Cours d’agriculture (Rozier)/ALCÉE

Hôtel Serpente (Tome premierp. 392-393).


ALCÉE. M. Tournefort place cette plante dans la section sixième de la première classe qui comprend les fleurs d’une seule pièce en forme de cloche, dans laquelle les filets des étamines, réunis par le bas en forme de cylindre, forment un tuyau au travers duquel s’élève le pistil, qui devient un fruit à plusieurs loges ; & il désigne cette plante par cette phrase botanique : Alcea vulgaris major, flore ex rubro roseo. M. le chevalier Von Linné la classe dans la monadelphie polyandrie, & l’appelle malva alcea.

Fleur, d’une seule pièce en forme de cloche, découpée profondément en cinq parties ; le calice est double, & la fleur d’un rouge tirant sur le rose.

Fruit ; plusieurs capsules rondes, réunies par articulation, semblables à un bouton enveloppé du calice intérieur de la fleur, renfermant des graines en forme de rein ; les capsules membraneuses, placées tout autour du même axe sur un plan horizontal, à côté les unes des autres : ces semences sont velues, & noires dans leur maturité.

Les feuilles qui partent des racines, autrement dites feuilles radicales, sont portées sur de longs pétioles ; celles des tiges ont des pétioles plus courts à mesure qu’elles approchent du sommet, & sont découpées plus profondément, le plus souvent en cinq parties ; elles sont velues, surtout sur leur revers.

Racine, ligneuse, oblongue, blanchâtre.

Port. Les tiges s’élèvent ordinairement à la hauteur d’une coudée ; elles sont nombreuses, cylindriques, moelleuses, velues, garnies de quelques poils longs. Les fleurs naissent des aisselles des feuilles, seules & isolées ; elles sont portées sur des péduncules velus, longs de trois pouces environ.

Lieu. Toute l’Europe.

Propriétés. Cette plante peut servir au défaut de la mauve & de la guimauve. Les fleurs sont utiles dans la toux & dans l’asthme convulsif, dans la soif de la fièvre, les ardeurs de poitrine, d’estomac, des intestins, des voies urinaires, dans les maladies inflammatoires, & les maladies douloureuses de l’abdomen ; elles maintiennent le ventre libre. La plante a un goût fade, mucilagineux, aqueux, un peu gluant ; elle est émolliente, adoucissante & laxative. On peut la regarder, comme la mauve, pour une des quatre premières herbes émollientes.

Usages. Les feuilles, les fleurs en lavement sont indiquées dans la retention des matières fécales, dans le tenesme, la dyssenterie. Les feuilles, sous forme de cataplasme, relâchent la portion des tégumens sur lesquels on les applique, calment la douleur, la chaleur, la dureté des tumeurs phlegmoneuses. On prescrit les fleurs récentes depuis demi-drachme jusqu’à une once, en infusion dans six onces d’eau. Les fleurs sèches, depuis huit grains jusqu’à deux drachmes en infusion dans cinq onces d’eau. Quelques auteurs ont regardé la racine comme un purgatif hydragogue très-fort ; mais le plus grand nombre lui attribue les mêmes qualités qu’aux fleurs & aux feuilles. Dans le doute, il vaut mieux ne pas en faire usage jusqu’à ce que l’expérience ait prononcé plus définitivement.

Cette plante est aussi utile pour les animaux que pour l’homme ; il importe peu de choisir les fleurs : la décoction des fleurs, des feuilles & des tiges leur suffit. Dans toutes leurs maladies inflammatoires, elle est très-utile, sur-tout en unissant sa décoction avec l’eau blanche, ou bien en y ajoutant un peu de sel de nitre, par exemple, la pesanteur d’un liard sur une ou deux pintes de décoction. On peut encore substituer au nitre le vinaigre, jusqu’à ce que la boisson ait une agréable acidité. Son usage en cataplasme est très-fréquent. En général toute la famille des mauves jouit des mêmes propriétés ; la seule différence est dans le plus ou dans le moins d’activité.