Description de la Chine (La Haye)/De la noblesse

Scheuerleer (2p. 69-75).


De la noblesse.


La noblesse n’est point héréditaire à la Chine, quoiqu’il y ait des dignités qui restent dans quelques familles, et qui se donnent par l’empereur, à ceux de la famille qu’il juge avoir le plus de talents. L’on n’y a de rang qu’autant qu’on a de capacité et de mérite. Quelque illustre qu’ait été un homme, fut-il même parvenu à la première dignité de l’empire, les enfants qu’il laisse après lui, ont leur fortune à faire ; et s’ils sont dépourvus d’esprit, ou amateurs de leur repos, ils ramperont avec le peuple, et seront souvent obligés d’embrasser les plus viles professions.

Il est vrai qu’on peut succéder aux biens de son père, mais on ne succède ni à ses dignités, ni à sa réputation ; il faut s’y élever par les mêmes degrés que lui : c’est pourquoi ils font leur capital de l’étude la plus constante, et ils ne manquent guère de s’avancer de quelque condition qu’ils soient, quand ils ont de la disposition aux lettres. Aussi voit-on tous les jours à la Chine des élévations de fortune non moins surprenantes, que celles qui se font quelquefois en Italie pour les ecclésiastiques, où des gens de la plus basse extraction, peuvent aspirer à la première dignité du monde chrétien.


De ses degrés.

Tout est peuple, ou lettré, ou mandarin à la Chine. Il n’y a que ceux de la famille régnante qui soient distingués ; ils ont le rang de princes, et c’est en leur faveur qu’on a établi cinq degrés de noblesse titulaire, à peu près semblables aux titres qu’on donne en Europe, de ducs, de marquis, de comtes, de barons, et de seigneurs.

On accorde ces titres aux descendants de la famille impériale, tels que sont les enfants de l’empereur, et ceux que l’empereur fait entrer dans son alliance, en leur donnant ses filles en mariage. On leur assigne des revenus propres à soutenir leurs dignités, mais on ne leur donne aucun pouvoir : il y a cependant d’autres princes qui ne sont point alliés à la famille impériale, soit qu’ils viennent des dynasties précédentes, soit que leurs ancêtres aient acquis ce titre, par les services rendus à l’empire. Les provinces ne sont gouvernées que par les mandarins envoyés par l’empereur, qui nomme immédiatement aux principaux emplois, et qui confirme ceux qui les font tirer au sort, comme nous l’avons dit ailleurs, après les avoir fait venir en sa présence, et les avoir examinés par lui-même.

L’empereur qui règne aujourd’hui n’est que le troisième de ceux qui ont régné depuis 99 ans sur toute la Chine et la Tartarie ; mais il est le cinquième si l’on remonte jusqu’à son bisaïeul, et son trisaïeul.

Celui-ci après avoir subjugué son propre pays, conquit encore toute la Tartarie orientale, le royaume de Corée, et la province de Leao tong, au-delà de la grande muraille, et établit sa cour dans la capitale appelée Chin yang par les Chinois, et Moukeden, par les Tartares Mantcheoux. On lui donna dès lors le nom de Tai tsou : c’est un nom commun à tous les conquérants, qui sont les premiers auteurs d’une dynastie ; et comme ses frères qui étaient en grand nombre avaient beaucoup contribué par leur valeur à la conquête de tant de pays, il leur donna des titres d’honneur ; il fit les uns tsin vang, les autres kiun vang, et pei lé : il a plu aux Européens d’appeler ces sortes de dignités, du nom de régulos, ou princes du premier, du second, et du troisième ordre. Il fut réglé alors que parmi les enfants de ces régulos, on en choisirait toujours un, pour succéder à son père dans la même dignité.

Outre ces trois dignités, ce même empereur en établit encore quelques autres qui leur sont inférieures, et qui se donnent aux autres enfants qui s’en rendent le plus dignes. Ceux du quatrième degré s’appellent pei tse, ceux du cinquième cong heou, et ainsi des autres.


Des princes du sang.

