De la Génération et de la Corruption/Livre I/Chapitre III


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CHAPITRE III

De la production absolue et de la destruction des choses ; difficulté de cette question ; de la production et de la destruction relatives. Méthode à suivre dans cette recherche ; citation du Traité du mouvement. De la perpétuité des êtres et de leur constante succession ; réciprocité de production et de destruction. Distinctions verbales importantes à faire ; citation de Parménide. Différence de la production absolue et relative ; différences de la destruction considérée sous ces deux rapports. Opinion vulgaire sur ce sujet ; on donne trop en général au témoignage des sens. Explications diverses ; manière de comprendre la perpétuité des phénomènes.


§ 1.[1] Ceci fixé, il faut rechercher d’abord s’il y a bien réellement quelque chose qui naisse et qui meure d’une manière absolue, ou s’il n’y a rien qui naisse et meure, à proprement parler. Dans ce cas, il faut rechercher si une chose quelconque ne vient pas toujours d’une autre chose d’où elle sort : comme, par exemple, du malade vient le bien portant, et du bien portant vient le malade, ou comme le petit vient du grand, et le grand vient du petit, toutes les autres choses sans exception se produisant de cette même manière. Que si l’on admet une production absolue, alors il faudra que l’être vienne absolument du non-être, du néant, de telle sorte qu’il serait vrai d’affirmer que le néant appartient à certains êtres. Une production relative peut bien venir d’un non-être relatif ; et par exemple, le blanc peut venir du non-blanc, ou le beau vient du non-beau ; mais la production absolue doit venir de l’absolu non-être.

§ 2.[2] Or, l’Absolu en ceci exprime, ou le primitif dans chaque catégorie de l’être, ou l’universel, c’est-à-dire, ce qui renferme et contient tout. Si c’est le primitif que signifie l’absolu, il y aura production de substance, venant de ce qui n’est pas substance. Mais ce qui n’a pas de substance, et ce qui n’est point telle chose déterminée ne peut évidemment être non plus à aucune autre des catégories, telles que la qualité, la quantité, le lieu, etc. ; car alors ce serait admettre que les qualités des substances en peuvent être séparées. Si c’est le non-être d’une façon générale que signifie l’absolu, c’est alors la négation universelle de toutes choses ; et par conséquent, ce qui naît et se produit doit nécessairement naître de rien.

§ 3.[3] Du reste, nous avons parlé ailleurs de ce sujet, et nous en avons traité déjà plus au long. Mais nous résumerons ici notre pensée, et nous dirons en peu de mots qu’en un sens il peut y avoir absolue production de quelque chose venant du néant, du non-être, et qu’en un autre sens, rien ne peut jamais venir que de ce qui est. C’est qu’en effet ce qui est en simple puissance et n’est pas en réalité, doit être préalablement et nécessairement des deux façons que nous venons d’indiquer. Mais il n’en reste pas moins à examiner, avec le plus grand soin, cette question, dont la difficulté peut encore nous étonner même après les développements qui précèdent, à savoir comment la production absolue peut avoir lieu, soit qu’elle vienne de ce qui est en puissance, soit qu’elle ait lieu de toute autre façon.

§ 4.[4] On peut rechercher, en effet, s’il y a uniquement production de la substance et de telle chose déterminée et réelle, ou s’il n’y a pas aussi production de la qualité, de la quantité, du lieu etc. Mêmes questions également pour la destruction. Que si réellement quelque chose vient à se produire et à naître, il est évident qu’il doit y avoir une certaine substance qui est au moins en puissance, si elle n’est pas en réalité, et en entéléchie, d’où sortira la production de la chose, et dans la quelle la chose devra se changer de toute nécessité, quand elle est détruite.

§ 5.[5] Se peut-il qu’une des autres catégories qui sont en toute réalité, en entéléchie, appartienne à cet être en puissance ? En d’autres termes, peut-on appliquer les idées de quantité, de qualité, de lieu, à ce qui n’est telle chose qu’en puissance, et est en puissance uniquement, sans être telle chose d’une manière absolue, ni même sans être absolument du tout ? Car si cet être n’est aucune chose en réalité, mais qu’il soit toutes choses en puissance, le non-être ainsi compris peut avoir une existence séparée ; et alors on en arrive à cette conséquence, qu’ont encore redoutée par dessus tout les premiers philosophes, de faire naître les choses du pur néant. Mais si l’on n’admet pas que ce soit un être véritable ou une substance, et que ce soit quelque autre des catégories indiquées, alors on suppose, ainsi que nous l’avons déjà dit, que les qualités et les affections peuvent être séparées des substances.

