Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6222

Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 170-171).

6222. — À M. HENNIN.
À Ferney, 7 janvier.

S’il y a, monsieur, des tracasseries de prose dans la parvulissime, il y a aussi des tracasseries de vers. Père Adam, qui dit la messe fort proprement, mais qui, pour avoir régenté vingt ans la rhétorique, n’en est peut-être pas un meilleur gourmet en vers français, vous a lu une copie de vers (très-informe) ; il en a laissé prendre dans Genève des copies plus informes encore[1] ; les Genevois, qui se connaissent en vers moins que lui, ont imprimé ce rogaton ; mes entrailles paternelles se sont émues. Je vous demande en grâce, monsieur, de ne point envoyer à Paris cet enfant bâtard ; je compte envoyer mon fils légitime, mais il est encore en nourrice.

J’ai lu le petit écrit intitulé le Droit négatif[2] ; il paraît mériter attention. Il me semble que la seule chose dans laquelle on s’accorde au pays où vous êtes, c’est le denier dix.

Vous me pardonnerez de ne point écrire de ma main ; les neiges me rendent presque aveugle.

Mille tendres respects. V.

  1. l’Êpître à Henri IV.
  2. Le droit négatif était le droit qu’avait le petit conseil de rejeter les représentations des citoyens tendantes à faire assembler le conseil général, soit pour interpréter les lois obscures, soit pour maintenir les lois enfreintes. (Note de Hennin fils.)