Des religions pratiquées actuellement dans l’Inde/Sikhisme

LE SIKHISME


En abordant le Sikhisme, nous nous trouvons en face de ce qu’on pourrait appeler un double mouvement. Essentiellement religieuse à son début, cette secte fut forcée, sous la pression des circonstances, d’adopter une organisation militaire. En songeant aux Sikhs, la plupart d’entre nous, évoquent de courageux guerriers, de splendides combattants. Mais nous nous tromperions gravement si nous les envisagions, nous qui étudions les religions, comme uniquement, ou même principalement des guerriers. Cela s’est réalisé sous la pression des circonstances, de l’entourage ; mais le mouvement lui-même, en son caractère durable, est essentiellement un mouvement religieux. Il a surgi au milieu de l’Hindouisme ; l’idée du grand fondateur, le Gourou Nânak, étant de réunir les Hindous et les Musulmans dans une ligue d’amour envers Dieu et de serviabilité envers les hommes. La pensée de Gourou Nânak, telle qu’elle est exprimée non seulement par ses paroles, mais surtout par sa vie, c’était de faire converger ces éléments hostiles du peuple hindou, vers un centre que tous pussent accepter.

Ce centre, c’est avant tout l’amour de Dieu, Bhakti, la dévotion — Bhakti envers Dieu et aussi envers le Gourou, le Maître, car le mot même de Sikh vient du mot Shishya, disciple, et cette idée de l’amour de Dieu et du Maître est la base même, la vraie racine du Sikhisme. C’est donc, originairement, un mouvement de dévotion. La philosophie est la même que celle des Hindous, mais le mouvement est réformateur dans sa nature, en lutte contre le formalisme du temps, contre le cérémonial, afin de trouver la vie cachée sous les formes, l’essence de la vérité qui a inspiré les cérémonies.

À l’époque de Gourou Nânak, ainsi que cela se présente trop souvent dans l’histoire du monde, une grande religion était devenue de plus en plus formaliste et les hommes dépérissaient en mangeant l’enveloppe du grain au lieu de se nourrir du grain lui-même. Le Gourou Nânak s’efforça de trouver le grain et, en agissant ainsi, il rejeta, en grande partie, l’enveloppe ; il s’efforça d’amener les hommes à voir la réalité de la religion, la vie, l’essence de cette religion, et à trouver cette vie et cette essence dans l’amour de Dieu et du Gourou, dans l’amour des hommes considérés comme les enfants d’un même Dieu. Vous pouvez presque résumer dans cette phrase l’essence même du Sikhisme. Nous verrons tout à l’heure dans la vie du fondateur, comment il essaya de réunir les éléments hostiles autour de lui. Nous verrons que cette vie ne fut qu’un chant de louanges et d’amour à Dieu ; nous verrons que le Gourou Nânak chercha sans cesse l’Être Suprême et, l’ayant trouvé, s’efforça d’apprendre à ses disciples comment, eux aussi, par la dévotion, pourraient arriver à la même science. Je voudrais que vous ayez cette pensée présente à l’esprit dans l’étude du Sikhisme, et je vais vous montrer, dans un instant, comment elle est développée par les doctrines qu’enseignent les Écritures sikhes.

Mais auparavant, et avant de parler de la vie du grand Saint, je dois rapidement tracer devant vous l’ébauche, en quelque sorte, de l’établissement historique du Sikhisme, afin que vous puissiez comprendre un mouvement, dont l’essence était Bhakti, arrivât à s’identifier avec le plus chevaleresque esprit militaire. Je ne peux pas, bien entendu, vous donner tous les détails que vous pourrez lire vous-mêmes. Mais la difficulté est toujours que la plupart des esprits attachent, dans leur étude, trop d’importance aux détails et perdent de vue les grandes lignes qui, seules, rendent le tout intelligible.

Le professeur Huxley se plaignait toujours que les étudiants qui faisaient de la science, perdaient de vue la forêt en étudiant les arbres et cela est continuellement vrai. Les hommes se perdent dans un labyrinthe de détails et ne réussissent pas à saisir les principes unificateurs de l’histoire, à découvrir la principale direction, le courant, la portée des événements. Tout ce que je désire faire, pour l’histoire du Sikhisme, c’est de vous en retracer les grandes lignes, qui vous feront comprendre comment il en vint à être ce qu’il fut. Dix Gourous se succèdent l’un à l’autre (dans une série ininterrompue), dont le Gourou Nânak est le premier, le plus pur, le plus saint et le plus noble de tous : il est la vie, le cœur et l’âme de ses successeurs. Nous examinerons tout à l’heure sa vie (1469-1539 après Jésus-Christ) ; pour le moment, je ne fais que le nommer. Après lui vient le Gourou Angad (1539-1552), de qui il y a peu de chose à dire, si ce n’est qu’il rassembla bon nombre des chants et préceptes de son devancier et commença ainsi la compilation des écritures Sikhes, l’A’di Grantha Saheb. Puis vient le troisième, le Gourou Amar Dâs (1552-1574), au sujet duquel un fait est à noter, à savoir qu’il rencontra l’empereur musulman, Akbar, dans une conférence sur des questions religieuses ; ce qui nous montre l’influence exercée par la pensée dit Gourou Nânak et qu’un essai avait été tenté, en vue d’établir la paix entre les grandes religions rivales de l’Hindouisme et de l’Islam. Le Gourou suivant, le quatrième, est le Gourou Ram Dâs qu’on trouve encore en relations amicales avec le libéral et magnanime Akbar, lequel donne au Gourou un morceau de territoire situé à Amritsar, où Ram Dâs fait creuser le fameux réservoir. Nous arrivons au cinquième, le Gourou Arjunmal (1581-1606), le constructeur du fameux temple d’Or, qui fait époque dans l’histoire des Sikhs ; car ce monument leur donne un centre, un foyer, un lieu de réunion. Le temple est d’abord dédié à Hari, Hari Mandir comme on l’appelle, le Gourou Nânak ayant toujours enseigné que le nom de Hari renfermait le salut. Plus tard, ce temple devînt le Darbâr Saheb. Les Sikhs ont désormais leur propre résidence. Ils commencent à s’assembler autour du temple ; ils commencent à former une communauté définie. Arjunmal, le maître en religion, se met à la tête de la communauté, organisée alors d’une façon précise, assemblée en un lieu déterminé : ce sont les débuts de l’État sikh. La grande œuvre du Maître, c’est, en outre, de rassembler les doctrines de ses prédécesseurs et c’est lui qui compile définitivement et publie l’A’di Grantha Saheb, composée en partie des chants et des préceptes des Gourous précédents, en partie, aussi, des chants des saints Sikhs, etc.

Surgit alors le premier symptôme qui annonce la lutte future. C’est Jehangir qui occupe le trône d’Akbar, il est moins libéral et moins magnanime que son prédécesseur. Son fils se révolte contre lui. Le Gourou Arjunmal, sans aucune raison apparente, ou pour une raison qui, en réalité n’en était pas une, est accusé de sympathiser avec le fils rebelle. Je dis « sans aucune raison », car la racine de l’accusation semble avoir été la colère et la jalousie du puissant ministre à qui Arjunmal avait refusé de donner son enfant en mariage ; ce ministre, excitant les soupçons de Jehangir contre le Gourou, pousse l’empereur à s’emparer de lui et à l’emprisonner. Arjunmal meurt des rigueurs de la captivité.

