Correspondance de Voltaire/1770/Lettre 8124

Correspondance : année 1770GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 286).
8124. — DE CHRISTIAN VII,
roi de danemark.
Friederichsberg, ce 15 décembre.

Monsieur de Voltaire, toujours poli et plein d’esprit, je sais bien à quoi je dois ce que sa lettre contient de flatteur pour moi. Je dois à sa politesse ce qu’il mérite de ma part et de tout le public par une longue suite de ses actions. Vous réussissez à faire des heureux, en éclairant les hommes et leur apprenant à penser librement. Je suis moins heureux, avec la meilleure volonté du monde et le pouvoir d’un souverain. Je n’ai pas encore pu parvenir à lever les obstacles qui s’opposent à rendre la liberté civile à la plus grande portion de mes sujets. Vous vous occupez présentement à délivrer un nombre considérable des hommes du joug des ecclésiastiques, le plus dur de tous, parce que les devoirs de la société ne sont connus que de la tête de ces messieurs, et jamais sentis de leur cœur. Ceci vaut bien se venger des barbares.

Je suis avec beaucoup d’estime votre affectionné

Christian.