Dictionnaire apologétique de la foi catholique/Renaissance

Dictionnaire apologétique de la foi catholique
Texte établi par Adhémar d’AlèsG. Beauchesne (Tome 4 – de « Persécutions » à « Zoroastre »p. 471-477).

RENAISSANCE. -
I. Définition. —
II. Caractères généraux. —
III. Première période. l’Italie et la découverte de l’antiquité. —
IV. La- Papauté et l’humanisme. —
V. La Papauté et les arts. —
VI. La Renaissance en Angleterre et en Allemagne. —
VII. La Renaissance en France. —
VIII. Bibliographie.

I. Définition. — On entend par le nom de Renaissance cette période de la civilisation européenne qui comprend le xve et le xvi » siècle, transition entre le Moyen Age et les temps modernes, que caractérise une évolution considérable des idées et des mœurs. Une vie nouvelle s’y manifeste dans les lettres et les arts, due surtout à la mise en lumière des chefs-d’œuvre de l’antiquité, oubliés ou perdus depuis de nombreux siècles.

Il semble que le premier emploi du mot, au sens spécial qui lui est donne, apparaisse dans la grande Histoire de France de Michblbt. Durant l’intervalle de dix ans qui sépara les six premiers volumes de leur suite, le point de vue de l’historien s’était complètement modifié, il avait découvert la Révolution, lui consacrant les facultés d’enthousiasme qu’il appliquait d’abord au Moyen Age. En 1855, ce qu il voit dans le xvie siècle, c’est l’aube de la Révolution, et il intitule son volume : Renaissance.

II. Caractères généraux  :. — C’est bien une révolution, mais uniquement intellectuelle. Propagée d’abord dans les rangs les plus élevés de la société, elle descend peu à peu, elle gagne les régions populaires ; elle y est introduite par un enseignement plus accessible à tous, et surtout par ce véhicule merveilleux des idées les meilleures et les pires, l’imprimerie. Ce que l’enseignement qui succède à la scolastique, ce que les livres qui succèdent aux manuscrits vont apporter à des esprits las de lu vieille routine, inquiets et avides d’une pensée, d’une morale et d’une foi plus libres, c’est la connaissance de l’àme antique, d’une sagesse et d’une règle de vie qui ne s’appuient plus seulement sur une autorité divine, mais sur la raison de l’homme et sur la nature. Maintenir l’équilibre entre l’humain et le divin, ouvrir à l’homme les trésors de la nature, mais rendre à Dieu ce qui est à Dieu, telle fut la première tâche et la vraie grandeur de la Renaissance ; trop souvent on n’en voit que la suite funeste, la déviation. Michblbt, en termes enflammés, a célébré ce qu’il nomme le grand duel :

« D’une part, l’Antiquité grecque et romaine, si
« haute dans sa sérénité héroïque. D’autre part, 
« l’Antiquité biblique, mystérieuse, pathétique et
« profonde. De quel côté penchera l’âme humaine ?
« à qui sera la Renaissance ? qui renaîtra des
« anciens dieux ? L’arbitre est la Nature. Et celui-là
« serait vainqueur, à qui elle donnerait son sourire, 

son gage de jeunesse éternelle. Plus jeune et

« plus vieille que tous, mère et nourrice des dieux, 
« comme des hommes, elle les berça aux anciens
« jours et sourira encore sur leurs tombeaux. « Suis

ï la Nature ». Ce mot des stoïciens fut l’adieu de

« l’Antiquité. « Reviens à la Nature », c’est le salut

<< que nous adresse la Renaissance, son premier mot. < Et c’est le dernier mot de la Raison » (Histoire dr France au seizième siècle. Renaissance, éd. de 18j5, p. 30(j). 931

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Et, dans llnlroduclion de son livre, voici cet hymne à Léonard de Vinci et à la nature :

« Le moyen âge s'était tenu dans une timidité
« tremblante en présence de la nature Il n’avait su

<( que maudire, exorciser la grande fée. Ce Vinci,

« fils de l’amour et lui-même le plus beau des hom « mes, sent qu’il est aussi la nature ; il n’en a pas
« peur. Toute nature est comme sienne, aimée de
« lui…
« Entrez au Musée du Louvre, dans la gTande ga « lerie. à gaucbe vous avez l’ancien monde, le nou « veau à droite. D’un côté les défaillantes figures

i du frère Angclico de Fiesole, restées aux pieds de

« la Vierge du moyen âge ; leurs regards malades
« et mourants semblent pourtant chercher, vouloir.
« En face de ce vieux mysticisme, brille dans les
« peintures de Vinci le génie de la Renaissance, en
« sa plus âpre inquiétude, en son plus perçant ai « guillon. Entre ces choses contemporaines, il y a
« plus d’un millier d’années.
« Bacchus, saint Jean et la Joconde dirigent leurs

a regards vers vous ; vous êtes fascinés et trouci blés, un inlini agit sur vous par un étrange ma « gnélisme. Art, nature, avenir, génie de mystère

« et de découverte, maître des profondeurs du
« monde, de l’abîme inconnu des âges, parlez, que

u voulez-vous de moi ? Cette toile m’attire, m’ap « pelle, m’envahit, m’absorbe ; je vais à elle mal « gré moi, comme l’oiseau va au serpent.