C’est à cette heure que la communauté, jusque-là purement religieuse et pacifique, est amenée, par suite de cette agression sur la personne de son maître et chef, dans la voie qui fera d’elle un grand corps militaire. Jehangir a pour successeur Aurangzib et les choses empirent sous ce maître fanatique. Le Gourou suivant, le sixième, le Gourou Har Govind (1606-1645), commence définitivement à organiser les Sikhs pour la défense ; il les concentre en un corps, séparé à la fois des Musulmans et des Hindous, destiné non plus à se réunir aux deux autres, mais à exister en tant que corps séparé des deux autres. L’État sikh commence à grandir ; et désormais éclatent la lutte et la guerre : escarmouches isolées, combats isolés, participation aux combats livrés autour d’eux, tout cela soudant les Sikhs plus étroitement entre eux pour en faire un corps guerrier. Le septième Gourou, le Gourou Har Rai (1645-1661), dont il est peu parlé, est pacifique et tranquille, mais autour de lui il y a plus de luttes que jamais, la guerre redouble, les violences redoublent, l’esprit militaire redouble, si bien que l’aspect religieux passe pour ainsi dire à l’arrière-plan si ce n’est par l’inspiration et la force de cohésion qu’il donne. Vient alors le Gourou Har Rishan (1606-1664), qui n’est qu’un enfant de six ans et meurt à neuf ans, suivi du neuvième Gourou, Tegh Bahâdur (1664-1675). La vie de celui-ci est très troublée : il meurt cruellement assassiné par Aurangzib et son fils lui succède, dixième et dernier Gourou, le Gourou Govind (1675-1708). Il donne aux Sikhs leur grande organisation militaire et en fait le corps qui élèvera, sous Ranjit Singh, l’empire Sikh du Pendjab.

Sur ce dixième Gourou, nous devons nous arrêter un instant. Encore petit garçon, il fuit pour sauver ses jours ; après l’assassinat de son père et pendant vingt ans, il vit retiré, méditant sur sa mission. Naturellement il nourrit des sentiments amers contre les ennemis de son père ; la haine des Musulmans semble presque devenir un devoir pour le fils, pour le Gourou et par suite pour les Sikhs. La vieille amitié s’est évanouie, le sang d’un père coule entre le Gourou et l’empereur musulman. Pendant près de vingt ans, comme je l’ai dit, il vit retiré, méditant sur la tâche qu’il a devant lui, méditant sur cette tâche comme un maître en religion mais, plus encore, comme un organisateur militaire. Et finalement il sort de sa retraite, prêt à accomplir une œuvre puissante, mûr pour la mission de sa vie. Il est résolu à séparer définitivement les Sikhs des hommes appartenant à toute autre foi et à éviter toute possibilité de confusion. Il appelle à lui cinq disciples dévoués et il institue, au milieu de ces cinq hommes, la cérémonie de Pâhul, initiation simple, bien dans le caractère guerrier. Il prend de l’eau ; sa femme venant à passer avec cinq sortes de plats doux, il prend un peu de chacun des plats et jette tout dans l’eau. Il agite l’eau avec un couteau à deux tranchants, il en fait sauter quelques gouttes sur les cinq hommes qui l’entourent et les fait tous boire ; eux, à leur tour, l’aspergent de quelques gouttes et lui donnent à boire ; il les proclame alors Khâlsâ, purs, et leur ordonne d’ajouter à leur nom l’épithète de Singh, le lion. Ce sont les premiers disciples initiés, ils se distinguent de tous les autres par des signes spéciaux que chaque Sikh doit porter avec lui. C’est la longue chevelure, qui le distingue de l’Hindou presque toujours rasé ; le peigne ; le poignard ou couteau à deux tranchants ; la bangle d’acier[1] ; les culottes courtes venant aux genoux. Ce sont les cinq signes, les cinq K’s, comme on les appelle, parce que le nom de chacun d’eux commence par un K dans la langue du pays, par lesquels le Gourou distingue tout Sikh de son entourage, et que les vrais Sikhs portent aujourd’hui encore. Telle est la cérémonie, instituée comme cérémonie d’initiation, et partout, a déclaré le Gourou, où cinq Sikhs seront réunis, son esprit sera présent et avec lui le pouvoir que confère l’initiation. Mais ce sera le dernier des Gourous ; après lui, aucun maître ne viendra, le pouvoir passera entre les mains des Khâlsa et sera exercé par le conseil de leurs chefs, les Gourous Mâtâ. L’autorité, pour les Sikhs, réside dans le livre sacré que, plus tard, Gourou Govind complétera.

À présent, il est le chef des guerriers et les Sikhs s’assemblent autour de son étendard. Il lutte, il combat, il organise une grande armée ; ses hommes sont connus par leur courage merveilleux, par la façon dont ils affrontent, dans les batailles, les parties très inégales. La même ardeur que nous avons vu animer les musulmans, après la mort de leur grand Prophète, dans leur carrière de conquérants, s’observe également chez les guerriers Sikhs et ils meurent aussi joyeusement que d’autres vivent. Rien d’étonnant à ce qu’au début ils aient tout entraîné devant eux ; cependant, après des luttes nombreuses, n’étant en somme qu’un petit nombre parmi des myriades d’hommes, nous les trouvons battus dans ce combat, entrepris par eux avec tant d’héroïsme contre la force écrasante du nombre : en effet, ce petit groupe s’était attaqué au puissant empire musulman du Nord. Ils ne sont qu’une poignée contre des myriades, mais ils ne sont jamais découragés, jamais terrifiés ; jamais ils ne perdent l’espoir ; leur Gourou est avec eux partout où ils vont et tant qu’il est là ils ont confiance : il est battu, encore battu, toujours battu, jusqu’à ce qu’enfin, dans un splendide effort, il se retourne et disperse les troupes ennemies : la poursuite cesse alors.

L’endroit où cette bataille libératrice avait été livrée fut appelé la Fontaine du Salut.

C’est à la suite de cela que, pour encourager ses disciples, le Gourou publia le dernier texte sacré des Sikhs, le Livre du dixième roi, ou Gourou Dashwen Pâdshâhi, le complément de l’A’di Grantha Saheb.

Nous arrivons à la fin. Il est attaqué par un Pathân, qui se dispute avec lui sur une question commerciale, une bêtise, mais l’homme menace sa vice et le guerrier le frappe. L’homme tombe mort. Les fils de cet homme arrivent ; il leur parle avec bonté et bienveillance ; se souvenant de l’assassinat de son propre père, il plaint les fils qu’il a fait orphelins ; il les prend à son service, leur accorde sa confiance et lorsqu’il sait son temps venu, une étrange scène se produit. Il parle à l’un des fils du devoir de vengeance, de l’obligation de tuer le meurtrier d’un parent jusqu’à ce qu’il excite le jeune homme à lui asséner le coup mortel. Pour sauver l’assassin de la colère de ses disciples, le Gourou déclare que l’étranger n’a fait que venger son père et qu’il doit s’en aller librement. Puis il ordonne aux siens de suivre les Écritures, leur recommande d’être fidèles aux Khâlsâ, et meurt.

Après qu’il a disparu, il n’y a plus de maître ; mais, comme je l’ai dit, ce qui fait autorité c’est l’A’di Grantha Saheb, avec le conseil des chefs, et les Khâlsâ, la communauté tout entière des Sikhs dans laquelle ne doit exister aucune différence de caste, aucune différence entre un homme et un autre, dans laquelle tous doivent être frères et égaux.