§ 6.[6] Tels sont les problèmes qu’il faut discuter ici, dans la mesure qui convient, de même qu’il nous faut rechercher quelle est la cause qui rend la production des êtres éternelle, soit la production absolue, soit la production partielle. Or, comme il n’y a, selon nous, qu’une seule et unique cause d’où part le principe du mouvement, et comme il n’y a également qu’une seule et unique matière, il faut expliquer ce que c’est que cette cause.

§ 7.[7] Mais déjà nous en avons parlé dans notre Traité du mouvement, quand nous y avons établi qu’il y a, d’une part, quelque chose d’immobile durant toute l’éternité, et d’autre part, quelque chose qui est mis au contraire dans un éternel mouvement. L’étude du principe immobile des choses relève d’une philosophie différente et plus haute ; mais quant au moteur qui meut tout le reste, parce qu’il est mis lui-même dans un mouvement continu, nous en parlerons plus tard, en expliquant quelle est la cause de chacun des phénomènes particuliers. Ici nous nous bornerons à traiter de cette cause qui se présente sous forme de matière, et qui fait que la production des choses et leur destruction ne font jamais défaut dans la nature. Mais cette discussion éclaircira peut-être, du même coup, le doute que nous venons d’élever tout à l’heure, et l’on verra comment il faut entendre aussi la destruction absolue et l’absolue production des choses.

§8.[8] D’ailleurs, c’est déjà une question bien assez embarrassante que de savoir quelle peut-être la cause qui entretient et enchaîne la génération des choses, si l’on suppose que ce qui est détruit s’en retourne dans le néant, et que le non-être n’est rien ; ce qui n’est pas, n’étant ni substance, ni qualité, ni quantité, ni lieu, etc. Car alors, puisque à tout instant quelqu’un des êtres disparaît et s’éteint, comment se fait-il que le monde entier n’ait pas été déjà depuis si longtemps épuisé mille fois, si la source d’où vient chacun de ces êtres est limitée et finie ? Certes si cette perpétuelle succession ne cesse jamais, ce n’est pas que la source d’où proviennent les êtres soit infinie ; car cela est tout à fait impossible, puisqu’en réalité rien n’est infini, et que c’est même seulement en puissance que quelque chose peut être infini dans la division. Or nous avons démontré que la division était seule à être incessante et à ne jamais manquer, parce qu’on peut toujours prendre une quantité de plus en plus faible. Mais ici nous ne voyons rien de pareil. La perpétuité de la succession ne devient- elle pas nécessaire par cela seul que la destruction d’une chose est la production d’une autre, et que, réciproquement, la production de celle-ci est la mort et la destruction de celle-là ?

§ 9.[9] Par là, on aura une cause qui pourra suffire à tout expliquer pour la production et la destruction des choses : ici, dans leur généralité, et là, dans chacun des êtres particuliers. Mais il n’en faut pas moins rechercher pourquoi, en parlant de certaines choses, on dit d’une manière absolue qu’elles se produisent et qu’elles se détruisent, tandis qu’en parlant de telles autres choses, on ne le dit pas absolument, s’il est bien vrai que la production de tel être soit la même chose que la destruction de tel autre, et si à l’inverse la destruction de celui-ci est bien la production de celui-là.

§ 10.[10] Cette différence d’expression demande aussi à être expliquée, puisque nous disons d’un être qu’il est, dans tel cas, absolument détruit, et non pas qu’il l’est seulement sous tel rapport ; et puisque nous prenons la production dans un sens absolu, aussi bien que la destruction. Ainsi telle chose devient telle autre chose ; mais elle ne devient pas absolument. Voilà, par exemple, comment nous disons de quelqu’un qui apprend, qu’il devient savant, mais nous ne disons pas pour cela qu’il devient et se produit absolument. En se rappelant ce que nous avons dit bien souvent, à savoir que tels noms expriment une substance réelle et que tels autres ne l’expriment pas, on peut voir d’où vient la question ici posée ; car il importe beaucoup de déterminer ce en quoi se change l’objet qui change. Par exemple, la transition d’un objet qui devient du feu peut être une production absolue ; mais c’est aussi la destruction de quelque chose, par exemple, de la terre. De même, la production de la terre est bien sans doute aussi une production ; mais ce n’est pas une production absolue, bien que ce soit une destruction absolue, et par exemple, la destruction du feu.

