Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6584

Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 508).

6584. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
24 novembre[1].

Y a-t-il un amant qui écrive plus souvent à sa maîtresse, un plaideur qui fatigue plus son avocat, que je n’excède mes anges ?

En voilà encore, des corrections, et de très-bonnes, ou je me trompe beaucoup. — Mais ce sont les dernières, n’est-ce pas ? — Oui, je le crois, à moins que vous ne trouviez que le nom de Smerdis est trop souvent répété dans une même tirade, et alors on met le roi au lieu de Smerdis. Maman Denis a relu encore, et jure que je n’ai jamais rien fait de plus neuf et de plus passable : et je pense comme elle. Pour l’amour de Dieu, pensez comme nous. Avouez tout, faites réussir tout, marchez tête levée. Deux vieillards en robe, des bergers troussés, des Persans magnifiques, des contrastes perpétuels, un intérêt continu, du spectacle, du naturel, des mœurs vraies et piquantes, une catastrophe attendrissante, déchirante et terrible ! Les comédiens en sauraient-ils assez pour faire tomber tout cela ?

Et puis l’alibi, l’alibi, il est si nécessaire !

Respect et tendresse.

  1. Toutes les éditions donnent cette lettre à l’année 1772 ; c’est une faute. (G. A.)