Suit alors une brillante histoire de luttes et de succès militaires couronnée finalement par les splendides victoires de Ranjit Singh, le Lion du Pendjab (1797), qui fait du Pendjab, en réalité, l’Empire Sikh. Il meurt en 1839. Alors, ah ! alors, c’est la plus triste histoire de tromperie, de trahison qu’on puisse imaginer ; des hommes généreux, de braves guerriers trompés et vendus, luttant désespérément contre tous. C’est la plus triste histoire du monde, — c’est pourtant, sans cesse et à nouveau, celle de l’Inde — l’'histoire du frère qui vend son frère, de l’ami qui vend son ami, de l’Indien qui trahit l’Indien ; voilà ce qui se répète dans cette histoire de la chute de l’Empire Sikh. Rien de plus héroïque, rien de plus pathétique que l’histoire de ces braves luttant contre une force écrasante, si bien que même leur héroïsme ne peut les sauver, jusqu’à ce que l’Empire s’écroule entièrement et que le Pendjab passe aux troupes anglaises, en 1849. Telle est l’histoire du Sikhisme.

Passons de cela à l’examen de ce qu’étaient la foi, la vie qui donnaient au Sikhisme sa force attachante, son merveilleux héroïsme, sa splendide vigueur. C’est la vie et la doctrine de Gourou Nânak, la plus douce des natures et le plus saint des hommes.

Depuis l’enfance, le petit garçon présentait des signes distincts, comme en présentent tous les prophètes de Dieu, qui le différenciaient de ses compagnons. L’histoire de son enfance n’est pas marquée par des événements nombreux mais elle est très pathétique et très bizarre, bizarre en ce sens qu’il était né dans une famille de braves gens, des plus communs, comme un aigle dans un nid de moineaux ; mais les moineaux ne comprenaient pas l’aigle et ne pouvaient démêler quelle sorte de créature c’était. Tranquille, réservé, silencieux, s’écartant pour méditer tandis que les autres petits garçons jouaient ; étrange enfant, qui n’apprend pas comme d’autres apprennent, ne joue pas comme d’autres jouent, qui, lorsqu’il va chez son maître, veut savoir le sens mystique des lettres et irrite le Pandit en lui posant des questions auxquelles celui-ci, le brave homme, ne peut pas répondre. L’enfant est toujours en lutte avec son entourage parce qu’il veut absolument savoir ce qui est dans les choses ; il ne peut se contenter de leur aspect extérieur. Et il n’y a rien de plus ennuyeux pour un être ordinaire, homme ou femme, que d’être pressé de questions quant à la réalité des choses, alors qu’il se trouve tout à fait à l’aise sur l’oreiller rassurant des formules ; ainsi Nânak, dans son enfance, met son père à une rude épreuve. Sûrement, il doit être fou ; il reste assis pendant des heures, méditant, sans prendre aucune nourriture ; il doit avoir la fièvre. On amène un docteur pour l’examiner, Nânak demande à celui-ci s’il pourrait guérir les maladies de son âme. Quelle espèce de malade est-ce, qui accueille son médecin de cette manière ? Observez encore Nânak au moment où va s’accomplir la cérémonie du cordon sacré. L’histoire est si caractéristique que je vais vous la raconter — et je dois déclarer ici que je me sers, pour toutes les citations que je fais, des traductions que mes amis Sikhs ont eu la bonté de me donner et qu’ils ont extraites de leurs propres livres, afin que j’aie un terrain sûr, sur lequel je puisse m’avancer.

« Lorsque tout fut prêt et que le Purohit (le prêtre de la famille) fut sur le point de le lui conférer, Nânak se retourna et demanda ; « Dis-moi, Pandit-ji, quelle est l’utilité de ce cordon ? Quels devoirs impose-t-il à l’homme qui le porte ? Pourquoi est-il nécessaire de le mettre ?

« — Nul ne peut accomplir les cérémonies du sacrifice sans le porter sur lui, répondit le Purohit, qui n’était qu’un Pandit de village et ignorait la signification secrète du cordon sacré ; ce fil purifie celui qui le porte, le met en état d’assister à toutes les cérémonies et même de les accomplir.

— Si un homme qui porte ce cordon sacré, reprit Nânak, ne change pas de conduite et mène une vie impure, est-ce que ce cordon le purifiera et l’aidera en aucune façon à atteindre le but ? Cet homme ne récoltera-t-il pas le fruit de ses actes ?

« — Je ne sais pas, répliqua le Purohit, mais c’est ordonné dans les Shâstras et nous devons suivre l’exemple de nos ancêtres.

« — Avec le coton de la compassion, tissez le cordon de l’amour ; que l’abstinence et la vérité forment les nœuds ; que votre esprit revête ce cordon, qu’il ne soit ni cassé, ni souillé, ni brûlé, ni perdu. Louanges à ceux qui ont revêtu ce cordon, dit Nânak.

« — Vous avez bien parlé, dit le Purohit, mais songez aux frais et dérangements qu’a eus votre père. Voyez vos parents et amis ; tous seront désappointés si vous ne voulez pas le porter.

« — Je suis sincèrement désolé de ne pouvoir vous obliger, dit Nânak ; je ne peux pas mettre sur moi ce cordon et je vous conseillerai, à votre tour, de vous préoccuper davantage de l’essence des choses que de leur forme. C’est seulement par une conviction sincère qu’on obtient le respect — et c’est en louant Dieu et en vivant selon la vérité que l’homme atteint à la perfection. »

À la fin, sa mère le supplia pour son salut de ne pas lui causer cette déception. Nânak alors répondit simplement : « Mère, j’obéis », il prit le cordon et le mit[2].

Voici une histoire très caractéristique de ce jeune homme, qui présente tous les signes d’un prophète, et cherche sans cesse la vérité intérieure à travers les apparences extérieures.

Il grandit et ce fils ne donne aucune satisfaction au brave père un peu borné, car il ne veut pas embrasser la vie agricole, il ne veut pas d’une boutique et il ne veut pas voyager pour faire du commerce. Son occupation consiste à donner de l’argent, ou plutôt des vivres aux Sannyâsis ; le père trouve que ce n’est pas une bonne affaire et il est peu satisfait, bien que Nânak trouve que c’est la meilleure affaire qu’on puisse réaliser. À quoi emploiera-t-on un jeune homme pareil ? Le père l’envoie chez sa sœur et son beau-frère qui l’aiment beaucoup. Il prend du service sous un Nawab, il sert fidèlement et bien ; mais il dépense sans cesse en charités et à la fin, lassé du monde, il décide de quitter le service, de quitter la vie d’intérieur dans laquelle il est entré, d’errer à la recherche de Dieu et des occasions de réaliser son amour de Dieu. Ici se place une autre scène caractéristique avec le Nawab, après que Nânak eût quitté son service. Le Nawab envoie chercher le jeune homme qui, au bout d’un certain temps arrive. Le Nawab est fâché qu’il ne soit pas venu de suite.

— Je ne suis plus actuellement votre serviteur, Nawab Sahib, répond Nânak. Je suis actuellement le serviteur de Dieu.

— Croyez-vous en un seul Dieu, ou en plusieurs Dieux ? s’informe le Nawab.

— En un seul Dieu, indivisible, existant par lui-même, incompréhensible, pénétrant tout et adorable, répond Nânak.

— Eh bien, puisque vous croyez en un seul Dieu et moi aussi, votre Dieu doit être le même que le mien ; donc, si vous êtes un fervent croyant, venez avec moi à la mosquée et offrez des prières avec nous.

— Je suis prêt, dit Nânak.

