Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CORDELIÈRE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 911).
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CORDELIÈRE. s. f. Religieuse du même ordre que les Cordeliers, & qui porte une semblable ceinture. Monialis franciscana.

Cordelière, en terme d’Architecture, est un petit ornement taillé en forme de cordes sur les baguettes, ou un petit liteau qui se met sous les patenôtres, Funiculi variis nodis impliciti.

On appelle aussi cordelière, une petite tresse de soie noire avec plusieurs nœuds à la distance d’un pouce, que les femmes portent quelquefois au cou, en place de coller. Funiculi, bombycini.

CORDELIERE, espèce de serge rase qui se fabrique dans quelques endroits de Champagne, particulièrement à Reims ; elles sont en partie laines d’Espagne, & en partie laines françoises.

On appelle aussi Cordelières, en termes de blason, le filet plein de nœuds que les veuves ou les filles mettent en guise de cordon, pour entourer l’écu de leurs armes. Funiculi variis nodis impliciti. La plûpart tiennent que l’origine en vient d’Anne de Bretagne. Cette Reine de France, épouse de Charles VIII, qui commença à régner en 1483, puis de Louis XII, qui lui succéda en 1498, institua une espèce d’ordre en l’honneur des cordes dont notre Seigneur fut lié en sa passion, & pour la dévotion qu’elle avoit à S. François d’Assise, dont elle portoit le cordon. Elle donna à cette ordre le nom de la cordelière, & pour marque un collier fait d’une corde à plusieurs nœuds entrelacés de lacs d’amour dont elle honora les principales dames de sa cour, pour le mettre autour de leurs armes. M. Herman, dans son Histoire des ordres militaires, dit que cette Princesse institua cet ordre après la mort de Charles VIII, & qu’elle prit pour devise : j’ai le corps delié, faisant allusion au mot Cordelier, parce que la mort de son mari l’avoir affranchie du joug du manage ; mais cette cordelière signifioit plutôt un engagement qu’un affranchissement de loix, & Herman a confondu apparemment cette Reine avec Louise de la Tour d’Auvergne, qui, après la mort de Claude de Montaigu son mari, prit pour devise, j’ai le corps delié, P. Hél. T. VIII, c. 68. Anne de Bretagne institua cet ordre à l’imitation de son père François, Duc de Bretagne, qui en mit un pareil alentour de l’écu de ses armes, à cause de la dévotion qu’il avoit à S. François d’Assise. Claude Faucher, dans ses Origines des armes, dit que la cordelière jadis fut comme la marque d’honneur que la Reine Anne de Bretagne donnait à celles qu’elle choisissoit, ainsi que le collier à coquilles jadis donné par le Roi aux Chevaliers de l’ordre de S. Michel. Voyez sur cet ordre vrai ou prétendu, l’Abbé Justin, T. II, C. 89, p. 845, & Favyn, Hist. de Nav. L. X, p. 524. & L. XVIII, p. 1270. Mais Matthieu Compain, Jésuite, dit qu’on en a vu de plus anciennes à Châlons sur des ornemens. Avant les Cordelières, les armoiriers des hommes & des femmes s’entouroient de guirlandes, de feuilles ou de fleurs, comme les images que les grecs & les romains nommoient stemmata. Les religieux les ont entourées de couronnes d’épines, ou de chapelets & de patenôtres ; ce qu’a retenu encore l’ordre de Malte.

Cordelière, (La) nom d’un vaisseau de Louis XII, l’Amiral de sa flotte. Ce vaisseau avoit été bâti par les soins la Reine, qui en avoit fait la dépense. C’étoit un des plus beaux navires qu’on ait jamais vu. En 1252, dans un combat naval contre les Anglois, la Cordelière accrocha le Régent, le plus grand de la flotte angloise, & ils furent tous deux brûlés sans qu’on ait su par où le feu s’y étoit mis.