Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CONSACRER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 818).
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☞ CONSACRER, v. a. signifie particulièrement l’action du Prêtre lorsqu’il prononce les paroles sacramentelles, en vertu desquelles le corps & le sang de J. C. sont réellement sous les espèces du pain & du vin. Panem & vinum vi verborum divinorum in Christi corpus & sanguinem convertere. Consacrer une Hostie. Le Prêtre consacra autant d’Hosties, qu’il y avoit de Communians.

Consacrer signifie quelquefois simplement convertir l’usage d’une chose prophane en un usage pieux, en sorte qu’elle devienne sainte, sacrée ;☞ sanctifier une chose commune ou profane, par le moyen de certaines cérémonies, la dédier à Dieu. Sacrare, dedicare, consecrare. L’Evêque aujourd’hui consacre, bénit, dédie une belle Eglise ; il a consacré des Calices ; le Pape a consacré des Médailles, des Agnus-Dei, des Pains, des Pâtes ; c’est-à-dire, il a accordé des Indulgences à ceux qui les porteroient avec respect, avec dévotion. Se consacrer au servite des Autels. Consacrer à Jesus-Christ sa virginité, Voyez Consécration.

Consacrer se dit en particulier de toute la cérémonie qui se fait pour conférer la puissance épiscopale ; c’est-à-dire, l’imposition, l’onction du chrême, & la bénédiction que reçoit celui qui est nommé à l’Episcopat. Consecrare. L’Evêque se doit faire consacrer dans trois mois du jour de sa promotion, sous peine de destitution de fruits.

Consacrer une Religieuse. Voyez Consécration.

Consacrer, chez les medaillistes Voyez Consécration.

Consacrer signifie aussi dédier, dévouer, offrir à Dieu sans observer aucune cérémonie particulière. Un tel a quitté le monde, & a consacré le reste de ses jours à Dieu. Devovere.

Consacrer, dans ce sens, se dit aussi en choses simplement morales, Devovere, mancipare. Quand on se consacre à la gloire, il faut renoncer à tout, pour courir après elle.

☞ On dit de même consacrer à quelqu’un son temps, ses veilles, ses soins, lui dévouer tout cela. Consacrer sa jeunesse, sa vie à l’étude, au barreau, à la guerre. Se consacrer au barreau. Il signifie encore perpétuer, immortaliser. Ce Conquérant a élevé un trophée, un arc de triomphe, pour consacrer la mémoire de ses exploits à la postérité.

Consacrer se dit encore dans une signification particulière ; pour dire, relever le mérite d’une chose, y attacher une idée de grandeur, accorder des louanges à des choses qui n’en méritent point. De tout temps l’Esprit humain a eu un penchant naturel à consacrer ses opinions & ses passions, en les imputant aux divinités. S. Real. La fortune consacre les grands crimes, & ils deviennent des vertus, quand ils sont couronnés par le succès. Bizot.

Et je l’ai vûe aussi cette cour peu sincère
Des crimes de Néron approuver les horreurs,
Je l’ai vûe à genoux consacrer ses fureurs.

Consacrer signifie encore, sacrifier, destiner, déterminer quelque chose à un certain usage. Addicere, destinare. J’ai mis une telle somme d’argent à part, que j’ai consacré à augmenter ma Bibliothèque. Consacrez tout votre loisir à l’étude de la sagesse.

☞ On dit que l’Eglise a consacré un mot ; pour dire, qu’elle l’a tellement déterminé à une signification particulière, que hors de-là il n’a point d’usage. Nous avons plusieurs mots consacrés dans l’Eglise Romaine, tels que ceux de consubstantialité, transubstantiation, procession, &c.

☞ On dit aussi que l’usage a consacré une façon de parler ; pour dire, qu’elle est établie par l’usage, & qu’il n’y faut rien changer, quoi qu’elle soit contre les règles. C’est ainsi que nous disons, & devons dire, lettres Royaux.