§ 11.[11] C’est en ce sens que Parménide ne reconnaît que deux choses au monde : l’être et le non-être, qui sont pour lui le feu et la terre. Peu importe, du reste, de faire l’hypothèse de ces éléments, ou d’autres éléments pareils ; car nous ne recherchons que la manière dont les phénomènes se passent, et non leur sujet. Ainsi, la modification qui mène les choses à l’absolu non-être, c’est une destruction absolue ; et au contraire, ce qui les mène absolument à l’être, c’est une absolue production. Mais quelles que soient les substances où l’on considère la production et la destruction, soit le feu, soit la-terre, soit tout autre élément analogue, la production et la destruction n’en sont pas moins toujours, l’une de l’être, et l’autre du non-être.

§ 12.[12] Telle est donc une première différence d’expression, qu’on peut établir entre la production et la destruction absolues, et entre la production et la destruction qui ne sont pas absolues. Une autre différence qui peut les distinguer, c’est la matière où elles ont lieu, quelle que soit cette matière. Celle dont les différences expriment davantage telle ou telle réalité, est aussi davantage de la substance ; et celle dont les différences expriment davantage la privation est davantage du non-être. Ainsi, la chaleur est une certaine catégorie et une espèce réelle ; au contraire, le froid n’est qu’une privation ; et c’est par ces mêmes différences que la terre et le feu se distinguent.

§ 13.[13] Pour le vulgaire, ce qui constitue surtout la différence de la production et de la destruction, c’est que l’une est perceptible aux sens, et que l’autre ne l’est pas. Quand il y a changement en une matière sensible, le vulgaire dit que l’objet naît et se produit, et qu’il meurt et se détruit quand il change en une matière invisible. C’est que les hommes définissent en général l’être et le non-être, selon qu’ils sentent la chose ou ne la sentent pas ; de même qu’ils prennent pour l’être ce qu’on connaît, et pour le non-être, ce qu’on ignore. Mais alors c’est la sensibilité qui remplit la fonction de la science. De même donc que les hommes ne conçoivent leur propre vie et leur être que par ce qu’il sentent ou peuvent sentir, de même aussi conçoivent-ils l’existence des choses, cherchant bien à connaître la vérité, mais ne la trouvant pas dans ce qu’ils disent.

§ 14.[14] C’est que la production et la destruction absolues des choses sont tout autres, selon qu’on les considère d’après l’opinion commune, ou dans leur réalité véritable. C’est ainsi que l’air et le vent existent moins, comme corps, si l’on s’en rapporte au simple témoignage des sens ; et voilà pourquoi l’on croit que les choses qui sont détruites absolument, se détruisent en se changeant en ces éléments, tandis que l’on croit que les choses naissent et se produisent, quand elles se changent en quelque élément qu’on puisse toucher ; et par exemple, en terre. Mais dans la vérité, ces deux éléments sont substance et espèce, bien plus que la terre elle-même.

§ 15.[15] On a donc expliqué ce qui fait qu’il y a la production absolue, en tant que destruction de quelque chose, et la destruction absolue, en tant que production de quelque chose aussi. Cela tient en effet à ce que la matière est différente, soit parce que l’une est substance, tandis que l’autre ne l’est pas, soit parce que l’une est davantage, et que l’autre est moins, ou bien enfin que la matière d’où vient la chose, et celle où elle va, est plus ou moins sensible. On dit des choses, tantôt qu’elles naissent et deviennent absolument, et tantôt on dit limitativement qu’elles deviennent telle ou telle chose, sans qu’elles viennent l’une de l’autre réciproquement, à la manière dont nous l’entendons ici. Nous nous bornons en effet maintenant à expliquer pourquoi, toute production étant la destruction de quelque autre chose, et toute destruction étant la production d’une autre chose aussi, nous n’attribuons pas dans le même sens la production et la destruction aux choses qui changent les unes dans les autres.