Ce cinquième degré est au dessus des plus grands mandarins de l’empire. Les autres qui suivent, n’ont pas, comme les précédents, des marques extérieures, qui les distinguent des mandarins, soit dans leurs équipages soit dans leurs habits : ils ne portent que la ceinture jaune, qui est commune à tous ces princes du sang, tant à ceux qui possèdent des dignités, qu’à ceux qui n’en ont pas : mais ceux-ci ont honte de la faire paraître, et ils ont coutume de la cacher, lorsque leur indigence les met hors d’état d’avoir un équipage convenable à leur rang et à leur naissance.

C’est pourquoi ce serait se faire une fausse idée des princes du sang de la Chine, si on les comparait à ceux d’Europe, et surtout de la France, où la suite glorieuse de tant de rois leurs ancêtres les élève beaucoup au-dessus des personnes mêmes les plus distinguées de l’État. Leur petit nombre leur attire encore plus d’attention et de respect, et ce respect s’augmente dans l’esprit des peuples, à proportion qu’ils approchent de plus près du trône.

Il n’en est pas ainsi à la Chine : les princes du sang touchent presque à leur origine : ils ne comptent que cinq générations ; et cependant leur nombre s’est tellement multiplié en si peu de temps, qu’on en compte aujourd’hui plus de deux mille : cette multitude en les éloignant du trône, les avilit, surtout ceux, qui d’ailleurs étant dépourvus de titres et d’emplois, ne peuvent figurer d’une manière conforme à leur naissance : c’est ce qui met une grande différence entre les princes du même sang.

La pluralité des femmes, fait que ces princes se multiplient extrêmement ; mais à force de se multiplier, ils se nuisent les uns aux autres : comme ils n’ont point de fond de terre, et que l’empereur ne peut pas donner des pensions à tous, il y en a qui vivent dans une extrême pauvreté, quoiqu’ils portent la ceinture jaune.

Sur la fin de la dynastie des Ming, il y en avait plus de trois mille familles dans la ville de Kiang tcheou, dont plusieurs étaient réduites à l’aumône. Le bandit qui s’empara de Peking, et qui passa par cette ville, se défit de tous ces princes, en les faisant presque tous passer par le fil de l’épée : c’est ce qui rendit déserte une partie de la ville.

Quelques-uns qui échappèrent à la cruauté, quittèrent la ceinture jaune, et changeant de nom, se mirent au rang du peuple. Ils sont encore connus pour être du sang impérial des Ming ; l’un d’eux a été domestique de nos missionnaires dans une maison que notre compagnie a dans cette ville, et cette maison a été bâtie par un de ces princes, qui sachant que les Tartares le cherchaient, prit la fuite et disparut.

Ces princes, outre leur femme légitime, en ont ordinairement trois autres, auxquelles l’empereur donne des titres, et dont les noms s’inscrivent dans le tribunal des princes : les enfants qui en naissent, ont leur rang après les enfants légitimes, et sont plus considérés que ceux qui naissent de simples concubines, qu’ils peuvent avoir en aussi grand nombre qu’ils souhaitent.

Ils ont pareillement deux sortes de domestiques : les uns qui sont proprement esclaves, les autres qui sont des Tartares ou des Chinois tartarisés, que l’empereur donne en grand ou petit nombre, à proportion de la dignité dont il honore les princes de son sang. Ces derniers font l’équipage du régulo, et on les appelle communément les gens de sa porte : il y a parmi eux des mandarins considérables, des vicerois, et même des tsong tou : quoiqu’ils ne soient pas esclaves comme les premiers, ils sont presque également soumis aux volontés du régulo, tant qu’il conserve sa dignité. Ils passent après sa mort au service de ses enfants, s’ils sont honorés de la même dignité.

Si le prince pendant sa vie vient à déchoir de son rang, ou si le conservant jusqu’à la mort, sa dignité ne passe pas à d’autres de ses enfants, cette espèce de domestiques est mise en réserve, et on les donne à quelques autres princes du sang, lorsqu’on fait sa maison, et qu’on l’élève à la même dignité.

L’occupation de ces princes, en remontant du cinquième ordre jusqu’au premier, est pour l’ordinaire d’assister aux cérémonies publiques, de se montrer tous les matins au palais de l’empereur, puis de se retirer dans leur hôtel, où ils n’ont d’autre soin que celui de gouverner leur famille, les mandarins, et les autres officiers dont l’empereur a composé leur maison. Il ne leur est pas permis de se visiter les uns les autres, ni de coucher hors de la ville, sans une permission expresse.

