Description de l’Égypte (2nde édition)/Tome 2/Chapitre IX/Section I/Paragraphe 7

§. vii. Du petit temple situé au pied de la butte factice de Medynet-abou.

Au sud-ouest du pavillon et à cent soixante mètres environ, on trouve, au pied de la butte factice de Medynet-abou, un petit temple dont l’axe fait avec le méridien magnétique un angle de 32° 30′. Son portique ou pronaos[1], plus élevé que le reste du temple, a trois mètres de largeur, et une longueur à peu près quadruple. Le temple[2] renferme trois salles successives. Les murs extérieurs n’ont point été sculptés. Le plafond du portique est en partie détruit, ou n’a peut-être jamais été achevé. La première pièce qui suit le portique, n’a plus, vers le sud, que quelques-unes des pierres qui en formaient la couverture ; elle était éclairée par des soupiraux pratiqués dans la partie supérieure des murs latéraux. On n’y voit point d’ornemens. La seconde pièce a ses parois couvertes de figures et d’hiéroglyphes points et sculptés. Sur trois de ses faces intérieures, et jusqu’à la moitié de la hauteur, sont des hiéroglyphes en relief. Les autres parties de cette pièce ont été peintes ; mais, en plusieurs endroits, les hiéroglyphes et les figures ont éprouvé des dégradations, ou même ne se voient plus du tout. Cette pièce est éclairée, comme celle qui la précède, par deux soupiraux pratiqués dans les faces latérales, et par des trous évasés d’environ un pied carré, ouverts au sud et au nord du plafond. Sur la face contiguë à la porte d’entrée, on voit, à droite, un sacrifice de deux lièvres, fait par un prêtre à la déesse Isis : à gauche, on a représenté un sacrifice à Horus, derrière lequel se trouve une femme coiffée de la dépouille d’un vautour. Devant le prêtre, qui semble tenir la tige d’une fleur, est une offrande composée de divers animaux, de fleurs et de fruits parmi lesquels on remarque des raisins et des poissons ; on y voit aussi des gâteaux et des pains.

De cette pièce on passe dans la troisième et dernière, qui est éclairée, comme les précédentes, par des soupiraux pratiqués dans le haut des faces latérales. Aux angles extrêmes, les murs ont été défoncés et fouillés. Le plafond, qui est peint en bleu, est parsemé d’étoiles sur les côtés, et décoré, au milieu, de vautours dont les ailes sont déployées.

Ce petit temple, si l’on en juge par son étendue, est de peu d’importance. Il n’a point été terminé ; ce qu’annoncent évidemment son portique à peine dégrossi et ses murs extérieurs sans ornemens : mais il mérite d’être observé, parce que, renfermant des sculptures entièrement achevées et d’autres qui ne sont qu’ébauchées, il présente les différens degrés du travail des artistes égyptiens dans l’exécution des bas-reliefs. On y voit, en effet, des figures tracées en rouge avec une pureté de trait et une hardiesse de dessin qui supposent une grande connaissance des formes et beaucoup d’habileté dans ceux qui les ont exécutées. Ces dessins mêmes sont supérieurs aux sculptures. Les proportions auxquelles les dessinateurs étaient assujettis, sont déterminées par des carreaux qui subsistent encore. Tel était le premier degré du travail, qui sans doute était exécuté par une même classe d’artistes. Tout près de ces figures construites au simple trait, on voit un bas-relief ébauché. Le ciseau du sculpteur a suivi tous les contours du dessin, et fait disparaître la matière qui environnait l’espace circonscrit par le trait du dessinateur. Cette opération a détaché la figure du fond : mais elle est encore grossière ; toutes les formes sont carrées, et toutes les parties du relief sont dans le même plan : c’était là le travail d’une seconde classe d’ouvriers. Ensuite un sculpteur plus habile venait mettre la dernière main à l’ouvrage ébauché, et donner ces formes douces et arrondies que l’on remarque près de là dans les sculptures entièrement terminées. Des figures qui n’ont point été peintes, et d’autres qui sont toutes brillantes des plus vives couleurs, font conjecturer que le travail du peintre suivait immédiatement celui du sculpteur.

La position de ce petit temple tout près de l’hippodrome, porte à croire qu’il n’est point placé là par l’effet du hasard ; c’était peut-être le lieu où les vainqueurs dans les jeux publics venaient rendre grâces aux dieux, des victoires qu’ils avaient remportées.

  1. Voyez ce que nous disons des portiques ou pronaos égyptiens dans la Description de Karnak, troisième partie de la section viii de ce chapitre.
  2. Voy. pl. 18, fig. 1, A., vol. ii.