Correspondance littéraire, philosophique et critique, éd. Garnier/15/1789/Novembre

Texte établi par Maurice Tourneux, Garnier frères (Volume 15p. 535-551).

NOVEMBRE
SUITE DU SALON DE 1789.

Junius Brutus, premier consul, de retour en sa maison après avoir condamné ses deux fils, qui s’étaient unis aux Tarquins et avaient conspiré contre la liberté romaine, par M. David. Brutus est assis dans l’ombre au pied d’une statue en style étrusque représentant Rome ; il tient encore à la main le décret du Sénat qui lui avait déféré le jugement de ses deux fils. Toute son attitude, tous ses traits portent à la fois le caractère d’une affliction profonde et d’une sévérité inflexible. « Je l’ai dû consommer, ce cruel sacrifice » : c’est le sentiment qui paraît empreint sur ses lèvres, mais avec une douleur sombre et recueillie qui marque assez tout ce qu’il lui fallut rassembler de force et de constance pour remporter une victoire si pénible, pour soutenir un dévouement si héroïque, eminente animo patrio inter publicæ pœnæ ministerium[1]. Cette figure austère, isolée et comme ensevelie dans les ténèbres, forme un contraste admirable avec ce groupe de femmes éclairé d’une lumière assez vive, mais douce et tranquille ; c’est la femme de Brutus avec ses deux filles, les bras tendus douloureusement vers les corps de ses deux fils que les licteurs portent dans le lieu destiné à leur sépulture. L’une d’elles tombe évanouie sur le sein de sa mère, l’autre semble avoir voulu suivre encore des yeux ces dépouilles si chères, mais elle n’en a pas la force ; ses mains placées devant son visage repoussent loin d’elle ce spectacle d’effroi. Une femme plus âgée, la mère de Brutus, assise dans l’enfoncement, se couvre d’un grand voile. Toute imparfaite, toute inanimée qu’est cette description, ne donne-t-elle pas l’idée d’un tableau sublime, d’une composition aussi grande que simple ? Ajoutez-y l’exécution la plus vraie et la plus finie. Les groupes sont disposés de manière que l’art ne s’y fait point apercevoir. Quelque soin qu’on puisse admirer dans les moindres détails, il n’est aucun de ces détails qui puisse distraire l’imagination, parce qu’il n’en est point qui ne soit nécessaire au sujet ; tout paraît tenir au développement naturel de l’idée principale. Plusieurs personnes ont observé qu’il existait dans ce tableau deux scènes séparées, le plus grand défaut qu’on puisse reprocher à un ouvrage de ce genre, et nous conviendrons qu’avant d’avoir vu l’ensemble du sujet, avant d’avoir pu saisir toute la pensée de l’artiste, l’œil est en quelque sorte blessé de ce partage singulier de lumière et d’ombre qui divise, pour ainsi dire, la toile en deux parties tout à fait différentes. Mais lorsqu’avec une attention plus soutenue on a bientôt aperçu la liaison intime des deux scènes, on ne peut plus douter que l’action ne soit une, sans équivoque, et, grâce à la double scène, sans cesser d’être unique l’intérêt n’en devient que plus vif et plus touchant. Le dessin est d’une pureté digne du pinceau de Raphaël ; les têtes sont nobles et de l’expression la plus admirable ; les draperies du plus beau style et le ton précisément celui qui convient le mieux au sujet.

Les Amours de Pâris et d’Hélène (pour M. le comte d’Artois), par le même. La scène se passe dans une salle de bains assez richement ornée dans toute la pureté du costume grec. Pâris est assis au pied d’un lit dont la couverture de pourpre relevée avec négligence paraît indiquer assez l’instant choisi par l’artiste. Une de ses mains soutient une lyre posée sur son genou, l’autre presse celle d’Hélène qui s’appuie languissamment sur lui dans une attitude remplie tout à la fois de grâce, de modestie et de volupté. Pâris semble jouir de l’impression délicieuse que vient de faire sur elle le souvenir des transports qu’exprimait cette lyre enchanteresse. Un manteau jeté légèrement sur les épaules de Pâris laisse voir toute la beauté dont les dieux douèrent l’heureux berger du mont Ida. Ce tableau prouve que le talent de M. David peut se plier à plus d’un genre. Je n’ai rien vu de plus parfaitement beau que le corps de Pâris dans tout son ensemble, dans tous ses détails. Hélène a peut-être un caractère de beauté moins noble, moins pur, mais l’artiste a répandu sur ses traits le charme le plus touchant, elle respire tout l’abandon, toute l’ivresse de l’amour. On doit se méfier de son jugement lorsqu’on examine l’ouvrage d’un homme aussi rare, mais j’avouerai que l’effet général de cette dernière composition me paraît moins heureusement senti que celui de ses autres tableaux ; il a, ce me semble, quelque chose de vague, d’incertain. J’avouerai encore que quelque admiration que m’ait inspirée l’exécution précieuse de tous les détails, il m’a toujours paru que c’était un défaut de convenance de présenter un homme presque entièrement nu à côté d’une femme habillée ; la surprise des yeux n’attend pas même celle de la réflexion. Si le ton des chairs n’est pas une des parties les moins admirables de ce tableau, celui des draperies nous paraît loin d’avoir la même vérité. C’est aussi le sentiment de M. Renou.

