Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BEDUN

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 832).
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BEDUN. s. m. Voyez Bédouïns. C’est la même chose. Joinville dit Bédun. Les Beduns ne croioient point en Mahomet, comme font les Turcs ; mais ils croioient en la loi d’Hély, qu’ils disent être oncle de Mahomet, & se tiennent en montagnes & déserts, & ont créance que quand l’un d’eux meurt pour son Seigneur, ou autre quelque bonne intention, que son ame va en un autre meilleur corps, & est à plus grande aise que devant. Et pour ce ne font compte de mourir pour le commandement de leurs anciens & supérieurs. Ces Beduns ne demeurent ne en ville ne en cité, mais gisent toujours aux champs & aux déserts ; & quand il fait un mauvais temps, eux, leurs femmes & leurs enfans fichent en terre une façon d’habitacle qui est fait de tonnes & cercles liés à des perches, ainsi que font les femmes à sécher les buées, & sur ces cercles & ces perches, jettent des peaux de grands moutons qu’ils ont, qu’on appelle peaux de Somas, corroyées en alun, & les Béduns même en grandes pelices, qui sont à grand poil, qui leur couvrent tout le corps. Et quand se vient le soir, ou qu’il fait mal temps, ils s’encloent & retirent en leurs pelices ; & ont leurs chevaux, ceux qui suivent les guerres, la nuyt paissans auprès d’eux, & ne leur font que ouster leurs brides & les laisser paître. Puis le lendemain ils étendent leurs pelices au soleil, & les froutent quand sont seiches, & ne pert point qu’elles aient été mouillées. Ceux qui suivent les guerres ne sont jamais armés, parce qu’ils dient & croient que nul ne peut mourir que à son jour, & pourtant ont-ils entre eux cette façon, que quand ils maudient leurs enfans, ils leur disent : tu sois maudit comme celui qui se arme de paons de mort. En batail ne portent-ils que le glaive fait à la mode de Turquie, & sont presque tous vêtus de lings ressemblans à sourpelix. Et sont laides gens & hideux à regarder : car ils ont tous les cheveux & les barbes longs, & tous noirs, ils vivent de l’affluence du lait de leurs bêtes ; & y en a si grand nombre, que nul ne les sauroit estimer ; car il y en a au Royaume d’Egypte, de Jerusalem, & par toutes les terres des Royaumes Sarazins & mescreanz auxquels ils font tributaires. Joinville.