésée se voit encore, comme dit Pausanias, sur une petite éminence qui en est proche, bâti de la même façon, & de pareille matière que celui qui est dans le château, mais un peu plus petit. Il n’a sur chaque côté sur 100 pieds de longueur, que quatorze colonnes, qui sont de 7 pièces, hautes de deux pieds, & sur 40 de largeur il n’en a que quatre, & deux à l’entrée. Entre les chapiteaux & la corniche qui règne tout autour, il y a une belle frise de basse taille, où sont représentés les exploits de Thésée, & particulièrement le combat des Centaures & des Lapithes, & celui des Athéniens avec les Amazones.

Les ports de Phalère & de Pirée, qu’on remarque de là, sont comblés maintenant. Les murs de la ville qui y conduisoient, pouvoient bien être appelés longs, puisqu’ils avoient trois milles. On n’en voit aujourd’hui des vestiges qu’en quelques endroits, non plus que des murs de l’enceinte de la ville, qu’on nous dit avoir été de six à sept milles de circuit.

Vers le midi on voit l’Ecole de Zénon, assez près du château, & au-dessous de ses murs. Il y a deux grandes colonnes de marbre blanc, qui sont l’entrée d’une grotte prise dans le roc. Ceux du pays tiennent qu’elle étoit dédiée au Dieu Pan, & leur opinion n’est pas tout à fait fausse. Pausanias remarque qu’il y en avoit une au même endroit dans le temple d’Apollon & de Pan.

Nous vîmes au milieu de la ville un petit temple octogone, fait de marbre, & qui est encore tout entier, dont Pausanias ne fait point mention. Il a environ 15 pieds de diamètre, & sa voûte n’est que de 24 tables de marbre. A chaque côté des angles par dehors, il y a une figure humaine, avec des caractères grecs qui marquent les noms de huit vents.

On nous montra près de ce temple un petit bâtiment fait comme un fanal, avec six colonnes canelées, hautes de huit pieds, qui soutiennent un cercle épais, gros d’un pied, & haut d’un & demi, autour duquel font des bas-reliefs d’une riche sculpture, qui représentent des jeux marins, & une inscription grecque, si effacée, qu’on ne la peut lire. Ce cercle est couvert d’une seule pierre faite en coquille, qui se tourne aisément, & qui a un chapiteau de feuillages merveilleusement bien travaillés, de la hauteur de deux pieds. On nous a voulu faire passer ce fanal pour l’étude de Démosthène : mais j’ai grand’peine à croire qu’il ait jamais servi à cet usage.

Il y a près de là une longue muraille de marbre blanc, avec huit colonnes de pareille matière, qui sont hautes de 24 pieds, & une grande & très-belle porte avancée, qui est soutenue de quatre colonnes. On nous dit que c’étoit la façade du temple de Thémistocle ; mais, à ce qu’on en peut juger, c’est plutôt un reste de ce superbe temple de Jupiter, que l’Empereur Adrien avoir fait bâtir si grand & si magnifique, que les statues alloient de pair avec les colosses Romains & les Rhodiens, & dans l’enceinte duquel étoit ce trou que les Anciens croyoient avoir servi d’égoût aux eaux du déluge de Deucalion, où les Athéniens jetoient tous les ans une galette faite de miel & de farine de froment. Ce qui me confirme encore dans cette opinion, est qu’on passe de-là par une grande porte pour aller au lieu où est un tarif en lettres grecques, sur une table de marbre blanc, que le même Adrien avoit fait faire pour toutes les denrées qui se vendoient dans Athènes.

Je ne fais si ce superbe bâtiment de marbre Phrygien, dont on voit encore une partie hors la ville, étoit autrefois compris dedans. Son plan a plus de 80 toises, & 120 colonnes cannelées, hautes de 28 pieds, & faites de plusieurs pièces qui le soutiennent. Chaque côté en avoit 15 à double rang : il en reste encore 16, avec quelques architraves dessus : la plus grande parties des bases sont encore en la place des autres : Pausanias ne parle point de l’usage de ce bâtiment. Ils croient dans le pays, que ce fut le lieu de l’assemblée du peuple, & un gentilhomme nous dit qu’on l’appelle aujourd’hui Διδασκάλιον. On y entroit par une seule porte faite en arcade, qui regarde l’occident, & qui est encore en son entier, ornée de festons travaillés avec une merveilleuse délicatesse. C’est au-dessus de cette porte que sont ces vers, que Volaterran dit être dans le château, vis-à-vis le temple de Minerve.