Le Déluge, par M. Regnault. On doit le compter assurément au nombre des tableaux les plus remarquables de cette exposition. La pensée en est simple. Toute la contrée paraît entièrement submergée. Sur le devant on voit un jeune homme portant sur ses épaules un vieillard et se traînant péniblement à travers les eaux dans l’espoir d’atteindre encore la cime découverte de quelque rocher ; à ses côtés est une femme qui, prête à se noyer, recueille encore un reste de forces pour soulever l’enfant qu’elle tenait dans ses bras. Toutes ces figures sont d’un choix intéressant et d’un très-beau dessin, mais on remarque trop d’égalité dans le ton des chairs ; on ne voudrait pas que la lumière fût aussi également répandue partout. On pense encore que la scène aurait eu plus d’effet si le peintre l’avait placée sur un plan plus reculé. L’ensemble du tableau n’offre pas à l’œil l’idée d’un espace assez grand. Il est impossible de ne pas comparer ce tableau avec celui de la galerie du Luxembourg. Ce n’est aussi qu’un petit tableau que ce chef-d’œuvre du Poussin, mais combien l’étendue qu’il embrasse est plus vaste, combien l’effet qu’il produit est plus sombre et plus terrible ! On n’y distingue également qu’un petit nombre de figures, mais tout annonce que ce sont là les seuls restes de l’humanité entière, tout rappelle que voilà le dernier moment de la nature expirante.

La Descente de croix, du même artiste, prouve aussi beaucoup de talent ; le style tient des meilleurs maîtres de l’Italie. La figure du Christ et celle de la Vierge, de la Madeleine et de saint Jean sont très-belles. On croit cependant que la tête de la Vierge n’est pas parfaitement ensemble. Ce tableau est pour la chapelle royale de Fontainebleau.

Sabinus et Éponine découverts avec leurs enfants dans leur retraite par les soldats de Vespasien, par M. Taillasson. Le sujet est conçu avec esprit. Il y a de l’intérêt dans les têtes de Sabinus et d’Éponine, beaucoup d’expression dans celle de l’un des enfants, mais le ton général du tableau est un peu gris. La scène moins éclairée aurait eu plus d’effet. Son Herminie, sa sainte Cécile et son Abelard manquent de couleur.

Ulysse sortant de Sparte avec Pénélope pour retourner à Ithaque, ou la Pudeur, par M. Le Barbier. « Icarius ayant marié sa fille à Ulysse fit d’inutiles efforts pour engager son gendre à se fixer à Sparte. Au moment qu’il le vit partir pour Ithaque, il redoubla ses instances et se mit à suivre son char. Las de tant d’importunités, Ulysse dit à sa femme d’opter entre son père et son époux ; alors Pénélope rougissante ne répondit qu’en mettant un voile sur son visage. Voyez Pausanias. »

Ce sujet présente peu d’action, mais il exige beaucoup de grâce et une grande finesse dans l’expression. M. Le Barbier ne paraît pas avoir vaincu toutes les difficultés d’une entreprise si délicate. On trouve plus d’invention, plus de talent dans ses dessins, particulièrement dans ceux qui sont destinés pour la belle édition des Œuvres de Gessner. Son portrait d’Henri, dit Dubois, soldat des gardes-françaises qui est entré le premier à la Bastille, a le mérite d’une grande ressemblance.

Les portraits de M. Vestier sont bien peints, bien dessinés et d’un très-bon effet. On a distingué avec raison celui du pauvre chevalier de Latude qui, retenu plus de trente ans dans les prisons d’État, s’en est échappé plusieurs fois, et entre autres de la Bastille, par l’industrie la plus admirable, mais qui n’a dû enfin sa liberté qu’à la pitié courageuse de la dame Le Gros.

La Mort de Socrate (pour le roi), par M. Peyron. On en avait déjà vu l’esquisse au dernier salon. Ce tableau a de l’harmonie, les lumières y sont bien distribuées, il est d’un effet très-séduisant ; on en trouve cependant le ton un peu noir ; mais ce n’est pas le reproche le plus essentiel que lui ait fait la critique. Socrate, dit-on, regarde hors du tableau et n’est point à la scène ; le geste de la main droite est insignifiant et tient à la manière ; l’action de la gauche n’est pas déterminée. Toutes les figures qui forment l’ensemble de cette scène sont isolées et ne participent point à la scène principale, à l’exception de l’esclave qui lui présente la coupe, ce qui paraît prouver que M. Peyron s’occupe plus des formes pittoresques que du fond des sujets.

