Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BOURRE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 17).
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BOURRE. s. f. Poil de plusieurs animaux, comme bœufs, vaches, chèvres, cerfs, &c. qu’on enleve de dessus leur peau quand on les prépare dans les tanneries. Tomentum. La bourre sert à garnir des chaises, des selles, &c.

Ce mot vient du latin burra, selon Ménage, d’où il dérive aussi le mot de bourrée & de bourgeon.

Bourre-lance, est la laine qui se tire des draps, quand on les prépare avec le chardon de Bonnetier. Tomentun laneum. C’est aussi la grosse laine qui reste aux moulins, où l’on foule des draps fins. Celle qui sort à la foulure des gros draps, s’appele Laveton.

Bourre-tontice, est celle qui se tire des draps, quand ils passent par les mains du Tondeur. Celle-là est la moindre, & il est défendu aux Tapissiers d’en mettre dans les matelas entre les deux futaines. On la laisse aux Potiers d’étain pour faire des bourrelets. Il y a aussi de la bourre de soie, qui est de la soie de rebut ou imparfaite, qu’on tire avec le peigne après que le cocon est dévidé.

Bourre, en termes de Teinturier, se dit aussi d’une certaine nuance, qui est la même que celle du rouge cramoisi.

Bourre de Marseille, étoffe moirée, dont la chaîne est de soie, & la trame de bourre de soie. Il s’en fabrique présentement dans plusieurs villes. Acad. Fr.

Bourre, se dit aussi de ce qui sert à mettre sur la poudre en chargeant les armes à feu, papier, foin, &c. La bourre de ce pistolet lui a donné au visage. En ce sens on appelle un tire-bourre, un fer pointu, & fait en forme de vis, attaché au bout de la baguette, avec lequel on décharge une arme à feu sans la tirer.

Bourre. C’est aussi un terme de Corroyeur, qui signifie la tannée, ou vieux tan qui est resté des peaux de moutons au sortir de la tannerie.

Bourre, signifie aussi le commencement d’un bourgeon de vigne. Muscus vitiarius, sarmentarius. ☞ C’est un amas de poils rassemblés en peloton sur l’œil de la vigne, un duvet qui couronne le bourgeon. On dit que la vigne est en bourre, quand ses boutons commencent à s’ouvrir, parce qu’il se montre d’abord un duvet qui ressemble à la bourre. On dit, geler en bourre, c’est-à-dire, avant que la feuille de la vigne ait paru. Liger l’étend aussi aux boutons des arbres fruitiers. Ainsi, selon lui, on dit, les arbres ont gelé en bourre. Cependant il y a lieu de douter si l’usage est qu’on le dise, au moins aussi communément des arbres que de la vigne. Voyez Bourré.

Bourre, se dit figurément & familièrement de tout ce qui est grossier, inutile dans quelque ouvrage de prose, ou de vers ; & cela par une métaphore tirée des garnitures des chaises qui sont mal conditionnées, quand on y met de la bourre au lieu de crin. Il y a de beaux endroits dans ce livre, mais il faut avouer qu’il y a aussi de la bourre.