§ 16.[16] Ceci du reste ne résout pas la question que nous nous posions en dernier lieu. Mais cela nous explique pourquoi de quelqu’un qui apprend, on dit qu’il devient savant, et non pas qu’il devient absolument ; tandis que d’une chose qui pousse naturellement, on dit d’une manière absolue qu’elle naît et devient. Ce sont là les déterminations, les différentes catégories, dont les unes expriment l’être réel et particulier, les autres la qualité, les autres la quantité. Par suite, de toutes les choses qui n’expriment pas une substance, on ne dit point d’une manière absolue qu’elles deviennent, mais qu’elles deviennent telle ou telle chose. Cependant, pour tous les cas également, la production ne s’applique expressément qu’aux objets placés dans une des deux séries. Par exemple ; dans la catégorie de la substance, on dit que la chose devient, si c’est du feu qui se produit ; on ne le dit pas, si c’est de la terre ; dans la catégorie de la qualité, on dit que la chose devient, si l’être devient savant, et non pas s’il devient ignorant.

§ 17.[17] Ainsi donc, voilà comment nous expliquons pourquoi certaines choses se produisent d’une manière absolue, et comment d’autres ne se produisent, ni d’une manière absolue, ni du tout, jusque dans les substances elles-mêmes. Nous avons dit aussi pourquoi le sujet, en tant que matière, est la cause de la production continue et éternelle des choses, attendu qu’il peut indifféremment se changer dans les contraires, et que, pour les substances, la production d’un phénomène est toujours la destruction d’un autre ; et réciproquement, que la destruction de celui-ci est la production de celui-là.

§ 18.[18] Du reste, il n’y a pas non plus à se demander pourquoi c’est cette destruction éternelle des êtres qui fait que quelque chose peut se produire ; car de même qu’on dit qu’une chose est détruite absolument, quand elle passe à l’insensible et au non-être, de même on peut dire qu’elle se produit et vient du non-être, quand elle vient de l’insensible. Par conséquent, soit qu’il y ait, soit qu’il n’y ait pas préalablement un sujet, la chose vient toujours du néant ; de telle sorte que, tout à la fois, la chose, en se produisant vient du non-être, et qu’en se détruisant, elle retourne au non-être encore. C’est bien là ce qui fait qu’il n’y a ni cessation ni lacune ; car la production est la destruction du non-être, et la destruction est la production du néant.

§ 19.[19] Mais on pourrait se demander si ce non-être absolu est le second des deux contraires ; et par exemple, la terre et tout ce qui est lourd étant le non-être, si c’est le feu et tout ce qui est léger qui est, ou qui n’est pas l’être. Mais on peut dire encore que la terre est l’être, et que le non-être est la matière de la terre, comme il l’est également du feu. Mais la matière de l’un et de l’autre de ces éléments est-elle donc différente ? Et est-il impossible qu’ils viennent l’un de l’autre, non plus que des contraires ? Car le feu, la terre, l’eau et l’air ont des contraires ; ou bien, leur matière est-elle la même en un sens, et n’est-elle différente qu’en un autre sens ? Car ce qui est le sujet de part et d’autre est identique, et c’est le mode seul d’existence qui ne l’est pas. Mais arrêtons-nous à ce que nous venons de dire sur ce sujet.

