Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BOTTE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 978-979).
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BOTTE. s. f. Faisceau, assemblage, paquet de plusieurs choses de même espèce liées ensemble. Fascis, manipulus, fasciculus.

Botte, se dit aussi en agriculture & en jardinage, de plusieurs choses liées en paquets, avec cette différence que quand c’est un terme de jardinage, il ne signifie qu’une ou plusieurs poignées de légumes, d’herbages ou de racines. Botte d’asperges, d’oignons, de raves, &c. au lieu que quand il est terme d’agriculture, il signifie un paquet plus considérable, botte d’échalas, de foin, de paille, &c. Botte de foin, de paille, c’est une certaine quantité de foin ou de paille qu’on entoure avec des liens de même nature, & qui pese plus ou moins, suivant les différens pays.

Ce mot vient du latin botulus, qui se prend pour une espèce de farce où il y a beaucoup de différentes choses ramassées. D’autres vont le chercher plus loin עבת, abat, fait עבות, abot, qui est exposé intricatum & instar funis perplexum & complicatum, funis intricatus & perplexus, & plerumque dicitur de foliis ramisque perplexis & complicatis. Desquelles significations je forme de עבות, abot, botte en françois, fasciculus intricatus & perplexus, comme nous disons une botte de cordes, & une botte ou boteau de foin. Guichard.

Botte, en termes de Botanique, se dit d’un amas de fleurs & de fruits disposés en gros paquets. Les fleurs du millet naissent par bottes. Dans ce cas, il vaut mieux dire en panicule. Panicula. Mais le mot de panicule ne convient point aux racines, comme celles de l’asperge, qui étant rassemblées plusieurs ensemble, sont dites racines en botte. Fasciculatus.

Dans le commerce, le mot de botte s’applique à un paquet de certaines marchandises. Une botte de soie est un paquet de plusieurs écheveaux de soie liés ensemble.

Botte de mouchoirs. Paquet de mouchoirs des Indes qu’on vend au Caire.

Botte de chanvre. Paquet de chanvre pesant 150 livres.

Botte de parchemin. Certaine quantité de peaux ou de feuilles de parchemin liées ensemble, &c.

Botte, se dit aussi dans le style bourgeois, d’une grande quantité de certaines choses. On dit une botte de livres, une botte de paperasses. Il fait une botte de chansons.

Botte, en vieux françois, signifioit aussi un crapaut. Bufo. On disoit aussi Botterel.

Botte, se dit aussi d’un vaisseau ou tonneau propre à mettre du vin ou d’autres liqueurs, qui est environ de la grandeur d’un muid. Dolium, cadus. On appelle bottatum vinum, du vin qui sent le fût. Ce mot est en usage seulement aux provinces de France, qui tirent vers le Midi, & vers l’Italie, où l’on appelle Bottaio, un Tonnelier. Vigenere, dans ses Annot. sur Tite Live, Tome I, page 1533, dit que la botte de Rome contient 8 barrils, pese 1365 livres, quatre onces d’Italie, & des nôtres 1024 : elle tient environ 600 pintes. Cette mesure est aussi en usage chez les Espagnols, & elle contient 30 arrobes : chaque arrobe pese environ 30 livres.

Botte, en termes d’Escrime, est un coup qu’on porte avec un fleuret, une estocade. Gladii præpilati ictus. Il lui a porté une botte franche au troisième bouton. En ce sens, il vient de l’italien botta. Botte marquée, botte diguée.

Botte, en ce sens, se dit figurément des attaques qu’on fait à quelqu’un dans le discours familier, en lui faisant quelque reproche, ou en lui disant quelque brocard, ou en lui faisant quelque emprunt qui lui donne du chagrin. Petitio. Il lui a poussé une terrible botte. On le dit aussi de celui qui dispute contre un autre dans les Ecoles.

Botte, signifie aussi une chaussure de cuir dont on se sert quand on monte à cheval, tant pour y être plus ferme, que pour se garantir des injures du temps. Ocrea. ☞ Elle est composée de la genouillère, d’une tige aussi large en haut près du genouil, qu’en bas près du cou de pied, & d’un soulier armé d’un éperon qui tient à la tige. Il y en a de plusieurs espèces.

Bottes de Pêcheurs, sont de grosses bottes & fortes qu’ont les Pêcheurs, quand ils pêchent des étangs. Bottes de chasse, ou demi-chasse, sont des bottes plus ou moins épaisses, qui servent aux Chasseurs. Les Dragons de l’armée sont des cavaliers sans bottes.

