Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/COU

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 950-951).
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COU. s. m. on disoit autrefois : col, qui n’est plus en usage qu’en ☞ Poësie ou dans quelques phrases du langage ordinaire, pour éviter ; par exemple, la rencontre des voyelles. Ainsi l’on diroit col court, & non pas cou court. C’est la partie du corps humain, ou de plusieurs animaux, qui est entre la tête & le tronc du corps, qui joint la tête aux épaules. Collum. Les animaux qui n’ont point de poumons, ou de voix, n’ont jamais de cou, comme les poissons & les grenouilles. Sa partie extérieure par devant s’appelle la gorge, ou le gosier, & la partie supérieure de la gorge se nomme le morceau, ou la pomme d’Adam. Fauces. Le trou qui est entre les deux clavicules n’a pas de nom en françois ; en latin il s’appelle jugulum, & en grec σφαγή ; c’est-à-dire, meurtre, parce qu’il est fort aisé de tuer un homme par là. Le derrière du cou est appelé en latin cervix ; & le creux qui est entre la première & seconde vertèbre, s’appelle la nuque, & en latin fossa, ima cervix. Ce qui est au dessous s’appelle le chignon du cou, & par les Médecins epomis. Ses parties latérales commencent depuis le dessous des oreilles, & s’appellent parotides. Ses parties intérieures sont sept vertèbres, l’artère trachée, le larynx, les veines jugulaires, les artères carotides, le nerf intercostal, celui de la huitième paire avec le récurrent, & plusieurs muscles. Philoxène étoit un Philosophe si voluptueux, qu’il souhaitoit avoir un cou de grue, afin qu’il eût plus long-temps le plaisir de goûter le vin & les viandes.

On dit, qu’un homme a un cou de grue, quand il l’a grele & long. On dit d’un père qui flatte ses enfans dans leurs vices, qui leur met la corde au cou. On dit aussi pour assurer une chose, je veux avoir le cou coupé, pour dire, j’y gagerois ma tête. Couper le cou, est en France le supplice des Nobles qui ont commis quelque crime capital. C’est séparer la tête des épaules. Caput adscindere, cervicus resecare. A l’égard des Roturiers, on dit qu’ils seront pendus par leur cou ; pour dire, qu’ils seront étranglés avec une corde. Il en est tout autrement en Turquie, où l’on n’étrangle que les gens de qualité, ou de quelque distinction ; au lieu que l’on n’y coupe le cou qu’aux séditieux, au traîtres à l’Etat, & aux misérables. Et la raison de cela est qu’en général toute mort où il y a effusion de sang est ignominieuse parmi les Turcs. Du Mont. Voyages. On dit du Diable, quand il étrangle des Sorciers, qu’il leur tort le cou. On dit encore, qu’un homme prend ses jambes à son cou ; pour dire, qu’il se résout à partir sur l’heure pour faire quelque message, ou pour s’enfuir.

On dit aussi qu’une personne a sauté au cou de quelqu’un ; pour dire, qu’il l’est allé baiser, caresser, embrasser. In alicujus amplexum ruere ; qu’une mère a toujours ses enfans pendus à son cou, quand elle les caresse souvent. On dit aussi de ceux qui ont un grand fardeau sur les épaules, qu’ils en ont chargé leur cou. Cervicibus onus imponere.

On dit aussi qu’un homme s’est rompu le cou ; pour dire, qu’il est tombé & qu’il s’est blesse : & en ce sens, on le dit figurément de la fortune, ou des affaires. Ce marchand a tant fait de crédit, qu’il s’est rompu le cou, qu’il s’est ruiné. On a rompu le cou à ce projet ; pour dire, on y a mis tant d’obstacles, qu’on l’a empêché de réussir. En voulant s’élever trop haut, l’on tombe, & l’on se casse le cou. S. Evr. Il n’est point de mer si pleine d’orages, ni qui roule plus de vagues, qu’il s’élève de mouvemens dans une multitude, quand elle a la bride sur le cou. Vaug.

Cou se dit aussi de quelque partie des habits qui se mettent sur le cou, ou autour du cou. Le cou de ce pourpoint, de cette chemise est trop étroit, il étrangle. Thoracis collare, amiculum. Un mouchoir de cou, c’est le mouchoir que mettent les femmes sur le cou pour cacher leur gorge. Tour de cou, est un gros linge qu’on met la nuit sur le cou de peur de s’enrhumer. Colli amictus, amiculum. On appelle aussi un tour de cou une grosse gance, ou tresse qu’on coud au haut d’un manteau pour l’attacher.

Cou se dit aussi par ressemblance de plusieurs choses qui sont longues, menues ou étroites. Collum. Le cou d’une bouteille, d’un matras, ou instrument qui sert aux distillations de Chimie, qui a un cou fort long. On le dit aussi des passages étroits qui sont dans les montagnes. Fauces. L’armée a passe le col de Pertus pour entrer en Catalogne.

En termes d’Anatomie, on donne le nom de cou ou col, à différentes choses. Dans les os le cou est la partie la plus étroite d’un os, qui d’étroit qu’il est dans son commencement, se dilate peu-à-peu. Le cou d’un os est placé sous une tête ; & le cou & la tête diffèrent en ce que la tête est presque toujours épiphyse, & le cou apophyse. Le cou de la matrice, le cou de la vessie, le cou de la vésicule du fiel, sont des ouvertures longues & étroites qu’ont ces parties. Le conduit qui est depuis l’orifice interne jusqu’à la principale cavité de la matrice, & qui est de la longueur d’un pouce, ou environ, s’appelle le cou court de la matrice. Voyez Col.

On appelle en Anatomie, le cou du pié, la partie la plus haute du pié de l’homme, & que les Médecins appellent le tarse. Tarsus pedis. Voyez Tarse. L’on ne dit cou du pié que par corruption pour coude du pié ; mais cou du pié est plus commun, ou plutôt le seul que l’on dire dans l’usage ordinaire. L’Académie écrit en un seul mot coudepié : & c’est ainsi qu’on le prononce le plus communément, au lieu qu’il est assez rare à présent d’entendre dire le cou du pié.

Cou de pié, se dit aussi de l’endroit de la forme du soulier qui répond au cou du pié de l’homme. Pars calcei tarso pedis respondens. J’ai besoin d’une forme qui ait le cou de pié fort haut.

Cou de Chameau, terme de Fleuriste : le cou de chameau est ainsi nommé, parce qu’en fleurissant il panche la tête, & courbe le cou comme un chameau. Il est autrement appelé Narcisse à tête longue, ou Narrière couronné. Il s’en trouve de trois sortes, de blanc simple, de double, & de blanc pâle. Le blanc simple étend six feuilles, du milieu desquelles s’élève un godet, dont l’extrémité est bordée d’un petit trait rouge. Le blanc pâle a la fleur plus petite, mais il porte aussi bien davantage, faisant quatre ou cinq fleurs sur chaque tige. Le blanc double, à cause de la plénitude de ses feuilles & de son godet doré, orlé d’une ligne rouge qui l’environne, enfermé d’une couronne, peut justement être appelé le Narcisse couronné. Il est de tous le plus beau & le plus estimé. Plusieurs Fleuristes nomment cette fleur Rose de Notre-Dame. Dans toutes ces trois espèces elle ne veut pas avoir beaucoup de soleil ; elle se plaît dans un fonds de bonne terre grasse & détrempée, de la profondeur de quatre doigts, un demi empan de distance. Il la faut recouvrir avec la terre de potager pour la faire plus facilement fleurir. On les tire tous les trois ans pour en détacher les cayeux. Morin.