Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BOUC

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 979-980).

BOUC. s. m. Bête à corne, qui est le mâle de la chèvre. Hircus.

Ce mot vient de l’Allemant bock, d’où l’Italien a fait becco. Ménage le dérive de buccus, qui se trouve dans la Loi Salique, ou plutôt du celtique bouc. Id. Icquez de buk, mot de la langue des Francs, qui veut dire la même chose, comme bocken chez les Allemands, & chez les Allobroges de qui il nous vient, si l’on en croit Chorier, ou chez les Celtes, comme pense le P. Pezron.

Les boucs desséchent & font mourir toutes les plantes où ils portent la dent. C’est pour cela que les Anciens sacrifioient des boucs aux Dieux qui présidoient aux plantes, à Bacchus, à Minerve, &c. C’est pour la même raison que nos coutumes défendent qu’on les mène dans les jeunes bois, ou qu’on les laisse aller dans les vignes. Voyez Bois taillis. Il y a même cinq Arrêts du Parlement de Dauphiné, des 14 Août 1554, 4 Novembre 1565, 18 Octobre 1579, 19 Décembre 1605, qui portent défenses de nourrir aucuns boucs, ou chèvres, dans les lieux où il y a des vignes, des vergers, des saussaies, & des bois taillis, mais seulement dans les montagnes & lieux incultes. Les boucs & les chèvres sont les plus lascifs de tous les animaux, & ceux dont l’odeur est plus forte & plus mauvaise. Les Hébreux donnent au bouc l’hépithète de צפיד, matineux, Dan. VIII, 5, 21, soit parce qu’il l’est en effet, & qu’il conduit les chèvres aux pâturages de grand matin, soit parce qu’en certaine saison il se tourne toujours du côté de l’Orient. Dans les jeux du Cirque il paroissoit des enfans à cheval sur des boucs sellés & bridés. L’Anthologie en fait mention, L. I, C. XXXIII. Epigr. 28. Un des ouvrages de sculpture que l’antiquité aie plus vanté, étoit un bouc en plein relief sur une fiole. Il étoit de Myos ou de Myron. Voyez Chèvre.

En termes de l’Ecriture on appelle bouc-émissaire, un bouc qui étoit envoyé dans le désert. On présentoit deux boucs devant l’autel, sur lesquels on jetoit le sort : l’un étoit destiné au sacrifice ; l’autre étoit abandonné dans la solitude. Voyez Emissaire & Azazel. Les boucs sont dans l’Ecriture les symboles des Rois, des Chefs & Conducteurs des peuples. Isaie XIV, 9, Dan. VIII, 5. Dans le nouveau Testament J. C. emploie ce mot pour signifier les réprouvée. Matth. XXV, 32, 33. Toutes les nations se rassembleront devant lui, & il séparera les uns d’avec les autres, comme un berger sépare les brebis d’avec les boucs. Il placera les brebis à sa droite, & les boucs à sa gauche. Bouh.

Quand Dieu viendra juger les vivans & les morts,
Et des humbles agneaux, objets de sa tendresse,
Séparera des boucs la troupe pécheresse. Boileau.

Bouc Étain. C’est le nom qu’on donne au bouc sauvage. Hircus sylvestris. Voyez Bouctein.

Chez les Anciens, le Poëte qui avoit remporté la victoire, avoit pour prix un bouc, victime ordinaire de Bacchus qui présidoit à la Tragédie. C’est de-là que La Tragédie a tiré son nom : car τράγος en grec signifie un bouc.

Du plus habile Chantre un bouc étoit le prix. Boil.

On appelle aussi bouc ou outre, en termes de commerce, un vaisseau fait de la peau d’un bouc, où l’on met du vin, de l’huile & autres liqueurs qu’on transporte. Uter. On se sert aussi de boucs pour toutes les navigations qui se font sur les rivières d’Orient, tant pour passer les rivières à la nage, que pour soutenir des radeaux qui transportent les marchandises sur l’Euphrate, & autres rivières qui ont des sauts. On dit aussi que le Diable se fait adorer au sabat sous la forme d’un bouc.

On dit proverbialement, qu’un homme a une barbe de bouc, quand il n’a de la barbe que sous le menton. Et c’est pour cela qu’on appelle barbe de bouc, ceux qui ont la barbe de cette sorte. Ces vilaines barbes de bouc sont des mélancoliques qui sont toujours en querelle. Ablanc. On dit, puant comme un bouc, à cause que cet animal sent mauvais. Lascif comme un bouc.

☞ On appelle bouc dans les machines hydrauliques une espèce de poulie garnie de cornes de fer qui font monter & descendre une chaîne sans fin.

Bouc. Petit poisson dont parle Athénée. Voyez Boulerot noir.

Bouc, (la tour du) Tour de France, sur les frontières de la Provence, sur un rocher, à l’entrée de la mer de Martigues, dont elle défend le passage.