Ménage prétend que ce mot a été dit par ressemblance à de grandes bouteilles de cuir plus larges par en-haut que par en-bas, dont se sont servis les Anciens, qu’ils ont appelées du même nom. Borel le dérive de bot, parce que cette chaussure contrefait la jambe, & rend en quelque façon le pied bot. Du Cange le dérive de l’anglois botta. Dans la vie de S. Richard Evêque de Chicester, écrite au XIIIe siècle par un Anglois, & rapportée par J. Carpgravius dans la Légende Anglicane, on trouve bota en latin en ce sens ; aussi bien que dans celle qui a été écrite par Radulphe, Dominicain ; & dans les procès des miracles de Saint Yves, qui est du même siècle. Etienne Guichard croit que botte a été fait par abbréviation de botinne, qu’il tire de βίτιννα, nom grec d’une espèce de chaussure. Mais il est clair que botinne au contraire est un diminutif de botte, comme les botinnes sont de petites bottes.

Les bottes des Chinois sont de soie, & les bas à bottes d’une étoffe picquée doublée de coton, & épaisse d’un bon pouce ; la jambe est par-là bien défendue contre le froid ; mais en été, dans un pays, où les chaleurs sont extrêmes, il n’y a que les Chinois au monde, qui pour conserver un air de gravité puissent se résoudre d’être ainsi dans une espèce d’étuve, depuis le matin jusqu’au soir. Aussi le peuple qui travaille ne s’en sert presque point. La forme de ces bottes est un peu différente des nôtres, car elles n’ont ni talon, ni genouillère. Quand on fait un long voyage à cheval, elles sont d’un cuir bien passé, ou d’une grosse toile noire de coton piquée ; mais dans la ville on les porte ordinairement de satin, avec un gros bord de velours, ou de panne sur le genou. P. Le Comte. Voyez Botter.

Botte, en termes de Chasse, se dit de la longe ou du collier avec lequel on mene le limier au bois. Salnov.

Botte. Terme de Sellier. C’est une espèce de petit marchepied, attaché au brancard des carrosses, à l’endroit où s’ouvrent les portières, sur lequel on appuie le pied pour monter.

Botte, se dit aussi du cuir des portières de carrosses à la vieille mode, où l’on mettoit les deux jambes, dont l’usage s’est conservé seulement aux carrosses des voituriers, & de quelques Princesses.

Botte, se dit encore de la terre grasse qui s’attache aux souliers, quand on marche dans des terres marécageuses, ou en temps de pluie. On le dit aussi de la neige qui s’attache de la même sorte aux talons des souliers de ceux qui y marchent. En marchant sur un terrain gras ou sur la neige, on prend, on rapporte des bottes.

Bottes. On nomme ainsi dans les Manufactures de lainage de la province de Champagne, une sorte de forces qui servent à tondre les droguets en dernier.

On dit proverbialement, à propos de bottes, quand on prend occasion de parler en attendant quelque chose de semblable. On le dit aussi quelquefois de toute sorte d’interruption. On dit aussi, qu’un homme a laissé les bottes en quelque endroit ; pour dire, qu’il y est mort ; & aussi qu’il graisse ses bottes ; pour dire, qu’il se prépare à un long voyage, & même à la mort. On dit, graissez les bottes à un vilain, il dira qu’on les lui brûle, pour accuser un homme d’ingratitude. On dit aussi, accoler la botte de quelqu’un ; pour dire, lui faire des révérences, des soumissions. On dit aussi, je ne m’en soucie non plus que de mes vieilles bottes, pour témoigner un grand mépris de quelqu’un. On dit aussi, qu’un homme a bien mis du foin dans ses bottes, ou de la paille dans les souliers ; pour dire, qu’il a bien gagné du bien. On dit encore par une expression basse & triviale, où va la botte, ou, comment va la botte ? pour demander à quelqu’un où il va, ou comment il se porte. Aller à la botte, se dit d’un cheval vicieux qui tâche de mordre à la jambe celui qui le monte. La même chose se dit d’un homme accoutumé à faire des réponses piquantes aux railleries les plus innocentes. Il ne faut pas se jouer à cet homme, il va d’abord à la botte.

☞ BOTTE, le BOTTE, ou BRICHES, ou STILO. Petite ville de la Morée, sur la côte méridionale du golfe de Napoli de Romanie.