Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 303-304).
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SUIE. Matière ordinairement noire & épaisse, que la fumée laisse, & qui s’attache au tuyau des cheminées ; plus le courant d’air est considérable dans les cheminées & entre les matières que l’on brille, moins elles donnent de suie. La suie est la portion qui n’a pas pu s’enflammer faute de contact suffisant avec l’air ; car si les vapeurs qui s’exhalent d’un corps inflammable, étoient assez raréfiées, pour que chacune de leurs parties fût bien environnée d’air, elles brûleroient toutes avec flamme, & alors on n’auroit ni fumée ni suie. Ce principe est rigoureusement démontré par les lampes ingénieuses inventées par M. Argand. Les suies ne sont pas toutes égales en qualité. Elles diffèrent, soit par la manière dont elles ont été produites par la flamme, soit par la nature même des substances que l’on brûle. De tels détails nous meneroient trop loin. Toutes les suies, en général, ont une saveur âcre, amère, & sentent l’empyreume, & toutes fournissent un sel alkali plus ou moins chargé de principes salins. On s’en sert pour les teintures.

La suie devient un excellent engrains, si les terres renferment en proportion suffisante des substances animales ; car si la partie saline de la suie domine trop, elle nuit plus à la végétation, qu’elle ne lui est utile ; & elle ne lui sera utile qu’autant que les pluies auront dissous ses sels & les auront combinés avec les matières graisseuses pour en composer les matériaux vie la sève. (Consultez ce mot, ainsi que l’article Amendement) Lorsqu’on veut s’en servir sur les terres à grains, il vaut beaucoup mieux la mêler avec le fumier, l’y étendre, couche par couche ; & lorsque le fumier est fait, on le porte sur les champs : alors les combinaisons des principes sont faites, & l’on ne risque plus rien.

Si un pré goûteux est rempli de mousses, de joncs, & autres plantes de ce genre, inutiles & nuisibles, la suie produit un excellent effet lorsque les places en sont saupoudrées : on l’emploie également avec succès sur les trèfles dans les terrains gras ; mais une main prudente doit guider son expansion. Il est à-propos de la répandre à l’entrée de l’hiver, afin que les pluies de cette saison dissolvent les sels, les mélangent avec la terre, & les combinent avec ses autres principes. Si l’opération est faite après l’hiver, & s’il survient une sécheresse pendant le printemps, le trèfle souffre & contracte une odeur désagréable. Ce que je viens de dire s’applique également aux luzernes & aux sain-foins ou esparcettes.