« Bacchus ou saint Jean, n’importe, c’est le même

" personnage à deux moments différent ». Regardez c le jeune Bacchus au milieu de ce paysage des pre « miers jours. Quel silence ! quelle curiosité I il épie

« dans la solitude le premier germe des choses, le
« bruissement de la nature naissante : il écoute
« sous l’antre des cyclopcs le murmure enivrant des
« dieux.
« Même curiosité du bien et du mal dans son
« saint Jean précurseur : un regard éblouissant qui
« porte lui-même la lumière el se rit de l’obscurité
« des temps et des choses ; l’avidité infinie de l’es « prit nouveau qui cherche la science et s'écrie : 
«  « Je l’ai trouvée ! » C’est le moment de la révéla « tion du vrai dans une intelligence épanouie, le
« ravissement de la découverte, avec une ironie

o légère sur le vieil âge, enfant caduc » (/</., p. lxxxviii et suiv.).

Cette poésie séduisante mais facile cache une conception fausse, et très répandue, de la Renaissance. Si elle n’eût été que l'éclosion de la libre pensée et le retour à la nature, c’est-à-dire à l’instinct, contrôlé par la seule raison, il serait malaise de comprendre qu’approuvée par l’Eglise, elle ait pu aider à son action et — malgré les erreurs lamentables de certains papes — exalter sa puissance spirituelle aussi bien que temporelle.

III. Première période. L’Italie et la découverte de l’antiquité. — Ce grand mouvement de rénovation intellectuelle et artistique s'étend à toute l’Europe, mais il a son point de départ en Italie. Malgré les ravages affreux des barbares, les luttes incessantes des petits Etats, l’oubli prodigieux où était tombé le passé illustre de l’héritière de la Grèce, ce passé subsistait obscurément ; le sol que la race latine, au temps de sa toute-puissance, avait couvert des monuments de sa gloire, laissait paraître de toutes parts des vestiges qui, effacés à demi ou cruellement déshonorés, remplissaient de stupeur ceux-là mêmes qui les mutilaien. Il faut bien dire que le sens de la grandeur antiqe ne fut jamais entièrement aboli. Des artistes, des poètes surgissaient, qui, sans comprendre entièrement la voix

qui s'élevait des ruines, s’efforçaient de la traduire, ou tout au moins de l’adapter aux intelligences formées parles méthodes d’enseignement chrétien. De même qu’aux premiers temps du triomphe de l’Eglise les figures des divinités païennes avaient fourni des modèles aux mosaïstes et aux sculpteurs chargés de représenter le Christ, la Vierge, les apôtres et les saints, c'étaient encore les sarcophages antiques qui, au xin » siècle, rappelaient à Nicolas de Pise et à ses élèves les lois tiop méconnues du rythme, la majesté harmonieuse des visages et des gestes, l'équilibre des plis d’un vêtement ; puis, tandis que Giotto, ouvrant les yeux sur la nature, faisait rentrer dans les froides et solennelles images 4e l’art byzantin l’expression de tous les mobiles intérieurs de la vie, Dante audacieusement fondait en une seule vision le passé, le présent et l’avenir de l’humanité, et, pour la première fois, rendait sa place à toute la beauté antique dans l’ascension vers la lumière divine. Le poète qui, pour associer la grandeur de sa patrie à la victoire suprême de sa religion, a choisi Virgile comme guide dans les cercles de l’Enfer et du Purgatoire, réservant à la Théologie, cachée sous les traits de son amour, de iui ménager l’accès du Paradis, qui encore, au seuil dernier de son poème, invoque Apollon et les Muses, après avoir fait apparaître les héros et les chantres de l’antiquité grecque et romaine, qui enlin, allant chercher dans les mythes d’une poésie morte, dans les figures d’un paganisme aboli l’expression la plus solennelle de la beauté divine, ose écrire sans blasphème, parlant de Jésus-Christ :

Souverain Jupiter, Qui fus en terre pour nous crucilié I

(Purg., VI, 118-9.)

Dante n’a-t-il point déjà mérité le litre, que l’on a décerné à Pétrarque, de « premier homme moderne » ? Dante et Pétrarque ont inauguré la Renaissance, et Pétrarque assurément mieux que Dante, par le souci qu’il eut de ressusciter les grands écrivains antiques. L’esprit de la Renaissance ne peut se bien comprendre que par une étude approfondie de l'œuvre de Pétrarque ; c’est la préface indispensable d’une histoire considérable, dont il est tout juste possible » d’indiquer ici les grandes lignes.

IV. La Papauté et l’humanisme. — Pétrarque et Boccace sont lespremiersdcshumanistes ; ils ont recherché passionnément les textes des auteurs latins et les traductions des auteurs grecs, encore peu accessibles dans leur langue. Ce n’est que vers le milieu du xv siècle, et surtout après la prise de Constantinople par les Turcs, en i^53, que les Grecs émigrés, accueillis à Venise, à Florence, à Rome, à Naples, apportèrent, avec les grands manuscrit » grecs, la connaissance de la langue. La première édition d’Homère est de 1 488, à Florence ; celle de Plutarque, de 1500, à Venise ; celle de Platon, de 1513, à Venise également ; mais Plutarque avait été publié en latin dès 1^70, et Platon, dans la traduction de Marsile Ficin, dès 1^83 ; Aristote est publié en grec, par Aide, de 1490 à i/|<)8 ; Aristophane, en 14()8 ; des trois grands tragiques, Sophocle, en 150a, Euripide, en ]503, Eschyle, en iô18.