Il est aisé de voir pour quelle raison on les assujettit à des lois si gênantes : il suffit de dire qu’elles leur donnent un grand loisir, et que la plupart ne l’emploient pas trop utilement. Il y en a cependant que l’empereur occupe dans les affaires publiques, et qui rendent de grands services à l’empire. Tel a été le treizième frère de l’empereur régnant.

On met encore au rang des nobles :

En premier lieu, ceux qui ont été autrefois mandarins dans d’autres provinces, car, comme je l’ai dit, nul ne peut l’être dans son propre pays, soit qu’ils aient été cassés de leurs emplois, et presque tous sont de ce nombre ; soit que d’eux-mêmes ils se soient retirés avec l’agrément du prince, ou qu’ils y aient été forcés par la mort de leur père, ou de leur mère ; car un mandarin qui a fait une semblable perte, doit aussitôt se dépouiller de sa charge, et donner par là une marque publique de sa douleur.

En second lieu, ceux qui n’ayant pas eu assez de capacité pour parvenir aux degrés littéraires, se sont procurés par la faveur ou par des présents, certains titres d’honneur, à l’aide desquels ils entretiennent avec les mandarins un commerce de visites qui les fait craindre et respecter du peuple.

En troisième lieu une infinité de gens d’étude, qui depuis l’âge de 15 à 16 ans, jusqu’à celui de 40 viennent tous les trois ans pour les examens au tribunal du gouverneur, qui leur donne le sujet de leur composition. C’est bien plus l’ambition, que le désir de se rendre habiles, qui les soutient dans une longue étude. Outre que le degré de bachelier, quand ils y sont une fois parvenus, les met à couvert des châtiments du mandarin public, il leur donne le privilège d’être admis à son audience, de s’asseoir en sa présence, et de manger avec lui : honneur qui est infiniment estimé à la Chine, et qui ne s’accorde presque jamais à aucune personne du peuple.


Famille la plus noble du monde.

La famille qui passe aujourd’hui pour la plus noble de la Chine, et qu’on peut regarder comme la plus noble du monde, si l’on a égard à son ancienneté, est la famille des descendants de Confucius, ce célèbre philosophe que les Chinois ont en si grande vénération. Il n’y a proprement que la noblesse de cette famille qui soit héréditaire, et qui se conserve en ligne directe depuis plus de deux mille ans, dans la personne d’un de ses neveux, qu’on appelle pour cela Ching gin ti chi ell, c’est-à-dire, le neveu du grand homme, ou du sage par excellence : car c’est ainsi que les Chinois appellent le restaurateur de leur philosophie morale ; et en considération de cette origine, tous les empereurs ont constamment honoré un des descendants du philosophe, de la dignité de cong, qui répond assez à celle de nos ducs ou de nos anciens comtes.

C’est avec les honneurs dûs à ce rang, que celui qui vit encore aujourd’hui, marche dans les rues de Peking, lorsqu’il s’y rend tous les ans de Kio seou, ville de la province de Chan tong qui est le lieu de la naissance de son illustre aïeul ; de plus c’est toujours un lettré de cette famille que l’empereur nomme gouverneur de la susdite ville de Kio seou.


Des marques de noblesse.

L’une des principales marques de noblesse, est d’avoir reçu de l’empereur des titres d’honneur qu’on ne donne qu’aux personnes d’un mérite éclatant. Le prince les donne quelquefois pour cinq, six, huit ou dix générations, selon les services plus ou moins grands qu’on a rendu à l’État. C’est de ces titres honorables, que les mandarins se qualifient dans leurs lettres, et sur le frontispice de leurs maisons.

En Europe la noblesse passe des pères aux enfants et à leur postérité : mais quelquefois à la Chine elle passe des enfants au père et aux aïeux. Quand quelqu’un s’est distingué par un mérite extraordinaire, l’empereur ne se contente pas de l’élever aux honneurs dont je viens de parler ; mais par autant de patentes, il étend ces titres au père et à la mère, à l’aïeul et à l’aïeule de celui qu’il a honoré ; ou pour mieux dire, il donne à chacun un titre d’honneur particulier, en reconnaissance de ce qu’ils ont mis au monde, et élevé avec soin, un homme d’un mérite si distingué, et si utile à l’État.

