Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 5956

Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 499-500).
5956. — À M. LE DOCTEUR TRONCHIN[1].

Je vous envoie, mon très-cher Esculape, la lettre de M. le duc de La Vallière. Lisez, jugez, arrangez-vous, et voyez ce qu’il faut que je réponde. Je ne sais s’il convient à M. Tronchin, le conseiller d’État, de louer les Délices pour quelques mois.

J’ai toujours sur le cœur l’honneur que nous a fait Mme de Gourgues de venir à Ferney. Mme Denis et moi, nous étions très-malades, et nous ne pûmes peut-être répondre comme nous le voulions aux bontés de Mme de Gourgues. Vous pouvez compter, mon cher ami, que je ne passe pas un seul jour sans souffrir. Je ne peux opposer à mes maux qu’une entière résignation ; mais cette résignation ne suffit pas pour bien faire les honneurs de sa maison. Je vous demande en grâce de vouloir bien faire ma cour à Mme de Gourgues, dont je connais tout le mérite, et à la santé de laquelle je m’intéresse infiniment.

Je sais que le bâtard du chien de Diogène na pas dit des choses agréables de vous et de moi à Mme de Luxembourg. Esculape était peint avec un serpent à ses pieds. C’était apparemment quelque Jean-Jacques qui voulait lui mordre le talon. Il faut avouer que ce malheureux est un monstre, et cependant, s’il avait besoin de vos secours, vous lui en donneriez. Quelle différence, grand Dieu ! d’un Tronchin à un Jean-Jacques.

Tâchez, je vous prie, de me rendre une réponse prompte chez M. Souchai, afin que je puisse satisfaire l’impatience de M. le duc de La Vallière.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.