  1. Ch. III, § I. D’une manière absolue, c’est-à-dire, sans qu’il y ait rien qui le précède et d’où il puisse sortir. — A proprement parler, c’est-à-dire, dans le sens absolu du mot. — Dans ce cas, c’est-à-dire, en supposant qu’il n’y a pas de production absolue, et que ce soit toujours d’un être antérieur que sorte l’être qui se produit. J’ai dû couper la phrase, qui est un peu trop longue dans le texte. — Du malade vient le bien portant, c’est-à-dire que l’être qui est malade redevient bien portant ; ou réciproquement, l’être qui est bien portant redevient malade. L’être alors ne se produit pas, à proprement dire ; il change seulement d’état et passe par diverses qualités ; mais préalablement il est, avant de changer. — Une production absolue, c’est-à-dire que la chose qui n’était pas antérieurement vient à être, sortant du néant, où elle était auparavant. — Du non-être, du néant, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. C’est en ce sens qu’on dit d’une chose qu’elle est plongée dans le néant, et que « le néant appartient à certains êtres, » comme le dit le texte. L’expression semble contradictoire, et cependant elle est juste. — Le blanc peut venir du non-blanc, c’est-à-dire qu’une chose qui n’est pas blanche peut devenir blanche. Ce n’est pas là une production, à proprement parler ; c’est un simple changement, une simple altération. — La production absolue doit venir de l’absolu non-être, c’est-à-dire qu’une chose est, après n’avoir pas été, sortant du néant où elle était.
  2. § 2. Or, l’Absolu en ceci exprime, ou le primitif, l’absolu ne semble pas pouvoir être employé en ce sens restreint ; mais c’est ici une simple distinction verbale, qui est tout arbitraire. — Dans chaque catégorie de l’être, c’est-à-dire dans toutes les catégories autres que celle de la substance, le primitif est le terme le plus élevé. Ainsi dans la catégorie de la qualité, ce n’est aucune des qualités particulières ; mais c’est la qualité même. — Ou l’universel, c’est-à-dire la substance, et c’est en ce sens que d’ordinaire on entend l’absolu. — Renferme et contient tout, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. Cela revient à dire qu’il faut d’abord que la chose existe, pour qu’ensuite elle puisse être douée de quelque qualité que ce soit. — Si c’est le primitif que signifie l’absolu, j’ai ajouté les trois derniers mots, pour rendre la pensée plus précise et plus claire. — Il y aura production de substance, l’expression ne paraît pas très convenable ; ce n’est pas de la substance précisément, mais plutôt une simple existence modifiée selon chaque catégorie. Une chose devient blanche, qui n’était pas blanche auparavant. — Et cætera, j’ai ajouté ce mot, pour indiquer que toutes les catégories ne sont pas énoncées ici. — Les qualités, le texte dit précisément : « les affections. » — Que signifie l’absolu, j’ai cru devoir répéter ces mots, pour compléter le texte. — La négation universelle de toutes choses, ou peut-être mieux : « la négation universelle de toutes les catégories, » y compris celle de la substance. — Ce qui mot et se produit, il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  3. § 3. Ailleurs, comme le remarque Philopon, c’est dans le 1er livre de la Physique ; ch. 8, §§ 1 et suivants, page 473 de ma traduction. — Venant du néant, du non-être, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — Rien ne peut jamais venir, le texte n’est pas aussi développé. — Ce qui est en simple puissance, le possible n’est pas précisément ; mais il suffit qu’il puisse être, pour qu’il ait déjà une sorte d’existence. — Des deux feront que nous venons d’indiquer, j’ai ajouté ces derniers mots. En d’autres termes, le possible est et n’est pu tout à la fois.
  4. § 4. S’il y a uniquement, j’ai ajouté ce dernier mot. — Production de la substance, on pourrait traduire encore : « Si la production appartient à la substance. » — Pour la destruction, qui est le contraire de la production. N’y a-t-il production et destruction que dans la catégorie de la substance ? Et n’y en a-t-il pas aussi dans les autres catégories ! — Réellement, j’ai ajouté ce mot. — Une certaine substance, le mot même de Substance est dans le texte ; mais il semble que la substance doit toujours être réelle et non simplement possible. — En réalité et en entéléchie, il n’y a qu’un seul mot dans le texte.
