Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BRAY

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 49).
◄  BRAURONIES
BRAYE  ►

BRAY. s. m. Vieux mot, qui signifioit autrefois, fange, boue. Lutum ; & dans la basse latinité, Braïum. C’est de-là que le nom de Bray a été donné à tant de lieux en France. Le pays de Bray, Braïum, petit pays en Normandie, très-mauvais & très-fangeux dans le temps de pluie. Il est situé entre le pays de Caux, le Comté d’Eu, le Vexin Normand, le Vexin François, & les Diocèses d’Amiens & de Beauvais. Voyez la Descript. Géogr. & Hist. de la Haute-Norm. Tom. I. pag. 52. Le Livre des miracles de S. Bernard parle du château de Bray, ce qui signifie, dit-il, boue, fange. Castrum Braïum, quod lutum interpretatur. C’est Bray sur Seine dans le Sénonois. Dans la Chronique du Monastère de S. Pierre le Vif dans le Sénonois, il est appelé Braïcus, & il est dit qu’il est dans des lieux marécageux ; Munitiunculam in pago Senonico, super Secanam fluvium, quæ Braïcus dicitur, in locis palustribus. C’est-de-là encore que l’on dit Bray, sur Somme, Braïum ad Summam ; la forêt de Bray, Silva Braïensis ; la Ferté en Bray, Firmitas in Braïo ; Houdane en Bray, Hosdencum ; Ville en Bray, villa in Braïo ; la tour de Bray, Turris in Braïo ; Piseux en Bray, Puteoli in Braïo ; Onesnbray, Ontium in Braïo ; Bray Comte-Robert ; Braïum Comitis Roberto, que l’on prononce communément Bri-Comte-Robert.

On a dit aussi Brahic, ou Braic, Breïcum, Braïacum, Braïcum, Brahicum, & quelquefois Brajotum. De-là viennent encore Vibraye, Follenbray, Savigni sur Braye, & cent autres lieux. Strada dit que quelques Auteurs croient que Bruxelles a été ainsi nommée, parce que cette ville est dans un lieu boueux & marécageux. Enfin, M. de Valois prétend que c’est de-là que viennent les noms de brouet, bouage, & boue. Voyez cet Auteur dans sa Notice des Gaules, p 94 & 95, d’où tout ceci est pris. Voyez Brayeux. Peut-être que bray est un mot celtique, qui vient de ברא, gras ; les terres grasses sont plus brayeuses, ou fangeuses que les autres.

Bray, ou Bré, selon Ménage, s. m. on dit mieux Bray ou Brai. Terme de Marine, est une composition de gomme, de resine & d’autres matières gluantes, qui font un corps dur, sec & noirâtre, qui sert à calfater & remplir les jointures des planches du bordage d’un vaisseau. Navalis uncturæ cera. On en fait aussi avec de la poix liquide mêlée avec de l’huile de poisson. Il y a du bray sec & du bray gras : le bray gras a plus d’humeur, & est plus visqueux. Le bray liquide est une liqueur grasse & claire qui découle du tronc des vieux pins. Les Suédois & les Norvégiens les incisent, & ensuite coupent l’écorce de l’arbre, d’où il découle du galipot noir, qu’on appelle aussi tarc, & c’est le bray : quand ce tarc, qui est comme la graisse de l’arbre, est tout découlé, l’arbre meurt. Le bray sec, qu’on appelle aussi arcançon, est du galipot ou suc de pin, qu’on a fait cuire jusqu’à ce qu’il soit presque brûlé. Pomet. ☞ On entend encore par ce mot bray, l’escourgeon & l’orge broyés pour la bière.