La Halle aux blés, morceau peint à la gouache et à l’aquarelle (31 pouces de large sur 23 de haut), par M. le chevalier de Lespinasse. Cette vue est prise à la distance de 28 toises. L’œil du spectateur est placé à la hauteur de 30 pieds et l’heure du jour entre midi et une heure. La perspective et le trait présentent la précision la plus parfaite et l’effet est de la plus grande vérité.

Mort de Sénèque (pour le roi), par M. Perrin. L’artiste a choisi le moment où Sénèque étant expiré, on éloigne Pauline, son épouse, par l’ordre de Néron. Ce tableau a paru en général d’un dessin lourd et pénible. La figure de Sénèque ressemble trop celle d’un Christ ; elle est aussi d’une nature trop forte et manque de noblesse. On reproche le même défaut à la tête de Pauline. Il y a cependant une sorte de grandeur dans l’ensemble de la composition, une manière assez large, du moins dans la distribution des masses. Le ton et l’effet sont harmonieux, l’exécution fort soignée. Son tableau représentant la Mort de la Vierge nous paraît d’un plus grand caractère. Ce tableau est destiné à décorer le chapitre des Chartreux.

Les paysages de M. de Valenciennes ont en général un grand mérite, singulièrement par la beauté du style et la netteté des plans, mais on leur reproche d’avoir trop généralement un ton jaune, ce qui leur donne la même physionomie. À en juger par le catalogue, on pourrait prendre tous ces paysages pour des tableaux d’histoire. L’un est intitulé Œdipe trouvé par le berger ; l’autre Pyrrhus apercevant Philoctète dans son antre à l’île de Lemnos, etc. Ces scènes historiques ne se trouvent cependant placées que dans un coin du tableau et n’ont jamais été traitées par l’artiste que comme de faibles épisodes du sujet principal. Le second de ces tableaux offre beaucoup plus d’intérêt que le premier. Le désordre que l’on suppose devoir régner dans un lieu inhabité est supérieurement rendu, tout y porte un grand caractère. Le tableau qui représente une Ville antique où des paysans s’exercent à la course sur un troisième plan est d’un effet très piquant. Le chemin du devant a paru d’un ton trop égal.

Sainte Thérèse, par M. Girou (pour la cathédrale de Boulogne-sur-Mer). La figure a de la noblesse dans le mouvement et de l’inspiration dans la tête. Le rayon de lumière qui éclaire le haut de la figure fait une belle opposition avec la lumière du jour qui éclaire la partie inférieure, mais la couleur en est un peu sèche.

Les portraits de M. Mosnier ont presque tous de la ressemblance et de la vérité, mais le tableau qui représente Une femme avec sa petite fille est celui qui a réuni le plus de suffrages ; il est d’un beau coloris et l’effet en est piquant.

C’est la première fois que M. Dumont, peintre de miniatures, expose ses ouvrages au salon. On y trouve plus de pratique que de nature ; le ton de tous ses portraits a paru trop noir et la manière toujours la même.

La Grange ruinée que le soleil éclaire à travers plusieurs solives est le morceau de réception de M. Légillion. On remarque dans ce tableau, comme dans ses autres ouvrages, une touche indécise, un ton vague. Cet artiste ne paraît être qu’imitateur des autres peintres.

Une corbeille renversée et remplie de différentes fleurs, par M. Corneille Van Spaendonck ; c’est aussi le morceau de réception de l’auteur. Ce nouvel académicien a mérité le plus grand éloge qu’on puisse obtenir dans ce genre. Au beau fini des tableaux de son frère il a su ajouter une plus grande harmonie, un ton plus vigoureux.

M. Bilcoq réussit toujours parfaitement dans l’imitation de la nature morte. Ses tableaux ont cependant de la sécheresse et l’on y remarque beaucoup de réminiscences.

Les miniatures exposées cette année par M. Hall sont en petit nombre, mais elles nous ont paru faites pour ajouter encore à la réputation de cet artiste. C’est le même esprit, la même grâce, avec une touche plus ferme et plus finie.


L’ABSENCE.
À BABET.

Je souffre, ma Babet l’ignore.
Peut-être même en cet instant
Au nouvel amant qui l’adore
Sa bouche a souri tendrement.
Peut-être, hélas !… mais je l’ignore.
Ah ! l’heureux sort que d’être absent !
Elle a passé la douce aurore
Qui lui promettait mon retour ;
Babet sans y songer encore
À su jouir de ce beau jour.
Combien l’absence sert l’amour !
Moi, pour Babet toujours le même,
En la voyant je la croirai,
En la croyant je l’aimerai ;
Tout s’excuse dans ce qu’on aime.
Mais je soutiens que tout amant,
Comme moi sans être en délire,
Plus d’une fois aurait pu dire :
Ah ! l’heureux sort que d’être absent !

