Cours d’agriculture (Rozier)/ANÉMOMÈTRE, ANÉMOSCOPE

Hôtel Serpente (Tome premierp. 531-532).


ANÉMOMÈTRE, & ANÉMOSCOPE ; deux machines destinées en météorologie à indiquer la force du vent & sa direction. La force du vent se connoît par la vîtesse ou le tems qu’il met à parcourir un espace donné, & réciproquement sa vîtesse peut se connoître par la force avec laquelle il pousse un corps qui est opposé perpendiculairement à sa direction. C’est sur ces deux principes qui n’en sont qu’un, qu’est fondée la construction de l’anémomètre. M. Mariotte, dans la suite de ses recherches sur les fluides, travailla à calculer la vîtesse de l’air en mouvement ou du vent ; il lançoit une plume dans l’air, & mesuroit ensuite l’espace qu’elle parcouroit dans un tems donné. On sent facilement combien cette manière étoit imparfaite. Plusieurs auteurs se sont occupés de cette partie de la physique, si intéressante pour la navigation. Huyghens, Mariotte, Belidor, Bouguer, ont dressé des tables où les degrés de force des vents qui frappent une surface d’une grandeur déterminée, sont comparés avec une suite régulière de poids d’égale impulsion ; quelques-uns même ont joint à la théorie la construction de différens anémomètres : on connoît celui de MM. Bouguer, dont M. Van Swinden se sert, & celui de Wolf, que M. d’Ons-en-Bray a perfectionné. Le plus commode, sans doute, & le plus parfait, est celui de M. Brequin de Demenge, colonel-ingénieur au service de Sa Majesté impériale & royale, dont nous avons donné la description & les dessins dans le Journal de Physique 1780, Juin, page 433.

C’est une espèce de moulin à vent, avec six ailes renfermées dans une cage composée de douze volets fixes, mais inclinés de trente degrés. L’axe qui porte les ailes, est vertical, & tourne au centre des douze volets. Ce premier axe porte une roue horizontale qui s’engrène dans une seconde roue perpendiculaire, dont l’axe est horizontal. Ce second axe est garni d’un ressort fort élastique dont un bout est attaché à l’axe, & l’autre à un piton à vis. Ce ressort donne à cet axe, de même qu’à celui des ailes, la liberté de faire une révolution, jamais plus ; & il doit être d’une force telle que le vent le plus fort qui tourne les ailes, ne le sera pas assez pour lui faire achever la révolution entière. À l’extrémité de l’axe horizontal, est une aiguille qui fait ses révolutions sur un cadran où sont tracés les différens degrés de force du vent.

Pour exprimer ces degrés, on place sur l’axe horizontal une autre roue, qui porte un cordon auquel est suspendu un bassin que l’on charge à volonté de différens poids. Ces poids font tourner l’index en raison de leur quantité, jusqu’à la révolution entière ; le ressort se tend en proportion, & l’on marque sur le cadran les degrés par les poids dont on s’est servi successivement ; par ce moyen on a une table assez exacte des degrés de force ou de vîtesse du vent.

Cet objet n’est point indifférent en météorologie, comme nous le verrons à ce mot & à celui de Vent, pour la connoissance parfaite de ce météore, & de ses influences dans l’économie végétale ; il importe de savoir quand & dans quelle direction le vent souffle plus ou moins fort ; les effets funestes ou salubres qu’il produit. Les différens degrés indiqueront pour la suite ce que l’on peut espérer de favorable, ou craindre de dangereux ; & c’est alors seulement que l’on pourra se flatter de construire un parfait anémoscope.

Les anciens connoissoient des machines propres à prédire les directions & les changemens de vent, comme il paroît par Vitruve. Otto de Guerike en avoit imaginé une pareille, à laquelle il donna le nom d’anémoscope ; c’étoit une petite figure de bois, qui montoit ou descendoit dans un tube de verre, suivant les variations de l’atmosphère ; mais c’étoit plutôt un baromètre qu’un véritable anémoscope, suivant l’étymologie de ce mot qui signifie, je considère le vent.

La plus simple, la plus ancienne, & la plus commode de toutes les machines destinées à remplir l’objet de cet instrument, est sans contredit la girouette. Elle indique surement les variations du vent, & par conséquent sa direction ; elle peut donc servir d’anémoscope, ou nous conduire au moins à des principes sûrs pour en construire de comparables, sur-tout si elle est jointe à un anémomètre. (Voy. Girouette) M. M.