Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DIÈTE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 333-334).
DIETÈTES  ►

☞ DIÈTE. s. f. Terme de Médecine. Diæta. Ce mot, pris dans le sens général qu’il présente, signifie manière de vivre réglée. Dans cette acception, le mot de diète se rapporte à l’usage de toutes les choses qui sont nécessaires pour la vie animale, soit en santé, soit en maladie. On use de la diète pour conserver la santé dont on jouit, pour préserver des maladies qu’on peut avoir, & pour se guérir de celle que l’on a.

Diète. Dans l’usage ordinaire, signifie le régime prescrit par le Médecin, par rapport au boire & au manger, qui règle la qualité & la quantité de l’un & de l’autre. Le Médecin a ordonné une diète exacte à son malade. La diète est très utile & très-nécessaire dans les maladies, parce qu’on doit éviter, autant que l’on peut, de distraire par la coction des alimens, la nature qui est toute entière occupée à digérer, & à chasser en-dehors l’humeur morbifique. L’Emery.

☞ Et, comme les Médecins prescrivent ordinairement aux malades de prendre peu de nourriture, d’en prendre moins qu’à l’ordinaire, on appelle communément diète ce retranchement, cette diminution de la nourriture qu’on a coutume de prendre. Ainsi faire diète, se mettre à la diète, c’est prendre peu de nourriture, se borner à une petite quantité d’alimens, ordinairement liquides. La diète est un souverain remède à tous les maux qui viennent de la réplétion. Une diète exacte ne convient nullement à ceux qui se portent bien. L’Emery.

☞ Ce mot vient du Grec διαιτα, qui signifie régime.

Diète de l’Empire, c’est une Assemblée générale des Etats ou Cercles de l’Empire, pour délibérer des affaires publiques. Imperii comitia, principum ac civitatum, aut legatorum conventus. La Diète a été convoquée à un tel jour, & en un tel lieu. Les diètes de l’Empire se tiennent ordinairement à Ratisbonne. En Suisse on appelle aussi diètes, les Assemblées des Cantons pour leurs affaires communes. On dit diète d’Ausbourg, diète de Nuremberg, diète de Ratisbonne, diète de Spire, diète de Wormes, pour marquer les endroits où ces Assemblées se sont tenues. L’Envoyé du Roi à la diète de l’Empire. On a proposé une telle affaire à la diète.

Les Diètes de l’Empire dans la Bulle d’or de l’Empereur Charles IV. & dans les décrets de l’Empire, sont appelées Curiæ regni, Curiæ solemnes, Curiæ regales. C’est à l’Empereur à les indiquer : il doit demander auparavant le consentement des Electeurs, & même des autres Etats de l’Empire ; mais celui-ci n’est pas nécessaire : celui des Electeurs l’est. L’Empereur ne doit indiquer la diète que pour la nécessité ou l’utilité & salut de l’Empire. Il ne le doit jamais faire que pour une grande raison. Les Electeurs en sont Juges, & ne doivent point permettre la convocation sans cela. Quand l’Empereur a obtenu le consentement des Electeurs, il indique la diète non pas par un décret général, mais par un décret spécial & particulier, qu’il envoie à chacun des Etats de l’Empire. Le tems de la convocation n’est point aujourd’hui déterminé par les lois : il dépend de l’Empereur de le fixer.

Quant au lieu où les diètes se doivent tenir, Constantin III. avoit réglé qu’elles se tiendroient toujours à Arles : ensuite elles se sont tenues à Mayence, puis à Francfort, quelquefois dans une campagne fort agréable appelée Romalie, & située près du Pô & de Plaisance en Italie. Elle s’est tenue à Nuremberg. Depuis Charles V, il est défendu à l’Empereur de les tenir hors de l’Allemagne. Le choix du lieu dépend de l’Empereur. Un mineur n’est point appelé aux diètes ; son tuteur ou son curateur l’est à sa place. Un majeur y est appelé, quand même il n’auroit point encore reçu l’investiture de ses Etats : de même un Prince Ecclésiastique y a place, avant même que d’avoir été consacré. Le siège vacant, on y invite le Chapitre. Autrefois on y a même invité des Princes alliés de l’Empire. Les Abbesses ne peuvent y assister : elles le pourroient par d’autres personnes qu’elles délégueroient. Les villes y assistent aussi par leurs Députés. Ceux qui ont droit d’y assister, doivent s’y trouver en personne, & ne peuvent s’en dispenser sans grande raison, & leur excuse doit être approuvée : mais aujourd’hui on n’y assiste guère que par Députés, au moins les Electeurs, & autres grands Etats.