— On a donné au Théâtre-Italien, samedi 31 octobre, la première représentation de Raoul, sire de Créquy, comédie lyrique en trois actes, en prose, mêlée d’ariettes, paroles de M. Monvel#1, [2] musique du chevalier Dalayrac. Le sujet de cette pièce est tiré d’une Nouvelle de M. d’Arnaud. C’est plutôt une pantomime qu’une pièce, mais c’est une pantomime fort dramatique et surtout fort pittoresque.

L’analyse la plus fidèle ne saurait donner une juste idée de l’effet d’un ouvrage qui est tout en situations ; si le premier jour on y a trouvé quelques longueurs, ce ne peut guère être dans les développements, car il n’y en a presque point ; c’est uniquement dans le mouvement de l’action dont la vraisemblance exigeait sans doute, pour ne pas troubler l’illusion, que les temps fussent encore plus pressés. C’est ce qu’on a eu l’attention de faire aux représentations suivantes, et le succès de l’ouvrage s’est soutenu. Il y a dans le second acte un mérite très neuf et très-réel, c’est la manière adroite dont les deux scènes se trouvent toujours liées ; soit qu’elles se succèdent l’une à l’autre, soit qu’elles soient simultanées, l’effet de l’une ajoute toujours infiniment à l’effet de l’autre. La musique n’a rien de remarquable, mais elle est en général assez analogue au caractère des différentes situations, et sous ce rapport elle a été justement applaudie.

— Elle vient de paraître enfin, la seconde partie des Confessions de J.-J. Rousseau, en deux volumes in-8o, et c’est sur une copie déposée à Genève que paraît avoir été faite l’édition. Cette seconde partie, quant au talent de l’écrivain, est assurément au-dessous de la première ; elle est plus méprisable encore quant au fond ; c’est un tissu de bassesses, de folies, souvent même de platises, le mot est de l’invention de Rousseau, et semble fait tout exprès pour caractériser une grande partie des détails contenus dans ce singulier ouvrage. Il y a cependant une sorte de charme attaché à cette lecture dont on ne saurait se défendre ; on se fâche, on s’indigne souvent contre l’auteur, on est tenté plus d’une fois de jeter le livre, mais on le reprend toujours, et quelque humeur que puissent donner ses injustices, ses préventions, ses extravagances, on finit par admirer le talent qui a pu jeter tant d’intérêt sur des inepties aussi bizarres, quelquefois même aussi odieuses[3]. Indépendamment de cette magie de style qui n’appartient qu’à Rousseau, l’on sent que tout homme capable d’impressions vives et qui se permettrait d’exprimer toutes celles qu’il a éprouvées dans le cours de sa vie, sans aucun ménagement ni pour lui-même ni pour les autres, offrirait toujours à la curiosité de ses lecteurs un attrait assez piquant ; mais comment un homme qui a quelque moralité dans le cœur peut-il se déterminer à laisser un pareil ouvrage après lui ? Les Confessions de Jean-Jacques décèlent un motif qui le rend plus coupable ; il paraît évident qu’il ne s’est déterminé à se peindre lui-même avec tant de franchise que pour acquérir le droit de consacrer ainsi la mémoire de tous ses ressentiments personnels, et dans l’espérance de faire croire le mal qu’il dirait des autres comme celui qu’il jugerait à propos de dire de lui-même. Mais Rousseau, dit-on, voulait que cet ouvrage ne parût que vingt-cinq ans après sa mort, lorsqu’il serait à présumer que toutes les personnes compromises par ses aveux ou par ses préventions ne seraient plus… Ah ! c’est en cela même que l’idée m’en paraît mille fois plus révoltante ; se retrancher dans sa tombe pour déchirer, pour assassiner plus sûrement les objets de ses liaisons les plus intimes, n’est-ce pas ajouter à la plus noire perfidie la plus odieuse lâcheté ? Si votre âme a besoin de haine et de vengeance, laissez du moins à ceux que vous voulez poursuivre le moyen de se défendre. « Ne voyez-vous pas, dit M. Cérutti, combien il est horrible qu’un homme, fût-il un demi-dieu, immole en mourant sur sa tombe les amis de sa vie, et force leurs mânes plaintifs à suivre avec opprobre les siens jusqu’à la dernière postérité ? Des confessions de ce genre sont un héritage de fureur et des legs d’infamie. »

Ce qui peut consoler infiniment les personnes calomniées dans cet ouvrage, c’est que l’ouvrage même, tout séduisant qu’il est, n’en renferme pas moins toutes les preuves de la folie de l’auteur et de l’absurde injustice de la plupart de ses visions. Un des hommes qu’il paraît avoir aimés le plus tendrement pour le haïr ensuite avec la violence la plus extravagante est M. de Grimm ; mais lorsque les plaintes qu’il se permet de répandre contre lui avec tant de fiel et d’amertume cessent d’être vagues, lorsqu’il cherche à le justifier en quelque manière des torts dont il l’accuse, il ne trouve à citer que les actions en elles-mêmes les plus indifférentes, des tracasseries, de véritables misères de société sur lesquelles son imagination, offusquée de sombres vapeurs, élève les complots les plus criminels, les conspirations les plus monstrueuses ; cette démence va jusqu’à lui persuader que M. de Grimm, du fond de son cabinet, s’était ligué avec les puissances pour faire entreprendre à M. de Choiseul la conquête de la Corse, uniquement afin d’empêcher Jean-Jacques d’en être le législateur.