A Florence, les premiers Médicis, Cosme l’Ancien, Pierre et surtout Laurent le Magnilique, tiennent lu tête du mouvement intellectuel, et groupent autour d’eux toute une active cohorte de savants, parmi lesquels se distinguent Jean Argyropoulos, Marsile Ficin, Pic de la Mirandole ; des bourgeois illustres, Niccolo Niccoli et Gianozzo Manelti, sont avec eux les promoteurs de l’humanisme. A Naples, Alphonse

le Grand prend à son service, comme historiographes, Georges de Trébizonde, Chrysoloras, Laurent Valla, Barthélémy Faccio et Antoine Panormita. A Urbin, le duc Frédéric, l'élève de Vittorino de l’eltre, homme de science universelle, rassemble les éléments d’une magnifique bibliothèque dont s’enrichira plus tard le Vatican. A Milan, lesSforza, à Ferrare, les princes Borso et Alphonse, à Rimini, le condottiere Sigismond Malalesta, et jusque dans les plus petites villes de Romagne, des despotes intimes, à l’imitation de leurs puissants voisins, célèbrent à l’envi, par la recherche approfondie de ses moindres monuments, la gloire retrouvée de l’antiquité.

Mais c’est à Rome, tout naturellement, que s'échauffait de la plus vive ardeur, 1e foyer de l’humanisme. « Au début du iv siècle, en dépit des diili « cultes au sein desquelles il se débattait, le pape ii Innocent VII avait manifesté la volonté de restau « rer l’Université fondée à Rome par Boniface VIII,

« et, dans une bulle publiée à cet effet, il prévoyait
« la création d’enseignements nouveaux, tels que

ci ceux de la littérature grecque et latine. Le style

« même de cette bulle, d’une belle latinité classi « que, toute pleine d’un sentiment de vénération
« profonde pour la Rome antique, décèle la plume

> d’un humaniste. Et, en effet, des humanistes de

« marque se trouvaient alors parmi les secrétaires

a apostoliques. Pogge, dont le nom est si intime « ment lié à la première renaissance des lettres,

« était entré à la chancellerie pontificale sous Boni « face IX, et Innocent VII lui-même venait d’y appe « 1er le célèbre Lionardo Bruni d’Arezzo. On sait
« quelle action le concile de Constance exerça sur
« le développement de l’humanisme. Il fut l’occat sion daa plus retentissantes « découvertes » littéc raires de Pogge, et, tandis qu’on transmettait en
« Italie les classiques latins retrouvés dans les bi€ bliothèques ultramontaines, les Pères du concile
« recevaient en échange de l’Italie lettrée la pre

< nière étincelle d’un feu qui allait se propager à

« travers l’Europe… C’est Nicolas V qui est le véri « table fondateur de la Bibliothèque Vaticane… Il
« était le représentant parfait de cette libre Acadé

< mie florentine de San Spirito, dont les échos

« avaient éveillé le palais tout voisin qui abritait
« Eugène IV. Depuis sa jeunesse, écrivait de lui le
« futur Pie II, il est initié à tous les arts libé « raux, il connaît tous les philosophes, les histo riens, les poètes, les cosmographes et les théolo « giens ; le droit civil et le droit canon, la médecine
« elle-même ne sont pas pour lui des sciences
« étrangères… Nicolas V se préoccupa de donner à
« Rome la maîtrise des esprits, d’en faire le ceutre

ii du mouvement intellectuel de la chrétienté. N'én tait-ce pas le meilleur moyen d’empêcher que ce

« mouvement ne s'égarât ? Les humanistes les

> plus célèbres furent sollicités de venir à Rome, i et remplirent tous les emplois de la curie… Tout ce que Florence comptait de lettrés en

« renom avait émigré à Rome » (Paul Fabhe, La

bibliothèque Vati cane, dans Le Vatican, éd. in-i a, t. H, p. îgy etsuiv.).

Sixte IV continue Nicolas V ; il installe avec magnificence, en la décorant de fresques, de vitraux, de boiseries sculptées, la nouvelle Bibliothèque Vaticane (dans les salles qu’occupe aujourd’hui la Pinacothèque) ; il nomme son bibliothécaire le grand humaniste Platina, et lui donne pour gardiens DémétriuR de Lueques et Jean Cbadel de Lyon ; il fait traduire quantité d’ouvrages grecs, hébreux et arabes ; à sa mort, en i^8'i, il y avait, dans les précieuses armoires, près de quatre mille manuscrits ; et déjà

les imprimés abondaient vingt ans plus tôt, en 4&>i les typographes allemands Conrad Sweinbeim et Arnold Pannartz, attirés à Rome par le cardinal Nicolas de Cuse, sous le pontifical de Paul II, et logés au couvent de Subiaco, avaient publié la Grammaire de Donat, les Institutions de Lactance et le De Orature de Cicéron. « L’extension

« que prit à Rome l’imprimerie à ses débuts fut
« véritablement merveilleuse. On reste confondu,
« quand on parcourt la liste des éditions romaines
« sous Paul II et Sixte IV, de la rapidité avec la « quelle les livres se succèdent : antiquité profane,
« antiquité chrétienne, ouvrages d’auteurs contem « porains, tout cela défile chez Sweinheim et Pan « nartz, chez Ulrich Hahn, chez Philippe de Ligna « mine, chez Georges Laver, chez Georges Sachsel,
« le plus souvent avec dédicace au pape en qui on
« sait un protecteur. On voit, pour ne citer que

i quelques exemples, Ïite-Live, Virgile, Aulu-Gelle, a César, Térence, Quintilien imprimés pour la o première fois, et avec eux saint Cyprien, saint

« Ambroise, saint Thomas, Guillaume Durand,
« Nicolas de Lyra, Jean Torquemada, Sanchez d’A « revalo. Les érudits abondent à la cour pontifi « cale, qui peuvent utilement remplir les fonctions

a de correcteurs : Jean-Antoine Carupano, Pom « ponio Leto, Domizio Calderini et d’autres en « core. C’est un moment unique dans l’histoire, u un moment glorieux pour le Saint-Siège, qri

« exerce sur les esprits une incomparable r |mai « trise » (Paul Fabrk, I. c, p. 216-7.)