Le Président de la diète est l’Empereur : s’il ne peut y venir, il nomme un ou plusieurs Commissaires pour présider à sa place. Charles V y a souvent présidé par Ferdinand son Frère, & par d’autres Commissaires. Personne n’a droit d’y rien proposer que l’Empereur ou son Commissaire.

L’Empereur ou son Commissaire occupe la place la plus éminente, les Electeurs sont un peu plus bas. Bertaunus dans son Traité de Comitiis, place à la droite l’Electeur de Mayence, le Roi de Bohême, & l’Electeur Palatin : mais, généralement parlant, il se trompe au regard du Roi de Bohême ; car on n’invite point ce Prince communément aux diètes ni aux assemblées particulières de l’Empire ; & il n’y a point séance ; mais cela est vrai des diètes où il a droit d’assister, & des autres même, quand il y est invité & qu’il y vient. D’autres mettent à droite l’Electeur de Mayence, celui de Cologne ; & le Roi de Bohême avec le Palatin à la gauche. Mais l’ordre établi par la constitution de Charles IV, insérée dans sa Bulle d’or, est que l’Electeur de Mayence, celui de Cologne, & le Prince Palatin soient à la droite de l’Empereur. L’Electeur de Trêves siège vis-à-vis de l’Empereur : à gauche sont le Duc de Saxe, le Marquis de Brandebourg : il n’y avoit que ces six Electeurs au temps de la Bulle d’or. Le Comte Palatin ayant été dépossédé vers 1622 le Duc de Baviere fut mis à sa place. En 1648. le Comte Palatin ayant été rétabli, on créa pour lui un VIIIe Electorat, & en 1692 on en créa un IXe pour le Duc d’Hanovre. D’autres disent que l’Empereur a à sa droite les Electeurs de Mayence, de Bavière & de Brandebourg, & à sa gauche ceux de Cologne, de Saxe & le Palatin. S’il y a un Roi des Romains, Cœlestinus dans son Histoire des dietes prétend qu’il est vis-à-vis de l’Empereur ; mais Limnius dit qu’il ne sait rien de certain sur cela. Le banc des Princes & celui des Villes est un degré plus bas que celui des Electeurs, & de deux degrés plus bas que le siége de l’Empereur. Tous les autres Etats de l’Empire sont au même étage. Tout le reste qui regarde les dietes de l’Empire se peut voir dans Limnæus, De Jure imperii, L. IX. qu’il emploie tout entier à expliquer ce qui concerne ces assemblées. On peut voir aussi Bertaunus de Comitiis, Cœlestinus, Hist. Comitiorum Comitiorum, & autres dont Linnæus relève & corrige souvent les fautes.