S’il y a quelque chose de clair dans l’origine de ces terribles querelles de Rousseau avec l’Encyclopédie, c’est que toutes les têtes de nos philosophes, et surtout la sienne, avaient été étrangement brouillées par la coquetterie de Mme d’Épinay et de Mme la comtesse d’Houdetot, sa belle-sœur. La première avait donné à Rousseau les preuves les plus touchantes de la plus tendre amitié, et n’en fut récompensée que par des procédés d’une ingratitude atroce. L’autre lui inspira un amour dont les transports sont peints comme il les avait sentis, en traits de feu. L’histoire de cette passion si brûlante et si malheureuse forme la partie la plus intéressante des nouvelles Confessions ; en voici un détail exprimé tout à la fois avec tant d’énergie et tant de décence qu’on nous pardonnera de le citer.

« Il y avait une lieue de l’Hermitage à Eaubonne (où demeurait alors Mme d’Houdetot). Je passais par les coteaux d’Andilly, qui sont charmants. Je rêvais en marchant à celle que j’allais voir, à l’accueil caressant qu’elle me ferait, au baiser qui m’attendait à mon arrivée. Ce seul baiser, ce baiser funeste, avant même de le recevoir, m’embrasait le sang à tel point que ma tête se troublait, un éblouissement m’aveuglait, mes genoux tremblants ne pouvaient me soutenir, j’étais forcé de m’arrêter, de m’asseoir ; toute ma machine était dans un désordre inconcevable ; j’étais prêt à m’évanouir. Instruit du danger, je tâchais en parlant de me distraire et de penser à autre chose. Je n’avais pas fait vingt pas que les mêmes souvenirs et tous les accidents qui en étaient la suite revenaient m’assaillir sans qu’il fût possible de m’en délivrer, et de quelque façon que je m’y sois pu prendre, je ne crois pas qu’il me soit jamais arrivé de faire seul ce trajet impunément. J’arrivais à Eaubonne faible, épuisé, rendu, me soutenant à peine. À l’instant que je la voyais tout était réparé, je ne sentais plus auprès d’elle que l’importunité d’une vigueur inépuisable et toujours inutile, etc. »


CHANSON.

Air : Quand le bien-aimé reviendra.
ROMANCE DE NINA

Le duc d’Orléans reviendra,
Tous les matins on nous l’annonce.
Le duc d’Orléans ne vient pas,
Sa fuite seule le dénonce.
Chacun l’accuse (bis), hélas ! hélas !
Le duc d’Orléans ne vient pas. (bis)

Aussitôt qu’il arrivera
Dans sa malheureuse patrie,
D’un seul mot il repoussera
Les soupçons et la calomnie ; (bis)
Chacun l’espère (bis), ha ! ha ! ha ! ha !
Nous verrons comme il s’y prendra. (bis)
 
Aisément il triomphera ;
Mais pour que son destin s’achève,
Son cher La Clos le conduira
Aux Porcherons, puis à la Grève,
On l’y désire (bis) ; ha ! ha ! ha ! ha !
Nous verrons s’il s’en tirera. (bis)

— Lundi 16 de ce mois, l’Académie française eut l’honneur de présenter son hommage à Leurs Majestés et à Monseigneur le Dauphin. M. le chevalier de Boufflers, portant la parole en qualité de directeur, prononça les discours suivants.


AU ROI.
« Sire,

« Quatorze siècles d’amour de la nation la plus fidèle et la plus enthousiaste de ses rois avaient fait contracter à vos prédécesseurs de grandes obligations, toujours accrues, et quelquefois oubliées. Il était réservé à Votre Majesté de s’acquitter envers son peuple, et c’est désormais à votre peuple à s’acquitter envers son roi.

« Ce généreux projet que Votre Majesté a conçu de si bonne foi, ce besoin sublime du bonheur de tous les hommes ; ces intentions si vraies, si bienfaisantes, si inconcevables pour les âmes vulgaires, devaient trouver des incrédules parmi ceux qui ne pouvaient lire au fond de votre cœur. Aujourd’hui, Sire, vous permettez qu’on y lise, vous vous montrez à chacun tel que vous êtes pour tous. Plus de barrières, plus de distance entre vous et vos sujets ; leur amour vous appelait, votre amour vous rapproche. Votre présence désirée annonce et renferme tous vos bienfaits, et vous daignez vous-même être le gage de vos promesses. Aussi votre peuple attendri ne cesse-t-il d’admirer cette égalité que rien ne dérange, cette modération que rien n’altère, cette sensibilité que rien ne refroidit, cette constance que rien ne lasse ; et jamais tant de regards n’ont été fixés sur tant de vertus.