V. La Papauté et les arts. — tandis que, sous le patronage intelligent des Médicis, Florence s’enrichit de chefs-d'œuvre, qu’une peinture nouvelle s’inaugure avec Ghirlandajo, Botticelli, Léonard de Vinci, Raphaël, une sculpture nouvelle avec Donatello, Verrocchio, les Pollajuoli, Michel-Ange, une architecture nouvelle avec Brunelleschi, la grande Rome, dont la résurrection a commencé avec le xve siècle, reçoit de ses papes un vêtement d’art digne des anciens temps. Martin V et Eugène IV avaient restauré le Latran, Nicolas V n’eut pas un règne assez long pour donner au Vatican et à la basilique de Saint-Pierre la splendeur qu’il rêvait ; mais il fit décorer ses appartements Je peintures que devaient remplacer les fresques de Raphaël ; surtout il y appela, pour orner sa chapelle privée de compositions qui subsistent encore, le saint moine de Fiesole, Fra Angelico.Devantles scènes d’une tendresse et d’une piété si absolument parfaites où sont retracées la vie, la prédication et la mort des saints Etienne et Laurent, on oublie les complaisances trop volontiers païennes des grands artistes de la Renaissance, et les complicités de leurs protecteurs, pour ne se souvenir que d’une chose, c’est que l’art chrétien est arrivé à ce sommet heureux où la beauté véritable est accompagnée par la foi, où la prière même a trouvé par les lignes et les couleurs une nouvelle expression. C’est là d’ailleurs qu’en un moment unique le sentiment du Moyen Age se traduit pour la première et dernière fois par le langage de la Renaissance ; l’antiquité va reprendre ses droits et assurer sa domination dans l'œuvre de Raphaël.

L’humaniste Pie II, le collectionneur Paul II fondent le culte de la Rome antique ; Sixte IV, en même temps qu’il entreprend l'édilication de la Rome moderne, inaugure le premier musée public de Rome, celui du Capitole ; il restaure et consolide la basilique de Saint-Pierre ; il fait construire, au palais Vatican, la chapelle Sixtine, et en ordonne le premier déeor, ces belles fresques, dues à Botticelli, Ghirlandajo, Pérugin, Signorelli, Cosimo Rosselli 935

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et Pinturicchio, qui semblent d harmonieuses tapisseries suspendues autour des murailles. Après ce grand pape, le progrès fut quelque temps arrêté, peut-être même compromis ; dans la société élégante et corrompue des Borgia, la Renaissance des arts n’est guère qu’un prétexte à la décadence des mœurs. Cependant le faste d’Alexandre VI apparaît intelligent dans le décor des célèbres chambres Borgia, qui demeure aujourd’hui, depuis sa restauration par les soins de Léon XIII, une des régions les plus charmantes à visiter du Vatican ; et c’est sous le règne de ce même pape que Michel-Ange donne à la basilique de Saint-Pierre son premier chef-d'œuvre, le marbre admirable delà Vierge de pitié. Là (en 14yN) s’est accompli dans sa plénitude le miracle d’art qu’exige l’union de la beauté antique et de la pensée chrétienne, l'œuvre de la Renaissance, préparée durant près d’un siècle, depuis Ghiberti et Donalello, par les plus nobles sculpteursde l’Italie.

Le second de ces miracles d’art — mais il fut altéré avant d'être accompli — devait être la basilique de Bramante, le nouveau Saint-Pierre. Miracle d’art, et tout à la fois erreur immense, car la basilique primitive, où toute la vie de l’Eglise, depuis les premiers siècles chrétiens et malgré les pillages. les incendies et les restaurations, avait marqué son empreinte, aurait dû demeurer sacrée et intangible ; en la détruisant, Jules II et Bramante rompaient brusquement les liens de la tradition chrétienne ; ils condamnaient la Renaissance dans son principe. A ce chef-d'œuvre de science et d’harmonie classique, le temple de Bramante, Michel-Ange devait donner son achèvement religieux, la coupole, dont les lignes idéalement pures emportent l'àme, dans une ascension sans angoisse, vers l’iniini.

Faut-il dire que la voûte de la chapelle Sixtine, peinte par Michel-Ange sur l’ordre de Jules II, est Ja troisième merveille de cette Renaissance que dirige la Papauté? Trop d'étrangetés peut-être y apparaissent d’abord, et l’intrusion, au long des cadres des grands tableaux, de ces figures nues aux attitudes sculpturales, qui semblent exprimer symboliquement la force et la beauté du corps humain, déroute l’esprit au seuil de la grande Bible ouverte à sa méditation. Mais rien n’est plus puissant, dans l’art universel, que les premiers tableaux de cette Bible, où la figure du Créateur anime tout de son souille ; et rien n’est plus poignant que les images des Prophètes et des Sibylles, et celles des Précurseurs du Christ qui relient, dans cette même chapelle, l’Ancien Testament au Nouveau.