Son beau-frère en demeura muet d’étonnement et il quitta aussitôt la cour, croyant que Nânak avait embrassé l’Islam. C’était un vendredi et comme l’heure de la prière approchait, le Nawab se leva et, accompagné de Nânak, se dirigea vers la mosquée. Lorsque le Kâzi commença à réciter la prière, le Nawab et son groupe commencèrent, selon l’usage, la cérémonie de la prosternation, tandis que Nânak, silencieux, se tenait immobile. Lorsque la prière fut terminée le Nawab se tourna vers lui et lui demanda avec indignation : « Pourquoi n’avez-vous pas fait les cérémonies d’usage ? Vous êtes un menteur et vos prétentions sont fausses. Vous n’êtes pas venu ici pour y rester comme une bûche. »

— Vous vous prosterniez le visage contre terre, fit observer Nânak, tandis que votre pensée courait, échevelée, dans les nuages ; vous songiez à faire venir des chevaux de Kandahâr, et non à offrir des prières ; quant à votre prêtre, seigneur, tandis qu’il accomplissait automatiquement la cérémonie de la prosternation, il pensait à sauver la jument qui a mis bas l’autre jour. Comment pourrais-je offrir des prières avec des gens qui font les génuflexions d’usage et répètent des paroles comme un perroquet ? »

Le Nawab convint qu’il songeait, en effet, à faire venir des chevaux et que, tout le temps de sa prière, cette pensée l’avait obsédé ; mais le Kâzi fut extrêmement mécontent et se tournant vers Nânak fit pleuvoir sur lui une grêle de questions[3].

Nous retrouvons dans cette anecdote, l’esprit du chercheur obstiné de la réalité. Il commence ses pérégrinations. Il va, errant, chantant avec le musicien et un ami qui le suit, Mardânâ et Bâlâ, et il arrive à un village où il a besoin de se restaurer. Il y trouve un pauvre homme nommé Lâlu, un charpentier qui mène une vie pure, et cet homme souhaite la bienvenue au Sannyâsi errant, lui donne son propre lit, lui apporte des aliments chauds : Nânak mange. Le jour suivant, un riche banquier de la ville donne une grande fête aux Brâhmanes et invite Nânak à se joindre à eux. Nânak y va, mais il refuse de prendre de la nourriture ; l’hôte lui demande : « Pourquoi ne touchez-vous pas à mes vivres ? »

— Parce qu’ils ne sont pas purs, dit Nânak, attendu que vous avez fait préparer ces aliments pour votre propre glorification ; c’est un don tâmasique et par conséquent impur.

— Vous appelez ma nourriture impure, tandis que celle de ce Lâlu de caste inférieure est pure ? Comment cela se fait-il ? » demanda Rai Bhag avec mépris.

— Vous traitez vos hôtes avec irrévérence et mépris, dit Nânak, cela montre votre but tâmasique. J’ai mangé de la nourriture préparée par Lâlu, car elle était préparée avec amour et m’était servie avec respect, sans désir d’être remercié et gratifié en retour. Vous avez une leçon à prendre de l’humble Lâlu. Votre nourriture est pleine de sang.

— Quelle preuve avez-vous que ma nourriture soit impure ? demanda Rai Bhag, courroucé.

« Nânak prit, dans une main, la nourriture de Rai Bhag, dans l’autre celle préparée par Lâlu et les pressa toutes deux : des aliments de Rai Bhag des gouttes de sang s’écoulèrent, tandis que ceux de Lâlu laissaient filtrer le lait[4]. »

Voilà de quelle manière le Gourou Nânak enseignait, sa leçon portant toujours sur la réalité et mettant à nu l’apparence. Était-il Hindou ? était-il Musulman ? On se dispute pour savoir ce qu’il était, car il était au-dessus des distinctions de croyance extérieure, il aimait tous les hommes et ne se donnait aucun titre. Lorsqu’il mourut, après soixante-dix ans d’une noble vie et d’un enseignement sans prix, ses disciples se disputèrent sur la question de savoir à quelle religion il appartenait réellement ; fallait-il le brûler comme un Hindou, ou l’enterrer comme un Musulman ? Tandis qu’ils se disputaient, quelqu’un souleva le linceul qui recouvrait le cadavre ; le corps avait disparu, il ne fut donc ni brûlé, ni enterré.

Tel était l’esprit du grand Maître, tel il ressort de sa vie, de sa conduite, et des préceptes qu’il a laissés derrière lui ; tout cela nous montre l’esprit qui animait Nânak, cette profonde dévotion envers l’Être Suprême, cet amour de Dieu que les hommes adonnés au monde appellent folie, cette passion et cette ferveur que les saints de tout âge et de toute religion ont éprouvée. Philosophiquement, Nânak était hindou ; ce qui le caractérise c’est cette profonde Bhakti et la haine qu’il avait de l’apparence.

Examinons sa doctrine et celle de ses successeurs, car ici on ne peut faire aucune différence ; voyons comment ils enseignaient et quel était l’esprit de l’enseignement. J’ai devant moi un grand nombre d’extraits de l’A’di Grantha Saheb, classés d’après certaines rubriques, que j’avais demandés spécialement au point de vue de la doctrine sikhe, afin de pouvoir vous donner, d’après les autorités, une esquisse de cette doctrine ; je choisirai des passages de ces traductions sikhes pour vous montrer exactement la nature de cet enseignement[5].

Tout d’abord, sur l’Être Suprême :

« Tu es moi, je suis toi. De quelle sorte est la différence ? « Dans tout, l’Un est à demeure, l’Un est contenu. » « Lui-même est un et lui-même est plusieurs. Il ne meurt ni ne périt. Il ne vient, ni ne s’en va. Nânak dit qu’il est toujours contenu dans tout. »

Vous pouvez saisir ici l’écho des Upanishads, répété dans un langage plus populaire,

la pensée profonde de la philosophie hindoue, adaptée à la forme de l’usage populaire.

Un Omkâra, nom véritable, auteur, esprit, sans crainte, incapable de vouloir le mal, formé hors du temps. N’étant sorti d’aucun sein, existant par lui-même, bénédiction suprême (ou qui se réalise par une faveur du Gourou). Vrai dès avant, vrai dès avant les temps (Yugas), vrai dans le présent et vrai dans l’avenir, ô Nânak.

(Japa I).

Sans signe, nul ne peut le contrarier, inaccessible (ou inconnaissable), il n’est point objet (pour les sens) ; inaltéré par le temps ou l’action ; d’essence sans commencement ; n’étant sorti d’aucun sein, existant par lui-même, inconditionné, sans défaillance, puissé-je être sacrifié à cette Pure Vérité. Il n’a ni forme, ni couleur, ni contour ; il doit être désigné par la parole de Vérité. Il n’a ni mère, ni père, ni fils, ni parent, ni désir, ni femme, ni clan ; il n’est pas imprégné (de Maya) ; il n’est pas dépassé, il est plus haut que le plus haut, Lumière de tout, Brahm caché dans tous les vaisseaux (cœurs), sa lumière est tout entière dans chaque véhicule (cœur). Par l’enseignement du Gourou, le portail de diamant s’est entr’ouvert, sans crainte, fixe et ferme, le regard s’y est fixé. Ayant créé les êtres, il plaça au-dessus d’eux le temps (la mort) et prit toute organisation sous son contrôle. En servant le Gourou ils trouvent la véritable fortune ; en agissant selon (sa) parole (ils) gagnent la véritable liberté. Dans un réceptacle pur (le cœur), la vérité seule peut vivre ; ils sont rares ceux dont la conduite est pure. Toute essence se fond dans l’essence suprême. Nânak en toi puissé-je trouver un refuge.

(Sorath, I).

Je m’incline devant (ou glorifie) l’Être premier, Omkâra ;
Qui a créé cette eau, cette terre et ce ciel ;
Esprit premier, non manifesté, impérissable ;
Dont ta lumière illumine les quatorze lokas ;
Qui habite au même titre dans la fourmi et dans l’éléphant ;
Qui tient pour égaux le maître et le pauvre ;
Dualité de la forme, Esprit sans signe
Qui connaît immédiatement ; contrôleur interne de tout réceptacle (cœur).

(Gourou).

Lui, le sans-forme (et) la Forme ; celui qui est sans qualité et qui a les qualités ; c’est d’Un seul qu’il est parlé, ô Nânak. Cet Un est toujours plusieurs.

