Dernier Amour/Fais-moi des vers


XI.

FAIS-MOI DES VERS.


Va, je me souviendrai, le reste de ma vie,
De ces mots que tu dis, l’autre soir, mon amie,
Alors qu’à mes côtés, dans les plus doux transports,
De l’amour partagé nous comptions les trésors :
« Chante ! fais-moi des vers, c’est l’écho de ton âme,
De l’encens de ton cœur je vois en eux la flamme ;
Je ne doute jamais de toi, lorsque je lis
Ces mots pour me charmer avec amour choisis :
Je te crois tout à moi lorsque tu les mélanges,
Ces sons mélodieux ; comme des accords d’anges,
Ils pénètrent en moi par l’oreille et le cœur.
Alors comme en mon Dieu j’ai foi dans mon bonheur.
Mais si ta douce muse interrompt son langage,
Je te crois oublieux, indifférent, volage,
Et qu’un mauvais génie arrête dans son cours
Le fleuve aux bords fleuris qui porte nos amours ;
Car je sais bien, hélas ! qu’ainsi, dans la nature,
L’hiver de nos ruisseaux interrompt le murmure,
Et que le rossignol, au fond des buis touffus,
Ne cesse de chanter qu’alors qu’il n’aime plus ! »


Séparateur