Correspondance de Voltaire/1767/Lettre 7068

Correspondance : année 1767GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 45 (p. 430).
7068. — À M. CHARDON.
À Ferney, 14 novembre.

Monsieur, il paraît que le conseil cherche bien plus à favoriser le commerce et la population du royaume qu’à persécuter des idiots qui aiment le prêche, et qui ne peuvent plus nuire. Dans ces circonstances favorables, je prends la liberté de rappeler à votre souvenir l’affaire des Sirven, et d’implorer votre protection et votre justice pour cette famille infortunée. On dit que vous pourrez rapporter cette affaire devant le roi. Ce sera, monsieur, une nouvelle preuve qu’il aura de votre capacité et de votre humanité. Il s’agit d’une famille entière qui avait un bien honnête, et qui se voit flétrie, réduite à la mendicité, et errante, en vertu d’une sentence absurde d’un juge de village.

Il n’y a pas longtemps, monsieur, qu’on a imprimé à Toulouse[1], par ordre du parlement, une justification de l’affreux jugement rendu contre les Calas. Cette pièce soutient fortement l’incompétence de messieurs des requêtes, et la nullité de leur arrêt. Jugez comme la pauvre famille Sirven serait traitée par ce parlement si elle y était renvoyée après avoir demandé justice au conseil. Vous êtes son unique appui. Je partage son affliction et sa reconnaissance.

J’ai l’honneur d’être avec beaucoup de respect, monsieur, votre, etc.

  1. Voyez lettre 7107.