Je n’en saurais donner un exemple plus solennel que celui du père Ferdinand Verbiest, jésuite flamand, président du tribunal des Mathématiques à la cour de Peking. Ce Père qui y avait été appelé pour aider le père Adam Schal en la réformation du calendrier, eut ordre de dresser des tables des mouvements célestes et des éclipses pour deux mille ans ; il y travailla avec soin, et il appliqua tous les mandarins de la première classe du tribunal de l’astronomie à calculer les mouvements des planètes, selon les règles qu’il leur donna. Enfin ayant achevé ce grand ouvrage, il en fit trente-deux volumes de cartes, avec leurs explications, et les présenta à l’empereur l’an 1678, sous ce titre : L’astronomie perpétuelle de l’empereur Cang hi.

Il se fit alors une assemblée générale des mandarins de tous les ordres, des princes, des vicerois, et des gouverneurs des provinces, qui étaient allés saluer l’empereur, et se réjouir avec lui de la déclaration qu’il avait fait de son fils pour son successeur à l’empire. Ce prince reçut agréablement le présent du père Verbiest, et fit mettre cet ouvrage dans les archives du palais : en même temps il voulut reconnaître le travail infatigable du Père, et pour cela il le fit président du tribunal du premier ordre, et lui donna le titre de cette dignité.

Le Père lui présenta une requête, où il remontrait que la profession religieuse qu’il avait embrassée, ne lui permettait pas d’accepter cet honneur : il ne fut pas écouté, et de crainte d’offenser l’empereur, et de nuire aux progrès de la religion dans l’empire, il lui fallut obéir. Voici la teneur des patentes, par lesquelles il lui conférait cette dignité.

« Nous empereur par ordre du Ciel, ordonnons : La forme d’un État bien réglé, demande que les belles actions soient connues, et que les services rendus à l’État avec une prompte volonté, soient récompensés, et reçoivent les éloges qu’ils méritent. Il est aussi du devoir d’un prince, qui gouverne sagement selon les lois, de louer la vertu, et d’exalter le mérite. C’est ce que nous faisons par ces lettres patentes, que nous voulons être publiées par tout notre empire, pour faire connaître à tous nos sujets, quel égard nous avons à des services, qui nous sont rendus avec tant d’application et de diligence.

« C’est pourquoi, Ferdinand Verbiest, à qui j’ai commis le soin de mon calendrier impérial, le naturel droit et sincère, et la vigilance que vous avez fait paraître à mon service, aussi bien que le profond savoir, que vous avez acquis par l’application continuelle de votre esprit en toutes sortes de sciences, m’ont obligé de vous établir à la tête de mon académie astronomique ; vous avez répondu par vos soins à notre attente, et travaillant jour et nuit, vous avez rempli les devoirs de cette charge ; enfin vous êtes heureusement venu à bout de tous vos desseins, avec un travail infatigable, dont nous avons nous-même été témoin.

« Il est convenable que dans la conjoncture d’une si grande fête, où tout mon empire est venu me donner des marques de sa joie, je vous fasse ressentir les effets de ma faveur impériale, et de l’estime que je fais de votre personne. C’est pourquoi par une grâce singulière et de notre propre mouvement, nous vous accordons le titre de grand homme, qui doit être partout rendu célèbre, et nous ordonnons que ce titre soit envoyé dans tous les lieux de notre empire, pour y être publié.

« Prenez de nouvelles forces à notre service. Ce titre d’honneur qui commence en votre personne, s’étend à tous vos parents et à tous ceux de votre sang ; vous avez mérité par vos soins et par votre application singulière, ces éloges et cette dignité ; et vos mérites sont si grands, qu’ils répondent entièrement à l’honneur que nous vous faisons. Recevez donc cette grâce avec le respect qui lui est dû. Vous êtes l’unique à qui je l’ai conféré ; que ce soit un nouveau motif d’employer pour notre service tous vos talents, et toutes les forces de votre esprit. »

De semblables titres d’honneur remontent, comme je l’ai dit, jusqu’aux ancêtres de celui qui les reçoit : tous ses parents s’en glorifient : ils les font écrire en divers lieux de leurs maisons, et jusque sur les lanternes qu’ils font porter devant eux, lorsqu’ils marchent pendant la nuit ; ce qui leur attire de grands respects.