« Parmi de si justes hommages, daignez, Sire, distinguer ceux des gens de lettres dont votre Académie ose être auprès de vous l’interprète et le garant. Votre Majesté n’aura point de meilleurs sujets, parce que les rois n’ont point de meilleurs juges. Eh ! quels hommes, Sire, pourront faire autant pour votre gloire que ceux qui, libres de passions et d’intérêts, s’occupent en silence à fixer la vérité fugitive, et à présenter aux âges futurs le tableau fidèle de l’âge présent ! Ils écriront ce qu’ils savent, ils peindront ce qu’ils voient, ils rehausseront encore vos actions en expliquant vos motifs ; enfin ils apprendront aux générations étonnées qu’à vous seul est dû le bonheur dont elles jouiront, que de votre propre mouvement vous avez prononcé dans la grande cause des peuples, et que, le premier entre tous les rois, vous vous êtes montré aussi juste que la loi, aussi bon que la nature. »


À LA REINE.
« Madame,

« Si j’osais tracer à Votre Majesté l’image d’une personne vraiment digne des hommages de l’univers, sur qui le ciel semblerait avoir d’avance répandu l’éclat du diadème, qui joindrait une dignité plus qu’humaine à une grâce presque divine, dont l’affabilité conserverait je ne sais quoi d’imposant qui obligerait à la vénération en permettant la confiance, et chez qui enfin la délicatesse de son sexe, en offrant l’expression des qualités les plus aimables, semblerait servir de voile à la force et au courage d’un héros, Votre Majesté nommerait l’auguste Marie-Thérèse, et tous les Français nommeraient son auguste fille. Si j’ajoutais de nouveaux traits, si je faisais connaître cette âme égale et généreuse, aussi forte contre ses propres chagrins que sensible aux peines des autres, avec cette raison en tout temps maîtresse d’elle-même, souvent inspirée, jamais dominée par les événements ; enfin si j’essayais de peindre ce don heureux d’étonner et de gagner les esprits par un maintien toujours digne, mais toujours conforme aux circonstances les plus difficiles, et ce charme indéfinissable qui naît de la convenance et de la grâce, et qui prête aux moindres paroles plus de force qu’à des armes, et plus de prix qu’à des bienfaits, Votre Majesté continuerait toujours à reconnaître et à être reconnue. Telle en effet, madame, on vit autrefois votre immortelle mère, et telle on croit la voir encore ; c’était ainsi qu’avec un tendre enfant, l’espoir de l’empire, entre ses bras, elle vint se montrer et se confier à la nation la plus jalouse de son indépendance ; de tels moyens ne manqueront jamais : elle arracha des larmes des yeux les plus farouches, elle ramena les esprits les plus anciennement aliénés ; et l’on connut dès lors que les peuples les plus libres sont en même temps ceux qui mettent le moins de bornes à leur enthousiasme, et qui savent le mieux obéir à des vertus dignes de leur commander… »


À MONSEIGNEUR LE DAUPHIN.

« Et vous, Monseigneur, votre aimable enfance est loin encore de méditer sur les grands événements et même sur les grands exemples dont elle est entourée ; mais votre candeur, votre grâce, vos caresses, et cette confiance ingénue, et ces jeux innocents, et cette inaltérable gaieté opposent un contraste intéressant aux sérieuses pensées qui, même en votre présence, absorbent tous les esprits. Cependant, Monseigneur, lorsque vous semblez ignorer les hautes destinées qui reposent sur votre tête, la nation attentive lit d’avance les siennes dans cette santé brillante qui vous promet à d’autres générations, et dans cet air de bonté qui nous annonce leur bonheur ; mais, Monseigneur, on pourrait tirer des augures encore plus certains de ces réponses naïves qui sont parvenues jusqu’à nous, et que l’Académie ne rendra jamais avec la grâce qui les accompagnait ; vous aimez bien mieux être ici, disiez-vous, parce que vous êtes bien plus avec le roi et la reine. Répétez-les souvent, Monseigneur, ces touchantes paroles, répandez ainsi à chaque instant un nouveau rayon de joie dans le cœur de vos augustes parents, et daignez seulement ajouter que vous parlez au nom de tous les Français. »


EXTRAIT DU MANUSCRIT D’UNE FEMME CÉLÈBRE[4]
intitulé : Conseils à ma jeune amie.