La quatrième merveille de la Renaissance romaine, celle qui, la résumant pleinement, marque le sommet enfin gravi, d’où elle ne pourra plus que descendre, c’est le chef-d'œuvre de Raphaël et de la peinture italienne, la Chambre de la Signature, dans l’appartement de Jules II, au Vatican. L'œuvre de l’antiquité y est glorifiée dans la fresque de YEcole d’Athènes, en face de laquelle la Dispute du saint Sacrement présente le triomphe de l’Eglise ; aux philosophes, aux savants, aux artistes groupes autour d’Aristote et de Platon, s’opposent les saints du ciel et les docteurs de la terre, entourant l’ostensoir qui repose sur l’autel. Aux deux autres parois, la Jurisprudence, avec ses légistes, au-dessus desquels trônent, en aimable allégorie, 1û Force, la Justice et la Tempérance, répond à la Poésie, qui réunit autour d’Apollon, sous les ombrages du Parnasse, les Muses et les Poètes : H Hante, déjà présent parmi les théologiens de la Dupât », reparaît ici, en précurseur de la Renaissance, auprès de Virgile et d’Horace, et des poètes amis de Jules II. Les gures idéales peintes aux médaillons de la voûte,

Silence. Théologie, Justice, Poésie, résument les grands décors des parois, et de menus tableaux ingénieux les complètent de leur commentaire.

La Renaissance a fait son œuvre en Italie ; son épanouissement a été aussi bref que splendide. Déjà, suus les chefs-d'œuvre hâtivement éclos, les germes de mort sont mal dissimulés. A peine organisé, l'équilibre se rompt entre le sentiment de la nature et l'élude dt l’antiquité. Les dernières frasques de Raphaël montrent l’abus des formules antiques ; et ces froides règles, vivifiées un instant, ne seront bientôt plus qu’un instrument facile aux mains d’artistes spirituels et sans conscience. Sous Léon X, le paganisme des Médicis, qu’avaient frappé à Florence les foudres de Savonarole, s'épanouit librement à Rome ; les dieux antiques semblaient régner au Vatiean. et les signes de leur corruption y devenaient visibles. D'étranges images se glissent parmi les arabesques des Loges ; la chambre de bains du cardinal Bibbiena, au Vatican, celle de Clément VII, au Château Saint-Ange, pourraient avoir appartenu à quelque Romain du siècle de Titus.

Le châtiment d’une oisiveté voluptueuse, où s’abolissait le sens religieux, fut terrible. Le sac de Rome parles Impériaux, en 1027, fut regardé par les sectaires de la Réforme comme une vengeance du ciel : les prophéties luthériennes condamnaient « la Ninive papale » à expier ses péchés par le fer et par le sang. On aime à interpréter ce sentiment d’une expiation dans l'énorme fresque du Jugement Dernier Aonl Michel-Ange achève de décorer, en 1541, la chapelle Sixtine ; et bientôt, commencé en bfr, le Concile de Trente intervient pour arrêter définitivement l'œuvre devenue malsaine de la Renaissance.

VI. La Renaissance eu Angleterre et en Allemagne. — En Angleterre, Renaissance et Réforme sont presque simultanées. « L’Oxford de lyi, avec

« Grocyn et Linacre, était pour tous les Anglais la
« ville du grec. Un moine de Cantorbéry, Sellyng, 
« de retour de Bologne où il s'était fait recevoir
« docteur, avait ouvert une classe de grec près de
« l’abbaye, puis, prenantaveclui son meilleur élève, 
« Thomas Linacre, il l’avait conduit en Halie et
« laissé entre les mains de Politien. Linacre fut le

1 professeur de Thomas More, et il fait bon voir ce

« (lambeau de la Renaissance qui passe ainsi de
« mains en mains, du maître de Jean de Médicis
« jusqu’au maître de Thomas More.
« Mais il y a loin des jardins de Laurent le Magni « lique aux pauvres chambres d’Oxford. Si l’ar « deur au travail est identique, ici du moins la vie
« reste grave et presque monacale. Aucune frivot lité, aucun renouveau de paganisme n’a marqué

1 les débuts de la Renaissance en Angleterre » (Hknri Brrmond, Le Bienheureux Thomas Mort, p. 10-1 1). C’est à Oxford que Thomas More, biographe de Pic de la Mirandole, rencontre en 1/197 Erasme ; en 150. r >, il lui oflre l’hospitalité, et l’introduit plus intimement au cénacle des hellénistes, où Colet et Lilly ont rejoint Grocyn et Linacre. En 1511, Erasme publie (à Paris) son Eloge de la Folie ; deux ans plus tard, il est nommé professeur à Cambridge. A son tour, en l5l6, More publie son Utopie, et Henri VIII l’accable de ses faveurs, jusqu'à l'élire, à la place de Wolsey, lord grand chancelier. On sait comment cette vie glorieuse se termina, en 153/j, par le martyre ; la rupture entre Rome et le royaume anglais était brusquement survenue, et la Réforme protestante, avec le schisme, avait succédé à la Renaissance.

