Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BLESSER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 930-931).
BLESSURE  ►

BLESSER. v. a. ☞ Causer de la douleur à quelqu’un en le serrant, soit qu’il en résulte une plaie, soit qu’il n’en résulte point. Vulnerare, fauciare. Les couprs orbes blessent en faisant des contusions. Les instrumens tranchans blessent en faisant des plaies. Les souliers trop serrés blessent les pieds. Une selle dure blesse un cheval. Urere. ☞ Lorsqu’en parlant de guerre, de combat, on dit que quelqu’un a été blessé, on entend toujours parler d’un coup qui a fait une plaie.

Ménage dérive ce mot de læsare latin, en y ajoutant un b.

Blesser, se dit en parlant de navire & de galère, & signifie, endommager. Detrimentum afferre. La Réale rencontra l’éperon d’une des galères, dont elle fut blessée. Vaug.

Blesser, se dit avec le pronom personnel, quand on se fait mal, soit en tombant, soit par megarde, soit volontairement. Offendere partem corporis aliquam. Je me suis blessé par mégarde. On dit aussi qu’une femme grosse, qu’elle s’est blessée ; pour dire, que quelque chûte, ou quelqu’autre accident, l’a fait accoucher avant terme. Abortum facere.

Blesser, signifie par extension, choquer, toucher trop fortement ce qui est délicat, faire une impression fâcheuse & désagréable. Offendere. Les couleurs trop vives blessent la vue. Une dissonance blesse l’oreille.

☞ On le dit de même au figuré. Des paroles deshonnêtes blessent la pudeur, sont contraires à la pudeur. Cette affreux récit blesse l’imagination, porte une impression désagréable dans l’imagination.

Blesser, se dit figurément en matière d’amour. Cet amant a le cœur blessé, les beaux yeux de cette Dame l’ont blessé ; on fait une violente impression sur son cœur.

Blesser, signifie encore au figuré, nuire à quelque chose, y donner atteinte, y faire brêche : choquer quelqu’un, l’offenser par quelque discours. Ces faits que vous vez avoués, blessent votre cause, donnent atteinte à votre droit. Il ne faut rien dire qui puisse blesser la réputation du prochain. Les railleries trop fortes blessent l’amitié : il y en a d’innocentes qui ne blessent personne.

C’est à vous, s’il vous plaît, que ce discours s’adresse,
A moi, Monsieur ! A vous, trouvez-vous qu’il vous blesse ?

Molière
.

Blesser, signifie encore, porter dommage. Detrimentum afferre, inferre. Cette sentence me blesse en ce chef ; elle me fait un préjudice notable.

On dit proverbialement, qu’on ne sait pas où le soulier nous blesse, où le bât nous blesse, quand on ne fait pas le déplaisir secret que nous avons dans l’ame. On dit aussi, autant de morts que de blessés, il n’y eut qu’un chapeau perdu ; pour dire, il n’y arriva pas grand mal.

BLESSÉ, ÉE. part. Vulneratus, sauciatus. Il est blessé à mort. Il est aussi adjectif.

Faut-il que nous vivions & qu’Erixane meure ?
Blessé comme je suis, la puis-je secourir !
L’aimant comme je fais, la puis-je voir mourir ?

Lem.
.

On dit qu’un homme a le cerveau blessé, pour dire, qu’il n’est pas sage. Acad. Fr.

Blessé, se dit aussi substantivement. Il faut avoir soin des malades & des blessés.