« Vous êtes encore loin, ma chère Pauline, du temps funeste où nous sommes forcées de nous avouer que tout passe, mais votre fille en grandissant, en attirant les regards, sera le terme de vos prétentions et le baptistère où l’on ira chercher votre âge. Par ce que vous entendez dire des autres femmes vous devez vous attendre à ce qu’on dira de vous. Pour vous mieux prémunir contre ce moment critique, il faut que je vous conte de quelle manière je l’ai passé moi-même.

« J’étais parvenue à l’âge de quarante ans sans m’être aperçue d’aucune dégradation dans ma figure ; soit que l’extrême parure nécessaire à mes rôles favorisât l’illusion des autres, soit qu’elle fût soutenue par la variété des personnages que je représentais, soit qu’on fût maîtrisé par les passions que je m’efforçais de bien peindre, ou par l’optique du théâtre, tous mes amis me trouvaient charmante, et mon amant m’aimait à la folie ; bref, je ne me doutais de rien. Un jour, plus vivement pressée du désir de plaire, je voulus ajouter à mes charmes le secours de ces parures élégantes que nous avons toujours en réserve, et qui font faire Ah !… quand on nous voit. Me regardant continuellement au miroir pour voir si mes cheveux allaient bien, il me sembla que ma femme de chambre se négligeait, qu’elle oubliait l’air de mon visage, qu’elle avait l’intention de me rendre moins jolie ce jour-là que de coutume. Cependant je demandai avec confiance le charmant bonnet qui devait tout surmonter ; mais, de quelque façon que je le tournasse, j’en fus mécontente, je le jetai, j’en demandai vingt autres, et, confondue de n’en trouver aucun qui m’allât comme je voulais, je m’examinai scrupuleusement moi-même. Le nez sur la glace éclairée par le jour le plus pur, je vis plusieurs sillons de rides sur mon front ! dans les deux coins de mes yeux ! dans le tour de mon cou ! la blancheur de mes dents n’avait plus le même éclat ! mes lèvres étaient moins fraîches, mes yeux moins vifs, et malheureusement je me portais bien dans ce moment-là ! Forcée de m’avouer que ce n’était pas la faute de ma femme de chambre et de mes bonnets, que c’était moi qui n’étais plus la même, je fondis en larmes. Quelle faiblesse ! direz-vous. Hélas ! j’aimais, mon bonheur dépendait de plaire, ma raison m’ordonnait de n’y plus prétendre ! Ce moment fut affreux, ma douleur dura près de six mois ; elle était d’autant plus pénible qu’il fallait la cacher pour n’en pas avouer la cause ; mais dès le premier moment de cette cruelle découverte, je me vouai à la plus grande simplicité ; en n’attirant plus les yeux sur ma parure je me flattai d’échapper plus aisément aux coups d’œil de détail ; la critique et l’envie doivent au moins se taire devant celles qui se font justice ; je n’exigeai plus rien ; en redoublant tous les soins de l’amour, je n’en parlai plus le langage, insensiblement j’en réprimai tous les désirs. Ma conduite frappa, l’on m’en demanda compte, on fut touché de celui que je rendis, j’obtins par-là de jouir encore cinq ans d’un cœur que beaucoup de femmes me disputaient, et que la jouissance d’une grande fortune me fit perdre sans retour.

« Faites vos réflexions là-dessus, ma chère amie. Arrivées à l’âge de trente ans, les hommes ont la sottise de nous constituer vieilles et de blâmer en nous ce qu’ils osent prétendre pour eux dans la plus dégoûtante caducité ; cette injustice est plus digne de pitié que de colère, ne vous en offensez point et n’y sacrifiez jamais rien ; c’est votre vanité, votre délicatesse, votre raison qu’il faut consulter pour savoir ce que vous avez encore à prétendre. Vous ne pouvez alors dissimuler que chaque jour va vous enlever une grâce, mais votre âme exercée par le temps et l’expérience voudra sûrement les remplacer par des vertus ; elles vous assureront un empire bien plus doux, bien plus durable que celui de la beauté. »

Mémoires de M. le duc de Choiseul, ancien ministre de la marine, de la guerre et des affaires étrangères, écrits par lui-même et imprimés sous ses yeux, dans son cabinet, à Chanteloup en 1778. Deux vol.  in-8o.

