Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DÉPENSE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 236).
◄  DÉPENS
DÉPENSER  ►

DÉPENSE. s. f. Emploi de son bien, argent que l’on emploie à quelque chose que ce puisse être. Sumtus expensum, impensa. On ne doit faire de dépense qu’à proportion de son revenu. N’insultez point ceux qui sont au dessous de vous par l’éclat de votre dépense, & n’irritez point l’envie, M. Esp. Dans les gens de Cour la modestie de la dépense n’est le plus ordinairement qu’une vertu politique. Id. S. Evremont dit à une belle personne, laissez les autres se ruiner en habits & pierreries ; la nature a fait pour vous toutes les dépenses. La dépense de la Maison de Louis XI qui n’étoit au commencement de son règne que de 28 à 50 mille livres, monta sur la fin du même jusqu’à 80603 livres, suivant la supputation qu’en fait Matthieu. Mascur.

Dépense ordinaire & extraordinaire. Terme de Finance, sont différentes dépenses qu’on fait pour la régie d’une affaire. Les dépenses ordinaires comprennent tous les appointemens, loyers de Bureaux, & autres frais qu’on a coutume de faire & qu’on envisage comme fixes. Les dépenses extraordinaires sont celles qui sont regardées comme casuelles, & qui ne peuvent point être fixées. Les appointemens sont des dépenses ordinaires, parce qu’ils sont fixes. Les gratifications sont des dépenses extraordinaires, parce qu’elles sont casuelles.

Dépenses secrètes. On appelle dépenses secrètes, celles qu’un Souverain permet de faire à un Général d’Armée, & qu’il lui permet de porter à tel point qu’il veut, sans exiger de lui qu’il en rende aucun compte.

On dit faire de la dépense, pour dire, faire beaucoup de dépense. Et faire une dépense sourde, pour dire, faire une dépense secrète qui ne paroît point. Acad. Fr.

Dépense, en termes de Pratique, c’est le chapitre d’un compte qui se met après la recette, dans lequel on fait voir l’emploi de ce qu’on a reçu. Expensum. On ne doit point allouer la dépense d’un compte, si elle n’est justifiée par quittances valables.

Dépense, en Architecture, est un lieu proche de la cuisine, où l’on serre les provisions de la table, & ce qui y sert ordinairement. Cella penaria. Chez les grands Seigneurs on l’appelle office. La dépense est une pièce du département de la bouche.

Dépense, sur mer, c’est le lieu où le maître valet tient les vivres qu’il distribue. Dans les navires de guerre, on place ordinairement la dépense au fond de cale, proche la cuisine, & il y a une ouverture par laquelle on donne les vivres. Mais, dans les Vaisseaux marchands, la dépense est plus souvent placée à la même hauteur que la cuisine. Dans un vaisseau de cent trente-quatre pieds de long de l’étrave à l’étambord, la dépense doit avoir cinq pieds & demi de long, & cinq de large. Dépensier d’un vaisseau, c’est proprement le maître valet.

Dépense, est aussi un terme de Religieux & de Religieuses. C’est le lieu où sont les pots, les tasses, le pain & le vin. Penarium, cellaria. &c.

Dépense, se dit aussi du petit vin qu’on donne à boire aux valets, qu’on fait avec de l’eau qu’on fait cuver sur le marc pressuré, en quelques lieux, boire ou beuvande. voyez Petit-vin.

Dépense, en Hydraulique, la dépense des eaux est leur écoulement ou leur débit en un certain temps. On mesure cette dépense par le moyen d’une jauge percée de plusieurs trous, depuis un pouce jusqu’à deux lignes circulaires. Encyc.

La dépense naturelle est celle que feroient les eaux jaillissantes si leurs conduites & éjutages n’étoient pas sujets à des frottemens.

La dépense effective est celle que l’on conhoît par l’expérience, toujours moindre que celle donnée par le calcul.