Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/COMMÉMORAISON

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 715).
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☞ COMMÉMORAISON, s. f. terme d’Eglise & de rubrique dont on se sert, en parlant de la mémoire que l’Eglise fait d’un Saint ou d’une Sainte, le jour qu’on célèbre une autre fête. Quelques Rubricaires prétendent qu’on doit dire commémoration. Commemoratio. Voyez ce mot. D’autres regardent ces deux mots comme absolument synonymes,disent également commémoraison ou commémoration d’un Saint, commémoraison ou commémoration des morts, des fidèles trépassés. C’est ainsi que les livres de l’Eglise nomment le jour que l’on appelle, dans l’usage ordinaire, le jour des Morts ; c’est-à-dire, le jour que l’Eglise a ordonné que l’on priât pour tous les Morts détenus en Purgatoire : c’est le 2 de Novembre. Commemoratio fidelium defunctorum. C’est saint Odilon, Abbé de Cluni, qui institua la Commémoraison générale des Trépassés dans le douzième siècle. On raconte diversement la révélation que l’on dit y avoir donné occasion. Voici ce qui m’en paroît le plus vraisemblable. Un pieux chevalier revenoit Pélérinage de Jerusalem ; s’étant égaré de son chemin, il rencontra un Ermita, qui apprenant qu’il étoit des Gaules, lui demanda s’il connoissoit le Monastère de Cluni & l’Abbé Odilon. Le Pélerin ayant dit qu’il le connoissoit, l’Ermite lui dit : Dieu m’a fait connoître qu’il a le crédit de délivrer les ames des peines qu’elles souffrent en l’autre vie. Quand donc vous serez de retour, exhortez Odilon, & ceux de sa Communauté, à continuer leurs prieres & leurs aumônes pour les morts. Fleury. Nous avons le Décret fait à Cluni pour l’institution de cette solemnité, en ces termes. Il a été ordonné par notre B. Pere Dom Odilon, du consentement, & à la prière de tous les Freres de Cluni, que comme dans toutes les Eglises ont célèbre la fête de tous les Saints le premier jour de Novembre, de même chez nous on célebrera solennellement la Commémoration de tous les fidèles Trépassés, qui ont été depuis le commencement du monde jusques à la fin en cette manière. Ce jour le Chapitre, le Doyen & les Cellériers feront l’aumône du pain & du vins à tous venans, & l’Aumonier recevra tous les restes du diner des Freres. Le même jour après Vêpres on sonnera toutes les cloches, & on chantera l’office des morts. La Messe sera solennelle : deux Freres chanteront le trait, tous offriront en particulier, & on nourrira douze pauvres. Nous voulons que ce décret s’observe à perpétuité, tant en ce lieu qu’en tous ceux qui en dépendant ; & si quelqu’un suit l’exemple de cette institution, il participera à nos bonnes intentions. Tel est le Décret de Cluni. Cette pratique passa bientôt à d’autres Eglises, & devint enfin commune à toute l’Eglise Catholique. Id.