Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 555-559).


VENT (arbre à plein). Jardinage. Arbres fruitiers qu’on ne tient ni en espalier, ni en mi-tige ; mais qui, livrés à eux-mêmes, poussent leurs branches d’après les impulsions de la nature. S’ils ne donnent pas le plus beau fruit, ils donnent au moins le fruit le meilleur & le plus savoureux.

Vent. Économie rurale. Air poussé d’un lieu à un autre avec plus ou moins de violence. Quelle est la cause des vents ? Cette question générale & purement physique n’est pas encore déterminée, maigre les nombreuses hypothèses fournies par un très-grand nombre d’auteurs. Rapporter leurs opinions seroit très-long, & nous écarter du but de cet ouvrage. Nous nous contenterons donc de dire que la principale cause de ce mouvement de l’air, est la chaleur du soleil. En général, toutes les causes qui produiront dans l’air une raréfaction, ou une condensation considérable, produiront des vents dont les mouvemens seront toujours directs, où sera la plus grande raréfaction ou la plus grande condensation.

Si les vents passent sur des montagnes chargées de neige, ils se chargent de froid & se font ressentir tels dans les plaines, même à une assez grande distance, suivant leur direction & force de direction. Si, pendant l’été, la neige des montagnes est fondue, mais si ces montagnes sont humides, les vents que l’on ressent dans la plaine sont ou frais ou même froids, en raison de la rapidité de l’évaporation occasionnée par la rapidité des vents, parce que toute évaporation produit le froid.

Si, au contraire, ils passent sur des montagnes, sur des terrains secs, ils produiront une sensation chaude, quand même leur direction viendroit du nord. Nous jugeons de l’intensité de la chaleur ou du froid des vents, d’après notre propre chaleur naturelle, & d’après l’évaporation de cette chaleur qu’ils excitent en nous. Supposons que l’air soit à dix degrés de froid, mais que l’air est tranquille, ce froid sera pour nous moins sensible que si le courant d’au est rapide, quand même le froid ne seroit que de cinq degrés. Dans le premier cas, il n’excite pas sur nous un courant d’évaporation. Soufflez sur votre main la bouche ouverte, vous direz, l’air qui sort de mes poumons est chaud. Soufflez de même, les lèvres serrées, & établissez un fort courant d’air, & vous direz, cet air est froid. Cependant, c’est spécifiquement le même air qui produit deux effets différens, en raison de la rapidité de son cours qui produit sur nous plus ou moins d’évaporation de notre propre chaleur. Mais si votre main est humide, si elle est imbibée d’un fluide très-évaporable comme l’éther, comme l’esprit-de-vin, & que l’on souffle rapidement dessus, on éprouvera un froid glacial, parce qu’on aura produit une plus grande évaporation. Cette petite comparaison donnera à celui qui réfléchit, les causes du froid ou de la chaleur dans son canton, occasionnées par les vents.

Les végétaux éprouvent les mêmes effets, mais non pas tous également, à cause des circonstances où ils se trouvent. Par exemple, l’olivier supporte un bien plus grand degré de froid avant de périr, s’il n’est pas exposé à un courant d’air. Le même froid qu’il éprouvera en décembre ou janvier ne l’endommagera pas autant que celui de février, quoique moins considérable, parce qu’en février, si l’hiver a été doux, le mouvement de la sève commence à s’effectuer. Il est alors plus sensible au froid, parce que la matière intérieure, susceptible d’être évaporée, est plus considérable. C’est par cette raison que plus les plantes & les bourgeons des arbres sont encore herbacés, plus ils sont sensibles au froid, & plus ils sont endommagés ou détruits par une grande évaporation. C’est encore la raison par laquelle les gelées tardives du printemps produisent des effets si funestes.

Tout homme qui désire acheter des biens de campagne, doit examiner soigneusement à quels vents, à quelles rafales de vents ils sont exposés, examiner les points d’où ils soufflent, & sur-tout s’ils ne passent pas sur des étangs, sur des relaissés de rivières, & sur toute espèce de putréfaction susceptibles d’altérer la santé de ses habitans. Chaque pays, chaque canton a son vent plus ou moins nuisible ; son côté, d’où viennent les grêles, les ouragans. Qu’il examine donc si la majorité de ses fonds en sont à couvert, s’il peut se garantir des coups dangereux de vents par des plantations de forêts, par des haies élevées ; enfin, à l’exemple des Hollandois qui renferment au Cap de Bonne-Espérance tous les champs par une ceinture de bambou, s’il peut les clore par de pareils moyens. Ces idées paroîtront extravagantes à quelques lecteurs, puériles peut-être à d’autres ; mais comme l’expérience m’a appris à connoître les effets des abris, des forêts, des haies, &c. j’insiste sur le parti que je propose.

Vent. Médecine rurale. Vapeur aériene & élastique qui s’engendre dans certaines cavités du corps. Personne n’ignore que l’œsophage, l’estomac, & tout le conduit intestinal sont presque toujours le siège des vents, que leur présence occasionne des maladies très-douloureuses, que leur sortie termine aussi promptement.

On connoît assez les dénominations que l’on donne aux vents qui s’échappent par le fondement avec bruit, ou sans bruit. On appelle ordinairement rapport, en latin ructus, celui qu’on rend par la bouche, dont l’odeur & le goût varient relativement aux alimens dont on a usé.

Il est encore bien prouvé qu’on peut rendre des vents en même temps, & avec violence par les deux voies. C’est ce qu’on observe dans le cholera sec, maladie qui a été si bien décrite par Hyppocrate, & qui est toujours accompagnée d’une constipation opiniâtre, d’une tension au bas-ventre, de tranchées, & de douleurs aiguës dans les lombes.

