Cours d’agriculture (Rozier)/SUFFOCATION

Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 302-303).
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SUFFOCATION. Médecine rurale. C’est une maladie très-aiguë, accompagnée d’une difficulté de respirer très-considérable & presque suffocation.

On ne doit point la confondre avec l’asthme. Elle en diffère tant par la marche que par la terminaison, qui sont toujours très-rapides. L’asthme a des périodes, la suffocation n’en a pas.

Plusieurs causes peuvent lui donner naissance ; de ce nombre sont les maladies inflammatoires de la gorge & de la poitrine. Les corps arrêté dans l’œsophage & la trachée artère ; les polypes au cœur ; la constriction spasmodique du larinx & de la matrice ; les tumeurs & les abcès considérables qui attaquent la substance du poumon, les engorgemens sanguins dans les glandes qui avoisinent les organes de la respiration, un épanchement d’une matière quelconque dans la cavité de la poitrine. Mais ce ne sont point là les seules causes qui peuvent exciter la suffocation ; on doit encore y joindre celles qui émanent des vapeurs du soufre, du charbon de pierre, de la fermentation vineuse. On ne peut pas aussi, dissimuler que l’engorgement sanguin du poumon, ne soit regardé avec juste raison par tous les médecins, comme la vraie cause de la suffocation.

Cette maladie présente presque toujours le plus grand danger, & les personnes les plus expérimentées dans l’art de guérir, sont très-souvent effrayées au premier aspect du malade, quoiqu’elles sachent que le péril n’est pas constamment le même, & qu’il varie suivant la diversité des causes dont elle est l’effet ; mais on peut dire, en général, que la suffocation, qui dépend des vapeurs du charbon, ou du soufre, n’est pas bien dangereuse, si l’on est appelé assez tôt pour pouvoir y remédier promptement. Que celle qui est déterminée par le spasme des nerfs de la matrice cède facilement à la senteur de quelques odeurs fortes, & qu’elle est plus effrayante que dangereuse ; & que celle qui reconnoît pour cause un corps engagé dans la trachée artère ou un polype au cœur, ou un anévrisme, est sans aucun espoir. Il n’en est pas de même de celle qui est l’effet d’un corps arrêté dans l’œsophage ; l’art fournit des moyens sûrs & puissans pour la guérir promptement. Pour traiter avec quelque succès la suffocation, il ne faut jamais perdre de vue la cause qui lui donne naissance. On combattra par la diette & par les saignées du pied & du bras, la suffocation qui dépendra d’une pléthore universelle, ou d’un engorgement sanguin dans quelque organe. On opposera à celle qui sera l’effet d’une fermentation dans les humeurs, des boissons acidulées, bien fraîches, & même glacées, telles que la limonade, l’orangeade, le sirop de vinaigre & le suc de cerise, étendus dans une suffisante quantité d’eau.

On emploiera avec succès l’alkali volatil fluor, l’eau de luce & autres spiritueux dont on chatouillera le gosier avec la barbe d’une plume, contre la suffocation par cause de méphitisme ; mais l’air libre & frais est encore le meilleur remède pour les personnes suffoquées par les vapeurs du soufre, du charbon ou du vin. Les lavemens âcres & stimulans, les frictions sèches surtout le corps, la fumée du tabac injectée par l’anus, produisent quelquefois de bons effets, ainsi que quelques poudres sternutatoires, âcres, telles que le tabac, l’euphorbe, la pyrèthre, qu’on fait souffler dans les narines, enfin, on s’abstiendra de la saignée dans la suffocation qui dépend de l’empyème, ou d’une vomique, & dans celle qui attaque les scorbutiques. M. AMI.