Ἇιδ’ οὐισ’ Ἀσθῆναι Θησέως πρῶτον πόλις
Ἇδ’ Ἀδριανοῦ, καὶ οὐδε Θησέως πόλις

C’est-à-dire, C’est ici Athènes, autrefois ville de Thésée, mais maintenant ville d’Adrien, & non pas de Thésée.

Le théâtre qui étoit pour les jeux publics, n’est pas loin de-là, & on y voit un chemin sous terre, par où se retiroient ceux qui avoient eu du désavantage, afin d’éviter la honte de se représenter aux Assistans.

Le Lycée d’Aristote est à moitié ruiné, & il n’y en a plus que deux colonnes. De l’Académie de Platon, il ne reste qu’un tas de pierres qui en marque la place, & où sont aussi les ruines d’un temple que les Athéniens croient avoir été dédié à Arthémise ; & ils ne se méprennent pas tout-à-fait. Pausanias remarque qu’il y en avoit un en ce lieu consacré à l’amour ; & personne n’ignore que pour le conjugal nous n’en avons point de plus illustre exemple que cette Reine.

Il n’y a pas jusqu’au fleuve Hissus qui ne se ressente du dommage du temps, & de la tyrannie de l’Ottoman. Les Turcs en ont détourné les eaux, pour arroser leurs jardins, & on n’en voit plus que le lit.

Les habitans tiennent que la montagne qui se voit au levant, environ à une lieue de la ville, étoit autrefois revêtue de marbre, & qu’il y avoir dessus une statue de Minerve. Et suivant leur opinion, ce seroit celle que Pausanias appelle Pentelicus ; mais je doute qu’il faille les en croire. Ce qu’ils nous assurent de la qualité des plantes qu’elle produit, qui ont la force de purger par le seul odorat ceux qui en approchent, témoigne, ce me semble, plutôt que c’est le mont Hymettus, où les abeilles faisoient du miel si délicat ; & parce qu’on en tiroit du marbre, cela leur a donné lieu de croire qu’elle en a été revêtue. Les briques que l’on voit encore assez près de ce lieu, servent de témoignage à cette opinion, parce que le mur qui regardoit cette montagne, en étoit bâti.

Outre toutes ces choses, il reste encore dans la ville & aux environs beaucoup de bâtimens ruinés, de morceaux de figures : mais enfin, quoique ces marques de sa première grandeur rendent son état présent encore plus déplorable, elles ne laissent pas pourtant de donner encore de l’admiration à ceux qui les voient. Duloir.

Quelques Auteurs disent que cette ville fut fondée par un certain Osius ; d’autres disent par Acrisius : Pausanias écrit dans ses Attiques que ce fut par Actéus, mais le sentiment le plus commun est que Cécrops en fut le Fondateur vers l’an du monde 2496, & ; 1558 ans avant l’ère chrétienne ; que c’est pour cela qu’elle s’appela d’abord Cecropia ; qu’ensuite elle prit le nom de Mopsus, & s’appela Mopsopia, nom qu’elle changea encore en celui de Ionia, ou Ionie, qu’elle prit d’Ion fils de Xuthus. Enfin, elle prit celui d’Athènes, ou bien d’Attea, fille de Cranaüs, ou bien en l’honneur de Minerve, qu’on appelle en grec Ἀθήνη, Athène, ou Athena. La fable dit qu’il y eut une grande contestation entre Neptune & à Minerve qui des deux donneroit son nom à cette ville ; que pour la terminer, ils convinrent que celui qui produiroit la chose la plus utile au genre humain, l’emporteroit sur l’autre ; que Neptune frappant la terre de son trident en fit sortir un cheval ; que Minerve produisit un olivier & que la victoire lui fut adjugée. Voyez Hyngin, Fabul. Poët. c. 164.

