Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/COADJUTEUR

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 653-654).
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COADJUTEUR. s. m. Prélat qui est adjoint à un autre pour lui aider à faire les fonctions attachées à sa prélature, & qui lui succède en vertu du même titre. Adjutor, Vicarius & Successor designatus. Le Coadjuteur a les mêmes prérogatives que l’Evêque même. Le Roi donne des Coadjuteurs aux Archevêques, & Evêques vieux, ou absens, qui ne peuvent pas vaquer à régler leurs Diocèses. Les Coadjuteurs sont nommés Evêques in Partibus Infidelium, parce qu’il faut que le Coadjuteur d’un Evêque soit Evêque : autrement il ne pourroit pas faire les fonctions épiscopales ; comme donner les Ordres, confirmer, &c.

L’Eglise a pris de l’Empire Romain l’usage de donner des Coadjuteurs. Symmachus, l. 10, ep. 56. parle des Aides, ou Coadjuteurs que l’on donnoit aux Magistrats, & il les appelle Adjutores publici Officii.

L’usage des Coadjuteurs est aboli en France à l’égard des Canonicats, des Prébendes & Prieurés, des Cures & des Chapelles. Il y a eu néanmoins de très-grandes difficultés pour les Canonicats & les dignités des trois Evêchés qui sont Metz, Toul & Verdun, & même pour la Bretagne ; comme ces lieux-là ne sont point compris dans le Concordat, les Papes accordent quelquefois des Bulles de Coadjutorerie, ce qui est une véritable réserve contraire au Concile de Trente & aux Libertés de l’Eglise Gallicane ; aussi quand on appelle comme d’abus de ces sortes de Bulles aux Parlemens, elles sont déclarées nulles & abusives.

Le droit de faire des Coadjuteurs appartient au Pape seul, qui doit examiner s’il y a de véritables raisons pour les établir, parce que l’ancien Droit y est contraire ; de plus le Concile de Trente, sess. 25, de Refor. c. 7, condamne tout ce qui a la moindre apparence de succession héréditaire dans les Bénéfices. Il ajoute néanmoins cette restriction, que si la nécessité des Eglises Cathédrales & des Monastères, ou une utilité manifeste demandent qu’on leur donne des Coadjuteurs, on leur en accordera. S. Grégoire, Liv. XI, ép. 7, veut bien qu’on donne un Coadjuteur à un Evêque malade, & qui ne revenant point en son bon sens ne peut demander un successeur, & se démettre ; mais il ne veut point qu’on l’ordonne du vivant de cet Evêque, tout incapable qu’il est de faire les Ordinations ; mais seulement après sa mort ; & qu’en attendant les ordinations se fassent par le Métropolitain de cet Evêque malade.

Ce mot est tiré du Latin, coadjutor, de coadjuvo, qui ne sont point en usage.

Coadjuteur est aussi un aide dans le ministère & gouvernement ecclésiastique : ce qui a lieu dans plusieurs Maisons Religieuses. Adjutor.

Les Coadjuteurs étoient chez les Jésuites ce qu’on appelle Frere Laïcs dans les autres Communautés. Il y en a de deux sortes : les Coadjuteurs spirituels, & les Coadjuteurs temporels. Les premiers sont les aides des Profès ; mais ils ne peuvent pas, comme eux, parvenir au quatrième vœu, qui est celui d’obéissance au Pape. Les Coadjuteurs temporels se donnent à l’Ordre pour servir les autres dans les plus vils Offices de la Maison, comme la Cuisine, la Cordonnerie, &c.