Pour être très-authentiques, ces Mémoires malheureusement n’en sont pas plus intéressants, ce ne sont que quelques pièces détachées ; une longue histoire assez peu piquante de sa première tracasserie avec M. le Dauphin, qui lui fut suscitée par M. de La Vauguyon ; des réflexions très-superficielles sur la liberté de l’exportation en 1775 ; les détails de l’intrigue de l’abbé Terray, de Mme du Barry et du duc d’Aiguillon pour le faire renvoyer du ministère ; le compte qu’il rendit au roi de son administration du département des affaires étrangères depuis 1757 jusqu’au 16 mars 1770, d’où il résulte qu’il a réduit la dépense de 57 millions à 7 millions, ce qui fait 50 millions d’économie, sans que l’état politique soit changé ; le compte de son administration de la guerre, etc. ; un projet de finance et de liquidation des dettes de l’État, et de borner la dépense du roi en 1777 (la grande base de ce projet est un bail de cinquante ans avec la ferme générale) ; des réflexions sur l’établissement des états provinciaux en France de 1778 (il trouve un grand inconvénient dans l’établissement des premières administrations provinciales, c’est de n’avoir pas assez donné d’influence aux commissaires du roi) ; longs, très-longs détails des intrigues de M. le duc d’Aiguillon et de Mme du Barry, pour lui faire ôter par le roi la charge de colonel-général des Suisses et Grisons ; M. d’Aiguillon écrivit à M. du Châtelet pour le charger de lui en demander la démission, et le roi, au bas de la lettre, ajouta de sa main : « Ce que dessus est ma façon de vouloir. » Cette apostille, dit-il, peint sa faiblesse et sa mauvaise diction en français. M. Foulon, qui avait été son commis, fût mêlé dans cette intrigue ; c’est ce qu’on appelle, dit M. de Choiseul, un insigne fripon en tous genres ; quoique dénué, pour ce qui n’est pas intrigue, d’esprit et de talent. « Je trouve, dit-il dans un autre endroit de ce même Mémoire, je trouve que M. d’Aiguillon est un homme qui est né jugé. » Un mot plus terrible sur Louis XV : « Ce n’est pas que le roi ne fût très-hardi pour faire le mal, il n’avait de courage que dans ce cas. Le mal qu’il pouvait faire lui procurait le sentiment de l’existence et une sorte d’effervescence qui ressemblait à la colère : « Alors ce pauvre prince sentait qu’il avait une âme, il n’en avait pas pour faire du bien… » Ce long Mémoire est terminé par une fort belle lettre de Mme de Choiseul au roi. Cette lettre respire tous les sentiments d’une âme pure et élevée. Le Royaume d’Arlequinerie, ou Arlequin, prince héréditaire, devenu homme d’esprit par amour, comédie dans le genre héroïque, n’est qu’un mauvais proverbe en trois actes. Ce qui a donné lieu, dit-on, à cette plaisanterie, c’est l’historiette d’un prince de Naples, fils aîné du roi d’Espagne, qui, dans toute sa vie, n’avait prononcé que le mot bacala. On avoue dans la préface que cette pièce n’est ni intéressante ni plaisante ; mais il y a, dit-on, des traits, tant bien que mal rendus, qui, s’ils sont entendus, pourront servir à l’histoire que l’on écrira dans cinquante ans. Ces traits portent, je crois, principalement sur M. de La Vauguyon, gouverneur de M. le Dauphin ; ce personnage, dans la pièce, s’appelle Guignon. Deux contes de Mme de Choiseul, la Princesse enchantée et la Queue de vache, terminent le recueil. Il n’y a pas beaucoup d’invention dans ces deux contes, mais de la grâce et de la facilité.

Tous ces Mémoires ne sont guère faits pour soutenir la réputation de M. de Choiseul ; ils donnent trop bien la mesure de ses lumières, de ses vues et de ses projets ; on y reconnaît un esprit léger, superficiel, mais avec cette espèce de bonhomie, de franchise, de loyauté dont un courtisan peut être susceptible, avec ce caractère de grandeur au dehors, qui n’est pas la véritable dignité d’un homme d’État, mais qui en est cependant une représentation plus ou moins imposante.



  1. Tite-live, livre II, chap. V.
  2. M. Boutet de Monvel, ancien acteur de la Comédie-Française, ensuite lecteur de Sa Majesté le roi de Suède, depuis enterré glorieusement dans le nécrologe de Plusieurs journaux, puis marié, puis persécuté pour des goûts qu’on ne prête qu’aux héros, après avoir erré sur quelques théâtres de province, vient de reparaître, au grand étonnement de la capitale, sur celui des variétés amusantes, où, malgré la faiblesse de ses moyens physiques, il n’a pas joué un seul rôle dans lequel il n’ait eu le plus grand succès. (meister.)
  3. Que penser, par exemple, d’un homme qui, après avoir annoncé qu’il envoya ses trois enfants à l’hôpital des Enfants-Trouvés, ajoute : « Si je disais mes raisons, j’en dirais trop ; puisqu’elles ont pu me séduire, elles en séduiraient bien d’autres. » (Meister.)
  4. Mlle Clairon. Ces conseils sont reproduits dans ses Mémoires. La plupart des fragments qui les composent figurent d’ailleurs à diverses dates dans les derniers volumes du manuscrit de Gotha. Mlle Clairon, en désavouant une édition de ses écrits, disait dans une lettre au Publiciste (28 thermidor an VI) : « J’ai confié mes Réflexions sur l’art dramatique et sur moi-même à un étranger, homme de lettres que j’aime. » Cet étranger est évidemment Meister.