Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DETTE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 292).
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DETTE, s. f. Chose due, soit qu’elle consiste en argent, soit en denrées, en corvées, ou autres prestastions. Æs alienum, nomen, pecunia debita. Il y a de plusieurs sortes de dettes. Les dettes actives, ce sont celles dont on est créancier. Æs in quo alius nobis obnoxius est, vel obligatus. Dettes passives, celles dont on est débiteur. Æs alienum cui obstricti sumus. Il y a des dettes personnelles ou mobiliaires, des dettes réelles & des dettes personnelles & réelles tout ensemble. Dette chirographaire, est celle qu’on doit en vertu d’une écriture privée non reconnue en Justice. Æs alienum chirographarium. Dette hypothécaire, celle qu’on doit en vertu de contrats ou de condamnations, & pour laquelle on peut faire vendre des fonds & des héritages. Æs alienum hypothecarium. Dette foncière, qui provient de l’aliénation du fonds dont on n’a pas payé tout le prix. Æs alienum prædiatorium. Dette privilégiée, celle qui doit être payée, avant toutes les autres, comme les droits du Roi, les provisions alimentaires, les dettes de la Communauté. Æs alienum prærogativum. Dettes mobiliaires sont celles qui se peuvent exiger par une action personnelle, & qui ne sont ni foncières, ni hypothécaires. Æs alienum moveas. Les dettes immobiliaires sont les rentes foncières, & constituées à prix d’argent. Grosses dettes, menues dettes. Æs alienum, majus, minus. Souvent on fait revivre des dettes, on va rechercher les dettes d’une personne. Tel paie ses dettes en qualité d’aumône, qui ne le paieroit jamais autrement. S. Réal.

On dit, Faire sa dette de quelque chose ; pour dire, Répondre pour quelqu’un, s’obliger pour lui à faire ou à payer ce qu’il a promis. Cautionem, vadem dare. Une dette solidaire. Nomen solidum certum. Une dette véreuse ou mal assurée. Nomen dubium, incertum. On dit aussi, Jouer la dette, quand on joue autant qu’on vient de perdre, ou de gagner.

On appelle, Dettes criardes, toutes les petites sommes qu’on doit à des Ouvriers, à des Marchands, & qui les font crier quand on ne les paie pas.

Dette, se dit aussi, figurément, pour Devoir, pour tout ce qu’on est obligé de faire. Officium. C’est une dette dont je m’acquitterai avec plaisir. Je m’acquitte d’une dette, & si vous la voyez de bon œil, j’en fais une autre. God.

On dit figurément & familièrement, qu’un homme avoue, confesse la dette ; pour dire qu’il est convaincu, qu’il reconnoît qu’il a tort. Quand il s’agit de reconnoître un bienfait, personne n’avoue franchement la dette. S. Evr. On dit aussi proverbialement, qui épouse la veuve, épouse les dettes ; pour dire, qu’un mari doit payer les dettes de la femme : ce qui n’est pas toujours vrai, chacun se pouvant réserver de les payer sur son propre bien. On dit encore qu’un homme est noyé de dettes ; pour dire, qu’il a plus de dettes que de bien ; qu’il a des dettes par-dessus les yeux, par-dessus les oreilles, par-dessus la tête. On dit aussi, que le chagrin ne paie point de dette.