Cours d’agriculture (Rozier)/CONSTIPATION

Hôtel Serpente (Tome troisièmep. 465-467).


CONSTIPATION, Médecine rurale. C’est la rétention des matières stercorales dans les boyaux ou intestins, passé le terme présent par la nature.

Les matières stercorales sont le résultat de la digestion ; elles descendent lentement, en suivant toutes les circonvolutions des intestins, & sont enfin expulsées au dehors.

Lorsque ces matières sont retenues dans les intestins, plus longtemps qu’il ne le faut, il s’ensuit plusieurs incommodités : elles se durcissent & s’altèrent ; elles occasionnent de violens maux de tête, quelquefois même des coups de sang, parce qu’elles pressent sur les vaisseaux sanguins, & font remonter le sang vers la tête. Elles donnent naissance aux hémorroïdes, en empêchant le retour du sang ; (voyez Hémorroïdes) elles font naître des fièvres miliaires chez les femmes, en faisant rentrer, dans la masse du sang, des particules putrides ; elles facilitent la naissance de l’asthme, & en redoublent les accès, quand il existe. Les femmes enceintes doivent redouter la constipation.

La constipation reconnoît plusieurs causes ; l’abus des liqueurs spiritueuses, & des médicamens trop chauds. Si, dans la constipation, on continue l’usage de ces moyens, les maladies dont nous venons de parler paroissent, les intestins s’enflamment, suppurent ou se paralysent.

Il faut, dans la constipation, s’abstenir de tout ce qui a pu la faire naître ; il faut faire usage de lavemens émolliens, avec les décoctions de son, de graine de lin, de poirée, de pariétaire & de miel ; il faut détendre toute l’habitude du corps par des boissons humectantes, relâchantes, & très-légèrement purgatives. Le petit lait, l’eau de poirée, de laitue, l’eau de veau légère, & la dissolution de deux ou trois onces de manne, avec un gros de crême de tartre, dans une pinte des boissons susdites, sont les moyens les plus propres à détruire la constipation, & à prévenir les suites dangereuses qui peuvent en naître. Il faut éviter avec soin tous les remèdes chauds, & tous les purgatifs violens ; l’inflammation ne tarderoit pas à attaquer tout le canal des intestins : &, d’une légère incommodité, que le régime & des moyens simples alloient faire disparoître, on verroit suivre des maladies graves & douloureuses, qui mettroient la vie du malade en danger. M. B.


CONSTIPATION, Médecine vétérinaire. C’est une difficulté que l’animal a de fienter. Il fait de violens efforts, qui quelquefois sont accompagnés d’une quantité plus ou moins considérable de matière muqueuse : ces efforts durent un moment, reviennent fréquemment, & tourmentent beaucoup l’animal.

Le cheval & le mouton sont plus sujets à cette maladie que les autres animaux.

Causes. Les exercices forcés, les longues marches pendant les grandes, chaleurs de l’été, le foin abondant en plantes aromatiques, le trop grand usage de la luzerne, de l’esparcette, de l’avoine, le défaut de boisson, les remèdes astringens, inconsidérément administrés par les maréchaux, sont les causes ordinaires de la constipation.

Traitement. Dès qu’un cheval, un mulet ou un bœuf, seront attaqués de cette maladie, il faudra les tenir à l’eau blanche, leur donner beaucoup de lavemens d’une décoction de guimauve, suivis des breuvages de la même décoction, auxquels on ajoutera une once de sel de nitre. Si les tégumens étoient très-échauffés, si l’animal avoit la fièvre, on feroit très-bien de pratiquer une saignée à la veine jugulaire, & de ne donner à l’animal, pour boisson, que de l’eau blanche, & pour nourriture, que du son mouillé.

On injectera, dans l’anus de la brebis qui sera constipée, du petit lait, & on lui en fera prendre par la bouche. La constipation, dans cet animal, vient quelquefois d’une chaleur excessive, à laquelle il a été exposé dans l’été. Pour-lors, l’usage des bains, si l’on est à portée d’une rivière, sera très-avantageux, pourvu que la saison soit convenable.

On a observé que certaines plantes, telles que la piloselle, &c. constipoient la brebis. Le cultivateur doit donc prévenir cet inconvénient, en recommandant à ses bergers de ne pas conduire ses troupeaux dans des lieux ou ils peuvent rencontrer ces sortes de plantes. M. T.