Cours d’agriculture (Rozier)/EMPHYSÈME

Hôtel Serpente (Tome quatrièmep. 202-203).


EMPHYSÈME, Médecine rurale. L’emphysème est une tumeur flatulente, diffuse, élastique, qui rend un gazouillement, un petit murmure qui paroît être produit par l’air s’échappant sous la pression du doigt.

L’habitude du corps peut être entièrement affectée de cette maladie, de même que certaines parties isolés. L’emphysème est appelé général ou particulier.

On ne connoît qu’une cause qui concourt toute seule à la formation de cette tumeur ; c’est toujours l’air, qui s’introduit de plusieurs manières dans le tissu cellulaire ; d’après cela, elle peut-être considérée sous deux points de vue ; ou comme symptôme d’une plaie pénétrant à la poitrine & au poumon, ou comme maladie essentielle ; cette distinction est très-nécessaire pour le choix des moyens à employer pour la combattre avec autres. L’air entre dans le corps par les voies les plus nécessaires à l’économie animale ; le poumon en reçoit une grande quantité par la trachée-artère ; les alimens que nous prenons, les liquides que nous avalons, sont imprégnés d’air, & personne n’ignore qu’il s’en dégage beaucoup pendant la digestion. (Voy. le mot Air, Tom. I, p. 338) Pringle a fort bien observé que le sang en produisoit une assez grande quantité par le mouvement de putréfaction ; on peut s’en convaincre en jettant dans l’eau quelques morceaux de viande putréfiés ; on verra qu’ils surnageront toujours. Les expériences des D. Hales, Cotes, prouvent encore que la fermentation, qui est très-possible dans l’état de maladie, en donne assez abondamment. Outre cela, nous vivons environnés d’air. D’après toutes ces considérations, on peut voir que le fluide pénètre dans le corps, & qu’il peut affecter certaines parties. En se logeant sous la peau dans la membrane cellulaire, de cellule en cellule, il peut occuper toute l’habitude du corps, si on n’y remédie ; c’est ainsi qu’en soufflant sous la peau d’un mouton, on l’enfle bientôt dans toute son étendue.

L’emphysème diffère de l’hydropisie tympanite & du météorisme, en ce que l’air est contenu dans le bas ventre ; & de l’œdème, en ce que l’emphysème ne cède point à la pression des doigts, & que les parties qui en sont attaquées, reprennent aussitôt toute leur élasticité.

L’emphysème se guérit, en détruisant l’air qui le produit, ou en le chassant des cellules où il est renfermé ; l’air se détruit lui-même, ou il perd son élasticité par la succession du temps & par la vapeur de la chaleur animale, comme il est prouvé par les expériences de Mayow & de Hales ; donc il disparoîtra par la seule chaleur de la partie, à moins que la cause qui doit lui enlever son élasticité ne subsiste. Parmi les remèdes qu’on emploie pour le traitement de l’emphysème, les sachets d’herbes & les semences aromatiques & carminatives de fenouil, d’anis, d’aneth, de cumin, de barbotine, de camomille, de laurier, appliqués sur la tumeur, sont très-efficaces ; l’application des feuilles de sureau & d’hièble, bouillies dans le vin, produit de bon effets. M. AM.