Comme le P. Verbiest était européen, il n’avait pas de parents à la Chine qui pussent partager cet honneur avec lui : mais par un bonheur singulier pour la religion, tous les missionnaires, jésuites et autres, passaient pour ses frères, et étaient considérés sous ce titre par les mandarins. Ce fut cette qualité qui facilita à Monseigneur l’Evêque d’Héliopolis, son entrée à la Chine, et la plupart des religieux faisaient mettre ce titre sur la porte de leur maison.

Après avoir ainsi honoré le P. Verbiest, l’empereur communiqua les mêmes titres à ses ancêtres, par autant de patentes qu’il fit dresser : l’une, pour son aïeul nommé Pierre Verbiest ; l’autre, pour Paschasie de Wolff son aïeule ; la troisième, pour Louis Verbiest son père, et la quatrième, pour Anne Vanherke sa mère. Je ne rapporterai que celles qui concernent l’aïeul et l’aïeule du missionnaire, elles suffiront pour faire connaître le caractère d’esprit de cette nation.

Les patentes accordées à l’aïeul du P. Verbiest, étaient ainsi exprimées :

« Nous empereur etc. Les honneurs que nous accordons à ceux, qui par leur mérite se sont élevés aux dignités de mandarins et de premiers magistrats, se doivent rapporter aux soins de leurs ancêtres comme à leur source, puisque c’est par l’instruction, par l’éducation, et par les bons exemples qu’ils ont reçu d’eux, qu’ils ont pratiqué la vertu, et se sont rendus dignes de ces honneurs.

« C’est pourquoi voulant remonter jusqu’à la première source du mérite, j’étends jusqu’à vous mes bienfaits, Pierre Verbiest, qui êtes l’aïeul du père Ferdinand, que j’ai honoré du titre de, etc. votre vertu comme un arbre bien planté, a jeté de profondes racines, et ne tombera jamais : elle soutient encore votre postérité, et persévère dans votre petit-fils, qui par un mérite si distingué, nous fait connaître quel a été le vôtre. C’est pourquoi vous considérant comme l’origine de sa grandeur, par une faveur singulière, je vous confère les mêmes titres d’honneur, etc. »

L’aïeule du P. Verbiest fut pareillement honorée des mêmes titres, par des patentes, dont voici le sens :

« Nous empereur etc. Lorsque selon les louables coutumes de notre empire, nous voulons récompenser le mérite de ceux qui nous ont fidèlement servi, et par ces récompenses, les exciter à nous continuer leurs services, il est juste qu’une partie de la gloire qu’ils acquièrent pour ces services, passe jusqu’à leurs ancêtres.

« C’est pourquoi considérant les soins que vous avez pris de l’éducation du P. Ferdinand, qui s’acquitte si dignement des charges et des emplois que je lui ai confiés, je vous confère par ces présentes, le titre que l’on donne à la femme de celui qui est mandarin du premier ordre, sous le titre de, etc. Jouissez de ce titre d’honneur, qui relève les soins que vous avez pris de l’éducation de vos enfants et qui excitera les soins des autres, lorsqu’ils verront que nos faveurs impériales s’étendent jusqu’à ceux qui ont contribué en quelque chose à la vertu, et au mérite des personnes que nous honorons. Votre postérité en sera plus glorieuse, et aura pour vous plus de respect : c’est pour cela que nous voulons par ces patentes relever la gloire de votre nom. »

On voit qu’à la réserve de la famille de Confucius, et des princes issus de la famille régnante, on n’est noble à la Chine, qu’autant qu’on a un mérite reconnu par l’empereur, et qu’on y occupe un rang où lui seul élève ceux qu’il en juge dignes : tout ce qui n’est point gradué, est de condition roturière et par là, il n’y a point à craindre que des familles se perpétuant dans un certain éclat, que donne l’ancienneté de la noblesse, s’avisent d’établir dans les provinces, une autorité dangereuse à celle du souverain.