Ce ne sont point encore là les seules maladies que produisent les vents. Tantôt ils occasionnent le météorisme, en causant une dilatation subite de l’estomac, & des intestins, de telle sorte que tout le bas-ventre s’élève considérablement, sur-tout vers les hypocondres, & tantôt ils donnent naissance à des grouillemens ou borborygmes, en parcourant avec bruit & sans douleur les circonvolutions du tube intestinal. Enfin ils déterminent la colique venteuse de l’estomac, la colique venteuse intestinale, la tympanite & le reflux des vents vers le haut, maladie connue & appelée du nom grec anadrome.

Cette dernière indisposition est très-familière aux hypocondriaques. Les personnes les plus sujettes à ces maladies sont celles qui ont le tempérament phlegmatique & pituiteux, qui ont le tissu du corp lâche & spongieux ; les enfans, les vieillards, les cachectiques, les hypocondriaques, les vaporeux, les femmes nerveuses ; celles enfin qui ont éprouvé de grandes pertes, qui sont abattues par des peines & de grands chagrins, ou affaiblies par des maladies longues, & qui ont déjà éprouvé de légères attaques d’apoplexie fausse, ou de paralysie. Dans ce nombre on doit encore y comprendre les mélancoliques, les atrabilaires, les bilieux, les gens de lettres, ceux qui ont l’esprit vif & pénétrant, qui suivent avec trop d’ardeur l’attrait des sciences, qui passent les nuits à l’étude des matières sèches & abstraites, qui se livrent avec excès aux plaisirs de l’amour, ceux enfin qui ont l’esprit agité de quelque violente passion, comme la colère, la crainte, la terreur, &c.

L’usage des alimens visqueux, tenaces, remplis d’une grande quantité d’air, & susceptibles d’une corruption prompte & soudaine, occasionnent encore les différentes maladies venteuses dont nous avons donné l’énumération. Il faut y ajouter les viandes séchées & fumées, les fèves, les pois, les châtaignes, tous les fruits, les herbes potagères & tous les légumes ; le laitage, tout ce qui est doux, gras, ou huileux, les fritures, le poisson de mer, salé, le pain chaud, les gâteaux, les vins blancs qui n’ont point fermenté.

Il faut convenir néanmoins que les hommes fort & bien portans sont pour l’ordinaire à l’abri de ces maladies, à moins qu’ils n’ayent trop mangé, ou trop bu des vins en fermentation, qui contiennent beaucoup d’air élastique, ce qui prouve, comme l’observe très-bien Buchan, que la matière des vents réside dans les alimens. Et la cause qui fait que l’air s’en dégage en assez grande quantité pour produire des douleurs, est presque toujours un vice des intestins eux-mêmes, qui sont trop foibles, soit pour empêcher l’air élastique de se dégager, soit pour expulser les vents, quand une fois ils sont formés.

On peut conclure de ce qui vient d’être dit, que les remèdes propres à combattre les différentes affections produites par les vents, sont les stomachiques & carminatifs, qui agissent de deux manières sur les organes de la digestion, en augmentant le ton des fibres des viscères devenus trop foibles pour exécuter leurs fonctions, & en opérant le relâchement de celles qui éprouvent un resserrement spasmodique ; on doit souvent associer ces remèdes aux purgatifs dont le choix dépend principalement de la qualité acide ou alkaline des sucs qui embourbent les premières voies. Les carminatifs les plus usités sont, les feuilles d’ambroisie, d’aurone, de cerfeuil ; les racines d’angélique, de valériane, de gentiane & d’aulnée : parmi les fleurs, celles d’oranger, de sauge, de romarin donné en infusion. Parmi les fruits, les baies de genévrier, de laurier, les cloux de gérofle, les semences d’anis, d’aneth, de coriandre, d’ammi, d’ache, de carvi, de synapi. Parmi les écorces, le quinquina, l’écorce de Winther, la cascarille : on peut encore compter le cachou, & les différentes espèces d’élixir, telles que celles de garrus, de propriété ; la quintessence d’absinthe, la liqueur minérale anodine d’Hoffman, le baume de souffre anisé, l’huille de canelle, l’anisette de Bordeaux, l’essence d’écorce de citron.

Mais l’exercice est supérieur à tous ces remèdes, soit pour prévenir la génération des vents, soit pour en faciliter l’expulsion. Ce ne sera point par des promenades faites d’une manière languissante, à pied, ou en voiture, qu’on peut en attendre des effets salutaires ; mais comme l’observe très-judicieusement le célèbre With, ce sera en travaillant, en se livrant à des arrosemens actifs, qui donnent une certaine commotion à toutes les parties du corps, qu’on en pourra venir à bout.

M. Ami.

Vent. Médecine vétérinaire. Bruit sourd excité dans les gros intestins des animaux, par les vents accompagnés de quelque humidité. Les alimens qui ont peu fermenté, en sont la cause ordinaire. Parvenus dans l’estomac, l’air qu’ils contiennent s’y dégage, s’y raréfie par la chaleur, distend ce viscère et les intestins, & occasionne quelquefois des tranchées. (Voyez Tranchées) Nous observons aussi communément des borborygmes dans les chevaux qui perdent beaucoup de salive, comme, par exemple, dans les chevaux qui ont le tic, (consultez le mot Tic) ou auxquels on a percé le canal salivaire dans l’opération que certains maréchaux & la plûpart des gens de la campagne ont coutume de faire dans les avines. (Voyez Avines)