Correspondance de Voltaire/1770/Lettre 7750

Correspondance : année 1770GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 528-529).
7750. — À M. DUPONT.
À Ferney, 11 janvier

Tâchez, mon cher ami, de tuer quelque gros prélat dont le bénéfice soit à la nomination de M. le duc de Wurtemberg, car il m’a promis que la première place serait pour monsieur votre fils, et M. de Montmartin m’en a donné aussi sa parole. Mais sur quelle parole peut-on compter ? Je n’entends parler ni de M. Roset, ni de la subrogation sur la terre du baron banquier Dietrich, ni du remboursement di questo barone. On s’est moqué de moi dans cet arrangement ; mais, après tout, le sieur Roset s’est soumis à me payer quatorze mille francs tous les trois mois jusqu’à fin de compte ; et quand même il dirait : Le beau billet qu’a La Châtre[1] ! il faut qu’il me donne de l’argent.

Je vous prie de vouloir bien le faire souvenir très-sérieusement de ses engagements, et d’avoir la bonté de me dire en quels termes on est avec le baron. Je soupçonne qu’il n’a jamais été question de le rembourser ; il est assez vraisemblable que tout mon argent a été donné à M. le prince de Wurtemberg, qui est à Montbéliard avec quatre enfants. Il est juste qu’étant prince et père de famille il passe avant nous ; mais il est juste aussi que Roset me paye, car j’ai aussi une nombreuse famille à nourrir. Je vous demande en grâce de me recommander à ses bontés, afin que je ne sois pas forcé de demander la protection du conseil souverain d’Alsace auprès de lui.

Adieu, mon cher ami ; je vous souhaite à vous et à toute votre famille beaucoup de bonnes années ; ainsi fait Mme Denis, ainsi fait aussi père Adam.

Voltaire.

  1. Mot de Ninon de Lenclos.