Diète Electorale. Quand l’Empereur est mort, l’Archevêque de Mayence, comme Doyen du Collège Electoral, est obligé de convier les Collègues à la diete par Lettres, ou par Ambassadeurs. Cette diète se tient à Francfort, & régulièrement elle doit commencer trois mois après la mort de l’Empereur. Les Electeurs y assistent, ou en personne, ou par Ambassadeurs. Les Electeurs s’assemblent dans l’Eglise de S. Barthélémy : on y dit une Messe solennelle. Au commencement de la Préface, les Protestans se retirent, & reviennent à la fin de la Messe, après laquelle les Electeurs font le serment accoutumé pour l’élection : de-là on passe dans un conclave. L’Electeur de Mayence, comme Grand Chancelier de l’Empire, préside à cette Assemblée. Un Electeur peut donner son suffrage à son fils ou à son frère, mais non pas à lui même, à moins que les autres Electeurs ne lui aient donné leur voix : car, en ce cas, il a droit d’y joindre la sienne, & de conclure l’élection en sa propre personne. Quand l’élection est faite, les Electeurs reviennent à l’Eglise. L’Empereur s’assied sur l’Autel, l’Archevêque de Mayence lui fait signer la capitulation. On conduit ensuite l’Empereur dans une tribune de la porte du Chœur, &, s’étant assis avec les Electeurs, il entend delà la proclamation qui se fait de son élection. Les Princes Etrangers envoient à cette diete leurs Ambassadeurs plénipotentiaires.

Diète, en ce sens, vient du mot diæta, qui a signifié premièrement une salle où l’on fait des festins, & ensuite une Assemblée d’Etats, parce que les Allemans tenoient la plupart de leurs conseils à table. Ménage. Diæta se trouve souvent, en ce sens, dans la basse Latinité. Voyez Bollandus, Act. Sanct. Jan. T. I. p. 184. 986. 987. 988. 990. 991. Mart. T. I. p. 590. F.

La diete générale de Pologne, selon les loix, ne se devroit tenir que de deux ans en deux ans. Les affaires pressantes font qu’elle s’assemble tous les ans. Les loix la bornent à 15 jours ; mais souvent on la prolonge de six semaines. C’est ordinairement à Varsovie qu’elle se tient : cette ville, étant la capitale du Royaume & le séjour des Rois, est commode pour ces sortes d’Assemblées : cependant on les a tenues souvent en d’autres villes, mais, parce que, de trois diètes, on doit en tenir une à Grodno en Lithuanie, lorsque, pour des raisons particulières, on est obligé de la tenir ailleurs, il faut que la Noblesse du Grand Duché y consente. C’est le Roi qui en fixe le temps, & qui la convoque par des Universaux, ou lettres circulaires, qu’il envoie à tous les Palatins. Dans un Interrègne, c’est l’archevêque de Gnesne qui le fait. Les dietes particulières, qui se tiennent six semaines avant la générale, y envoient trois Députés, choisis d’entre les Gentilshommes qui y sont présens. Il y a aussi en Pologne des dietes à cheval, qui se tiennent à la campagne : telles sont celles dans lesquelles on élit un Roi : on les appelle Pospolites.

Les Suisses ont des dietes des Cantons Catholiques, des dietes des Cantons Protestans, & une diete générale. Les premières se tiennent à Lucerne ; & le Canton de Lucerne a droit de les convoquer. Les secondes s’assemblent à Areau ; & c’est le Canton de Zurich qui les convoque. La diete générale, composée des Députés de tous les Cantons, tant Catholiques, que Protestans, se tient deux fois l’année, à la fin de Juin & au commencement de Décembre. C’est le premier Canton, qui est Zurich, qui a le droit de la convoquer.

Diète, se dit, dans quelques Ordres Religieux, des Chapitres ou Assemblées de ces Ordres, qui se tiennent entre deux Chapitres généraux, pour ce qui regarde leur discipline. Comitia. Dans l’Ordre des Sylvestrins, outre le Chapitre général, on tient encore tous les deux ans une diete générale, dans laquelle on change les Supérieurs, qui ont fini le temps de leur office, & on pourvoit au bien de la Congrégation. P. Heliot. T. VI. C. 21.

Diète, en Chancellerie Romaine, signifie le chemin qu’on peut faire en un jour ; c’est-à-dire, dix lieues. Diæta. Les Bénéfices sont réputés vacans in Curia, tant qu’on est dans une diete de Rome.

Diète, est une journée de chemin dans le Japon, de trente mille pas Géométriques.

Diète, en Jurisprudence, se dit, en quelques endroits, en matière d’inventaire, de vente, &c. pour vacation. La diete d’un tel jour, c’est-à-dire, la vacation.