Correspondance de Voltaire/1769/Lettre 7731

Correspondance : année 1769GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 512-513).
7731. — À M. CHRISTIN.
11 décembre.

L’ermite de Ferney fait les plus tendres compliments à son cher philosophe de Saint-Claude.

Il est instamment prié d’écrire à son ami, qui est employé en Lorraine, de dire bien positivement où en est l’affaire de ce malheureux Martin ; si on la poursuit, si on a réhabilité la mémoire de cet homme si injustement condamné ; si c’est à la Tournelle de Paris que la sentence fut confirmée : cette affaire est très-importante. Ceux qui l’ont mandée à Paris, sur la foi des lettres reçues de Lorraine, craignent fort d’être compromis, si malheureusement l’ami de M. Christin s’est trompé.

Sirven a été élargi, et il a eu mainlevée de son bien, malgré la bonne volonté de ses juges subalternes, qui voulaient absolument le faire rouer. Il en appelle au parlement de Toulouse, qui est très-bien disposé en sa faveur, et il espère qu’il obtiendra des dédommagements.

Si le solitaire se portait mieux, il pourrait faire donner les étrivières au carme ; mais il est trop malade pour entrer dans ces petites discussions. La sottise et l’insolence du carme auraient été dangereuses au xive siècle ; mais, dans celui-ci, on peut prendre le parti d’en rire. Je me trouve d’ailleurs entre le bon et le mauvais larron, entre Bayle et Jean-Jacques.

Mon cher philosophe rendra un grand service à la jurisprudence et à la nation, en continuant à son loisir l’ouvrage qu’il a commencé. Il est prié de mettre une grande marge à la copie.

Mme Denis et moi nous vous souhaitons la bonne année ; nous aurions bien voulu la finir et la commencer avec vous.