(Gourou V, Bavanakhhri).

Le Parabrahman, le Seigneur Suprême, ne s’incarne point dans un sein.
Avec la parole, tu as créé la création et après l’avoir faite tu la pénètres.
Ta forme ne peut pas être entrevue, comment méditerai-je sur toi ?
Tu fonctionnes en tout, ton pouvoir le montre ;

Ton amour remplit des trésors inépuisables ;
Ces joyaux (la paix, etc,) sont sans prix,

(Gourou V, Var-Maru).

D’innombrables Avâtaras de Vishnou ont été accomplis par toi.
D’innombrables Brahmândas sont le séjour de ta loi ;
D’innombrables Maheshvaras sont créés et absorbés ;
D’innombrables Brahmâs ont été par toi employés à façonner les mondes ;
Telle est ainsi la richesse de mon Seigneur,
Dont je ne peux dire en détail les grandes qualités,
Qu’entourent d’innombrables Mâyâs.
(Les cœurs d’)êtres innombrables sont le lieu où il demeure ;
Innombrables sont (les dévots) qui embrassent les membres (personnifiés pour le culte).
Innombrables les dévots qui demeurent avec Hari.
Innombrables les rois (littér. Seigneurs de parasols) qui te rendent hommage,
Innombrables les Indras qui se tiennent devant tes portiques ;
Innombrables les Cieux dans ton regard ;
Innombrables (tes) noms sans prix,
Dont les résonances innombrables retentissent au loin.
Innombrables les tournois d’actions merveilleuses ;
Innombrables les Shaktis et les Shivas qui obéissent à la volonté ;
Innombrables les êtres que tu nourris,
Dont les pieds renferment d’innombrables Tirthas (endroits sacrés),
D’innombrables purs répètent ton précieux nom,
D’innombrables adorateurs te rendent hommage ;
Ton expansion est infinie ; il n’y a pas un second Être

Dont les titres glorieux, purs et sans tache, soient innombrables,
Dont les louanges soient chantées par d’innombrables Brahma-Rishis ;
De qui, en un clin d’œil, les créations et absorptions soient innombrables ;
Innombrables les qualités qu’on ne peut énumérer.
D’innombrables sages confessent ta science ;
D’innombrables méditatifs méditent sur ta nature ;
D’innombrables ascètes accomplissent des austérités,
D’innombrables Munis demeurent assis en silence ;
Seigneur non manifesté, Maître non perceptible
Qui remplis tous les cœurs et les contrôles du dedans,
Partout où je regarde tu demeures ;
Gourou (ou le grand Un) Nânak illuminé possesseur de cette science),

(Gourou V, Bharon).

Qui n’a ni disque, ni marque, ni classe, ni caste, ni sous-caste
De qui nul ne peut dire « Il a forme, couleur, contour ou vêtement ».
Forme immuable brillant à travers Anubhâva (perception directe de la conscience spirituelle la plus intérieure)
Que nous pouvons appeler l’Indra (Seigneur) d’innombrables Indras et le roi des rois.
Trois mondes, les seigneurs de la terre, des dieux, des hommes, des démons et de l’herbe des forêts répètent « Neti, neti » (pas cela, pas cela).
Qui peut énumérer tous les noms ? les sages confessent (seulement) les noms de tes fonctions.

(Gourou X, Japa).

De toutes les façons que je vous ai dites, il n’y en a pas d’autre (dieu) que lui, ô mes amis,
Il demeure dans tous les continents et toutes les îles (dvipas).
Il remplit tous les lokas.

(Gourou V, Devagandhari).

Sa grandeur, le Veda ne la connaît pas ;
Brahmâ ne sait pas son mystère ;
Les Avatâras ne connaissent pas ses limites ;
Le Seigneur suprême, Parabrahma, est infini.

(Gourou V, Ramkali).

Tous sont créés sujets à l’erreur, le Créateur seul ne commet pas d’erreur.

(Gourou I, Shri Rag).
Puis pour le culte, tout Hindou sait les A’rati et la façon dont la lumière d’abord, puis une chose après l’autre est offerte, à l’image du Dieu adoré. Gourou Nânak s’élève contre l’usage des images dans le culte et, dans ses propres A’rati, il offre l’Univers tout entier en hommage à Brahma, le Dieu suprême.

L’espace lui-même (est ton) plateau ; le soleil et la lune (tes) lampes :
L’armée des étoiles les perles, ô père.
La brise odorante des munis Malaya est (ton) encens ;
Le vent agite (som chawri (sur toi) ;
Toute la végétation de la forêt (littér. le royaume végétal) te fournit de fleurs, ô Lumière !
Quel sujet de réjouissance (A’vati ou hymne de louange), Ô destructeur de la crainte (ou samsarâ) ; l’Anatat Shabdha (sans son, ou son qui n’a pas été frappé) résonne comme (les) timbales.
Tes yeux sont milliers, mais non ! non ! tu n’en as pas,
Tes formes sont milliers ; mais non ! non ! tu n’en as pas,
Tes pieds sacrés sont milliers ; mais non ! non ! tu n’en as pas,
Tu es sans narines (littér. dénué du sens de l’odorat) et cependant tu as mille narines ;
Cette œuvre merveilleuse qui est la tienne (nous) transporte.
En toutes choses, Ô gloire ! est la Lumière.
En chacun, la lumière de cette (Lumière) rayonne.
En présence du Gourou (ou grâce à l’enseignement du Gourou) rayonne cette lumière ;
C’est un (A’rati) réjouissant, qui lui est agréable.

Telle est la doctrine. Elle respire le plus pur esprit de dévotion, qui, au delà de toutes les formes, atteint l’Un sans forme ; de loin en loin, on rencontre un cœur qui éprouve une plus grande passion de dévotion envers l’idéal de l’Un et qui ne peut s’arrêter à aucune des formes sous lesquelles l’Un se manifeste. Le Gourou Nânak ne renie pas toutes ces formes sous lesquelles apparaît l’Être suprême, mais il partage la conception des Upanishads, selon lesquels il n’y a qu’un Brahmâ, suprême en toutes choses, de qui tous les Dieux ne sont que les manifestations partielles, de qui les formes les plus élevées ne sont que le reflet de la Beauté.

Si l’on nous demande ce qu’il enseigne touchant la création, nous trouvons la pure doctrine du Veda, à savoir que la création n’est que Mâyâ et que toutes choses se produisent par la puissance d’Ishvara et de Mâyâ.

Par la volonté (littér. par un ordre) les formes se produisent.

Gourou I, Japa).2

Une mère (mâya) unie à Dieu donna naissance à trois enfants acceptables (disciples) ;
L’un d’eux engendre Samsâra, l’autre produit et le troisième, ordinairement, dissout.
Selon qu’il lui plaît (il) les dirige, suivant (sa) volonté.
Il observe, mais n’est pas vu ; grande est la merveille,

Gloire, gloire à Lui !
Au primordial, sans souillure, sans commencement,
à l’indestructible (qui revêt), en tous les temps, le même vêtement.

(Gourou, I, Japa).

Lorsque le Créateur exhale un souffle (ou expansion),
Alors la création revêt une infinité de corps ;
À chacune de tes inspirations
Tout ce qui est incarné rentre, au contraire, en Toi.

(Gourou, X, Chaupat).

On compte par centaines de mille les A’kâshas et les Pâtâlas.

(Gourou, I Japa).

Les limites de Sa création ne peuvent être connues

(Gourou, I, Japa).

Ce monde est la demeure du Véridique, le Véridique y habite.

(Gourou, II, Asavar).

