Correspondance de Voltaire/1767/Lettre 6680


6680. — À M. LE MARQUIS D’ARGENCE DE DIRAC.
17 janvier.

Je vous écris, mon cher marquis, mourant de froid et de faim, au milieu des neiges, environné de la légion de Flandre et du régiment de Conti, qui ne sont pas plus à leur aise que moi.

J’ai été sur le point de partir pour Soleure, avec monsieur l’ambassadeur de France ; j’avais fait tous mes paquets. J’ai perdu dans ce remue-ménage l’original de votre lettre à M. le comte de Périgord[1]. Je vous supplie de me renvoyer la copie que vous avez signée de votre main ; et sur-le-champ nous mettrons la main à l’œuvre, et tout sera en règle. Les Genevois payeront, je crois, leurs folies un peu cher. Ils se sont conduits en impertinents et en insensés ; ils ont irrité M. le duc de Choiseul, ils ont abusé de ses bontés, et ils n’ont que ce qu’ils méritent.

M. Boursier ne peut vous envoyer que dans un mois, ou environ, les bouteilles de Colladon[2] qu’il vous a promises. Ces liqueurs sont fort nécessaires pour le temps qu’il fait ; elles doivent réchauffer des cœurs glacés par huit ou dix pieds de neige qui couvrent la terre dans nos cantons.

Conservez-moi votre amitié, mon cher marquis ; la mienne pour vous ne finira qu’avec ma vie.

  1. Voltaire en a déjà parlé dans la lettre 6605.
  2. Voyez une note sur la lettre 6661.