Correspondance de Voltaire/1772/Lettre 8610

8610. — DE CATHERINE II[1],
impératrice de russie.
Août 1772.

Monsieur, en réponse à votre lettre du 1er d’auguste, je vous envoie un mémoire sur ma guerre avec la sainte congrégation de la Propagande : vous ne vous doutiez pas apparemment de ce petit démêlé-là. Ces gens voudraient me faire accroire, comme dit la chanson, que je ne suis pas le maître dans ma maison quand ils y sont ; mais difficilement ils me persuaderont. Leurs arguments ne valent pas même ceux de Moustapha et des bandes à écharpes blanches de Pologne. J’espère que cette vétille ne vous mettra point en colère contre moi ; au reste ne me boudez point, j’aime trop à être bien avec vous.

Si la paix se fait, je reviendrai à mon code ; cette paix se traite à Fokchani ; mais jusqu’ici il n’y a rien encore de décidé. Je suis fâchée de la petite mésaventure arrivée à notre ami Ali-bey. Notre-Dame de Czenstochowa s’est mise à coqueter avec le général-major prince Golitsine ; j’ai reçu un courrier avant-hier où il me mande que cette forteresse s’est rendue à discrétion. Le nonce du pape, Durini, part furieux de Varsovie, parce que l’incrédulité des Polonais a empêché les miracles de cette image, fertile en pareilles productions.

  1. Collection de Documents, Mémoires et Correspondances, etc., publiée par la Société impériale de l’histoire de Russie, tome XV, page 262. Cette lettre figure ici pour la première fois dans les Œuvres de Voltaire.