Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHERSONÈSE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 511).
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CHERSONÈSE. Terme de Géographie. Prononcez Kersonèse. M. Tillemont, contre l’usage général, & contre la raison & l’étymologie, écrit Quersonèse. C’est une péninsule ou continent, qui est presque tout environné des eaux de la mer, & qui ne tient au reste des terres que par un isthme, ou petit détroit. Chersonesus. Le Péloponnèse est une Chersonèse, ou presqu’Île, ou péninsule. Ainsi l’on a donné ce nom dans l’antiquité à plusieurs contrées qui sont entourées de la mer, & ne sont attachées à la terre ferme que par un isthme ; & on s’en sert encore aujourd’hui fort bien pour signifier ces presqu’îles des Anciens. Les plus célébres sont,

La Chersonèse du Péloponnèse, Chersonesus Peloponnesiaca, qui s’appeloit aussi simplement le Péliponnèse, étoit ce que nous appelons aujourd’hui la Morée. La Chersonèse de Thrace, Chersonesus Thracica, ou de l’Hellepont, Hellespontiaca, c’est une partie de la Thrace, qui se nomme aujourd’hui le Bras de Saint-George, ou la presqu’île de la Romanie, qui s’étend du midi au septentrion, & qui étoit baignée à l’occident par le golfe de Mélane, & à l’Orient par la Propintide. La Chersonèse Cimbrique, Chersonesus Cimbrica, on l’appeloit ainsi, parce que les Cimbres habitoient ce pays ; c’est le Jutland. Cette opinion est générale, cependant Rudbecks, dans son Atlantique, prétend que c’est la Scandinavie. Voyez le Cimbricæ Chersonesi Prodromus de Jean Mollerus, & l’Isagoge ad Historiam Chersonesi Cimbricæ du même. La Chersonèse Taurique, Chersonesus Taurica, étoit entre le Pont-Euxin & la Palus Méotide, & dunt ainsi nommes des Taures ou Turiens, Tauri, qui l’habitoient ; nous l’apelons aujourd’hui Crimée. La Chersonèse d’Or, Chersonesus Aurea, c’est la péninsule de l’Inde au-delà du Gange est le Royaume de Malada, & la partie méridionale de celui de Siam, & qui aboutit vers l’île de Sumatra, s’étendant du septentrion au midi. Ce nom de Chersonese d’Or, a fait croire à bien des Auteurs que c’étoit l’Ophir de Salomon. On a aussi donné ce nom à quelques promontoires, ou caps, & à quelques villes bâties sur des pointes ou langues de terre qui s’avançoient dans la mer, comme on le peut voir dans Hoffman & dans d’autres ; mais nous ne nous servons pas de ce nom en françois pour ces lieux, comme nous faisons pour ceux dont on vient de parler. La petite Chersonèse, Chersonesus parva, c’est un promontoire d’Egypte vers l’occident, que les Anciens appeloient ainsi, & qui se nomme aujourd’hui Bosire, dit Vigenère, ou plutôt Bochir, comme écrit Sanson dans ses Cartes. C’étoit une péninsule qui s’avançoit dans la mer devant Alexandrie, & dans laquelle étoit le Phare. Voyez Ptolom. Liv. IV, c. 5. & les Tables de Bertius. P. Mela, L. II, c. 3, appelle encore Chersonèse un promontoire de la côte orientala du Péloponnèse : c’est le cap de Schilli.

Ce mot vient du grec Χηρσόνησος qui signifie la même chose.