On a souvent accusé ces deux grands amis, Erasme et More, d’avoir pactisé avec l’hérésie.mais, 937

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comme l’écrit Froide, l’historien d’Erasme, « on ne

« comprend rien au xvi* siècle, tant qu’on n’a pas

x réalise l’immense différence qu’on faisait alors < entre un changement de doctrine et une réforme

« disciplinaire et morale de l’Eglise » (cilé par Bkb-KOND, 

/. e., p. 34). Cette réforme si nécessaire sera l’objet d’un concile ; mais elle laissera le dogme intact.

On s’émerveille de l’audace d’un Erasme, dénonçant les vices du clergé, stigmatisant la corruption des moines ; mais ne trouverait-on pas un tableau aussi noir, un siècle et demi plus tôt, dans le Dialogue de sainte Catherine de Sienne, et Dante ne demeure-t-il pas grand théologien au milieu même de ses attaques passionnées contre certains papes ? Il est vrai, Catherine est une sainte, et Dante est un poète ; Erasme n’est qu’un homme d’esprit. Son ami Thomas More demeure Adèle à l’humour anglais jusque sous la hache du bourreau ; Erasme aiguise des traits qui font penser à l’ironie de Voltaire. Mais il va plus loin que More. Dans l’Eloge de lu Folie, « on aperçoit sans peine que la théologie, ou mieux la critique de la théologie, occupe la première place. < E : i contiant à la Folie un rôle qui lui semblait si

« étranger, Erasme estimait par une feinte habile

» qu’un bouffon peut tout dire, et qu’on serait mal

« venu de lui reprocher des excès de langage r (J.

B. Pihbad, Erasme, sa pensée religieuse, p. 171-2). Ce fut, quand on l’attaqua, le meilleur argument de sa défense. Plus tard, en 1518, dans les Colloques familiers, il cache sous un badinage plus subtil ses idées sur la réforme religieuse, et il les présente de telle sorte, en des dialogues où hérétiques et orthodoxes ont les uns et les autres des rôles presque égaux, et la part aussi belle, qu’on ne sort point de la lecture de cette comédie ingénieuse sans quelque incertitude sur les convictions intimes de son auteur. Ce n’est pourtant pas à Rome, mais en Sorbonne que les théologiens sentirent leur enseignement menacé par cette incessante raillerie ; « le 15 mai 1026, f la Faculté procéda à la censure détaillée des Colloques ; à l’unanimité et après mûre délibération,

« elle décida que la lecture en serait interdite à tous
« et surtout aux jeunes gens » (Pi.rau, l. c.. p. 209).

Il n’est pas sans intérêt de constater que l’humanisme érasmien n’était pas moins redouté dans le camp protestant. Luther écrit dans ses Propos de taille :

« Par mon testament, j’interdirai à mes tils la
« lecture des Colloques : sous le couvert de personnages

fictifs, Erasme insinue des impiétés, il propose des principes qui ruinent ou du moins compromettent le christianisme et l’Eglise… ; c’est un 1 Démocrite et c’est un Epicure ; c’est un subtil rail* leur de la religion. Je préfère Lucien à Erasme,

« qui, sous un masque de piété, bafoue la religion » 

(cité par Pwbau.Lc, p. 269). Et, dans le camp catholique, le théologien Clichtove, ne voulant pas attaquer directement Erasme, fait allusion, par une phrase discrète de son Antiluther, à un écrivain

« doué du charme du langage, qu’il faut regarder
« comme un sectateur d’Epicure » (id., p. 270).

Erasme est le représentant le plus notable de l’humanisme allemand, dans la période où, consciemment ou non, il commence à pactiser avec les réformateurs ; les thèses de Luther sont de 1017. Mais il y a eu une première phase de la Renaissance, où, selon les paroles de l’humaniste Wimpheling, " l’instituteur de l’Allemagne >, la bonne nouvelle se répandit de canton en canton, < exaltant en tous lieux

« l’excellence et la noblesse des arts et des sciences, 

< et vantant tous les bienfaits que l’on peut recevoir par leur commerce. L’Allemagne ne fut jamais plus féconde en hommes remarquables ;

« ceux-là du moins, formésà la vieille école, étaient
« encore pour la plupart des chrétiens convaincus.
« Grâce à l’imprimerie, leurs idées se répandent
« partout. La diffusion « les livres religieux précède
« celle des classiques ; la Bible est lééditée plus de
« cent fois, de i’i"’- à 1500… Des humanistes de
« marque, dont l’action sera très grande, … cher< client dans l’étude des classiques un complément
« à leur formation chrétienne, qu’ils ne renient nullement.

Ce n’est pas l’étude de l’antiquité classique en elle-même, écrivait Wimpheling dans

« son grand ouvrage pédagogique, qui est dangereuse

pour l’éducation chrétienne, c’est lamanière

« fausse de l’envisager, c’est le mauvais usage qu ?
« l’on en peut faire. Sans aucun doute, elle serait
« funeste si, comme il arrive fréquemment en Italie, 
« on propageait par les classiques une manière
« païenne de juger et de penser, et si l’on mettait
« entre les mains de nos étudiants des œuvres litté<i raires qui pourraient mettre en péril, dans leurs
« jeunes esprits, le patriotisme ou les mœurs chrétiennes.

Mais au contraire l’antiquité bien comprise peut rendre à la morale et à la science théologique les services les plus précieux » (Alfrbd

« Baudrillart, L’Eglise catholique, la Renaissance, 

<c le Protestantisme, p. 42-3).

