Correspondance de Voltaire/1770/Lettre 8140

Correspondance : année 1770GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 300-301).
8140. — À M. FABRY.
22 décembre.

Monsieur, je me félicite bien de m’être rencontré avec vous : je vous avoue que j’avais écrit quatre lettres consécutives, et que j’avais toujours représenté que nous n’avions pas de quoi nourrir des troupes.

Votre approvisionnement fera grand bien ; les blés que le roi de Sardaigne accorde reviennent encore aux Genevois à un prix plus cher qu’on ne l’achète au marché de Gex, à cause de l’extrême rareté des voitures.

Nous serons probablement obligés de nous fournir à Lyon ou à Marseille pour le printemps. Dieu veuille que les pluies et les débordements ne désolent point les provinces voisines ! Tout est à craindre.

Les querelles du parlement de Paris ne feront jamais croître un épi de blé ; si nous n’avons point de guerre, nous en aurons l’obligation à M. le duc de Choiseul, qui fait tout le bien qu’il peut, et que je regarde comme le premier homme de l’Europe.

Il n’est que trop vrai, monsieur, que les circonstances présentes ne sont pas plus favorables à l’édit de Versoy que les débordements ne sont favorables aux biens de la terre. C’est bien dommage, l’entreprise était belle ; mais la cire verte enlacée de soie rouge et verte ne s’échauffe pas aisément pendant les pluies continuelles.

J’ai l’honneur d’être, etc.

Voltaire.