De la morale naturelle/XIII
CHAPITRE XIII.
Piété filiale.
La tendresse des enfans pour
leurs parens est la plus naturelle
de toutes les vertus, le devoir le
plus saint ; mais peut-être n’est-ce
qu’un devoir : la tendresse des
parens pour les enfans est, ce
me semble, quelque chose de
plus, c’est un sentiment.
Il est encore plus facile de s’aimer dans ses enfans que dans ceux à qui l’on doit le jour ; le premier de ces rapports naît avec une sensibilité toute développée, l’autre existe long-tems sans elle : le premier appartient surement à la nature, l’autre ne dépend peut-être que de l’habitude ; mais si l’instinct du premier de ces sentimens est plus vif, la raison ne doit pas laisser à l’autre moins d’influence, moins d’énergie. Que de motifs pour révérer ceux à qui l’on doit la vie et les soins pénibles de la première enfance !
Il n’est point de prétexte, il n’est point de sophisme qui puisse altérer la sainteté d’un tel devoir.