Ce monde est le temple de Hari, mais il n’est que ténèbres effrayantes sans le Gourou.
Ceux qui sont guidés par l’esprit (litt. qui regardent l’esprit
Ces aveugles grossiers l’adorent en tant que distinct (littér. autre).

(Gourou, III, Prabhati).

Voici la question d’un Siddha :
Comment le monde a-t-il été produit, ô homme (et) comment la douleur peut-elle être détruite ?
Réponse du Gourou Nânak :
Dans l’égoïsme le monde a sa naissance, en oubliant le nom (nous) souffrons.

(Gourou, I, Sadhgosht).

Sur la question du Jiva, il enseigne que le Jiva se confond en essence avec l’Être suprême, que par la réincarnation et le Karma le Jiva peut se libérer et comprendre qu’il n’y a pas de différence entre l’Être suprême et lui. Il parle de naissances à l’infini et il répète cette phrase, que nous avons rencontrée dans le Djaïnisme et dans l’Hindouisme « que la naissance humaine est difficile à conquérir et que par la naissance humaine se peut réaliser la libération. »

Ce Jiva n’est point sujet à la mort.

(Gourou, V, Gauri).

Dans le corps est l’esprit, dans l’esprit est le véridique ;
Ce véridique se fondant dans (s’unissant au) le véridique est absorbé.

(Gourou, I, Rag Dhanasari).

C’est la même chose qui est dans le corps et dans le Brahmânda ;
Qui cherche la trouve.

(Pippa Bhakta Dhanasari).

On ne demande ni caste ni naissance ; informez-vous à la demeure du Vrai. D’après les actions d’un homme, se déterminent sa caste et sa naissance.

(Gourou, I, Prahbati).

L’homme qui accomplit de bonnes actions
Est appelé Deva (dans ce) monde ;
Celui qui commet de mauvaises actions en ce monde,
Les hommes l’appellent un Asûra (démon).

(Gourou, X, Vichitra Natak).

Sur le Karma, la doctrine est très claire :

Sème toi-même, mange toi-même.

(Gourou I, Japaji).

Dans le champ du Karma, on récolte ce qu’on sème.

(Gourou V, Baramah Majh).

Ne blâmons personne.
Quoique nous fassions, dont nous jouissions (et souffrions.
Les actions (Karmas) sont nôtres, l’esclavage est nôtre aussi.
Toujours allant et venant se déploie l’activité (les affaires) de Mâyâ.

(Gourou, V).

Par beaucoup de naissances (nous) sommes devenus insectes et phalènes,
Par beaucoup de naissances (nous) sommes devenus éléphants, poissons et daims.
Par beaucoup de naissances (nous) sommes devenu oiseaux et serpents ;
Par beaucoup de naissances (nous) avons été mis sous le joug, comme des coursiers et des bœufs ;
Cherchons le Seigneur ! C’est la plus sûre (occasion) de chercher ; après de longues périodes, ce corps (humain) a été atteint.
Durant bien des vies (nous avons) erré sur les montagnes.
Durant bien des vies (nous avons) été détournés du sein qui nous a enfantés,
Durant bien des vies (nous avons) existé en tant qu’herbage.
Il nous a fallu errer à travers quatre-vingt-quatre centaines de mille de seins,
L’association du bien nous a permis d’atteindre (cette) naissance.
Sers Le, dit dévotement Hari. Tel est l’enseignement du Gourou.

S’il rejette la vanité, la fausseté et l’orgueil
Et s’il meurt vivant, il sera accepté dans (cette) cour (litt. présence).

(Gourou, V, Guri Rag).

De même que le fer placé sur une enclume est battu jusqu’à ce qu’il prenne forme,
De même l’âme abusée (ou ignorante) est jetée dans divers seins et condamnée à errer, afin qu’elle puisse plier (ou être détournée vers le Sentier juste).

(Gourou, I, Suhi Rag Kafi 4).

Voici une belle description du Jivan Mukta :

Celui qui sait, en son esprit, que la volonté du Seigneur a tout fait pour le mieux,
Celui-là est véritablement appelé Jivan Mukta.
Pour lui la joie est la même chose que la tristesse,
Il est toujours bienheureux, pour lui il n’y a pas de séparation,
L’or, pour lui, est la même chose que l’argile,
Le nectar, pour lui, est la même chose que le poison amer.
L’honneur et le déshonneur sont pour lui la même chose,
Le pauvre et le roi sont égaux devant lui,
Quoi qu’il survienne (par la volonté du Seigneur), il regarde cela comme convenable et bien.
Ô Nânak, un tel homme est appelé un Jivan Mukta.

(Gourou, V, Sukhmani).

Et voici un joli poème sur le Brahmajâni :

I. Brahmajñâni demeure toujours intact, ainsi que le lotus qui n’est point mouillé par l’eau,
Brahmajñâni demeure toujours exempt de faute (ou de mal), ainsi que le soleil qui sèche toutes choses.
Brahmajñâni envisage tous les hommes également, ainsi que le vent qui effleure également le roi et le pauvre,
Brahmajñâni souffre et endure tout également, ainsi que la terre, qui est bêchée par les uns et couverte de santal par les autres.
Telle est la qualité inhérente au Brahmajnâni comme le pouvoir (de brûler) est inné au feu.
Brahmajñâni est plus pur que le pur, car l’impureté ne touche pas l’eau,
Dans l’esprit du Brahmajñâni la lumière luit, comme le ciel au-dessus de la terre.
Pour le Brahmajñâni, ami et ennemi sont égaux, le Brahmajñâni n’a pas d’orgueil.
Brahmajñâni est plus haut que le plus haut, mais il se croit plus bas que n’importe qui.
Ceux qui deviennent Brahmajñâni, Ô Nânak, sont les hommes que le Seigneur lui-même a faits (tels).

II. Brahmajñâni est la poussière (des pieds) de chacun ; Brahmajñâni a recueilli (ou connu) l’essence d’At’mâ.
Bramajñâni est compatissant envers tous ; aucun mal ne vient du Brahmajñâni.
Brahmajñâni envisage tous les êtres également, sur tout ce qu’il regarde il verse le nectar.

Brahmajñâni est exempt d’esclavage, la yoga du Brahmajñâni est pure.
La nourriture du Brahmajñâni est la sagesse ; Ô Nânak, la méditation de Brahmajñâni est Brahma.
Brahmajñâni (fixe son) espoir sur l’Un, Bramajñâni ne périt jamais.
Brahmajñâni est pénétré d’humilité. Brahmajñani se réjouit en faisant du bien à autrui,
Brahmajñâni est exempt d’activité (celle des trois
Gunas) Brahmajñani rend (son propre esprit) prisonnier.
Quoi qu’il arrive à un Brahmajñâni (il considère) que c’est bien, les qualités divines fructifient un Brahmajñâni.
Toute chose s’élève avec un Brahmajñâni, Ô Nânak, le monde entier répète (le nom de) Brahmajñâni.


III. Brahmajñâni n’a qu’une couleur (état d’esprit, c’est-à-dire amour). Le Seigneur habite avec le Brahmajñâni.
Brahmajñâni est soutenu par la Parole ; pour le Brahmajñâni la Parole est tout en tout.
Brahmajñâni est toujours en éveil dans le Réel, il rejette l’égoïsme.
Dans le cœur du Brahmajñâni règne la plus haute félicité ;
Dans la demeure du Bramajñâni règne toujours la paix.
Brahmajñâni vit dans le bonheur ; Ô Nânak, il n’y a pas de destruction pour le Brahmajñâni.
Brahmajñâni est celui qui connaît Brahma ; Brahmajñâni est toujours uni d’amour avec l’Un.
Brahmajñâni est exempt d’anxiété, sa croyance est pure.