« Le rôle des universités fut plus grand que celui
« des maîtres isolé », bien plus actif qu’en Italie ; 
« n’en a-t-il pas été ainsi plus d’une fois dans le
« cours de l’histoire de l’Allemagne ? Elles étaient
« jeunes encore, mais auprès de chacune se groupaient

des hommes éminents. A Cologne, Barthélemy de Cologne et Ortwin Gratius ; àHeidelberg,

« Rodolphe Agricola, le chancelier Jean de Dalberg, 
« Reuchlin, l’illustre abbé de Spanheim, Jean Trithème, 

le plus grand historien allemand du siècle ;

« àErfurth, le fameux cercle d’humanistes fondé
« par Maternus Pistorius avec Crotus Rubeanus, 
« Ëoban Hesse, Hermann Buse ii, Mutian, les poète*
« qui bientôt s’opposeront aux scolastiques ; à
« Bàle, Heylin von Stein, qui tient encore à l’école
« scolastique et la représente avec honneur ; à
« Strasbourg enfin, Wimpheling, à qui un ardent
« patriotisme, joint à un savoir étendu, dicta la
« première histoire d’Allemagne qu’ail écrite un humaniste

» (Baudrillart, l. c., p. 45-6).

D’autre part, comme en Italie, ces humanistes sont aidés par de riches protecteurs, Conrad Peutinger, à Augsbourg, Wilibald Pirckheimer, à Nuremberg. De grands artistes, comme Albert Durer et Hans Holbein, l’ami d’Erasme, illustrent avec un respect profond l’Ancien et le Nouveau Testament. Cependant, sous l’influence d’Erasme, ce qu’on a appelé « le prologue de la grande tragédie tliéologique du xvie siècle » se précipite. « Les huit manistes d’Erfurth, Mutian, chanoine de Gotha,

« Crotus Rubeanus, Eoban Hesse, le suivent dans
« la lutte contre les scolastiques, et déjà se prépare
« la division intellectuelle de l’Allemagne, qui se
« consomme à propos de la querelle de Reuchlin.
« Reuchlin, l’un des plus grands parmi les humau

nistes, l’un des fondateurs de la science hébraïque,

« se voit attaquer par les théologiens de Cologne à
« propos de ses livres De verbo mirifico et De arte
« cabbalistica ; tous les esprits s’enflamment ; les
« humanistes se prononcent avec fureur contre les
« scolastiques, que par les Epistulævirorum obscu~
« rorum ils couvrent de ridicule. Voilà des alliés
« tout prêts pour Luther… » (Baudrillart, /. c, 
« P. 4q).

VII. La R9na133ance en France. — La France était préparée de longue date à la Renaissance. 939

RENAISSANCE

940

Dès le moyen âge, on s’y essayait à traduire les auteurs latins, Tite-Live, Sénèque, Quinte-Curce ; les légendes romaines tenaient une large place parmi les livres de chevalerie. Mais l’humanisme était déjà largement épanoui en Italie, lorsqu’il s’implanta en France, grâce surtout à deux grands éiudits, Guillaume Fichet, professeur de théologie en Sorbonne et de lettres latines aux écoles de la rue du Fouarre, et Robert Gaguin, professeur, diplomate et voyageur, auteur de la première histoire de France. Les guerres d Italie, sous Charles VIII et louis XII, précipitent la transformation des arts, aussi bien que celle des lettres. L’imprimerie se répand, de Paris à Chartres, à RoueD, à Lyon, à Poitiers, à Toulouse. L’enseignement des collèges parisiens s’ouvre libéralement aux idées nouvelles ; l’humaniste italien Jérôme Aléandre, qui commente Platon, Cicéron, Ausone, est accueilli avec enthousiasme aux collèges de la Marche et de Cambrai, en iôog, 151 i, 1513 ; les éditions des classiques latins de Josse Bade rivalisent avec celles des Aide. Un grand helléniste, Guillaume Budé, « renouvellel’étude dudroit, fonde

« l’histoire de l’économie politique et partage avec

i Erasme, devant l’Europe, la maîtrise incontestée

« de l’érudition » (P. Imbart db la Tour, Les Origines

de la Réforme, tome II, p. 364). Enfin, en 1530, après delongueshésitations, François I er institue les chaires de grec et d’hébreu, puis de latin et de mathématiques, du Collège de France, où désormais sera poursuivie en toute liberté l’étude des langues et des civilisations antiques, en réaction contre la scolastique et les méthodes surannées de la Sorbonne, dont Rabelais va poursuivre les doctrines de ses plaisantes et terribles caricatures.

Rabelais ira plus loin qu’Erasme dans sa critique du clergé, et rejoindra Luther dans ses attaques contre la Rome papale ; ce qui ne l’empêche point de traiter Calvin tout aussi rudement. Mais, si l’on veutchercherquel fut en France le vrai protagoniste de la réforme religieuse, c’est Lefèvre d’Etaples que l’on nommera. Exégète et professeur, lié en Italie avec les grands humanistes, il enseigne Aristote, le traduit et le commente, puis, à la suite d’un second séjour en Italie, en 1500, il étudie Platon, et pousse l’analyse du platonisme jusqu’à ses lointaines déviations, dans le mysticisme de Plotin ou de Denys l’Aréopagite. Théologien, il publie en 150g la première édition critique des Psaumes ; enfin il accompagne de ses commentaires, en 1512, l’édition des Epîtres de saint Paul. Son action, appuyée, continuée par l’évêque de Meaux, Briçonnet, dont il fut le vicaire général, inspire l’humanisme de Marguerite de Navarre, demeurée catholique, malgré sa sympathie très évidente pour la Réforme.