Phurnutus dit qu’il est bien difficile de trouver l’étymologie du mot Athène, que porte Minerve, & qu’elle donna à Athènes. Platon en dit autant dans son Cratyle, p. 407, de l’édition d’Etienne. Il ne laisse pas que de chercher cette étymologie ; & il lui semble que les Anciens avoient eu de Minerve la même idée qu’en avoient les interprètes d’Homère, qui disoient que ce Poëte l’avoit prise pour l’esprit & la pensée ; qu’ainsi il croit que celui qui avoit le premier donné le nom Ἀθήνη, Athène, à cette Déesse, avoit voulu exprimer la même chose ; mais d’une manière plus noble encore, en disant qu’elle étoit la pensée de Dieu, la pensée divine ; ensorte qu’Ἀθήνη, Athène, n’est autre chose que ἡ θεοῦ νόησις, d’où en changeant l’ή en α, selon un dialecte étranger, c’est-à-dire, le dorique ou l’éolique & retranchant la terminaison de νόησις, s’est fait Θεονόη, puis Ἀθήνη. il ajoute qu’on pourroit dire encore qu’on a voulu la nommer Ἠθονόη, composé de νόησις ἐν τῷ ἤθει, la prudence dans les mœurs, ce qui convient parfaitement bien à cette Déesse, & que d’Ἠθονόη, en adoucissant la prononciation, on a fait Ἀθήνη. Ainsi l’explique ce Philosophe à l’endroit que j’ai indiqué. D’autres disent que Athena s’est dit pour Athrena, ἀπὸ τοῦ ἀθρεῖν, c’est-à-dire, du verbe ἀθρεῖν, qui signifie voir, & qu’elle a été ainsi nommée, parce que Minerve est la prudence. D’autres dérivent ce nom de l’α privatif, & du verbe θηλάζειν, allaiter, & veulent que Ἀθήνη, ait été dit pour Ἀθήλη, c’est-à-dire, qui n’a point été allaitée, qui n’a point tété, qui n’a point été en nourrice, parce qu’en effet Pallas n’ayant point été enfant, mais étant sortie du cerveau de Jupiter en âge parfait, elle ne fut point allaitée. Vossius, Lib. II, de Idol. c. 42, dit qu’il ne doute nullement que ce nom ne vienne de l’Orient, ou pour le moins de l’Egypte : il croit qu’on le peut tirer du mot hébreu איתן Ethan, qui signifie fort, robuste, & selon lui encore, perennis, perpétuel, éternel. Il aime mieux néanmoins le faire venir du Chaldéen תנה, tena, si usité parmi les Thalmudistes, & qui est la même chose que l’Hébreu שגה, qu’il interprète, penser, méditer, étudier, enseigner, d’où vient Tanaïm, qui signifie Docteurs. Ainsi Minerve, au sentiment de cet Auteur, a été appelée Ἀθήνη, Athène, parce qu’elle préside à la doctrine, aux études & aux sciences. L’α du commencement est l’article, dont on a seulement changé l’aspiration, comme il est arrivé en beaucoup d’autres noms. Quoiqu’il en soit, la ville d’Athènes prit ce nom, lorsqu’Amphictyon, son troisième Roi, l’eut consacrée à Minerve.

Platon, dans son Critias, décrit ce qu’étoit Athènes dans ces commencemens. Athènes dans sa naissance eut des Rois ; mais ils n’en avoient que le nom : toute leur puissance, presque restreinte au commandement des armées, s’évanouissoit dans la paix. Tourreil. Codrus, contemporain de Saül, fut le dernier. Ses enfans, Médon & Nilée, disputerent le Royaume entre eux. Les Athéniens en prirent occasion d’abolir la royauté, & déclarèrent Jupiter seul Roi d’Athènes. A la place des Rois, ils créèrent sous le nom d’Archontes des Gouverneurs perpétuels ; ils en réduisirent ensuite l’administration à dix ans, & puis à un an. Une puissance aussi limitée que celle-là, contenoit mal des esprits si pointilleux & si remuans. Athènes demeura ainsi longtemps hors d’état de s’accroître, trop heureuse de se conserver au milieu des longues & fréquentes dissenssions qui la déchiroient. Elle apprit enfin que la véritable liberté consiste à dépendre de la justice & de la raison. Id.

Dracon, & ensuite Solon, donnèrent des lois à Athènes : Pisistrate son parent se fit ensuite reconnoître Roi. Il transmit la royauté à ses enfans, qui en jouirent assez long-temps, & jusqu’à Hippias, contre lequel ils gagnèrent la fameuse bataille de Marathon. L’Empire d’Athènes, qui commença peu de temps après cette victoire, dura 73 ans. Les femmes jusqu’au temps de Cécrops avoient eu droit de suffrage : elles le perdirent, pour avoir favorisé Minerve dans le jugement de son procés contre Neptune, à qui nommeroit la ville d’Athènes. Les dix Tribus d’Athènes élisoient par an chacune au sort 50 Sénateurs, qui composoient le Sénat des cinq cens. Chaque Tribu tour à tour avoit la préséance. Id. Cécrops, premier Roi d’Athènes, étoit venu d’Egypte. Athènes a un Archevêque, qui a six suffragans.

Athènes fut encore plus fameuse par les gens d’esprit qu’elle produisit ou qu’elle éleva, & par le loin qu’elle eut de faire fleurir & de cultiver toutes les sciences, que par sa valeur, & ses grands Capitaines. Les dépenses qui se faisoient à Athènes pour le théâtre & pour la représentation des pièces montoient aussi haut,