 Celui-là est Brahmajñâni que le Seigneur lui-même fait (tel) ; la gloire du Brahmajñâni est grande.
Une personne très favorisée peut voir (rencontrer) un Brahmajñâni,
Nous devrions nous offrir nous-mêmes en sacrifice pour Brahmajñâni.
Maheshvara (Shiva, le grand Dieu) cherche un Brahmajñâni, ô Nânak !
Le Brahmajñâni est le Seigneur Suprême lui-même,
Le Brahmajñâni est un trésor sans prix.
Toute chose est dans le cœur du Brahmajñâni pour celui qui sait le secret du Brahmajñâni.
Proclamons toujours le Brahmajñâni ; nous ne pourrions pas prononcer la moitié d’une lettre du nom de Brahmajñâni.
Brahmajñâni est le Seigneur de toutes choses, qui peut avec des paroles mesurer le Brahmajñâni ?
Un Brahmajñâni seul connaît le but du Brahmajñâni.
Quand il s’agit du Brahmajñâni, il n’y a ni limite ni autre rive,
Ô Nânak, nous proclamons toujours le Brahmajñâni.
Brahmajñâni est l’auteur de toute la création. C’est le dispensateur du mukti[6], de la yoga et de la vie.
Brahmajñâni est l’esprit dans sa totalité (Purusha) et l’ordonnateur.
Brahmajñâni est le protecteur de celui qui est sans protection, il veille sur chacun.
Tout cela est la forme du Brahmajñâni, Brahmajñâni est le Sans Forme (le Moi suprême) lui-même.
La splendeur (ou grâce) du Brahmajñâni ne sied qu’au seul Brahmajñâni, Brahmajñâni est le Trésor de tout.

(Gourou V, Sukhmani).

Celui qui ne cause aucune crainte aux autres et ne craint personne
Dis, Nânak ! écoule, ô esprit, il faut l’appeler Jnâni Sage.

(Gourou, IV).

Voici maintenant quelques slokas sur la dévotion au Gouroudeva :

Ô Nânak ! reconnais celui-là pour le vrai Gourou, qui t’unit au tout, bien aimé.

(Gourou, I, Shri Rag).

Chaque jour, une centaine de fois (je) voudrais me sacrifier à mon Gourou ;
À lui qui m’a transformé en Dieu et il ne lui a pas failli longtemps pour faire cela.

(Gourou, I, Vara Asa).

Si une centaine de lunes et un millier de soleils venaient à se lever,
Et que tout cela éclairât, sans Gourou régnerait (quand même) une obscurité terrible.

(Gourou, I, A’savara).

Béni soit mon véritable Gourou, qui connaît Hari
Qui nous a montré l’ami et l’ennemi égaux à nos yeux.

(Gourou, IV, Vara Vadhans).

Gouroudeva est mère, Gouroudeva est père, Gouroudeva est le Seigneur Suprême,
Gouroudeva est l’ami, le destructeur de l’ignorance, Gouroudeva est le parent et le vrai frère ;
Gouroudeva est celui qui a donné et enseigné le nom d’Hari ;
Gouroudeva a réalisé la mantra ;
Gouroudeva est l’incarnation de la paix, de la vérité et de la lumière ; le contact de Gouroudeva dépasse celui de la pierre des philosophes.
Gouroudeva est le Tirtha (lieu du pèlerinage) le réservoir de nectar (immortalité), il n’y a rien
au-dessus de l’immersion dans la science du Gourou.
Gouroudeva le créateur, est le destructeur de tout mal.
Gouroudeva est le purificateur de tous les déchus.
Gouroudeva est primordial avant les âges, à tout âge, en répétant son Hari Mantra (nous) serons sauvés (littér. retirés de l’océan de Samsâra).
Ô Seigneur, favorise-nous de la compagnie de Gouroudeva, afin qu’attachés à lui, nous puissions pécheurs égarés, faire la traversée à la nage.
Gouroudeva, le vrai Gourou, est Parabrahma, Seigneur suprême ; Nânak s’incline devant Gouroudeva Hari.

(Gourou, V, Bavanakhari).

Ô mère, je me réjouis, car j’ai trouvé le vrai Gourou !

(Gourou, III, Ramkali).

Qu’il fixe la parole du Gourou dans son cœur,
Et cesse de s’associer aux cinq personnes (le désir, la colère, etc.).
Qu’il tienne ses dix organes sous le contrôle.
Alors, dans son Moi, la lumière brillera.

(Gourou, V, Gauri).

Pour terminer ces citations, peut-être déjà trop nombreuses, j’en ferai quelques-unes très diverses et pleines de beauté :

Médite sur les grandes qualités de la vraie Parole, à l’heure d’ambroisie (le matin).

(Gourou, I, Japa).

Même si nous frottons et lavons notre corps avec de l’eau, même alors, Ô frère ! Il est impur ;
Baignons-nous dans les eaux puissantes de la science,
ô frère ! afin que l’esprit et le corps soient purifiés.

(Gourou, I, Sorath).

Ô mon cœur t’aime Hari, comme le lotus aime l’eau ;
Il est battu par l’onde, mais (les pétales de) son amour se déploient.

(Gourou, I, Shri Rag).

J’ai oublié toutes les distinctions (ou j’ai oublié tout ce qui était autre).

Depuis que j’ai obtenu la compagnie du bien,
Il n’a plus existé d’ennemi, ni d’étranger, j’ai fait la paix avec tous.

(Gourou, V, Kanara).

Tous les êtres sont à lui, il appartient à tous les êtres.
Qui pouvons-nous insulter (à qui pouvons-nous dire qu’il est bas ?) S’il y avait un autre (nous pourrions agir ainsi).

(Gourou, III, A’sa).

Arrêtons-nous un moment sur cette pensée que, s’il n’y a qu’un Moi dans toutes choses, où y a-t-il place pour la haine ? S’il n’y a qu’un Hari en tout ce qui existe, où est la place du mépris ? S’il y avait plus d’un Être, si l’Un n’était pas sans second, alors l’homme pourrait être différent de l’homme et se quereller avec son frère ; mais si le même Dieu habite dans tous les cœurs, si le même Moi anime tous les vivants, où trouver place pour la haine et le mépris ? Il n’y a que l’Un en toutes choses.

Ô Nânak ! répétons Soham, Hamsa ; en répétant cela, les trois mondes sont absorbés en Lui.

(Gourou, I, Var Maru).

Ne les appelons pas des purs, ceux qui lavent leur corps et s’assoient,
Ô Nânak ! Ceux-là seuls sont purs, dans le cœur desquels Il habite.

(Gourou, I, Var’Asa).

Celui-là est Sannyâsi qui sert le vrai Gourou et écarte le moi de son âme ;
Qui ne désire ni abri, ni nourriture, prend ce qui (lui) vient sans y penser (ou qu’on lui ait demandé).

(Gourou, I, Maru Rag).

Bien peu atteignent à la faveur du Gourou et prennent place dans le quatrième empire.

(Gourou, III, Majh).

Parmi les choses auxquelles il faut renoncer, celles
auxquelles il faut surtout renoncer sont le désir, la haine et l’avarice.
Écoute méditer sur le nom d’Hari, c’est faire la charité à tous.

(Gourou, V, Majh).

Sans pratiquer la vertu la dévotion n’est pas possible.

(Gourou, I, Japa).

Dans ton propre palais, à ton propre foyer trouve la félicité innée (sans quoi) tu ne reviendras pas.

(Gourou, V, Gauri).