  5. § 5. Qu’une des autres catégories, c’est-à-dire une des catégories autres que celle de la substance. — A cet être en puissance, le texte n’est pas aussi explicite. — De lieu, ou de toute autre catégorie. — Avoir une existence séparée, ce qui est contradictoire. — Qu’ont encore redoutée par dessus tout les philosophes, qui n’ont jamais pu admettre sous aucune forme l’idée du néant, la création e nihilo. — Du pur néant, le texte dit précisément : « du néant préexistant. » — Un être véritable, on pourrait ajouter : « et distinct. » Si le possible n’est pas une substance, dira-t-on qu’il soit une autre des catégories ? — Indiquées, un peu plus haut. — Nous l’avons déjà dit, voir plus haut, § 2.
  6. § 6. Dans la mesure qui convient, au sujet spécial qui est traité dans le présent ouvrage. — La cause qui rend la production des êtres éternelle, ce ne serait pas moins que l’intervention de Dieu, considéré comme créateur et conservateur des choses, ainsi qu’il est indiqué un peu plus bas. — Soit la production absolue, c’est-à-dire, celle qui fait sortir les choses du néant. — Soit la production partielle, c’est-à-dire, celle des qualités successives des choses. — Une seule et unique cause, c’est le moteur immobile. — Une seule et unique matière, sur laquelle agit le premier moteur. — Ce que c’est que cette cause, ici l’expression du texte laisse à désirer un peu plus de netteté ; car il s’agit de deux causes et non pas d’une seule, la cause efficiente et la cause matérielle.matière, sur laquelle agit le premier moteur. — Ce que c’est que cette cause, ici l’expression du texte laisse à désirer un peu plus de netteté ; car il s’agit de deux causes et non pas d’une seule, la cause efficiente et la cause matérielle.
  7. § 7. Dans notre Traité du mouvement, ce titre indique la Physique. — Quand nous y avons établi, voir la Physique, livre VIII, ch. 3, § 2, de ma traduction ; voir aussi le début de la Physique, et la Dissertation spéciale sur les titres divers de ce traité. — D’une philosophie différente et plus haute, c’est-à-dire, de la Métaphysique ; voir le livre XII de la traduction de M. V. Cousin. —Nous en parlerons plus tard, voir le second livre du présent traité, ch. 10. — Des phénomènes, ou des êtres. — La cause qui se présente sous forme de matière, c’est-à-dire, la cause matérielle. — Ne font jamais défaut, c’est la perpétuelle succession des êtres ; mais dans le système d’Aristote, le monde n’ayant pas commencé et ne devant pas avoir de fin, la succession des êtres doit continuer telle que nous la voyons. Cette question a été traitée aussi dans le Vlll. livre de la Physique, ch. 7, § 4, et en outre, livre III, ch. 5, § 4. — La destruction absolue, et l’absolue production, c’est-à-dire la possibilité qu’une chose vienne du néant et rentre dans le néant.
  8. § 8. Qui entretient et enchaîne, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — S’en retourne dans le néant, ou simplement : « s’en va dans le néant. » — Ni substance, ni qualité, c’est-à-dire, dans aucune des catégories. — Ni lieu, il n’y a ici que quatre catégories d’énumérées, au lieu de dix ; voilà pourquoi j’ai ajouté un et cætera. — Le monde entier, le texte dit précisément : Le tout. — Est limitée et finie, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — Cette perpétuelle succession, le texte n’est pas tout à fait si explicite. — Nous avons démontré, voir la Physique, Théorie de l’infini, livre Ill, ch. 5, § 4, et ch. 11, § 5. — De plus en plus faible, c’est en effet la théorie d’Aristote dans la Physique ; mais il semble qu’on peut trouver que l’accroissement des choses est infini, tout aussi bien que leur division, puisqu’il s’agit toujours, de part et d’autre, de quantités purement imaginaires. — Par cela seul que la destruction dune chose, la même supposition est faite dans la Physique, livre III, ch. 12, § 2 de ma traduction.
  9. § 9. Ici dans leur généralité, le texte n’est pas aussi formel. — D’une manière absolue, sans limitation ni modification d’aucune espèce.
