Des hommes sauvages nus féroces et anthropophages/Relation/24

Traduction par Henri Ternaux.
Arthus Bertrand (p. 109-111).


CHAPITRE XXIV.


Comment on me conduisit après la danse, chez Ipperu Wasu qui devait me tuer.


Quand la danse fut finie, on me livra à Ipperu Wasu. Celui-ci me gardait avec soin, et m’annonça que j’avais encore quelque temps à vivre. Ils apportèrent ensuite toutes leurs idoles, et les placèrent autour de moi, disant qu’elles leur avaient annoncé qu’ils prendraient un Portugais. Je leur dis alors : « Vos idoles n’ont pas de pouvoir et ne peuvent pas parler, elles ont menti ; car je ne suis pas Portugais, je suis l’ami des Français, et d’un pays qu’on appelle Allemagne. » Ils me répondirent que je leur en imposais ; et que si j’étais l’ami des Français, je n’aurais pas été avec les Portugais, car ils savaient bien que les Français étaient aussi leurs ennemis ; ajoutant que ceux-ci venaient tous les ans dans cet endroit, et leur donnaient des couteaux, des haches, des miroirs, des peignes et des ciseaux en échange de bois du Brésil, de coton, de plumes, de poivre, etc. c’est pourquoi ils étaient leurs bons amis. Mais que les Portugais n’en avaient pas agi ainsi ; car, lorsqu’ils étaient arrivés dans le pays, ils s’étaient établis au milieu de leurs ennemis et avaient fait alliance avec eux. Qu’ensuite, ils étaient venus de leur côté, et avaient aussi voulu commercer. Après les avoir reçus avec confiance, et être allés à bord de leurs vaisseaux, comme ils le faisaient encore avec les Français, quand les Portugais en eurent un grand nombre, ils les avaient saisis, garrottés, et livrés à leurs ennemis, qui les avaient massacrés et mangés. Que les Portugais en avaient tué d’autres à coups de fusil ; leur avaient fait tout le mal possible, et enfin, qu’ils se réunissaient souvent à leurs ennemis pour les attaquer.