Correspondance de Voltaire/1773/Lettre 8785

8785. — COPIE DE LA LETTRE DE WAGNIERE[1]
à M. valade.
À Ferney, 14 mars.

J’avais répondu, monsieur, à une de vos lettres dans laquelle vous paraissiez vous repentir de votre faute. Je vous avais mandé que M. de Voltaire vous récompenserait si vous lui avouiez la vérité. Mais, au lieu d’avouer cette vérité, vous avez persisté à vouloir tromper M. de Sartines, et à soutenir que vous aviez travaillé à votre détestable édition sur l’édition publiée à Genève. Ensuite vous avez dit que c’était sur une édition de Lausanne. Or je vous déclare une seconde fois que les Lois de Minos n’ont jamais encore été imprimées ni à Lausanne ni à Genève, et que toutes les provinces voisines, au nombre de plus de trois millions d’âmes, peuvent vous démentir. Comment avez-vous pu affirmer une fausseté si évidente ?

Vous avez imprimé les Lois de Minos sur une copie manuscrite de l’exemplaire de M. Lekain, dans lequel il y a plus de quarante vers qui ne sont pas de M. de Voltaire, et qui ne se trouveront pas assurément dans l’édition qu’on fait actuellement à Genève, et qui paraîtra bientôt. Votre procédé n’est pas excusable ; mais M. de Sartines ne pouvait pas supposer que vous osassiez abuser à ce point de sa bonté.

Montrez l’exemplaire que vous dites avoir reçu de Lausanne ; on vous en défie. Vous ne montrerez que l’exemplaire que vous aviez imprimé clandestinement sous le nom de Lausanne, avant d’avoir obtenu une permission tacite.

M. de Voltaire ne veut point vous perdre : il en est bien éloigné ; et si vous aviez eu la bonne foi de lui avouer votre délit, vous vous en seriez bien trouvé. C’est tout ce que peut vous dire votre serviteur.

Wagnière,
secrétaire de M. de Voltaire.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.