  10. § 10. Cette différence d’expression, le texte dit simplement : « Cela. » — Qu’il est absolument détruit, c’est-à-dire qu’il passe de l’être au non-être d’une manière complète, et cesse absolument d’exister, après avoir existé quelque temps. — Seulement sous tel rapport, c’est-à-dire, par exemple, qu’une chose devient blanche, de noire qu’elle était ; elle ne cesse pas d’être absolument pour cela ; seulement elle cesse d’être blanche ; elle est détruite en tant que blanche, sans être réellement détruite. — De quelqu’un qui apprend, et qui par conséquent n’est pas encore savant ; il devient donc savant. Mais on ne peut pas dire d’une manière absolue qu’il devient, comme s’il naissait par exemple. — Qu’il devient et se produit, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — Nous avons dit bien souvent, on peut voir les Catégories, ch. 4, § 1. — Tels noms, l’expression du texte est indéterminée. — Une substance réelle, le texte dit précisément : « telle chose. » — La destruction de quelque chose, par exemple, de la terre, c’est-à-dire que la terre doit être détruite pour devenir du feu, en admettant que cette transformation soit possible, comme le suppose Parménide. — La destruction du feu, même remarque.
  11. § 11. L’être et le non-être, dans la Physique, livre I, ch. 6, § 4, c’est le froid et le chaud, et non l’être et le non-être qui sont indiqués comme les deux éléments primitifs de Parménide. D’ailleurs, le froid et le chaud y sont identifiés aussi avec la terre et le feu. — Peu importe du reste, Aristote sent ici que la transformation de la terre en feu, ou du feu en terre, est une hypothèse bien singulière. — Et non leur sujet, c’est-à-dire le sujet dans lequel se passent les phénomènes, et qui peut être indifféremment, de la terre, du feu, on tout autre corps quelconque. La substance peut varier ; mais le phénomène est toujours le même. Aristote d’ailleurs s’en explique positivement un peu plus bas. — La nidification qui amène, le texte n’est pas aussi formel. — Soit le feu soit la terre, comme le veut Parménide. — L’une de l’être, n’est la production ou génération. — L’autre du non-être, la destruction ou corruption.
  12. § 12. Une première différence d’expression, le texte n’est pas tout à fait aussi précis. — Où elles ont lieu, j’ai ajouté ces mots, pour éclaircir la pensée. — Telle ou telle réalité, le texte dit simplement : « telle chose. » — Aussi la chaleur est une certaine catégorie, l’exemple n’est peut-être pas très bien choisi ; et si le froid est la privation de la chaleur, on peut dire aussi que la chaleur est la privation du froid. Le froid et la chaleur sont également des qualités, dont l’une est le contraire de l’autre. — La terre et le feu se distinguent, voir le § précédent. D’après le commentaire de Philopon, le feu est plus substance que la terre ; il est l’affirmation ou la possession, tandis que la terre est la négation. Voir la fin du § suivant.
  13. § 13. La différence de la production et de la destruction, ma traduction est un peu plus précise que le texte. — Quand il y a changement, même observation. — Naît et se produit… meurt et se détruit, il n’y a de part et d’autre qu’un seul mot dans le texte. — Conçoivent-ils l’existence des choses, c’est-à-dire selon que les choses sont senties, et selon qu’elles ne le sont pas, ou ne peuvent pas l’être.
  14. § 14. D’après l’opinion commune, on pourrait traduire aussi : « selon la simple apparence. » — Existent moins comme corps, le texte dit précisément : « sont moins. » — Au simple témoignage des sens, attendu que l’air et le vent se sentent moins que les éléments plus grossiers de la terre et de l’eau. — En ces éléments, de l’air et du vent. — Par exemple, j’ai ajouté ces mots, qui complètent la pensée. —— Et espèce, ou forme. Le mot du texte n’est pas plus précis que celui que j’ai dû employer. — Bien plus que la terre elle-même, il aurait peut-être fallu donner la raison de cette théorie, qui, à première vue, semble paradoxale. Philopon prétend que l’air est en réalité plus substance que la terre, parce qu’il l’entoure et qu’il a en outre le caractère de la chaleur, qui le spécifie davantage.
  15. § 15. On a donc expliqué, l’explication n’a pas été aussi claire qu’on peut le désirer ; et le résumé qui est donné ici peut paraître un peu prématuré. — Qu’il y a, il semble qu’il vaudrait mieux dire : « que l’on croit qu’il y a. » Mais je n’ai pas osé risquer ce changement. — La matière, l’expression du texte est tout aussi indéterminée que celle dont je me sers dans la traduction. On peut demander : La matière de quoi ? — L’une, des deux choses, sous-entendu. — Est substance, c’est-à-dire, un objet individuel et spécial. — Est davantage, en d’autres termes : « l’une a une existence plus prononcée, et l’autre une existence moins sensible. » — Naissent et deviennent, il n’y a qu’un seul mot dans le grec. — Limitativement, ou seulement. — Dont nous l’entendons ici, en disant que la génération absolue est la destruction d’une autre chose, et que la destruction absolue est aussi une génération. — Nous n’attribuons pas dans le même sens, toutes ces restrictions sont subtiles et obscures. — Aux choses qui se changent les unes dans les autres, ce sont les différents états par lesquels passe un même corps, comme la suite semble l’indiquer. Ce n’est pas à proprement parler la destruction, ou la production, d’une qualité ; c’est une simple succession.