Ô esprit ! pratique ces sannyas (renoncements) ; considère tous les séjours comme une forêt, demeure indifférent de cœur ; conserve les cheveux embroussaillés, signe de la possession de toi, accomplis l’ablution de la yoga, laisse pousser les ongles, selon le niyama (ce sont les cinq observances).
Fais de la Science (divine) ton Gourou et enseigne toi-même.
Enduisez-vous des cendres de la Parole ;
Que l’amour (le bien) de ton corps consiste à manger peu, dormir peu, à être compatissant et à pardonner.
Pratique la bonne disposition, le contentement, dépasse les trois Gunas,
Ne laisse pas le désir, la colère, l’orgueil, l’avarice, l’entêtement, les attachements illusoires (s’emparer de toi).
Alors tu contempleras la réalité (essence) du Mot et tu atteindras à l’Esprit Suprême.

(Gourou, X, Shahda Hazam).

Ne diffère pas de faire le bien ; diffère de faire le mal.

(Gourou, V).

Innombrables sont les promoteurs de scandale (qui) se chargent eux-mêmes (du péché de calomnie).
Si tu cherches ton propre bien, alors fais le bien et laisse-les te traiter injurieusement.

(Gourou, I, A’sa).

Pesé dans la balance, celui qui s’abaisse est précieux.

(Gourou, I, Suhi).

Je ne suis pas bon ; nul autre n’est mauvais.

(Idem).

Si quelqu’un devient un esclave d’esclaves et dépouille le moi, alors il trouvera Hari.

(Gourou, III.

De même que le poisson ne peut vivre sans eau,
De même que le coucou ne saurait être satisfait sans gouttes de pluie.
De même que le daim (blessé, atteint ou amoureux), lorsqu’il entend le son (d’un gong) accourt vers le bruit,
De même que la noire abeille, altérée du parfum d’une fleur lorsqu’elle la rencontre, en devient la prisonnière.
De même les saints aiment Dieu et sont satisfaits en le voyant.

(Gourou, V, Jaitsari).

Il n’en est aucun qui ne discute et ne fasse de l’opposition,
S’il s’en trouve, montrez-les moi et je les louerai.

(Gourou, I, Maru).

Les dévots et les hommes selon le monde s’accordent rarement.

(Gourou, I, Majh).

Par la faveur du Gourou, pratique la Râja Yoga
Ils sont peu nombreux, ceux qui détruisent la dualité (le sens de la séparation) et l’ayant détruit pratiquent la Râja Yoga.

(Gourou, V, Gauri).

Celui sur les yeux duquel le collyre de la Science divine a été appliqué, celui-là contemple tout comme splendide.
Dans l’obscurité de l’ignorance, il ne voit pas et il erre sans cesse (en renaissant toujours).

(Gourou, V, Sorath).

Je l’ai cherché dans les dix quartiers, je l’ai trouvé dans la maison,
Je l’ai rencontré, lorsque le vrai Gourou m’a mis face à face avec lui.

(Gourou, I, Omkar).

L’illusion a disparu de son cœur,
Hindous et Musulmans sont égaux devant lui.

(Gourou, X).

L’un est devenu un Sannyâsi confessé publiquement, un autre un Yogi, un Brahmachari, un Yati est entouré de considération ; de même un Hindou, un Turc (Musulman), un Rafazi, Imamshafi. Mais comprends que l’humanité est une. Le Créateur, le Compatissant est le même, le Nourricier, le Bienveillant est le même ; ne tombe pas dans l’erreur et l’illusion de la différence et de la dualité.

Un seul doit être servi ; le Gouroudeva de toutes choses est un, la nature est une et sache que ta lumière est une. Le temple et la mosquée sont une même chose, Pûjâ et Nimaz (la prière musulmane) sont une même chose, tous les hommes ne font qu’un, bien que divers en manifestation ; ainsi Dieu et les démons ne font qu’un, comme les Yakshas et les Gandharvas. Les Hindous et les Turcs proviennent de la nature différente du monde extérieur dans des pays différents. Les yeux, les oreilles, le corps, sont de même fabrication : une combinaison de terre, d’air, de feu et d’eau ; Allah, exempt de signe est le même ; les Purânas et le Coran sont une même chose, une est la nature et une la fabrication.

Ainsi que du feu s’élève une fusée d’étincelles qui après s’être séparées viennent à nouveau se perdre dans le (même) feu ; ainsi que d’un tas de poussière, de nombreuses particules remplissent les airs qui disparaissent ensuite dans la même poussière ; ainsi que dans l’eau se forment de nombreuses rides, qui cependant ne sont pas appelées d’un autre nom que celui de l’eau, ainsi du sein de la Forme universelle, les êtres conscients et les inconscients se manifestent, mais ils se perdront dans ce dont ils proviennent.

(Gourou X, Kavitu).

Certes, il n’y a rien dans tout cela à quoi le cœur de chacun de nous ne puisse répondre, dont chacun de nous ne puisse se faire l’écho tout en souhaitant d’avoir la même passion et la même dévotion et en désirant seulement que notre dévotion puisse être aussi claire que celle-ci.

Telle est la doctrine et tel est le cœur du Sikhisme. Tout là-dedans n’est-il pas fait pour servir à rattacher, à rapprocher les cœurs l’un vers l’autre, à unir les hommes par l’amour ? Si vous pensez au Gourou Nânak, imaginez un des grands prophètes de paix, qui, dans un suprême amour de Dieu, voulaient apporter aux hommes le fruit béni de l’amour, et vous verrez que nos frères Sikhs sont des collaborateurs dans la construction d’une nation unique faite de toute l’Inde, sans querelle avec personne, sans haine contre personne, sans lutte qui les sépare d’aucune autre religion. S’ils sont fidèles à l’enseignement de leur Gourou, ils seront amis et unificateurs partout où ils iront, édificateurs et constructeurs de la vie nationale. Nous ne nous tromperions pas beaucoup en disant que dans cette religion de pure Bhakti, d’amour envers Dieu et les hommes, nous avons un des précurseurs de cette Sagesse Divine des anciens que la grande Loge a, tout récemment, donnée aux hommes ; car, ici aussi, nous trouvons un unificateur, un ami et un frère, ici aussi, il y a un être aimant et qui réconcilie les rivaux.

Lorsque nous prononçons le nom de Gourou Nânak, nous parlons de paix et puisse Celui qui veille sur sa communauté de fidèles, faire de la paix un des éléments de la régénération de notre Inde !

  1. Bracelet plat.
  2. Life of Gourou Nânak, par Jogendra Singh, dans la C. H. C. Magazine.
  3. Life of Gourou Nânak.
  4. Life of Gourou Nânak.
  5. J’en dois la plus grande partie aux Sirdars Umrao Singh et Harbans Singh, qui ont choisi les passages significatifs et les ont traduits. La vérification des références peut être facilitée par la description ci-dessous du contenu de l’A’di Grantha Saheb, extraite de l’History of the Sikhs, par J. D. Cunningham (2e édition. p.365-371).
    L’A’di Grantha Saheb est divisée en plusieurs parties ainsi qu’il suit :
    Jâpji, ou Gourou Mantra, par Gourou Nânak.  
    Sodur Reih Râs
    avec additions.
    Kirit Sohila
    --------


    31 §§ en forme de versets ;

    Shri Râga. Todi. Tokkâri.
    Majh. Bairâri. Kedâra.
    Gauri. Teitang. Bhairo.
    Assa. Sodhi. Basant.
    Gujri. Bilâwal. Sarang.
    Deva Gandhâri. Gand. Mulâr.
    Bihâgrâ. Râm Kalî. Kanrâ.
    Wad Hans. Nal Narâyan. Katyân.
    Sorath. Mati Gaura. Parbhâti.
    Dhanâsri. Marû. Jai Jaiwanli.
    Jeit Siri.   Bhog.
        Bhogka Barû.
  6. La délivrance, l’arrêt de la chaîne de transmigration.