Cours d’agriculture (Rozier)/FONGUS

Hôtel Serpente (Tome quatrièmep. 683-685).


FONGUS. Nom qu’on donne à une excroissance en forme de champignon, qui s’élève sur le bord & dans le fonds des ulcères, & qui vient aussi dans toutes les parties du corps, & sur-tout à l’anus.

Les fongus sont quelquefois mols, pulpeux & unis. D’autres fois ils sont durs, inégaux & squirreux. De leur nature ils ne sont ni rouges ni douloureux, & ils conservent la couleur de la peau : mais lorsqu’ils s’enflamment par le vice du sang, par des tiraillemens, des contusions, ou par l’usage des topiques trop âcres, ils s’abcèdent s’ils sont mols, ou bien ils dégénèrent en cancer ou en squirre, s’ils ne suppurent pas.

Les personnes débauchées, & qui se sont livrées à un commerce impur, en sont pour l’ordinaire attaquées ; les fongus reconnoissent plusieurs causes : quand le virus vénérien n’en fait pas la cause principale, l’épaississement de la lymphe en est une des plus efficaces, mais aussi il peut dépendre à son tour d’une infinité d’autres causes, comme d’un régime de vie pris de l’usage des alimens épais & trop consistans en mucus, d’une boisson trop astringente, d’une compression trop forte sur quelque partie du corps.

Le traitement des fongus consiste à en faire l’extirpation avec l’instrument tranchant ou avec les cathérétiques, ou par la ligature.

Mais avant d’employer ces moyens, il convient de préparer le malade par quelques bouillons amers & altérans, par des adoucissans légers, tels que le petit lait, les eaux minérales acidules, une eau légère de poulet. La saignée ne convient point du tout, à moins que les fongus ne viennent à s’enflammer. Il faut alors observer & bien voir si la fièvre est locale, parce qu’alors on feroit la saignée sur la partie affectée, & on y appliqueroit des émolliens & des relâchans qui pourroient faire cesser l’inflammation.

Ce préambule rempli, & les fongus ne venant point en suppuration, on en vient à l’extirpation ; les uns préfèrent la ligature à l’instrument tranchant & aux caustiques. Il est certain que cette pratique est aisée dans son exécution, en liant le fongus avec un fil ciré que l’on serre chaque jour de plus en plus, jusqu’à ce qu’étant desséché, il tombe de lui-même ; cette méthode, toute simple qu’elle est, présente néanmoins beaucoup d’inconvéniens. 1°. Elle cause des douleurs très-vives ; 2°. elle peut produire des inflammations considérables, qui peuvent dégénérer en cancer, en arrêtant le cours du sang ; 3°. elle n’emporte jamais la racine du fongus, qui revient bientôt après.

Les autres aiment mieux l’emploi des cathérétiques ; leur usage ne vaut pas plus que celui de la ligature, par les raisons suivantes. La première est que cette méthode est très-longue, sur-tout si le fongus est considérable ; elle est même inefficace, s’il est calleux : la seconde est qu’elle cause des douleurs insupportables, & peut déterminer des inflammations qui peuvent s’étendre au loin, & intéresser certaines parties très-sensibles.

Néanmoins, si le malade ne veut point se résoudre à supporter l’incision, & que le fongus soit petit, il ne peut résulter aucun inconvénient de la pratiquer.

Le moyen le plus sûr, le plus court & le moins dangereux, est de le couper avec un bistouri. L’incision faire, il faut examiner le fonds & la base du fongus. Si on y découvre quelque callosité, on les scarifiera aussi profondément qu’on le pourra, pour exciter une suppuration abondante, capable de le fondre.

Mais si le fongus dépend d’un vice vénérien, il faut plutôt l’attaquer par les remèdes appropriés ; sans cela, toutes les opérations deviendroient inutiles ; le fongus reparoîtroit dans sa même étendue, & prendroit peut-être même un accroissement plus considérable.

Cette maladie demande & exige l’attention & les soins assidus des maîtres de l’art. Aussi ne doit-on pas oublier d’y avoir recours & de se conformer à leurs avis éclairés ; il y auroit trop d’imprudence de se traiter soi-même ; il pourroit en résulter les plus grands dangers. M. AME.