  16. § 16. Que nous nous posions en dernier lieu, sur les rapports véritables de la production et de la destruction absolues. — Qu’il devient savant, son ignorance se changeant en savoir, de même que son savoir peut se changer en ignorance, s’il oublie ce qu’il a appris. — Qui pousse naturellement, le mot du texte me semble avoir toute la force de l’expression dont je me sers en traduisant. — Qu’elle naît et devient, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. Les unes… l’être réel et particulier, c’est la catégorie de la substance. Le texte est un peu moins précis. — Les autres la quantité, il n’y a ici que trois catégories d’énumérées, bien qu’il y en ait dix ; voir le traité des Catégories, ch. 4, page 58 de ma traduction. — Qu’elles deviennent telle ou telle chose, c’est-à-dire, qu’elles changent de qualité on de manière d’être, la substance étant nécessairement supposée permanente, sous toutes les catégories. — Dans une des deux séries, l’une affirmative, l’autre négative. La suite d’ailleurs éclaircit cette pensée, bien que les termes pris pour exemple ne soient peut-être pas très bien choisis. — Si c’est du feu, le feu étant pris pour le terme positif, tandis que la terre est prise pour le terme négatif. — Si c’est de la terre, voir plus haut, § 14. — Si l’être devient savant, c’est le terme positif, tandis qu’Ignorant est le terme négatif ; mais dans l’un et l’autre cas, on dit aussi bien qu’on devient savant ou qu’on devient ignorant. Tout ceci est évidemment très subtil.
  17. § 17. Jusque dans les substances elles-mêmes, c’est-à-dire, quand une des choses, tout en existant, a cependant moins d’existence qu’une autre, en ce qu’elle lui est subordonnée ; voir plus haut, § 15. — Le sujet en tant que matière, le sujet subsiste ; car il est matériellement le lieu des contraires, qui se passent en lui et qui s’y succèdent. Le sujet persiste tout en changeant. — Continue et éternelle, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. — La production d’un phénomène, en d’autres termes, le changement des qualités. La production du noir est la destruction du blanc ; la production du blanc est la destruction du noir ; et le sujet, qui devient tour à tour noir et blanc, n’en subsiste pas moins.
  18. § 18. C’est cette destruction éternelle des êtres, le texte n’est pas tout à fait aussi formel dans tout ce passage. — Quand elle passe à l’insensible, voir plus haut, § 13. — La chose vient toujours du néant, j’ai pris une expression aussi générale et aussi vague que celle du texte. En d’autres termes, soit qu’il y ait simple changement de qualité, le phénomène vient toujours de ce qui n’était pas. — Ni cessation ni lacune, il n’y a qu’un seul mot dans le texte. C’est d’ailleurs par une subtilité, ou plutôt un abus de langage, qu’on peut parler de la production ou de la destruction du néant.
  19.   § 19. Est le second des deux contraires, celui qui n’est pas réellement, mais qui pourrait être, en remplaçant le contraire qui est. — La terre et tout ce qui est lourd étant le notre, contre l’opinion vulgaire, qui accorderait plus d’être à la terre qu’à l’air et au feu, parce qu’elle est plus perceptible aux sens ; voir plus haut, § 13. — Que la terre est l’être, il semble en effet difficile de le nier. — Le non-être est la matière de la terre, il ne semble pu que le non-être puisse être la matière de quoi que ce soit, si ce n’est dans le sens purement abstrait, où on vient de le dire un peu plus haut. — Est-il impossible qu’ils viennent l’un de l’autre, c’est ce qu’il semble, à ne s’en rapporter qu’au témoignage des sens. — Ont des contraires, il serait peut-être plus exact de dire qu’ils sont contraires les uns aux autres. — Ce qui est le sujet, c’est-à-dire la matière prise au sens abstrait, mais non pas au sens réel et positif. — Le mode seul d’existence, distinction familière à Aristote, et qui souvent est très exacte. — Arrêtons-nous, il ne paraît pas cependant que le sujet soit épuisé, ni surtout qu’il soit suffisamment élucidé par les développements qui précèdent.