Quand commenceront les guerres de religion, on verra paraître de façon plustranchéecedoublecaractère de l’esprit de la Renaissance, dont on suit aisément le développement en France jusqu’à la fin du xvi 8 siècle : l’humanisme chrétien, nourri de la beauté antique, mais demeuré fidèle à la doctrine îles grands théologiens du Moyen Age, donnera sa

; > ! us belle floraison dans l’œuvre des poètes nouveaux, 

avec Ronsard et son groupe, dans l’œuvre des moralistes, avec Montaigne et Charron ; l’huma nisme païen, hostile au clergé, foncièrement sceptique, et que l’on nommerait plutôt naturalisme, continue la verve gauloise des conteurs du Moyen Age, s’épanouit avec Rabelais, avec les libertins du xvne siècle et les libres-penseurs du xvni’, trouve ses formules dans la doctrine de l’Encyclopédie et l’ironie de Voltaire, et aboutit à la Révolution.

VIII. Bibliographie. — Une étude approfondie de ce sujet immense nécessiterait toute une bibliothèque ; on ne peut indiquer ici que les livres essentiels. Ils sont cités d’ailleurs en deux ouvrages de proportions modestes, mais où la thèse catholique est traitée avec l’e « prit le plus généreux et l’information la plus sûre : L’Eglise et les origines de la Renaissance, par Jean Guiraud, Paris, 1902 ; L’Eglise catholique, la Renaissance, le Protestantisme, conférences données à l’Institut Catholique, janvier-mars lllOi. par Mgr. Baudrillart. On ajoutera : le tome II du grand ouvrage de P. Imbart delà Tour, Les Origines de la Réforme (V Eglise catholique, la crise et la Renaissance), Paris, 1909, et Fbrnand MounRBT, Histoire Générais de l’Eglise, t. V, La Renaissance et Ut Réforme, Paris, 1910. Les charmants livres de Gbbhart, Les Origines de la Renaissance en Italie, Paris 1879 ; l.a Renaissance italienne et la philosophiede l’histoire, Paris, 1887 ; L’Italie mystique, Paris, 1893, gardent une note surtout littéraire et un peu rorr. antique, qui apparaît plus accentuée dans le Jules II de Klaczko, Paris, 1898, et surtout dans La Renaissance, scènes historiques, du Cte de Gobineau, Paris, 1876. On a vu plus haut ce qu’il fallait penser du livre de Michklbt, Histoire de France au seizième siècle. Renaissance, Paris, 1855 ; L’Histoire des Papes depuis la fin du Moyen Age, de Pastor, trad. par Furcy-Raynaud, Paris, iSgætann. sulv., est une source capitale (l’édition allemande seule est accompagnée de notes, de la plus haute importance) ; il faut y joindre, pour l’Allemagne, la publication non moins considérable de Mgr. Janssen, L’Allemagne et la Réforme, trad. fr., Paris, 1889 et ann. suiv. Dans l’ouvrage collectif Le Vatican, les Papes et la Civilisation, par Goyau, Pbraté et Fabre, Paris, 1895, éd. illustrée in-4°. et 2 vol. in-12, l’étude sur La Bibliothèque Vaticane apporte de nombreux documents de haute valeur. Autres ouvrages généraux : Burckhardt, La civilisation en Italie au temps de la Renaissance, trad. par Schmitt, Paris, 1885, 2 vol. ; Voigt, Die Wiederbelehung des classischcn Alterthums, Berlin, 1880, 2 vol., travaux de haute érudition, et de critique rationaliste. — Euo. Muntz, Histoire de l’Art pendant la Renaissance, 3 vol., Paris 1889-9.5 ; La Renaissance en Italie et en France à l’époque de Charles VIII. Paris, 1885 ; Les Précurseurs de la Renaissance, Paris. 1881. — Ph. Monnibr, Le Quattrocento, 2 vol.. Paris, 1901. — Pierre de Nolhac, Pétrarque et l’humanisme, Paris. 1892 ; Ronsard et l’humanisme, Paris, 192^. — Amb. Firmin-Didot, Aide Manuce et l’hi llénisme à Venise, Paris, 1875.

— Abrl Lbfranc, Histoire du Collège de France, Paris, 1893. L’excellent petit livre de Henri Bhbmond, Le Bienheureux Thomas More, Paris, 1904, donne une vue très précise de la Renaissance anglaise. Sur Erasme, les publications sont nombreuses : Nisard, Etudessur la Renaissance(Erasme, Thomas Morus, Melanchton), Paris, 1 855 ; Fnugkre, Erasme, sa vie et ses ouvrages, Paris, 187/J ; Pierre db Nolhac, Erasme en Italie, Paris, 1898 ; J. B. Pineau, Erasme, sa pensée religieuse, Paris, ig24, très minutieux et précis. — J. Paquier, Jérôme Aléandre, Paris, 1900. — H. Hauser, De l’humanisme et de la Réforme en France (Revue historique, juillet-août 1897). On trouvera une abondante bibliographie d’art aux tomes III et IV de l’Histoire de l’Art dirigée par André Michel ; d’art et d’histoire au tome V de l’Histoire de France dirigée par Lavissb, enfin dans les récentes Histoires de la Littérature française de Peut de Jul941

RESPONSABILITÉ

942

lbvillb, de Gustavb Lanson, et de Bkihbr et

1I.VZARD.

André Pérath.