Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CANTIQUE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 225).
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CANTIQUE. s. m. Chant spirituel qui témoigne quelque joie, ou allégresse, & qui est à l’honneur de Dieu, particulièrement pour lui rendre grâces de quelque bienfait, de quelque victoire solennelle. Canticum. Il y a dans l’Ancien Testament plusieurs cantiques, celui de Moise, celui d’Ezéchias, celui des trois Enfans dans la fournaise, le cantique d’Anne, d’Habacuc, &c. Dans le Nouveau Testament, il y a celui de la Vierge, celui de Siméon & celui de Zacharie, qui sont le Magnificat, le Nunc dimittis & le Benedictus. On chante ou on récite aux Matines de l’Office divin, les sept cantiques qui sont tirés du Vieux Testament un chaque jour : ainsi on ne les récite qu’une fois par semaine ; mais on récite tous les jours les trois cantiques qui sont pris du Nouveau Testament ; savoir, à Laudes le cantique de Zacharie, Benedictus ; à Vêpres, le cantique de la sainte Vierge Magnificat ; à Complies le cantique de Siméon, Nunc dimittis. On a appelé aussi cantiques, les quinze pseaumes Graduels, depuis le 119e jusqu’au 133, parce qu’on les chantoit en montant les 15 degrés par où l’on montoit au Temple.

Les Auteurs Ecclésiastiques, S. Hilaire, S. Basile, S. Jean Chrysostôme, Euthymius, distinguent les cantiques des pseaumes par rapport au chant ; ils disent que pour les cantiques on n’emploie que les voix, & qu’on emploie les voix & les instrumens (organa) pour les pseaumes : ils ajoutent que quand les voix & les instrumens se répondent alternativement, si les instrumens commencent, cela s’appelle cantique de pseaume, canticum psalmi, & si les voix commencent, cela s’appelle pseaume de cantique. Voyez, outre les Auteurs cités, Gavantus, le Cardinal Bona, Amalarius, Fortunatus, Richard de S. Victor, Rupert.

☞ Les anciens appeloient aussi cantiques, certains monologues passionnés & touchans de leurs Tragédies, qu’on chantoit.

Le Cantique des Cantiques est un des livres canoniques de Salomon. Cantica Canticorum. C’est un épithalame en forme d’idylle ou de bucolique, dans lequel on fait parler un époux & une épouse, les amis de l’époux & les compagnes de l’épouse.

Grotius soupçonne que ce livre étoit un transport amoureux de Salomon pour la fille du Roi d’Egypte. C’est pourquoi les Juifs ne permettoient la lecture du Cantique des Cantiques qu’à l’âge de 30 ans, de peur que les sens d’une jeunesse bouillante ne fussent trop émus par les images & les allégories si touchantes dont il est rempli. Les Théologiens conviennent que si le sens littéral peut être appliqué aux amours de Salomon, le sens mystique & spirituel doit être appliqué à l’union de Jésus-Christ avec son Eglise : il est ainsi nommé, parce que c’est un cantique par excellence.

Cantique, se dit aussi de tout chant qui traite de matière pieuse. La France affligée & triomphante tout ensemble, mêla aux chants de douleur & de funérailles, des cantiques de louanges & d’actions de grâces. Flechier. Dans les Couvens on chante des cantiques spirituels.

☞ On appelle cantiques spirituels, des chansons faites sur des matières de dévotion.