Cours d’agriculture (Rozier)/APOSTÊME

Hôtel Serpente (Tome premierp. 596-597).


APOSTÊME, ou Apostume, Médecine vétérinaire. C’est une tumeur contre nature produite par la matière humorale. L’apostême étant formé par les liqueurs renfermées dans le corps de l’animal, il doit y avoir autant de différens apostêmes qu’il y a de ces différentes liqueurs.

Le sang produit des apostêmes par sa partie rouge, ou par sa partie blanche.

Dans le premier cas, si le sang est épanché, & en outre infiltré dans le tissu de la graisse, l’apostême qu’il forme est un véritable anévrisme faux ; & il produit un anévrisme vrai & la varice, s’il est contenu dans les vaisseaux par une dilatation contre nature.

Dans le second, la partie blanche occasionne des apostêmes, en s’arrêtant dans les vaisseaux ou en s’extravasant ; tels sont le squirrhe, & le gonflement des glandes.

Les liqueurs émanées du sang peuvent aussi être des causes d’apostême. L’humeur des amygdales, par exemple, retenue dans les glandes, cause leur gonflement ; la salive arrêtée dans les glandes salivaires produit les parotides ou les avives ; la synovie, lors qu’elle n’est pas repompée par les pores ressorbans des ligamens de l’articulation, forme l’ankilose ; l’humeur muqueuse qui séjourne dans les glandes de la membrane pituitaire, occasionne la morve, & ainsi des autres.

L’apostême reçoit différens noms, par rapport aux parties où il siège. Lorsqu’il est placé au sommet de la tête entre les deux oreilles, on l’appelle taupe ; au gosier, étranguillon, esquinancie ; au devant du poitrail, avant cœur ; sur la couronne proche le sabot, javart encorné.

Les uns se forment promptement, les autres lentement. Les premiers sont ordinairement des apostêmes chauds, comme le phlegmon & l’érysipèle. (Voyez ces mots) Les seconds sont appelés apostêmes froids, par exemple, l’œdême, le squirrhe. (Voyez ces mots) Les uns sont benins, les autres sont malins ; ceux-ci critiques, ceux-là symptômatiques.

Leurs causes sont internes ou externes. Les causes internes viennent du vice des solides & de celui des fluides. Le vice des solides consiste dans leur trop grande tension, ou dans leur contraction, dans la perte ou l’affoiblissement de leur ressort, & dans leur division. Le vice des fluides réside dans l’excès ou dans le défaut de leur quantité, & dans leur mauvaise qualité.

Les causes externes sont les coups, les contusions, les fortes ligatures, les piqûres, les morsures d’animaux venimeux, la mauvaise qualité de l’air, des alimens, l’excès de travail & le trop grand repos. Toutes ces causes produisent des embarras, des engorgemens, des obstructions, & conséquemment des apostêmes.

On remarque aux apostêmes comme à toutes les maladies, quatre tems ; le commencement, le progrès, l’état & la fin. Le commencement est le premier point de l’obstruction ; le progrès est l’augmentation de cette même obstruction ; l’état est celui où l’obstruction est à son plus haut point, & on la reconnoît à la violence des symptômes ; la fin est leur terminaison.

La terminaison se fait par résolution, par suppuration, par délitescence, par induration, & par pourriture, ou par mortification. Toutes ces terminaisons peuvent être avantageuses ou désavantageuses, suivant les cas & les circonstances de la maladie ; elle sera avantageuse, par exemple, lorsque dans la gourme la terminaison se fera par la suppuration des glandes lymphatiques de la ganache & des parotides, &c. La cure de l’apostême étant particulière à chaque espèce, voyez l’article de chaque tumeur. M. T.